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La valorisafion des céréales locales approche du PROCELOS dans les villes sahéliennes

Jean-Pierre OUEDRAOGO
Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS), Ouagadougou, Burkina Faso

Le programme PROCELOS (Programme régional de promotion des céréales locales au Sahel) est un projet initié par le CILSS (Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel) dans le but de contribuer à la promotion de la consommation de céréales locales dans les villes sahéliennes.

Le séminaire FAO/ClRAD/FSA sur la production et la valorisation du maïs cible quant à lui le milieu rural * On peut donc se demander quelle peut être la contribution du programme PROCELOS à la réflexion que souhaitent lancer les organisateurs de ce séminaire.

La réponse paraît cependant évidente lorsque l'on réalise qu'une partie de la valorisation du maïs produit en zone rurale passe par la commercialisation et donc par la consommation dans les régions déficitaires, principalement dans les zones urbaines. Les villes sahéliennes ne produisent pas les céréales qu'elles consomment et contribuent ainsi à réguler le marché céréalier.

Les céréales achetées sur les marchés villageois assurent la distribution de revenus monétaires en zone rurale et permettent de répondre aux besoins de consommation finale et intermédiaire des villes. La consommation intermédiaire est surtout le fait des unités de transformation des céréales, qui assurent le plus souvent artisanalement la transformation; on peut citer à ce propos les dizaines de dolotières (fabrication de boisson fermentée à partir du sorgho) qui exercent à Ouagadougou.

Le lien étroit entre la valorisation des céréales à l'échelon villageois et la consommation des centres urbains peut encore être illustré par les interactions entre les comportements et habitudes alimentaires des citadins et la commercialisation du maïs dans les villages: les importations incontrôlées d'aide alimentaire ou de céréales achetées à bas prix sur le marché international, la distribution gratuite de céréales ainsi que les food for work ont des conséquences directes sur l'aptitude des marchés ruraux à procurer un débouché intéressant aux producteurs. Une mauvaise politique d'importation peut entraîner une chute brutale du cours des céréales locales, obligeant les paysans à conserver malgré eux ou à brader des stocks de céréales pour pouvoir faire face à leurs obligations.

La fourniture annuelle par une ONG caritative au Burkina Faso de 10 000 tonnes de semoule de maïs quel que soit le niveau des récoltes, ou les importants stocks invendus de riz local dont a souffert l'Office du Niger au Mali, sont des exemples qui illustrent encore le lien entre valorisation des céréales par le producteur et comportement des consommateurs et des autorités en zone urbaine.

En effet, l'achat par cette ONG au Burkina Faso de maïs transformé sur place ou par des commerçants maliens du riz de l'Office du Niger, en remplacement des céréales importées, aurait à n'en pas douter un effet positif sur les revenus des producteurs villageois.

Les neuf pays du CILSS totalisent une population d'environ 45 millions de Sahéliens et une production moyenne de 9,3 millions de tonnes de céréales par an - sorgho, mil, maïs, riz et fonio. La production de maïs, ces dernières années, a été de l'ordre de 770 000 à 800 000 tonnes, soit environ 8 % de la production brute totale. Si le maïs ne représente que de 10 à12 % de la production des grands pays céréaliers tels le Burkina Faso et le Mali, il constitue pratiquement 100 % de la production céréalière des iles du Cap-Vert.

La production annuelle de maïs par habitant en 1991-1992 a été de 33 kg pour le Burkina Faso, 30 kg pour le Mali, 26 kg pour le Cap-Vert, 23 kg pour la Gambie, 13 kg pour le Sénégal et seulement 1 kg pour le Niger ou la Mauritanie.

Le lancement du programme PROCELOS est consécutif à un phénomène paradoxal constaté au cours des années 1985-1986 dans plusieurs pays du CILSS: le rétablissement de la pluviométrie à un niveau normal, après la longue période de sécheresse qu'a connue la région, s'est traduit par un accroissement spectaculaire des quantités de céréales produites, tandis que la hausse des importations de céréales n'enregistrait aucun fléchissement. Celle-ci n'était donc plus uniquement le résultat de la sécheresse, mais la conséquence d'un changement des habitudes alimentaires, que l'on ne tarda pas à attribuer aux citadins sahéliens.

