TABLEAU 29 Concentrations en vitamines du lait de vache (mg/litre)

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Vitamines Moyennes
Vitamines hydrosolubles
B. (thiamine) 0.42
B2 (riboflavine) 1 ,72
B6 (pyridoxine) 0,48
B12 (cobalamine) 0,0045
Acide nicotinique 0,92
Acide folique 0,053
Acide pantothénique 3,6
Inositol 1 60
Biotine 0,036
Choline 1 70
C (acide ascorbique) 8
Vitamines liposolubles
A 0,37
ß-carotène 0,21
D (cholécalciférol) 0,0008
E (tocophérol) 1, 1
K 0,03

Source: Renner, 1983 et 1989.

Cependant, elle résiste bien à la chaleur et la stérilisation classique du lait provoque une perte ne dépassant pas même 10 pour cent de l'activité initiale.

La vitamine PP (vitamine antipellagreuse ou niacine) ne se trouve qu'en faibles quantités dans le lait de vache et entièrement à l'état libre. Par contre, on y trouve en abondance du tryptophane, un précurseur de la niacine. Cette vitamine est stable à l'air et à la lumière et peu sensible à la chaleur.

Le lait de vache est riche en acide pantothénique. Cette vitamine s'y trouve presque totalement à l'état libre et est un facteur de croissance pour divers micro-organismes, dont les lactobacilles. Elle est stable à l'air et à la lumière mais, par contre, très sensible à la chaleur et aux modifications du pH.

La teneur en vitamine B6 est de cinq à dix fois plus élevée dans le lait bovin que dans le lait humain; elle s'y trouve essentiellement à l'état libre. La pasteurisation et la stérilisation UHT du lait la laissent intacte, mais la stérilisation classique en détruit 50 pour cent. Une carence prolongée peut être la cause de convulsions chez le nourrisson.

L'acide tolique se trouve dans le lait de vache à des concentrations fort variables (allant de 1 à 25 ) et est lié aux protéines. Facteur de croissance pour divers micro-organismes, il est sensible à la lumière et à l'oxygène, mais stable à la chaleur et à des pH supérieurs à 4.

La biotine se trouve totalement à l'état libre, mais en faibles quantités dans le lait. Elle est stable à la chaleur et à la lumière, mais sensible à l'air.

Le lait contient peu de vitamine B12, (cyanocobalamine), mais son activité est considérable. Elle est liée au lactosérum (95 pour cent) et est stable à l'air, mais sensible à la lumière et au chauffage, surtout lorsqu'il n'est pas effectué à l'abri de l'air. La pasteurisation HTST n'en détruit que 10 pour cent, mais la stérilisation classique 90 pour cent.

En comparaison des fruits ou légumes qui en fournissent jusqu'à 100 fois plus, le lait ne représente pas une bonne source de vitamine C. Celle-ci existe sous forme libre uniquement; elle est très fragile et sensible à l'air, à la lumière et au chauffage (perte de 50 pour cent au cours de la stérilisation classique, de 10 pour cent seulement au cours de la pasteurisation). Le stockage et l'agitation du lait en tanks réfrigérés (2 à 4 °C) pendant 36 heures détruit plus de la moitié et jusqu'aux trois quarts de l'acide ascorbique.

Vitamines liposolubles. Les taux de vitamines A, D, E et K du lait dépendent de nombreux facteurs. Comme ces vitamines sont dissoutes dans la matière grasse, elles passent lors de l'écrémage dans la crème et le bourre. Le lait contient beaucoup de vitamine A (et de précurseurs caroténoïdes: 30 pour cent de l'activité vitaminique A totale) lorsque la nourriture des animaux est riche en herbes fraîches (fourrage vert) et en carotène. De ce fait, il contient, en été, de une fois et demie à deux fois plus de carotène et de rétinol qu'en hiver. Le carotène est le colorant de la matière grasse du lait. Certaines races convertissent moins le carotène et l'absorbent intact avant de l'éliminer en partie dans le lait, lui donnant une couleur caractéristique.

Le lait de vache ne contient de la vitamine D (vitamine D3 ou cholécalciférol, essentiellement en tant que sulfate) qu'en faibles quantités (de 1 à 50 ng/litre). La vitamine D existerait aussi sous forme hydrosoluble à des concentrations parfois importantes (de 3 à 4 µg/litre), mais seulement en relation étroite avec les protéines solubles, et ceci avant de gagner la membrane des globules gras. La teneur lactée varie en fonction du temps d'exposition de l'animal à la lumière solaire et aussi de l'alimentation consommée, en d'autres termes selon les régions et les saisons.

