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Synthèse préparatoire - La valorisation du maïs à l'échelon villageois

 

La valorisation du maïs à l'échelon villageois

Nicolas BRICAS, Bernard BRIDIER, Hubert DEVAUTOUR
Département des systèmes agroalimentaires et ruraux, CIRAD, Montpellier, France

Christian MESTRES
Département des cultures annuelles, CIRAD, Montpellier, France

«Le maïs a été, et sera, monnaie, nourriture et religion. Il est toujours le visage du Mexique».

Le maïs a toujours constitué la nourriture de base des civilisations méso-américaines (Mayas, Aztèques). A partir du XVIe siècle, les Portugais et les Espagnols l'introduisent en Europe et en Afrique. En Afrique, on note deux axes de pénétration puis de diffusion:

Devenu l'une des céréales de base dans le monde (après le riz et le blé), le maïs a connu au cours des dernières décennies une grande diversification des utilisations possibles des différents composants de la plante (figure 1). Outre les utilisations alimentaires traditionnelles (cf. phrase en exergue), qui se sont elles-mêmes considérablement diversifiées, la plante permet aujourd'hui des valorisations dans les domaines de l'alimentation animale, de l'énergie, de la fertilisation, de l'industrie, de la pharmacie (figure 2).

Les valorisations de la biomasse

Les tiges, les feuilles, les spathes, les rafles, et le grain, dans certains cas, sont exploités.

Les utilisations en alimentation animale

Par voie humide (ensilage)

L'ensilage par voie humide a été développé surtout dans les pays industrialisés, sous plusieurs formes.

L'ENSILAGE PLANTE ENTIÈRE

Utilisé essentiellement pour les ruminants (vaches laitières, moutons...), ses atouts principaux sont l'énergie et l'appétence. Il permet des rations de base couvrant une part importante des besoins en énergie des animaux producteurs de lait ou de viande. Quelles sont les caractéristiques d'un bon ensilage?

• Récolte entre 30 et 35 % de matière sèche: début de dessèchement des feuilles au-dessous de l'épi et jaunissement des spathes; le grain s'écrase difficilement mais se raye à l'ongle.

• Hachage approprié: 85 à 90 % de particules inférieures ou égales à 1 cm de diamètre; 10 à 15 % de particules entre 1 et 2 cm.

• Bonne conservation: acidification efficace et rapide (pH 3,8 à 4,2) et anaérobiose. L'acidité et l'anaérobiose persistantes sont le gage du maintien d'un statu quo chimique et biologique durant plusieurs mois.

La valeur nutritive d'un ensilage de maïs est de 0,9 UFL/kg m.s. (unité fourragère lait), de 0,8 UFV/kg m.s.(unité fourragère viande). La digestibilité est de 71 à 72 %. La richesse énergétique du maïs est liée à sa digestibilité élevée, avec peu de pertes d'éléments nutritifs. La valeur azotée est faible (7 à 8 %). Le maïs d'ensilage ne peut à lui seul assurer la couverture des besoins azotés des ruminants. La teneur en minéraux est très variable (teneur en cendres de 4 à 6 % de la matière sèche).

La tige

Les feuilles

La rage

Le grain

Figure 1. Les différents organes de la plante de maïs.

Figure 2. Les utilisations du maïs.

On distingue deux formes de stockage

• le silo en tas. Consiste à ériger un tas (en taupinière ou en couloir entre deux murs) sur une aire bétonnée, à le tasser régulièrement à l'aide d'un tracteur afin d'en chasser l'air, puis à l'étanchéifier hermétiquement du contact de l'air grâce à des bâches en plastique plaquées sur l'ensilage par des chargements divers (sable, sciure, pneus usagés...).

• le silo-sac (microsilos). Développée en Espagne, cette technique de stockage utilise des sacs de polyéthylène de 1 000 microns d'épaisseur. Ces sacs d'une hauteur de 1,50 m et d'une largeur de 0,50 à 0,65 m ont le fond soudé hermétiquement. Remplis d'ensilage, tassés avec un bâton, fermés par une double attache empêchant l'entrée d'air, ils constituent des microsilos d'utilisation plus aisée pour la manutention et le transport dans les zones où l'emploi du tracteur est difficile.

L'ENSILAGE GRAIN-RAFLE

Il est destiné en particulier à l'élevage des porcs.