Le programme PROCELOS a donc reçu pour mission de contribuer à l'arrêt de l'érosion des parts de marché des céréales locales dans la consommation céréalière des villes sahéliennes.

Nous tenterons, à partir des actions de ce projet dans trois villes - Bamako (Mali), Dakar (Sénégal) et Ouagadougou (Burkina) -, d'exposer l'approche choisie par le PROCELOS pour remplir sa mission et les premiers résultats enregistrés depuis juin 1993, date à laquelle le projet a pu atteindre sa vitesse de croisière.

L'approche PROCELOS

Afin de remplir au mieux la mission définie ci-dessus, le programme PROCELOS a orienté son action vers un appui au secteur de la transformation des céréales locales, avec pour objectif d'aider ce secteur à fournir en qualité et en quantité les produits céréaliers transformés recherchés par les consommateurs urbains.

Auparavant, un séminaire regroupant les opérateurs économiques du secteur de la transformation avait permis d'identifier les formes d'appui souhaitées: après avoir identifié les principales contraintes au développement de leurs activités (approvisionnement, technologie, crédit), les responsables d'unités de transformation ont retenu deux formes d'appui pour le PROCELOS du CILSS: information et conseil.

Prenant en compte le caractère privé de la plupart des unités de transformation, le programme

PROCELOS a décidé d'agir dans les trois domaines majeurs suivants pour répondre aux deux missions ci-dessus:

Pour la réalisation de cette triple action, le dispositif organisationnel du projet comprend trois organes: une coordination régionale très légère au CILSS, des bureaux conseils et des relais nationaux PROCELOS dans chacune des trois villes sus-citées.

Ainsi, à Bamako, Dakar et Ouagadougou, nous avons recruté sur appel d'offres un bureau d'études privé local, pour jouer le rôle de bureau conseil. Ce bureau assure à la fois la collecte, la diffusion d'informations et le conseil direct aux entreprises de la place.

Le bureau conseil de chacune de ces trois villes publie mensuellement un «supplément agroalimentaire». Ce supplément de quatre pages est encarté chaque mois dans un quotidien de la place, lu par les opérateurs économiques. Il est constitué de petits articles d'accès facile, de reportages et de présentations de nouveaux produits. Le supplément s'efforce de répondre aux besoins d'information des responsables d'unités agroalimentaires: fiscalité, marketing, crédit, prix, magasins d'équipement, connaissance des céréales, notions de qualité, etc. Chaque bureau conseil conçoit librement le contenu de son «supplément agro-alimentaire» en fonction des informations qu'il a collectées.

Le conseil direct aux entrepreneurs ou aux promoteurs est assuré par le bureau conseil. Les responsables d'unité ou les promoteurs désireux d'en créer peuvent ainsi bénéficier de conseils gratuits: recherche d'informations fiscales ou réglementaires, choix d'un équipement, finalisation de dossiers de crédit, création d'une micro ou petite entreprise de transformation, lancement d'un nouveau produit, etc.

Le troisième domaine de travail concerne l'animation et la réalisation d'actions ponctuelles destinées à faciliter la promotion des produits céréaliers locaux. Cette animation est assurée par un troisième organe du projet dénommé relais PROCELOS. Ce relais existe dans chacune des trois villes, il est constitué d'un petit groupe pluridisciplinaire (6 ou 7 personnes), comprenant des opérateurs économiques, des chercheurs, des fabricants d'équipements et un représentant de l'administration. Chaque relais se réunit une fois par mois pour réfléchir sur les diffi cultés du secteur de la transformation et la mise en œuvre de son programme d'activités. En effet, les activités du relais sont financées par le projet. Le relais est cependant une structure informelle,

Les premiers résultats

Comme nous l'avons signalé ci-dessus, le programme PROCELOS n'a réellement atteint sa vitesse de croisière que depuis juin 1993, suite à des difficultés d'ordre administratif.