Le lait est parfois artificiellement enrichi en vitamine D et les procédés de stérilisation par ultraviolet empêchent un contrôle précis de l'enrichissement. En cas de surdosage, le lait prend une saveur oxydée.

La vitamine E (de 2 à 5 mg par 100 g de matières grasses) est un antioxydant qui protège les lipides des altérations oxydatives. Plus de 95 pour cent de la vitamine E est de l'a-tocophérol, le composé biologique le plus actif, le reste étant composé de gamma-tocophérol uniquement.

La vitamine K (synthétisée dans le rumen) se trouve toujours dans le lait en quantités faibles, mais suffisantes pour l'homme (de 0,1 à 0,5 mg par 100 g de lipides).

Enzymes

Une soixantaine d'enzymes ont été répertoriées dans le lait, mais leur rôle n'est pas toujours clairement établi. Certaines de ces enzymes n'existent d'ailleurs pas (ou à peine) dans le lait humain, comme la lactoperoxydase, la xanthine oxydase ou la ribonucléase.

Certaines sont des facteurs de dégradation (utiles ou nuisibles), comme les protéases qui facilitent l'hydrolyse de la caséine et les lipases, facteurs de rancissement. D'autres possèdent une activité bactéricide ou bactériostatique. La lactoperoxydase, 1 'enzyme la plus abondante du lait de vache, agit contre les bactéries en présence de H2O2 et de thiocyanate (SCN-) lorsque ces substances sont présentes en concentrations suffisantes. Ce système protège aussi les muqueuses de l'animal contre les radicaux libres' Les taux de thiocyanate du lait de vache semblent sans danger pour la fonction thyroïdienne.

La xanthine oxydase contribue comme la lactoperoxydase, au rancissement du lait. Enfin, la quantité de certaines enzymes du lait (catalane) constitue un indicateur de son niveau d'hygiène. Ce taux, qui dépend du nombre de bactéries (contamination), est élevé dans le colostrum et augmente en cas de mammite.

Hormones

Le lait de vache contient des hormones dont l'activité biologique est connue, mais dont le rôle est beaucoup moins certain. Il semble que la plupart de ces hormones soient détruites dans le tube digestif, du moins chez l'homme.

Les taux des oestrogènes (de 60 à 200 ng/litre) et de la prolactine (environ 50 µg/litre) diminuent au fur et à mesure que la lactation progresse. La progestérone (environ 13 µg/litre) existe en proportion directe avec le taux de lipides; elle est pratiquement absente du lait écrémé (< 2 µg/litre) et lorsqu'on l'y trouve en quantité supérieure à 6 µg/litre, une nouvelle gestation doit être suspectée. On trouve également des corticostéroïdes dans le lait (de 8 à 18 µg/litre) et diverses prostaglandines, ainsi que de la somatotropine, des gonadotropines, de la thyrotropine et des polyamines (Sanguansermsri, Gyorgi et Zilliken, 1974). L'activité biologique sur l'homme des hormones naturelles du lait de vache est considérée comme nulle. Certaines hormones de synthèse, administrées à l'animal pour augmenter la production lactée' se retrouvent dans les laits. Cette pratique est donc à proscrire et souvent interdite.

Acides organiques

De nombreux acides organiques ont été détectés dans le lait. Les principaux sont cités ci-après.

Acide citrique. Sa concentration est en moyenne de 1,7 g/litre. Cet acide représente à lui seul plus de 90 pour cent des acides organiques du lait. Il se trouve en solution, moins de 10 pour cent étant associé à la caséine et au calcium dans la phase colloïdale. Son rôle est de réduire l'excrétion urinaire du calcium ionisé du plasma sanguin et d'éviter ainsi une déminéralisation de l'os. L'acide citrique est dans les produits laitiers fermentés le point de départ de substances aromatisantes.

Acide neuraminique. Cet acide se trouve dans le lait à un taux moyen de 150 mg/litre et sous forme acétylée (acide N-acétyl-neuraminique ou acide sialique). Il est pour 80 pour cent environ lié à la caséine (kappa), dont il assure une part de la stabilité.

Acides nucléiques. Les acides ribonucléiques (50 mg/litre), désoxyribonucléiques ( 12 mg/litre) et les nucléotides (dont 80 pour cent d'acide orotique: 1 00 mg/litre) sont présents dans le lactosérum; ils sont également associés, en faibles quantités, à la caséine. Un avantage de ces quantités modestes est que la formation d'acide urique au cours du catabolisme alimentaire est très faible, à l'opposé de ce qui se produit après consommation de viande.

L'acide orotique s'est vu attribuer des rôles multiples, dont un effet favorable sur la croissance du Lactobifidus bulgaricus.