Dans ce cas, humidité et taux de cellulose guident la formulation. La récolte de l'épi entier (grain à plus de 35 % d'humidité) fournit environ 65 g de cellulose brute par kilo de matière sèche et environ 3 500 kcal d'énergie digestible par kilo de matière sèche.

Ce type d'ensilage permet d'éviter l'achat de matières premières fibreuses en complément d'une ration d'ensilage maïs grain humide.

Les techniques d'ensilage restent les mêmes que précédemment, la seule différence étant la granulométrie du produit (mouture fine).

Dans les zones géographiques où l'obtention d'un grain sec (Il 3 % d'humidité) nécessite des coûts énergétiques de séchage très élevés, l'ensilage de maïs grain humide, à plus de 35 % d'humidité, est aussi pratiqué pour l'alimentation des porcs en particulier.

Par voie sèche

Dans ce cas, les pailles sont un sous-produit de la récolte du maïs (grain ou épi). Leur récolte s'opère alors à la fin de la dernière phase de l'évolution de la plante, phase d'arrêt de fabrication de matière sèche et de continuation des transferts. Lorsque l'activité photosynthétique devient insuffisante, la demande du grain ne peut plus être assurée que par des transferts de métabolites en provenance de l'appareil végétatif (l'augmentation du rendement plante entière est alors nulle).

Les tiges et feuilles contiennent alors plus de 25 % de matière sèche et représentent moins de 35 % de la matière sèche totale de la plante entière.

Une des solutions pour la restitution directe de cette matière organique au sol consiste à utiliser ces pailles sèches en alimentation animale. Compte tenu des difficultés de transport de ces pailles, de volume très important, l'usage le plus courant dans de nombreux pays d'Afrique est de les laisser sur le champ pour la pâture - soit sur pied, soit récoltées et mises en tas, éventuellement avec un défens d'épineux, pour une utilisation différée et contrôlée par les animaux (saison sèche).

Dans le cas de pâture des chaumes sur le champ, une restitution partielle de fumure organique au sol est opérée par les animaux (fécès). Il est cependant à noter que les agriculteurs hésitent quelquefois à utiliser cette valorisation possible des pailles, qui serait responsable d'une infestation plus importante de mauvaises herbes, en raison des semences contenues dans les déjections animales.

Ces pailles sont utilisées par les ruminants et ont un taux très faible de matières azotées digestibles ainsi qu'un faible apport énergétique.

La valeur nutritive de la paille de maïs est d'environ 0,50 UFL et de 4 % de matières azotées digestibles.

Les utilisations en énergie

Les pailles (tiges, feuilles et spathes)

Deux voies de valorisation sont possibles.

LA COMBUSTION DIRECTE

Ce type d'utilisation se développe en particulier dans les zones sahéliennes et soudano-sahéliennes dans lesquelles le bois de feu devient rare et cher. Du fait des difficultés de transport (volume), ce type d'utilisation reste l'apanage des zones rurales et de la cuisine familiale, dans le cadre de la cuisson de l'alimentation.

LA PRODUCTION DE BIOGAZ

La recherche n'a pas travaillé directement sur les pailles de maïs. On peut cependant, sans risque, extrapoler les résultats obtenus sur les pailles de sorgho (CIRAD-IRAT et ISRA) (FARINET et SARR, 1989). Les expérimentations ont eu lieu au Sénégal, dans le cadre d'une exploitation type intégrant l'élevage, l'irrigation, la technologie Transpaille et la petite motorisation pour la production d'énergie et de compost. Les équipements de l'unité expérimentale comprennent;

Les résidus de récolte et d'élevage sont utilises pour alimenter le fermenteur sous la forme d'un fumier très pailleux dont les caractéristiques moyennes sont les suivantes:

Les produits de la fermentation méthanique de ce fumier sont, d'une part, un gaz combustible (biogaz), d'autre part, un compost, après finition des effluents de fermentation.

Le rendement se situe en moyenne à 170 litres de biogaz par kilo de matières sèches pour une charge d'environ 45 kg de matières sèches par jour (soit environ 130 kg de biomasse-fumier). La quantité de compost final est équivalente à 60 % de la biomasse initiale (en m.s.), avec un taux de nitrate de 7 % de l'azote total et une réserve en azote nitrifiable proche de 60 % de l'azote total.

Les rafles

Les rafles sont constituées à 85 % de cellulose et de lignine.

Trois kilos de rafles séchées dégagent autant d'énergie qu'un litre de fuel. Dans certains organismes de collecte, elles sont directement utilisées comme source d'énergie pour le séchage.