Depuis juin 1993, les bureaux conseils de Bamako et de Ouagadougou ont publié chacun six «suppléments agroalimentaires», tandis que celui du Sénégal en est à son troisième numéro, car il a commencé avec trois mois de retard (le premier appel d'offres s'étant avéré non fructueux, il a fallu en organiser un deuxième). Il apparaît donc que la périodicité mensuelle du supplément est bien respectée. Le contenu des différents numéros parus reflète déjà la diversité des situations de l'agroalimentaire dans chacun des pays: le Mali insiste sur la valorisation du riz et la qualité, tandis que le Burkina Faso met l'accent sur le maïs et les farines infantiles, alors que le Sénégal s'intéresse plutôt au mil local. Tous les suppléments font le point sur les prix et les disponibilités en céréales. Chacun des pays fait également une place aux informations concernant les autres structures d'appui au secteur agroalimentaire ou aux petites et moyennes entreprises.

Des numéros spécifiques du supplément ont concerné les équipements agroalimentaires disponibles dans le pays avec une liste des fournisseurs ainsi que des centres de formation et de réparation. Des techniques de transformation -étuvage du riz et du fonio, séchage solaire des fruits -ont pu être diffusées à travers les suppléments. Enfin, des produits agroalimentaires locaux ont été présentés lors des reportages dans les entreprises.

Les premières réactions qui nous sont parvenues indiquent que le groupe cible souhaiterait que le supplément soit accompagné d'émissions radio reprenant les mêmes thèmes dans les langues nationales, car le numéro étant rédigé en français, il ne concerne qu'un public limité.

En matière de conseil, les bureaux sont surtout sollicités par des promoteurs pour le montage de dossiers et la recherche de financement. Les conseils portent également sur des appuis en matière de choix d'équipement, de pénétration du marché face à la concurrence des produits importés, du secteur informel ou de la fraude. Les demandes de conseils sur les six premiers mois ont surtout concerné la première transformation des céréales; au Mali le sous-secteur du riz connaît une vitalité soutenue. Des ONG et structures d'appui ont également recours aux conseils des bureaux d'études du PROCELOS. il convient cependant de ne pas tirer de conclusions hâtives compte tenu de la brièveté du temps d'observation; la publicité menée autour de la prestation conseil n'est pas encore suffisante.

Les relais PROCELOS (petits groupes pluridisciplinaires) ont élaboré des programmes d'activité, que nous avons souhaités modestes et réalistes, dont ils ont entamé la mise en oeuvre.

Le relais du Mali prépare activement un atelier sur l'ensemble de la filière fonio, tandis que celui du Sénégal a entrepris de réaliser une étude faisant le point sur les initiatives de transformation dans ce pays. Le relais du Burkina Faso a lancé à la télévision une émission bimensuelle intitulée «Bien manger, mieux vivre», qui présente aux téléspectateurs de nouveaux plats à base de produits alimentaires locaux, ainsi que des notions élémentaires de nutrition. L'émission se déroule tous les quinze jours dans un restaurant acceptant de présenter un de ses plats «à base de céréales ou de légumes locaux». Les recettes ne sont pas forcément nationales, ce sont les produits alimentaires qui doivent être locaux. Le relais du Burkina Faso prépare également une rencontre entre les opérateurs économiques du secteur agroalimentaire et les laboratoires de technologie alimentaire du Burkina Faso. Les relais s'efforcent également de favoriser l'émergence ou le renforcement d'associations professionnelles au sein du groupe cible.

Conclusion

Comme nous l'avons déjà indiqué ci-dessus, il est encore prématuré de tirer des conclusions définitives. On peut cependant, dès à présent, confirmer le besoin d'information du secteur agroalimentaire: information concernant l'approvisionnement, les prix, les équipements et l'environnement économique des petites et moyennes entreprises.

Le transfert des céréales de la zone de production vers les unités de transformation est encore à améliorer. En effet, le secteur agroalimentaire a besoin de céréales de qualité et d'un approvisionnement régulier sans rupture de stock. il convient d'envisager dans un tel séminaire quel type d'organisation paysanne est en mesure d'assurer ce rôle.

La valorisation du maïs en zone rurale passe également suivant les pays par une politique d'importation protégeant la production locale de maïs, ainsi que par une politique de distribution à prix social, ou même de distribution gratuite, qui ne perturbe pas les marchés ruraux; la priorité pour les agences d'aide devrait être accordée aux achats locaux de céréales.

