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Progrès de la génétique forestière

par C. SYRACH-LARSEN, Directeur de la Station expérimentale d'essences forestières, Hørsholm, Danemark

On peut être frappé du fait que les progrès de l'utilisation des plantes améliorées sont beau coup plus lents en sylviculture qu'en agriculture ou en horticulture, état de choses qui est pourtant parfaitement explicable.

L'amélioration génétique est fondée sur le fait qu'il n'existe pas dans une même espèce deux plantes identiques, et qu'en sélectionnant les meilleurs spécimens, on pourra obtenir les types améliorés voulus. De même, il est possible de croiser les espèces et les types de façon à combiner les qualités recherchées.

Grâce à la reproduction sexuée, on peut obtenir des lignées, comme c'est le cas dans la culture des céréales, des racines potagères et des graminées, ou encore dans la culture des fleurs et légumes. En règle générale, ces plantes se reproduisent tous les ans ou tous les deux ans. En faisant appel aux générations qui se succèdent rapidement, on a pu, par une sélection constante et par interpollinisation, obtenir la reproduction de lignées pures.

Les clones, qui servent à la multiplication des arbres fruitiers, des rosiers et de plantes similaires, répondent à une conception d'un tout autre ordre. Ils se propagent sur une vaste échelle par la multiplication végétative On peut créer un clone par la greffe, le bouturage ou le marcottage. On prend, sur les plantes qui donnent des fruits ou des fleurs d'une qualité exceptionnelle plus ou moins par hasard, des pousses ou des bourgeons qui sont greffés sur des plantes sauvages. Ces clones sont donc au départ des individus qui, après avoir été greffés pousseront sur des racines étrangères ou serviront à la création de plants indépendants par bouturage ou marcottage.

La méthode choisie par l'agriculteur ou l'horticulteur dans chaque cas d'amélioration dépend des caractéristiques des plantes et des possibilités pratiques. Il importe particulièrement de s'attacher au rythme de succession des générations, aux conditions de floraison et notamment à l'époque d'apparition des fleurs mâles et femelles, à la pollinisation par les insectes ou par le vent, au nombre de graines que donne la plante et à la nécessité, de ce fait, de rechercher la capacité de multiplication végétative de la plante, et à bien d'autres points encore.

En sylviculture, tout effort visant à obtenir une «lignée pure» d'arbres forestiers au moyen de la pollinisation artificielle se heurte aux obstacles que crée la hauteur des arbres. La pollinisation à la main n'est pas facile, car elle doit s'effectuer au faite des arbres. En outre, les arbres sont souvent dispersés sur une vaste superficie et ils ne peuvent être transportés en des points convenant à l'expérimentation Enfin, un arbre peut prendre dix, vingt ou même quarante ans avant de produire de la graine

C'est pourquoi il n'est guère surprenant que l'idée de la pollinisation artificielle ait été abandonnée et que personne n'ait cru en la régénération des forêts par la greffe ou le bouturage D'une façon générale, la sylviculture intensive s'attache donc principalement à l'amélioration de la végétation forestière au moyen de l'introduction d'essences exotiques et de la sélection des meilleurs spécimens indigènes dans des conditions naturelles de pollinisation. Toutefois, un pas important a été fait lorsqu'on a reconnu que certains types d'arbres sont héréditaires et lorsqu'on a commencé à prendre des mesures d'amélioration volontaire, même si les progrès n'ont pas dépassé le stade de la sélection par pollinisation naturelle.

Sapin de Douglas: V. 661 est un greffon prélevé au Danemark sur un arbre choisi. Il a été greffé dans un peuplement fortement attaqué par Phaeocryptopus Gaümannii et semble ainsi résister à cette maladie

L'obtention de bonnes semences

Il convenait tout d'abord et surtout de rechercher la semence optima pour le reboisement. De ce fait, les demandes de renseignements sûrs concernant la provenance des semences sont devenues de plus en plus nombreuses, et divers systèmes de contrôle ont été créés dans plusieurs pays. La coopération internationale revêt dans ce domaine une importance extrême: elle permet l'échange de renseignements et, le cas échéant, l'établissement progressif de méthodes uniformes, ou tout au moins, des échanges de vues sur les demandes présentées ou sur les façons de les traiter.