Dans ce cas, l'opération de récolte nécessite l'utilisation d'outils adaptés à la récolte (corn-picker en culture mécanisée), et l'opération de séchage nécessite des générateurs d'air chaud spécifiques (fours spéciaux en raison, particulièrement, de la forte teneur en silice des rafles).

De nouveaux marchés sont actuellement développés en Europe: bûches reconstituées, qui peuvent aussi se substituer au charbon de bois.

Par ailleurs, de même que les pailles, les rafles peuvent être utilisées en combustion directe pour un usage familial, en particulier la cuisson des repas.

Les utilisations industrielles

Les utilisations industrielles ne sont mentionnées ici que pour mémoire. La plupart ne sont pas opérationnelles dans un village en Afrique.

Les pailles (tiges, feuilles, spathes)

Le ramassage des pailles, leur transport, leur stockage et leur transformation posent encore de nombreux problèmes, tant techniques qu'économiques. C'est pourquoi les pailles de maïs sont très peu utilisées en Europe pour l'instant. Les principales utilisations actuelles sont:

Les rafles

TRANSFORMATION CHIMIQUE

La principale transformation des rafles par voie chimique est la production de furfural par hydrolyse en milieu acide.

Il faut cependant signaler qu'en milieu tropical d'autres sous-produits sont plus facilement disponibles et riches en pentosanes: enveloppes des graines de coton, balles de riz, bagasses de sucrerie...

Cette transformation entraîne une production annexe d'alcool éthylique et d'acétone ainsi que des sousproduits valorisés, par exemple, comme engrais.

TRANSFORMATION MÉCANIQUE

Les rafles broyées ont des propriétés d'absorption, d'abrasion et de combustion qui leur valent des emplois divers:

De plus, les rafles, entières ou broyées, peuvent être utilisées dans l'élevage, en particulier en aviculture, comme litière pour les animaux.

La première transformation du grain

Incidence de la structure et de la composition du grain

Morphologie et texture du grain de maïs

L'aspect d'un grain de maïs offre une variabilité importante (figure 3):

L'enveloppe externe du grain, le péricarpe, représente en moyenne 5 % du grain (tableau 1) et le germe environ 10 %. Celui-ci se trouve enchâssé dans le grain (figure 3), et il sera toujours difficile à séparer de l'albumen.

On distingue dans l'albumen - environ 80 % du grain - deux parties différentes: une fraction farineuse, opaque à la lumière, située préférentiellement au centre du grain, le long du germe, et dans la partie apicale dentée, et une fraction vitreuse, translucide, enveloppant l'albumen farineux et le germe (figure 3). La proportion de ces deux fractions est très variable (MESTRES et al., 1991) selon le cultivar considéré (tableau 11): ainsi, les variétés locales présentes dans le sud du Togo et du Bénin, ainsi qu'au Cameroun (TCHAMO, 1993), sont farineuses tandis que les variétés améliorées sont en général à tendance vitreuse à très vitreuse MESTRES et al., 1991). Il existe d'autre part des variétés à grain entièrement farineux, comme les souches mutantes Opaque 2. On relie généralement ce caractère de vitrosité du grain à sa dureté, c'est-à-dire à sa capacité à être broyé au cours du procédé de première transformation: la partie farineuse est plus tendre, plus facile à réduire en farine que la partie vitreuse.

Il faut noter que plus un grain est humide, plus son albumen est tendre et friable. Inversement, le péricarpe et le germe sont friables à l'état sec mais deviennent souples et élastiques quand ils sont humidifiés.

Tableau I. Structure et composition du grain de maïs.

  Proportion du grain(% base sèche) (Minimum/maximum)* Composition des différentes parties du grain (% base sèche)
Amidon Protéines Lipides Fibres Cendres
Albumen 83 (73/77) 88 8 0,8 3,2 0,3
Germe 11 (9/14) 8 18 33 14 11
Péricarpe 5 7 3,7 1 84 0,8
Funicule 1 (0,8/2,1) 5 9,1 3,8 78 1,6
Grain entier (min/max)** 100 73 9,1 (7,4/12,3) 4,4 (3,75,8)   1,4 (1,13/1,6)

Moyennes déterminées sur grains hybridés américains, d'après Earle et al., 1946 Johnson, 1991; excepté

*Moyennes mesurées sur cultivars africains Anonyme, 1984.
**Moyennes mesurées sur cultivars africains Mestres et al., 1991.

Tableau II. Propriétés physiques des grains de maïs.