La valorisation du maïs local par certains pays de la région passe également par l'exportation, à savoir les échanges avec les pays de la zone ouest africaine. Ce type d'échanges ne peut réellement se développer et s'imposer sans une rigueur qui implique l'intervention d'exportateurs professionnels, mais aussi l'établissement de normes minimales de qualité reconnues par les pays de la région. Les expériences, pas toujours heureuses, d'exportation de maïs togolais au Cap-Vert ou de maïs béninois au Burkina Faso ou encore de mil malien au Sénégal illustrent parfaitement ces propos.

Le lien entre chercheurs et entrepreneurs du secteur agroalimentaire nous paraît indispensable: l'amélioration de la qualité, l'innovation sont indispensables pour la conquête des parts de marchés gagnés par les céréales importées: la recherche-action donne des résultats encourageants sur le fonio, où ingénieurs concepteurs d'équipement et unités de transformation travaillent ensemble au Mali. Il convient de recourir à des spécialistes pour réussir la distribution des produits transformés à base de maïs dans les villes sahéliennes.

Enfin, l'identification des principaux acteurs du secteur agroalimentaire dans les trois pays dans lesquels intervient le PROCELOS sera mise à profit pour mieux cerner les contraintes à l'expansion de ce secteur, afin de mieux cibler l'action des différentes structures d'appui aux petites et moyennes entreprises agroalimentaires.

La question majeure qu'il convient de se poser, surtout après le changement de la parité monétaire intervenu dans la zone, est la suivante: comment le secteur agroalimentaire peut-il conquérir des parts de marché dans l'approvisionnement des villes sahéliennes en céréales brutes ou transformées? On ne peut répondre à cette question sans évoquer celle de l'accroissement de la production et celle de l'organisation d'un marché fluide et efficient, en mesure de garantir une commercialisation aux paysans produisant du maïs pour le marché et un approvisionnement sûr (en qualité et en quantité) aux utilisateurs finaux et intermédiaires de maïs en zone urbaine. Cela n'est envisageable à terme qu'en intégrant une dimension régionale au marché céréalier pour transcender les contraintes nées de l'exiguïté des marchés nationaux.

 

Rapport de l'atelier sur le stockage et la valorisation du maïs

Les participants à l'atelier n° 2 sur le stockage et la valorisation du maïs à l'échelon villageois ont, face à la complexité du thème, décidé de le subdiviser en trois sous-thèmes

L'ensemble des communications présentées lors de l'atelier a permis d'identifier les principales difficultés et contraintes entravant le stockage et la valorisation du maïs au niveau villageois et de formuler des suggestions quant aux axes à approfondir par les différents acteurs de la filière pour parvenir à une meilleure promotion du maïs.

Un certain nombre de constatations générales auxquelles sont parvenus les participants méritent d'être relevées dès à présent, car elles sont de nature à éclairer les propositions faites par la suite. Ces constatations concernent la diversité des situations, la consommation urbaine et les médias.

Les différences de zones agroclimatiques engendrent une diversité de cas quant à la nature des problèmes de stockage, de conservation et de transformation, aussi bien entre pays qu'entre régions d'un même pays. La nature des contraintes, et donc des solutions à rechercher, est également fonction de l'importance de la production de maïs par les exploitations paysannes et de la taille des unités de transformation.

Par ailleurs, la valorisation du maïs villageois passe bien souvent par la commercialisation d'une partie du maïs produit pour satisfaire les besoins de consommation des zones urbaines non productrices de céréales. A contrario, le mode de consommation des citadins peut entraîner une politique d'importation de céréales pouvant devenir un frein à la valorisation du maïs villageois.

Enfin, il est apparu que les communicateurs ainsi que les différents organes de presse (exemple: radio rurale) constituaient des acteurs potentiels puissants pour la promotion de la production et de la consommation de maïs, dont le concours n'a été jusque là que très peu sollicité.

Le stockage et conservation du niais

Les principales difficultés mises en exergue par les communications concernaient le taux d'humidité, les prédateurs et les moyens financiers.

• Le taux d'humidité élevé est incontestablement la principale raison des pertes élevées constatées lors du stockage et de la conservation du maïs. Les producteurs des zones humides parviennent difficilement à réduire le taux d'humidité et à le maintenir durant le stockage entre 12 et 13 %.