A ce propos, il semble souhaitable de s'intéresser non seulement aux races et aux types climatiques que l'on rencontre dans la nature et qui répondent particulièrement bien aux conditions de la sylviculture, mais aussi aux types qui semblent avoir été créés sous l'action de l'homme. Il y a lieu de mentionner ici les chênes dont sont plantées les avenues de Hollande, le mélèze d'Europe (Larix decidua) et le sapin Douglas (Pseudotsuga taxifolia) d'Amérique du Nord poussant en Ecosse, sans parler de nombreux autres exemples, dans le Nouveau Monde comme dans l'Ancien. Il faut noter également la propagation fort étendue d'Hevea brasiliensis qui fournit de loin la plus grande partie du caoutchouc brut du monde, presque exclusivement dans des plantations situées hors de l'habitat naturel de cette essence; ces vastes plantations sont issues à l'origine de quantités minimes de semences.

Un tel isolement d'une essence peut avoir de grands avantages, mais il peut également avoir pour résultat l'exclusion de chances intéressantes de variation. Toutefois, c'est là un argument de peu de poids en face du grand progrès réalisé en agriculture et en horticulture, particulièrement depuis cinquante ou cent ans. Les magnifiques récoltes de notre époque dans les champs et dans les jardins représentent plusieurs fois les récoltes d'il y a quelques années. L'amélioration récente du mais par l'hybridation - les premiers essais théoriques en ont été faits vers 1917 - a donné pour l'année 1947 seule, un profit estimé entre 750 millions et un milliard de dollars.

Nous avons observé avec envie les progrès réalisés par certains exploitants grâce aux techniques d'amélioration des végétaux. Malheureusement, en sylviculture, on a trop mis en relief les difficultés qui se présentaient, c'est pourquoi ces techniques ont été négligées. En effet, les difficultés sont grandes si l'on veut appliquer à la sylviculture les méthodes employées en agriculture et en horticulture. La sylviculture devrait choisir sa propre voie et la question se présenterait peut-être sous un jour différent.

Voici les plus importants moyens d'action en matière d'amélioration des essences forestières:

a) Recherches en vue de déterminer les différences héréditaires à l'intérieur d'une même espèce; races déterminées par les facteurs climatiques, et types spéciaux poussant tant dans des conditions naturelles qu'en culture - en d'autres termes la question de la provenance au sens le plus large - accompagnées d'expériences dans des conditions de pollinisation naturelle.

b) Pollinisation artificielle basée sur les études faites antérieurement sur la floraison des arbres forestiers

c) Hybridation, et particulièrement utilisation de la vigueur d'hybride, ou heterosis.

d) Travaux d'ordre cytologique visant à identifier les arbres au moyen des différences que présente le nombre de chromosomes, et reproduction de ces arbres.

e) Multiplication végétative, méthode technique d'une grande importance pour l'amélioration des forêts, par l'établissement de plantations pour l'obtention de semences et l'organisation d'expositions d'arboriculture. Ces plantations et expositions peuvent également avoir une grande influence sur l'utilisation d'un arbre présentant une caractéristique donnée (clone).

Pinus strobus: a) Vieil arbre à Uggeløse Skov, Danemark. b) Semis provenant d'une pollinisation artificielle effectuée en 1944 dans la cime du vieil arbre c) Greffons prélevés sur le vieux pin, greffés en 1948. Les greffons ont fleuri en 1950 (b et c ont été photographiés le 30 juin 1950).

Conservation des meilleurs types

Il importe tout d'abord d'assurer la conservation pour l'avenir des types optima d'arbres présentant une importance économique. Il faudrait que chaque pays procédât à l'enregistrement des peuplements les meilleurs, de préférence dans les forêts vierges, ou de tous spécimens particulièrement intéressants (arbres d'élite). Cette tâche est étroitement liée à l'entretien des parcs nationaux et à la protection des sites naturels. Les spécimens d'élite devront être utilisés dans les travaux de plantation, soit au moyen de leurs semences ou de préférence par multiplication végétative (greffage ou bouturage) de façon à propager les génotypes que lion juge intéressants et qui pourront de cette façon être utilisés ultérieurement. En tout état de cause, cette façon d'agir offrirait une certaine garantie contre la dégénérescence.