  Minimum Maximum Quality Protein Maize (QPM)
Masse de 1 000 grains (gbs) 153 345 192
Pourcentage de grains dentés 0 100 13
Vitrosité MY 6 87 54

Observations sur cultivars africains, d'après MESTRES et al., 1991; Louis-ALEXANDRE et al. 1991.

* Pourcentage d'albumen vitreux mesuré sur coupes transversales des grains.

Figure 3. Coupes longitudinales et transversales de grains de maïs.

Composition du grain de maïs

Si l'amidon est toujours le composant majeur du grain (tableau 1), on peut observer une assez grade variabilité dans sa teneur en protéines, qui peut quasiment passer du simple au double selon l'échantilIon considéré.

Le germe est très riche en lipides (plus de 30 %, tableau 1), protéines et cendres; il contient ainsi près de 80 % des cendres et des lipides du grain. Les lipides du grain sont essentiellement des triglycérides (près de 80%; WEBER, 1987), susceptibles d'être hydrolysés et oxydés, libérant des acides gras libres et provoquant ainsi le phénomène de rancissement. Les matières minérales du germe sont en majorité sous forme de phytates: on considère ainsi qu'à peine 30 % du phosphore du grain est assimilable (WRIGHT, 1987). L'acide phytique libéré lors de la digestion peut par ailleurs rendre non assimilable le calcium de la ration.

Le péricarpe est, lui, très riche en composés pariétaux: il comporte de 50 à 70 % de pentosanes, qui sont des fibres indigestibles mais fermentescibles (SECKINGER et al., 1960; 13LANCHARD et ADRIAN, 1988). L'albumen est composé majoritairement d'amidon, mais contient une part non négligeable de protéines. Ce sont des protéines de réserves, fortement carencées en lysine et tryptophane, contrairement aux protéines du germe (WILSON, 1987). Toutefois, les grains des variétés Opaque 2 ou QPM 1 ont des teneurs en lysine et tryptophane augmentées de 50 à100 % (WILSON, 1987; KNABE et al., 1992) et ont ainsi une efficacité protéique doublée (NATIONAL RESEARCH COUNCIL, 1988).

Enfin, il existe une couche de cellules particulières situées à la partie externe de l'albumen au contact du péricarpe: c'est l'assise protéique ou couche à aleurone. Elle représente 2 % environ du grain et est riche en protéines (plus de 20 %; HINTON, 1953) et en matières minérales.

Le grain de maïs comporte la plupart des vitamines importantes (à l'exception de la vitamine B12; WRIGHT, 1987). Mais, il faut noter que la niacine est présente sous une forme complexée non assimilable. Toutefois, un traitement alcalin à chaud, comme la nixtamalisation, pratiquée en Amérique centrale (voir plus loin), permet de la rendre assimilable, limitant ainsi l'apparition du béribéri, maladie de carence en niacine. Le germe est plus riche en vitamines que l'albumen, exception faite des composés caroténoïdes (provitamine A), qui sont essentiellement présents dans l'albumen des grains jaunes.

Ainsi, selon le type de première transformation et le degré de décorticage (élimination du péricarpe) et dégermage, les qualités organoleptiques et nutritionnelles du produit seront modifiées. Le décorticage permettra de diminuer la teneur en composés pariétaux, non digestibles (fibres) et souvent préjudiciables à la texture en bouche du plat final; toutefois, il s'accompagnera souvent d'une élimination de la couche à aleurone (riche en protéines et en matières minérales) et d'un dégermage partiel. L'élimination du germe abaissera la teneur en vitamines, en cendres et en protéines (et surtout l'efficacité protéique) du produit, mais, par la délipidation induite, permettra de conserver plus longtemps le produit, qui sera moins sujet au rancissement.

Les opérations de séchage et de stockage

La première étape de la chaîne postrécolte du maïs est celle de la conservation (en épis ou en grains).

Les conditions de conservation

Toutes les causes d'altération ont une action dont l'intensité est conditionnée par les facteurs de milieu, en particulier le temps, la température et l'humidité. Les insectes ont une multiplication dépendante de la température (difficile à moins de 18 °C). Au-dessous d'un taux d'humidité de 10 % du grain, les insectes se développent plus difficilement. Le développement des micro-organismes (moisissures) est lié à la combinaison de deux facteurs, température et humidité. Le seuil d'humidité permettant leur développement est abaissé par une augmentation de la température. La germination peut aussi affecter les grains de maïs en fonction d'une combinaison température-humidité (figure 4).