Substances indésirables

La mamelle est un émonctoire et le lait peut contenir des substances ingérées ou inhalées par l'animal, sous la forme soit du constituant original, soit de composés dérivés métabolisés. Les substances étrangères peuvent provenir des aliments (engrais et produits phytosanitaires), de l'environnement (pesticides), de traitements prescrits à l'animal (produits pharmaceutiques, antibiotiques, hormones) (Mahieu et a/., 1977).

Ces contaminations posent des problèmes particuliers, parce qu'il est souvent difficile d'en apprécier les conséquences à long terme sur la santé (Mueller et Schroeder, 1978). Les mesures de prévention restent la pratique la plus logique et la plus efficace, que l'anxiété des médecins ou du public soit justifiée ou non.

Pesticides. Ces produits sont destinés à détruire les insectes qui attaquent le bétail, les cultures et les récoltes. Tous présentent un degré de toxicité pour l'homme; seulement se retrouvent dans le lait quand la vache les a consommés.

Les phosphates (très toxiques) sont ainsi très rapidement métabolisés, les organophosphorés sont très peu rémanents et les organochlorés (stables et lipophiles) sont éliminés à concurrence de 30 à 40 pour cent dans le lait. Même le chauffage du lait ne les détruit pas (DDT et son métabolite essentiel, le DDE) (Renterghem, 1976; Renterghem, Moennans et Brack, 1 979).

Antibiotiques. Leur usage chez l'animal en fait des constituants sporadiques du lait, et donc une source de sélection de souches résistantes et d'accidents allergiques pour le consommateur.

Eléments radioactifs. Suite à l'incendie d'une usine nucléaire en avril 1986 à Tchernobyl (Ukraine), l'environnement a été contaminé. Des nuages de radioactivité ont sillonné l'Europe dans les 2 à 3 jours suivant l'accident (Bruce et Slorach, 1987). En apparence, l'Autriche a été parmi les pays les plus touchés par les retombées. Le taux d'iode 131 a été élevé pendant 2 à 3 semaines dans le lait de vache. Cette radioactivité s'est estompée au rythme de la demi-vie brève de cet élément.

Les taux de césium radioactif ont augmenté plus lentement pour culminer 2 mois environ après la contamination. Quatre mois plus tard, ces taux étaient encore nettement plus élevés que ceux mesurés en routine, préalablement à la destruction de l'usine nucléaire. Au cours de l'hiver, la consommation de fourrage (foin ramassé en juin) s'est accompagnée d'une remontée passagère mais notable de la radioactivité du lait.

Une réglementation stricte (tableau 30) et une surveillance des laits de consommation ont suffi à maîtriser le problème. Le lait contaminé (voir normes européennes) a été déclaré impropre à la consommation et retiré des circuits de distribution. En outre, un contrôle a été excercé sur les laits importés, notamment sur ceux utilisés pour la fabrication des laits en poudre destinés aux nourrissons.

TABLEAU 30 Niveau de contamination radioactive pour un ensemble de radionucléides: seuils à ne pas dépasser pour le lait et les aliments pour nourrissons

Radionucléides Seuils
Am 241 Pu 239 1 Bq/kg
1131 Ae 90 100 Bq/kg
Os 134 Cs 137 1 000 Bq/kg

Note: En cas d'accident nucléaire le règlement Euratom exige de ne plus dépasser 400 Bg/kg pour le césium (134 et 137).

Source: Valeurs proposées par la FAO/OMS et adoptées par la commission du Codex Alimentarius (juillet 1989) et/ou par le règlement Euratom.

Nitrates et nitrosamines. La fabrication de certains produits laitiers s'accompagne d'une addition de nitrate de potassium ou de sodium dans le lait à cailler. Ceux-ci s'accumulent surtout dans le lactosérum. De fait, on peut trouver dans les produits secs, des nitrates en concentrations très élevées.

Les nitrates peuvent former des liaisons avec divers composants du lait. Les nitrites qui découlent de la conversion des nitrates peuvent former des nitrosamines, dont certaines sont cancérigènes.

Métaux. A leur propos, il convient de distinguer entre la découverte d'un antagoniste naturellement présent dans le lait et une contamination par cette même substance en quantités inutiles, voire dangereuses. Par exemple, on accepte dans les crustacés un taux d'arsenic de 50 ppm, mais on s'inquiète d'en trouver plus de 0,05 ppm dans du lait.

Parmi les métaux susceptibles de contaminer le lait à des taux inquiétants pour la santé, on peut citer le sélénium, l'arsenic, le plomb, le mercure et le cadmium.