Au Danemark, cette tâche est accomplie par l'Arboretum d'Etat. De par sa nature même c'est une tâche qui est naturellement de la compétence des arboretums des divers pays, qu'ils dépendent d'écoles de sylviculture, de centres de recherches ou d'autres institutions. Il est temps de renoncer aux errements des anciennes collections; et à leurs monstruosités. On avait autrefois coutume de collectionner des spécimens tels que le frêne pleureur, le sapin serpent arbres nains ou en boule, au lieu de s'attacher surtout aux spécimens d'élite d'origine forestière.

La distance crée un problème important. Il arrive souvent que les arbres qu'il faudrait réunir soient dispersés sur une vaste superficie de sorte qu'il semble au premier abord impossible de les utiliser. On aura déjà fait un grand progrès le jour où l'on aura réussi à planter des arbres d'élite dans l'arboretum, Le meilleur moyen d'y parvenir serait d'obtenir de la semence des peuplements de qualité et d'assurer la multiplication végétative des beaux spécimens. Une jeep portant une échelle d'acier de type suédois peut rayonner sur de vastes distances et peut servir à recueillir des éléments provenant d'arbres très élevés. Même s'il est difficile d'atteindre le faite des arbres, il est possible de briser de petits rameaux à coups de fusil.

Transport de matériel de greffage par la poste aérienne

Pour les transports à longue distance on dispose du courrier aérien et des colis par avion. J'ai réussi à obtenir en trois jours une quantité importante de matériel de greffage expédié de Californie. Le mercredi les greffons partaient de San Francisco et le samedi suivant le greffage commençait à Hørsholm. Nous avons envoyé du pollen de pin du Danemark à Placerville en Californie et, depuis le printemps de 1946, nous recevons tous les ans du pollen du Canada, tant pour l'expérimentation que pour la production commerciale des peupliers hybrides. Nous avons reçu d'Australie du pollen de pin et nous avons effectué un grand nombre d'échanges du même ordre. Il est certain que dans quelques années ce matériel, dont l'échange revêt pour nous une telle importance, constituera un fret courant.

C'est plutôt l'élément temps que l'élément distance qui constitue un obstacle. Toutefois, on trouve un grand nombre d'essences forestières importantes qui produisent des semences en quantité considérable à un âge relativement jeune, même si elles poussent dans les conditions ordinaires.

On peut mentionner parmi les essences principales d'Europe, Betula, Larix et Pinus. Les arbres de 10 à 15 ans sont encore capables de fournir des quantités considérables de semences, à condition qu'ils soient suffisamment espacés pour que la couronne se développe normalement.

La greffe offre certains avantages: il semble que les greffons soient en mesure de produire des semences beaucoup plus tôt, même s'ils sont plantés dans la forêt de la même façon que les autres arbres On peut également hâter la production de semences par incision, pincement et par le rafraîchissement des racines. Il a été clairement prouvé que les greffons poussant en pots ou traités de façon spéciale peuvent constituer des sujets d'expérience portant précocement des fruits. Travailler en serre avec des plantes en pots produisant des semences représente un grand avantage. S'il est possible de prouver que les greffons ont exactement les mêmes caractères génétiques que les sujets d'élite dont ils proviennent, on disposera d'éléments permettant d'intéressants travaux de recherche.

L'identification du génotype des essences forestières constitue également un problème difficile. Un traitement sylvicole approprié peut permettre des progrès sensibles, mais la tâche serait grandement facilitée si l'on disposait d'arbres ayant, par tendance héréditaire, la végétation la plus vigoureuse, les troncs les plus droits, la plus grande résistance aux maladies et aux insectes, etc. Les arbres des forêts vivent dans une communauté où, comme tout organisme, ils doivent s'adapter au milieu. Les conditions de ce milieu peuvent varier d'une manière considérable avec le temps, d'autant plus que les arbres vivent très longtemps et qu'ils peuvent être soumis à de nombreuses influences extérieures.

Sapin de Douglas 1 a) Arbre d'origine, Wind River, Etat de Washington, Etats-Unis (photographié le 17 avril 1946). b) et c) Greffe (V. 1061) sur un sujet plus âgé au Danemark le 29 avril 1946 (b a été photographié le 25 septembre 1946 et c le 26 juin 1950). Si on compare le sapin de Douglas 1 au sapin de Douglas 2, on voit à quel point diffèrent ces deux génotypes. Il est remarquable qu'il soit possible de constater cette différence sur les photographies de 1946 (voir b). En 1950 (voir c) la différence est évidente.