Le séchage

La récolte du maïs s'effectue manuellement dans la plupart des villages africains. La première question à se poser concerne la nature du produit à conserver. Vaut-il mieux effectuer les opérations de séchage sur des épis recouverts par les spathes, sur des épis déspathés (épanouillage) ou sur des grains?

La réponse à cette question va dépendre des conditions climatiques de la zone de production, de l'humidité du maïs au moment de la récolte et des équipements de séchage (ou séchage-stockage) disponibles.

LE PRÉSÉCHAGE AU CHAMP (CEEMAT, 1988)

Traditionnellement, les paysans ont coutume, quand les conditions climatiques le permettent, de laisser sécher le maïs sur pied plusieurs semaines après qu'il ait atteint sa maturité. Dans certaines zones (Amérique du Sud, par exemple), on cherche à améliorer ce séchage au champ en pratiquant le «doblado», qui consiste à passer une première fois dans les champs pour casser les épis. Après la récolte, qui s'effectue alors sur des maïs dont l'humidité est inférieure à 20 %, les épis sont stockés dans des greniers aérés. Si cette technique permet effectivement un préséchage, voire un séchage du produit (jusqu'à une humidité d'environ 13 %), elle présente plusieurs inconvénients:

LE SÉCHAGE EN ÉPIS

Il est essentiel de bien sécher le produit (humidité inférieure à 13 %) avant le stockage pour éviter une perte de matière sèche par respiration et un développement des micro-organismes. Par rapport à cet impératif, le séchage en épis présente les inconvénients:

En revanche, il présente l'avantage important d'offrir une meilleure conservation du produit semi-humide dans les cas de séchage lent par ventilation naturelle (meilleure résistance aux attaques d'insectes ou de micro-organismes, due à la réduction des surfaces en contact avec le milieu).

Faut-il laisser ou non les spathes au cours de cette phase de séchage? A cette question il peut être répondu que:

Il est donc préférable, le plus souvent, de déspather pour favoriser les traitements ultérieurs.

Deux grands types de séchage d'épis sont employés.

• Le séchage par ventilation en convection naturelle

Certaines méthodes traditionnelles de stockage utilisent des greniers aérés (Togo) ou des grappes d'épis suspendues aux arbres (nord de la Côte-d'Ivoire) ou sur des perches, pratiques le plus souvent liées à un préséchage préalable sur le champ. Dans le nord-ouest et l'ouest du Cameroun, le maïs est séché par étalement sur des «bandas» (faux-plafonds de bambou à l'intérieur des maisons et au-dessus des vérandas); un feu est entretenu dans la maison pendant au moins quatre semaines, pendant la saison humide. Le maïs est séché avec les spathes pour limiter les attaques (insectes et rongeurs) et éviter le noircissement des grains par la fumée.

Figure 4. Diagramme de conservation des céréales.

L'équipement le plus répandu en Amérique comme en France pour ce type de séchage (avec des épis déspathés) est le crib. Les cribs connaissent un début de diffusion en Afrique et ils y ont été étudiés, en particulier par l'international Institute of Tropical Agriculture (IITA). Son emploi est souvent recommandé car c'est une structure combinée de séchage-stockage, en particulier dans les zones humides où l'on récolte le produit dès maturité pour libérer le champ.

La diffusion de cette technique reste malgré tout limitée.

Les performances techniques n'apparaissent pas systématiquement meilleures que celle du séchage traditionnel. La prise en compte des conditions locales (direction et force des vents dominants, pluies...) dans la conception du crib est importante pour qu'il constitue une technique performante. Une analyse menée dans l'ouest et le nord-ouest du Cameroun (SAUTIER, 1992) fait ressortir que l'adoption du crib par les producteurs est le plus souvent liée à d'autres innovations («paquet technologique»), en particulier:

• Le séchage par ventilation en convection forcée

Ce type de séchage associe en général deux opérations:

L'équipement comporte donc trois éléments: le générateur d'air chaud, le ventilateur, la cellule de séchage qui contient les épis.

Le plus souvent, les installations prévoient un quatrième élément, l'échangeur, qui permet de faire chauffer l'air par les gaz de combustion. Pour des problèmes de qualité, il peut être en effet nocif d'envoyer directement les gaz de combustion dans la masse de grains ou d'épis.

Dans l'opération de séchage, le combustible est très coûteux. Les produits pétroliers ne sont pas envisageables pour les petites installations et sont de moins en moins économiques pour les grandes.