• Le maïs est de plus en plus attaqué dans les champs et dans les structures de stockage par de dangereux prédateurs pour lesquels les moyens de lutte restent encore peu efficaces.

• Les organisations paysannes dans les zones de grande production disposent rarement des moyens financiers pour réaliser la construction de structures aptes au stockage de 15, 20 voire 50 tonnes de céréales.

Ces difficultés ont des effets directs sur le niveau des pertes. Celles-ci peuvent atteindre 25 à 35 % des produits stockés! En plus des pertes en poids, il convient de relever également une dépréciation de l'aptitude technologique et de la valeur hygiénique du maïs.

Certains pays ont entrepris des expériences dans le domaine du stockage: amélioration du stockage traditionnel par une meilleure ventilation et une isolation du grenier, et amélioration du séchage par l'utilisation de séchoirs avec un brûleur alimenté par du bois de feu.

Les principales suggestions et recommandations issues des discussions sur ce sous-thème ont été les suivantes:

L'expérience sur l'utilisation de séchoirs pourrait être enrichie par le remplacement du ois par les rafles de maïs dans les brûleurs, ainsi que par la réalisation d'un test sur le concept de séchoir «collectif»: un séchoir villageois qui fonctionnerait en prestation de service.

• La multiplication des échanges d'expérience de séchage du maïs entre producteurs de régions ou pays différents faciliterait la diffusion des systèmes les plus performants.

• L'initiation d'une nouvelle forme d'intermédiation financière à grande échelle s'avère à présent indispensable suite aux faillites enregistrées par les banques classiques modernes de développement de la production agricole.

• La levée de certaines contraintes soulevées ci-dessus est conditionnée par une meilleure gestion et commercialisation des stocks villageois. Une meilleure formation en gestion et en alphabétisation fonctionnelle constitue une priorité incontournable.

La commercialisation du maïs

Les communications sur ce sous-thème ont relevé plusieurs problèmes.

• Une insuffisance dans l'organisation des paysans: les paysans regroupés en groupements fonctionnels seraient plus aptes à discuter les prix avec les commerçants et à tirer un meilleur profit de leur stock de maïs en le vendant en dehors des périodes de récolte.

• Une infrastructure routière assez souvent déficiente en zone rurale: certains producteurs ne peuvent accéder au marché pour vendre leur maïs, car le réseau routier défectueux conduit à un enclavement de leur zone.

Il en résulte un mauvais écoulement de la production de maïs: les paysans sont quelquefois contraints de brader leur produit ou de se retrouver avec un stock encombrant. Une telle situation n'est pas de nature à les pousser à accroître la production.

Les discussions au sein de l'atelier ont conduit encore une fois les participants à recommander la mise en place d'une structure de financement adapté au secteur agricole villageois, ainsi que l'intensification de l'alphabétisation fonctionnelle.

Il a également été suggéré d'adapter le conditionnement au pouvoir d'achat des consommateurs.

La transformation

L'atelier a subdivisé ce thème en deux sous-thèmes, à savoir: les produits transformés à base de maïs et les mini-minoteries.

Les produits transformés

L'atelier a retenu les constatations suivantes à l'issue des exposés.

• La plus ou moins grande diversité de produits transformés à base de maïs. Les travaux de la Faculté des sciences agronomiques de l'Université nationale du Bénin ont convaincu les participants de l'existence d'une quarantaine de produits alimentaires issus de la transformation primaire et secondaire du maïs.

• Le développement d'un important artisanat alimentaire dans les pays comme le Bénin.

• Un manque d'affirmation claire et concrète de la volonté politique des autorités quant à l'initiation et à l'encouragement des actions de valorisation des ressources agricoles locales.

• L'importance toute particulière des travaux menés par la Faculté des sciences agronomiques de l'Université nationale du Bénin sur le maïs, dans la prise de conscience sur la nécessité de connaître les plats à base de céréales locales.

• Les effets pervers des importations non justifiées de céréales ou d'aides alimentaires sur la valorisation du maïs local.
A la suite des échanges de vues, l'atelier a formulé les suggestions suivantes.

• L'intégration de la sélection variétale dans les facteurs susceptibles de résoudre certaines difficultés rencontrées lors de la transformation.