Le rôle des expositions d'arboriculture

Nous avons entrepris d'organiser des expositions d'arboriculture au Danemark en vue d'aider à identifier le génotype des arbres. Ces expositions sont des plantations de groupes de plants de tailles variées se propageant par multiplication végétative, de sorte que chaque groupe - d'une trentaine de plants en général - représente son arbre particulier, son clone. A cet égard, les résultats les plus sûrs sont obtenus au moyen du bouturage. Mais la greffe permet également des observations dignes de foi. Nous avons trouvé, à l'arboretum de Hossholm, que ces méthodes facilitaient considérablement l'identification du génotype des clones de Fagus, Fraxinus, Betula, Larix, Picea et Pseudotsuga 1.

1 C. Syrach-Larsen: Identification du génotype des essences forestières, 1947.

Ces expositions d'arboriculture constituent un moyen de démontrer l'existence de différents génotypes. Elles offrent également d'intéressantes possibilités d'observation et d'essais sur une période prolongée. En outre, elles peuvent être organisées de façon à permettre des essais sur des génotypes individuels dans différentes conditions de milieu, ainsi que des travaux dans divers domaines.

Nous ne pouvons nous étendre ici, mais il y a lieu d'observer que ces expositions peuvent également être très utiles pour les observations phénologiques et pour l'étude de la physiologie et de la pathologie végétales. Ces études permettent de mettre en relief les grandes différences individuelles qui existent entre les plantes et qui sont la base des améliorations. On serait surpris de voir la somme de connaissances que l'on peut tirer de ce genre de travail, et la rapidité des progrès. Un autre point à noter est que grâce au greffage - ou, de préférence, au bouturage - on peut tenter de vérifier l'importance de la provenance. Il serait possible de créer pour ainsi dire des «centres météorologiques vivants» ou d'entreprendre l'utilisation d'«arbres-types». On dit souvent que le travail d'amélioration devrait suivre la plante de la naissance à la mort, de façon à être sûr de découvrir la plante la plus intéressante, mais en sylviculture, il y a lieu à mon avis de suivre l'arbre de la mort à la naissance, comme nous le faisons dans nos expositions.

L'agriculteur sème ses graines et observe le développement de la végétation jusqu'à la récolte. Cela lui est facile, car l'ensemble du cycle de végétation ne prend qu'un ou deux ans. La même opération serait inconcevable pour le sylviculteur, c'est pourquoi il doit prendre un raccourci par la voie de l'exposition d'arboriculture. Le bel arbre adulte de la forêt est au seuil de la mort, mais il nous a montré qu'il pouvait devenir l'arbre idéal. Si on en retire des greffons qu'on installe dans une exposition, on a alors la possibilité d'étudier les caractères congénitaux qui ont fait de l'arbre un sujet intéressant. On peut en quelques années découvrir les causes de sa supériorité, que ce soit une vigueur exceptionnelle une grande robustesse ou une résistance particulière aux maladies. C'est ce que signifie «suivre l'arbre de la mort à la naissance». Mais c'est là un exemple frappant de la nécessité de s'écarter des sentiers battus.

En ce qui concerne la production des semences, «je recommande énergiquement l'appel à la multiplication végétative et, en même temps que des expériences de pollinisation artificielle, la création de plantations ayant pour but de fournir des semences pour l'utilisation pratique».2) C'est là une citation qui n'a rien de nouveau mais qui représente un objectif que nous devons nous efforcer d'atteindre.

2 C. Syrach-Larsen: La sélection des essences forestières, 1934, page 112.

Sapin de Douglas 2: a) Arbre d'origine, Wind River, Etat de Washington, Etats-Unis (photographié le 17 avril 1946) b et c) Greffe (V. 1026) sur un sujet plus âgé au Danemark, le 29 avril 1946 (b a été photographié le 25 septembre 1946 et c le 26 juin 1946).