Le séchage solaire offre l'avantage d'une énergie gratuite mais difficilement mobilisable (irrégulière et peu concentrée). Le débit des séchoirs solaires est limité, en particulier en saison humide, et ne permet donc pas de traiter rapidement la récolte. Il n'existe pas d'applications en dehors des aires de séchage (surfaces au sol permettant l'exposition directe au soleil).

Les sous-produits cellulosiques (rafles) renferment une énergie calorifique importante et apte à réchauffer les grandes masses d'air nécessaires au séchage (CEEMAT, 1988).

Dans le domaine des petites et moyennes puissances adaptées à l'échelle villageoise (moins de 200 thermies par heure), trois types de combustibles biologiques pourraient être utilisés:

Parmi ces trois possibilités, et compte tenu des contraintes de la production de biogaz (investissements, intégration agricuIture-élevage), c'est l'utilisation de la rafle de maïs, dans des générateurs simples à la taille d'un producteur ou d'un groupe de producteurs, qui nous parait présenter les meilleures perspectives d'avenir.

LE SÉCHAGE EN GRAINS

Les problèmes de conservation du grain humide, dès qu'il est séparé de la rafle, impliquent un séchage rapide pour réduire l'humidité à environ 13 %. Cette contrainte impose l'utilisation de générateurs d'air chaud. Par ailleurs, les pertes de charge engendrées par la circulation de l'air chaud dans la masse de grains induisent la nécessité de recourir à une pression d'air importante en convection forcée (d'où une puissance de ventilation en conséquence).

Le séchage en épis apparaît donc préférable à l'échelle des villages africains dans toutes les zones où l'humidité du grain à la récolte est importante (zones humides).

Dans les zones sèches, où le maïs est récolté à un faible taux d'humidité (ou préséché au champ), il peut en revanche être avantageux, pour des raisons de facilité de manutention et de stockage, d'opérer le séchage final sur les grains. On se reportera alors à nos conclusions précédentes (séchage des épis par ventilation en convection forcée) concernant les combustibles les plus appropriés (rafles, biogaz).

Le stockage

Les techniques de stockage peuvent être étroitement corrélées avec les techniques de séchage, en fonction des conditions climatiques des zones de production (cribs, par exemple, en zones humides).

LE STOCKAGE TRADITIONNEL EN AFRIQUE

Extrêmement variables d'une région à l'autre, les structures traditionnelles de stockage ont cependant un certain nombre de caractéristiques communes:

LE CRIB

Nous avons déjà présenté cette technique dans la partie consacrée au séchage. Il s'agit d'un équipement mixte séchage-stockage, dont nous avons souligné que l'adoption par les producteurs était liée à celle d'un «paquet technologique». Il présente un intérêt particulier en cas d'intensification, quand les structures traditionnelles de séchage et de stockage ne peuvent plus jouer leur rôle, du fait de l'augmentation des quantités mises en jeu.

LE STOCKAGE EN SACS

La solution du stockage en sacs, en magasin, est la plus fréquemment retenue, car elle permet d'utiliser des bâtiments du village. Les principaux facteurs et agents de dégradation des stocks sont la température, l'humidité et les différents déprédateurs (insectes, rongeurs, oiseaux). Les magasins doivent donc être conçus et gérés de façon àlimiter l'influence de chacun de ces facteurs (CEEMAT, 1988).

LE STOCKAGE EN VRAC

Le stockage en vrac est encore très peu répandu en Afrique et, pour les petites quantités, les matériels existants (silos métalliques) sont peu rentables économiquement par rapport aux structures traditionnelles.

L'égrenage

Une troisième opération vient le plus souvent s'insérer dans le couple séchage-stockage, c'est l'égrenage. Selon les options techniques choisies, cette opération pourra prendre place juste après la récolte, entre le séchage et le stockage ou bien après le stockage, au moment de la transformation ou de la commercialisation.

L'égrenage traditionnel, entièrement manuel, adapté à la consommation familiale quotidienne de quelques kilos de maïs, ne peut répondre aux besoins nés de la commercialisation de plus en plus importante de ce produit sous sa forme grain ou aux besoins des unités de transformation. Les égreneuses existant sur le marché sont très variées et semblent bien adaptées à leur fonction:

Si la récolte est réalisée avec les spathes, il peut se révéler intéressant de mécaniser le chantier d'épanouillage (déspathage) avant l'égrenage.

continue


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