• La stabilisation tout comme la mécanisation sont des atouts pour une meilleure valorisation du maïs, mais le recours à ces techniques ne doit pas être systématique mais décidé au cas par cas. Elles ne doivent être utilisées que si elles apportent un «plus».

• L'intensification d'échanges d'expériences est à encourager fortement, un échange entre «transformateurs» ou opérateurs économiques du secteur de la transformation (y compris les restaurateurs populaires) de plusieurs pays ou plusieurs régions dans un même pays, et un échange également entre chercheurs. Sur ce dernier point, les participants ont souhaité l'établissement d'un référentiel des produits alimentaires existant dans la sous-région, afin que sur la base de ce référentiel, les chercheurs travaillant sur le même type ou la même famille de produits (ex: pâte fermentée de maïs) puissent mieux collaborer et parler le même langage.

• La création ou l'introduction de produits nouveaux à base de maïs requiert l'utilisation de techniques modernes de marketing surtout en zone urbaine. A titre d'exemple, il convient de ne pas positionner ces produits nouveaux comme des imitations de produits importés mais plutôt comme des produits spécifiques et originaux.

• Le choix de la technologie ne doit jamais précéder l'étude des exigences du marché, des goûts et du pouvoir d'achat des futurs consommateurs. C'est le type de produit retenu par le consommateur qui doit conduire au choix des équipement nécessaires et pas le contraire.

Les mini-minoteries

Après avoir pris connaissance des expériences menées au Mali et au Sénégal sur les unités semi-industrielles villageoises de transformation de maïs, à savoir des unités produisant environ 50 tonnes par an de maïs transformé en farine, semoule et brisures destinées à être vendues sur le marché, les participants ont fait les constats suivants.

• Les mini-minoteries constituent des projets d'introduction d'un nouveau système de transformation du maïs à l'échelon villageois. Elles diffèrent des moulins villageois qui ne peuvent effectuer que les prestations de service.

• Les mini-minoteries fonctionnent depuis leur lancement en dessous de leur capacité de production. Cette situation résulte suivant les cas de l'insuffisance de la production de maïs, du caractère récent de l'installation ou surtout des problèmes rencontrés dans la commercialisation des produits transformés, notamment la farine.

• Les mini-minoteries enregistrent des bénéfices comptables, cependant l'atelier s'est posé la question de savoir ce qu'elles deviendront à la fin des projets.

• Les mini-minoteries rencontrent des difficultés dans la conservation de leurs produits.

• Il semble que l'installation des mini-minoteries accroisse la production dans la zone d'implantation.

Au regard de la nature des difficultés relevées ci-dessus, les suggestions formulées ont été les suivantes.

• Le recours à de vrais professionnels de la vente, à de vrais commerciaux pour placer les produits transformés par les mini-minoteries.

• L'amélioration continue de la qualité des produits conduisant à l'établissement de normes de qualité minimales, de nature à encourager les échanges régionaux de maïs grain ou transformé.

• Les mini-minoteries peuvent fournir aux bailleurs de fonds une partie de leurs besoins en semoule ou farine de maïs pour leurs programmes d'aide alimentaire. Et maintenant comment mettre en œuvre le concept maïs prospère?

• Proposition de rencontres périodiques en Afrique de l'Ouest sur la production et la transformation maïs, dans le cadre d'un réseau maïs prospère.

• Formations, échanges de savoir faire au niveau régional. A titre d'exemple, les thèmes suivants pourraient faire l'objet de formations au Bénin: - utilisation du maïs dans l'alimentation (plus de 40 recettes au Bénin) - élevage de l'escargot géant africain.

 

Discours de clôture de Monsieur Mathurin Coffi Nago

Doyen de la Faculté des sciences agronomiques de l'Université nationale du Bénin

Excellence, Monsieur le représentant de la FAO,
Monsieur le Directeur de cabinet,
Honorables invités,
Mesdames et Messieurs,
Chers collègues séminaristes.