La production de semences en jardins

Certains changements peuvent s'avérer nécessaires, par exemple, pour la plantation de certaines essences, l'emploi de plants issus de la pollinisation contrôlée de greffons provenant d'arbres d'élite. Certaines combinaisons peuvent également présenter des avantages, mais il y aurait lieu sans aucun doute de procéder à la création de plantations spéciales ou, pour leur donner une appellation plus exacte, de jardins pour la production de semences. Une sylviculture intensive comme celle que connaît le Danemark doit manifestement utiliser de tels jardins, mais mon impression est qu'ils peuvent également être recommandés dans les pays où la sylviculture présente un caractère moins intensif; aux Etats-Unis et au Canada par exemple, ils constitueraient un prolongement naturel des pépinières dont le rôle est plus général

Fraxinus excelsior: a) vieil arbre à Stenderup, Danemark. b) Greffons du même arbre portant des graines en serre, 22 août 1949. c) Semis provenant des graines figurées en b. germées en 1941 (photographiés en 1942).

Au Danemark le travail a été organisé de telle façon que la plus grande partie des expériences visant à l'amélioration des arbres forestiers est concentré à l'Arboretum d'Etat, tandis que la création et la surveillance des jardins pour la production de semences constituent la tâche essentielle du Centre de sélection forestière d'Etat,

Avant, tout, ces jardins, créés par la multiplication végétative de sujets d'élite, constitueront notre carte maîtresse. Il ne faut pas jeter un regard d'envie sur la situation privilégiée de ceux qui opèrent sur les plantes herbacées, mais bien plutôt voir l'autre côté de la question. Paradoxalement, on peut dire qu'en ce qui concerne les plantes à vie brève nous devons nous confiner aux types qui donnent régulièrement des graines et qui se reproduisent dans toutes leurs caractéristiques si on veut les conserver, alors que dans le domaine des arbres forestiers il est; possible de conserver des tendances héréditaires intéressantes chez les mêmes sujets, parfois pendant des siècles. Ne nous plaignons donc pas de la lente succession des générations mais félicitons nous plutôt de la longue vie des sujets.

En outre, ces jardins permettent d'utiliser 1-a vigueur d'hybrides (hétérosis). On peut non seulement produire sans difficulté de la semence de l'hybride voulu, mais aussi la produire à partir de sujets sélectionnés à cet effet.

A cet égard on peut noter que F.I. Righter, de l'Institut de génétique forestière de Placerville en Californie, recommande l'utilisation d'hybrides par l'emploi de semences de la génération F1 dans des conditions de pollinisation libre. L'Institut de Placerville travaille presque exclusivement sur le pin, et a créé un certain nombre d'hybrides dont le plus ancien lot est P. attenuata x P. radiata (semé en 1929), qui a certainement constitué la base de son expérience. J'ai obtenu, en croisant Larix decidua et L. leptolepis, une descendance remarquable de F2 et de sujets issus de croisement avec les parents (pollinisation contrôlée). Et je me rappelle également avoir vu en Ecosse de magnifiques plantations issues de la pollinisation naturelle entre F1 et F2.

J'aimerais aussi attirer l'attention sur la méthode des «croisements répétés» (polycross-method) employée avec succès au cours de ces dernières années pour l'amélioration des plantes cultivées 3. Cette méthode convient particulièrement pour les plantes qui se pollinisent mutuellement, qui peuvent constituer des clones et être ainsi conservées pendant des années, comme c'est le cas pour les arbres des forêts.

3 B. N. Frandsen: Imperial Agricultural Bureau Joint Publication No 3, 1940; H. K. Hayes: American Naturalist, Vol. LXXX, 1946; et H. M. Tysdal et Bliss H. Crandall; Journal of the American Society of Agronomy, Vol. 40, 1948.

L'emploi de la méthode des «croisements répétés» permet d'obtenir des plantes ayant une grande «capacité de combinaison». S'il était possible en sylviculture de trouver des arbres ayant une capacité de combinaison suffisamment grande, il pourrait être avantageux de les introduire dans les peuplements, même si on y utilisait la régénération naturelle.

Dans la recherche constante de la solution optima, il faut, en travaillant avec la plus grande précision possible, s'attaquer au cœur du problème, de façon à mettre les découvertes en pratique. Il appartient à chacun de nous de traiter les problèmes à notre idée, mais il nous faut en même temps coopérer au maximum avec autrui.