Polychlorodrphényles. Certains produits chimiques, comme les phtalates, les esters de l'acide sébacique et certains polychlorobiphényles (PCB), présentent un degré certain de toxicité pour l'homme, d'autant plus que ces substances sont stables dans l'organisme où elles s'accumulent dans le tissu adipeux ( Murata, Zabik et Zabik, 1977; Luquet et al., 1979).

Variations dans la composition

La quantité de lait produit par un animal et sa composition subissent des fluctuations d'origine physiologique (nombre de vêlages, époque de lactation, état de santé, activité de l'animal) et des variations d'origine génétique (espèce, race), zootechnique (mode, moment de la traite), alimentaire (foin, fourrage) et, enfin, climatique.

Les modifications de composition non directement ou indirectement imputables à l'animal, comme les conditions de conservation ou les contaminations postérieures à la traite, sont la conséquence d'altérations du lait.

Sa nature biologique, la complexité de sa structure physique et la grande diversité de ses constituants chimiques en font un produit fragile, très facilement altérable. Les dégradations peuvent être dues à des facteurs intrinsèques du lait (leucocytes, enzymes, micro-organismes) ou à des agents extrinsèques (oxygène de l'air, lumière, poussières, contaminants chimiques et, surtout, micro-organismes). Les modifications contrôlées ou non de composition physico-chimique qui en découlent se répercutent directement en technologie laitière (voir chapitres suivants).

Fluctuations physiologiques intra-individuelles. Peu avant le vêlage et pendant les 6 à 9 jours suivants, la mamelle produit le colostrum (liquide jaunâtre, visqueux et amer), riche en protéines et en minéraux, mais pauvre en lactose. Il apporte aux jeunes veaux des anticorps indispensables et des éléments purgatifs. Après cette période colostrale, la quantité de lait augmente progressivement (pendant environ 1 mois), se stabilise pendant 2 à 3 mois pour diminuer ensuite jusqu'au tarissement 6 mois plus tard.

La concentration en matière sèche diminue pendant le mois qui suit le vêlage, puis augmente régulièrement en raison de l'accroissement des matières azotée et grasse. L'écart entre la teneur minimale ( 1 mois) et la teneur maximale (10 mois) en lipides ou en protéines peut atteindre facilement de 5 à 1 O g/litre, voire davantage. La courbe de concentration en lactose varie au cours de la lactation; celle-ci après une augmentation rapide au cours du premier mois, reste ensuite constante.

Vers la fin de la lactation, lorsque la teneur azotée s'élève rapidement, un déséquilibre s'installe entre les composants du lait (avec augmentation concomitante en chlorure de sodium) et le rend, comme le colostrum, impropre aux fabrications. On observe également une évolution individuelle normale du début à la fin de la traite (augmentation régulière de la teneur en matière grasse et baisse de la teneur en protéines). Si le lait n'est pas évacué, les molécules de synthèse (lactose, caséine et graisse) subissent une résorption et le lait obtenu (dit de <<rétention») est de composition anormale.

Variabilité interindividuelle. L'influence propre de chacun des paramètres de variabilité est difficile à identifier. Ce sont les facteurs raciaux, liés aux effets de la sélection, et les facteurs alimentaires qui ont les conséquences les plus importantes sur le lait au plan nutritionnel, technologique et économique. Ainsi, les laits des vaches frisonnes sont moins riches en matières grasses et en protéines que ceux des vaches anglo-normandes. Les Jersiaises fournissent un lait riche qui rappelle celui des vaches zébus de l'Inde.

De même, la vache au pâturage produit plus d'acides longs (stéarique et oléique) et moins de chaînes moyennes (laurique, myristique et palmitique), tandis que la vache en étable produit plus d'acides gras polyinsaturés, surtout parce que son alimentation en contient.

Variabilité spatio-temporelle. En raison de l'importance de certaines variations saisonnières notamment, tous les laits n'ont pas la même aptitude à être transformés en fromage ou en beurre.

Dans les pays tempérés, la collecte quantitative du lait peut présenter entre l'hiver et l'été des écarts de 1 à 1,5, alors que, dans d'autres pays, ces écarts peuvent varier de 1 à 8 ou 10. Dans les pays tropicaux, il est courant de voir une production abondante en saison humide totalement arrêtée en saison sèche.

Les courbes de production et de composition du lait peuvent varier dans leurs niveaux (minima, maxima) et leurs pentes. Les fluctuations sont plus importantes pour des laits individuels et s'estompent à mesure que le lait est de plus grand mélange.

D'une façon générale, il est toujours économiquement préférable de réduire le plus possible les variations de composition qualitatives et quantitatives, ce qui justifie un ensemble de pratiques (régularisation des vêlages et de l'alimentation, sélection des races, mélange des laits et incitations économiques).


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