NOTRE RENCONTRE VA BIENTÔT S'ACHEVER. C'est donc l'heure du bilan. Nous venons d'en écouter une partie, à savoir les résultats et conclusions des travaux réalisés ici même. Il n'est pas facile de s'apprécier soi-même, d'évaluer les travaux auxquels on a directement participé, car, dit-on, l'on ne peut être à la fois juge et partie. Mais je dois pour une fois enfreindre la règle, pour dire honnêtement que vous avez, que nous avons fait du bon «boulot». Les résultats de nos échanges et de nos réflexions sont, à mon sens, d'une qualité satisfaisante. lis sont à la mesure du sérieux et de la disponibilité dont nous avons tous fait preuve tout au long du présent séminaire. Chacun de nous a pu apporter et échanger avec les autres participants ses résultats, ses expériences. le ne pense donc pas trahir les sentiments de mes collègues en affirmant que la rencontre a été utile et enrichissante pour nous tous. Il ne pouvait, du reste, en être autrement vu la composition de l'assistance qui se caractérise à la fois par une diversité des spécialités, des compétences et des fonctions, par une diversité et une richesse des expériences accumulées. Cette assistance comprend en effet des chercheurs, des développeurs mais aussi des communicateurs et des paysans, c'est-à-dire des «petits producteurs de maïs» (pour parier comme mon ami BERTHÉ). Nous sommes ainsi sortis des schémas classiques et, au vu des résultats obtenus, je puis affirmer que les organisateurs ont bien agi en associant à la rencontre les hommes de la parole (les communicateurs) et les hommes de la terre (les paysans).

Il y a une autre partie du bilan de notre rencontre qui ne ressort pas du rapport de synthèse qui vient d'être présenté. Cette partie paraît moins concrète, moins visible, mais elle n'en est pas moins importante. Il s'agît des relations d'amitié, de travail qui se sont nouées entre nous, de l'ambiance générale qui a régné tout au long des travaux, toutes choses qui ont contribué fortement à la qualité des échanges et des résultats obtenus.

Il faut souhaiter que ce séminaire ne soit pas seulement une rencontre de plus. Il devra permettre une véritable prise de conscience de nos possibilités, de nos potentialités, de la nécessité de les valoriser et d'œuvrer réellement au côté des paysans et des autres acteurs pour la prospérité de la filière maïs. Il est également souhaitable que cette rencontre débouche sur un programme qui favorise les échanges entre les paysans de la sous-région ouest-africaine, en vue de la capitalisation et de la diffusion des informations et des innovations utiles et adaptées à nos réalités socio-économiques.

Au terme du séminaire, il me plaît d'adresser, au nom de la Faculté des sciences agronomiques du Bénin, à tous ceux qui ont contribué à sa conception et à sa réalisation, nos sincères remerciements. Remerciements à la FAO et au CIRAD, mais aussi remerciements à tous les participants ici présents. A cet égard, je voudrais me féliciter du dynamisme et de la participation active des communicateurs présents à cette rencontre.

A vous tous, je souhaite enfin un bon retour dans vos villes et pays respectifs.

Je vous remercie.

 

Discours de clôture de Monsieur Nicolas Bricas

Représentant du CIRAD

Monsieur le Directeur de cabinet du ministre du Développement rural,
Monsieur le représentant de la FAO,
Monsieur le Doyen de la Faculté des sciences agronomiques de l'Université nationale du Bénin,
Chers collègues et amis.

VOUS VENEZ D'ENTENDRE les principales conclusions du séminaire «Maïs prospère: pro duction et valorisation du maïs à l'échelon villageois en Afrique de l'Ouest».

L'objectif, je vous le rappelle, était de faire le point sur les possibilités d'améliorer la production paysanne de maïs: faire le point et échanger nos expériences sur les systèmes de culture, le stockage, la transformation de cette céréale. Je crois pouvoir dire que cet objectif est atteint. Le bon niveau des communications, la qualité du dialogue entre des participants venus d'horizons géographiques et thématiques divers et la bonne ambiance générale ont permis de faire émerger de nombreuses idées, d'apprendre beaucoup, de remettre en cause certaines idées préconçues. Même s'il faut rester modeste, je crois que nous avons avancé et que chacun va repartir avec des idées nouvelles et des adresses de nouveaux collègues. C'est une bonne chose, car on peut dire que la production et la valorisation du maïs ont des perspectives de développement. Ce constat est d'autant plus important dans le contexte actuel suite à la dévaluation du Franc CFA.