Les pionniers de la génétique

Il s'agit là d'un travail de pionniers. L'étude des stimulants de la végétation, qui peut permettre un emploi généralisé du bouturage, et les recherches cytologiques approfondies ont la même importance que l'établissement de théories ou l'emploi de méthodes qui ont fait leurs preuves en horticulture.

Il faut s'efforcer d'obtenir une végétation vigoureuse, sans qu'elle soit pour cela gigantesque; il faut rechercher la résistance aux maladies et avoir pour but d'accroître le volume de production à l'hectare. C'est de cette façon que la sélection des arbres forestiers contribuera aux progrès du boisement.

Lorsque les pionniers atteignirent la Prairie de l'Amérique du Nord, elle était recouverte d'une «mer d'herbe» qu'ils s'estimèrent heureux de pouvoir utiliser gratuitement, mais depuis l'agriculteur a appris qu'il est préférable d'enfouir cette herbe et de cultiver d'autres graminées plus avantageuses, même s'il en coûte de l'argent et du travail. Il doit en être de même pour le forestier s'il veut pouvoir satisfaire à la demande en bois des industries chimiques et de l'industrie du papier dont la consommation s'accroît de plus en plus, ainsi qu'aux demandes diverses de bois présentant des caractéristiques techniques et de structures particulières. Il faut prévoir une demande régulière d'arbres ayant les qualités nécessaires pour constituer des rideaux protégeant les cultures contre le vent et le sable, et pour les espèces et types d'arbres et d'arbustes facilitant la régularisation des cours d'eau et la protection contre l'érosion. L'amélioration des arbres forestiers aura sans doute un jour pour tâche de fournir des sujets pour le boisement de vastes régions où l'action de l'homme a été particulièrement malheureuse. Des plants spéciaux pourront être nécessaires près des agglomérations industrielles qui contaminent l'atmosphère, ou bien en Afrique du Sud où les énormes montagnes de sable extrait des mines de diamant envahissent les maisons, ou encore à Suez, pour empêcher l'obstruction du canal par le sable qu'apporte le vent du désert.

Si l'on veut réussir quelque peu dans l'amélioration des arbres forestiers, il faudra bientôt aborder la phase qui démontrera les avantages qu'offre la création de plantations de types purs dans des conditions favorables, sur la chasse à d'innombrables essences diverses des forêts vierges ou sur l'attente de la régénération des forêts du Grand Nord. Ce sont les régions du monde qui ont une luminosité, une chaleur et une humidité abondantes, qui offrent les meilleures possibilités. Il faut rester à l'affût de toutes les occasions qui pourront se présenter, d'où qu'elles viennent. Et, quoi qu'il arrive, il faut aborder la tâche avec optimisme. Si nous nous attachons à la longue vie des spécimens plutôt qu'à la lente succession des générations, l'avenir paraît immédiatement plus favorable et des possibilités se présentent d'aborder l'amélioration des arbres d'une façon toute nouvelle: c'est alors que le sylviculteur peut devancer l'agriculteur et l'horticulteur.

Echange d'éléments de recherche

Après accord avec le Président de l'Union Internationale des Organismes de Recherches Forestières, la FAO publiera dans Unasylva de brefs avis et demandes concernant les recherches et les éléments nécessaires aux recherches qui pourront lui être envoyés par des centres de recherche ou individuellement par les personnes, chargées de ces recherches.

La note suivante nous a été envoyée par Carl Muhle Larsen, Union Allumettière S.A., Institut de Populiculture, 230, rue Buizemont, Grammont, Belgique.

«Nous cherchons pour nos travaux sur la production des essences de peupliers des spécimens de P. Nigra. Nous étudions à la fois l'essence elle-même et ses variétés; mais les rameaux fournis doivent parvenir de plants sains et de préférence d'arbres de bonne forme et de croissance satisfaisante. Afin qu'ils puissent être utilisés immédiatement dés la première année, les rameaux fournis, de 30 à 50 centimètres de long, doivent porter des bourgeons à fleurs.

«Nous serions heureux si les Instituts de Recherche voulaient bien nous faire connaître s'ils leur est possible de nous fournir ce matériel. Nous prendrions à notre charge les frais d'expédition et tous autres frais».


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