Cela dit, je voudrais souligner quelques éléments qui m'ont personnellement marqué au cours des discussions de ces derniers jours.

Nous avons fait le constat que diverses solutions techniques existent pour accroître la production de maïs et mieux le valoriser. Mais no us avons tous rapidement reconnu quil ne suffit pas qu'elles existent pour qu'elles soient mises en œuvre Ont alors été pointées diverses préoccupations qui ne concernent pas seulement le maïs mais l'agriculture paysanne d'une façon plus générale. Ces préoccupations ne sont pas nouvelles. A lire les recommandations des multiples séminaires qui se déroulent depuis des années en Afrique, on retrouve ces mêmes préoccupations. je citerai quelques exemples.

• La sécurisation du foncier. Comment des paysans peuvent-ils mettre en œuvre des innovations techniques pour accroître leur production, protéger leurs sols contre l'érosion ou maintenir leur fertilité s'ils n'ont pas la garantie de pouvoir cultiver durablement leur terre?

• L'esprit, les démarches d'encadrement. Nous en avons beaucoup parlé hier. Les représen tants des organisations paysannes ont attiré notre attention sur la nécessité de changer les modes de relation entre l'encadrement, la vulgarisation, la recherche et les paysans. Les paysans ne sont pas des cibles à développer. Ce sont des acteurs responsables, rationnels dans leurs comportements et relativement efficaces compte tenu de leurs contraintes. Ceci ne signifie pas qu'il n'y a rien à faire. Bien au contraire. Mais les diagnostics, le dialogue, les conseils doivent se faire dans un nouvel esprit de partenariat et non d'assistance.

• Les problèmes de la relève après l'achèvement des projets. Trop souvent les projets n'ont qu'une courte durée, ne permettent que dinitier des actions sans pouvoir les mener à leur terme. Les préoccupations des participants soulignent la nécessité d'un engagement durable des structures de recherche, d'accompagnement ou de coopération auprès des paysans.

• Les problèmes de l'environnement économique et juridique des activités agricoles et agroalimentaires.

Ces quelques exemples de préoccupations, de contraintes que nous avons une fois de plus identifiées et discutées, relèvent les limites des conclusions de ce séminaire. Ceci nous appelle à une certaine modestie par rapport à nos recommandations et montre en tout cas la nécessité d'une approche globale des problèmes. La prospérité du maïs ne s'obtiendra pas seulement par la diffusion de nouvelles techniques. Elle suppose un environnement général plus favorable aux petits paysans et il y a encore, de ce point de vue, du chemin à faire.

Pour être plus positif, je voudrais souligner un dernier point qui me semble être un acquis important de ce séminaire.

La présence conjointe dans ce séminaire de participants travaillant sur les systèmes de culture et sur le stockage et la transformation du maïs a permis une prise de conscience de la forte relation qui existe entre ces deux aspects. Les paysans n'auront intérêt à investir dans l'amélioration de leurs systèmes de culture, de stockage, ou de transformation que s'ils ont des garanties de débouchés, que s'ils peuvent accéder au marché. On ne peut plus réfléchir les questions de systèmes de culture et de systèmes de transformation de façon indépendante. Cette idée paraissait parfois un peu curieuse il y a 10 ans. Elle devient aujourd'hui une certitude et ce séminaire en est la démonstration.

Si ce dialogue entre agronomes et technologues a été fructueux, c'est grâce à la qualité des participants et à celle de l'organisation. Aussi, au nom de tous les participants, je voudrais remercier les autorités béninoises et tout particulièrement l'équipe du professeur Mathurin NAGO et joseph HOUNHOUIGAN de la FSA pour l'accueil qui nous a été réservé et pour l'organisation exemplaire de ce séminaire. je remercie chacun des participants pour son engagement dans ce séminaire et souhaite à tous un bon retour chez lui. Merci enfin à la FAO pour son initiative et son appui à l'organisation du séminaire. je crois que nous repartons tous de Cotonou avec la tête pleine d'idées et de souvenirs, et en particulier de souvenirs gastronomiques: de l'ablo au chakpalo en passant par l'akassa, l'amiwo, l'aklui, etc. et sans oublier le nouveau venu: le mavi.

Je vous remercie.


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