Axe Développement économique et social

Synthèses

 
october 2010
Adapter la Convention relative à l’aide alimentaire aux réalités du XXIe siècle
Quelques suggestions pour des interventions plus efficaces

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Les situations d'urgence sont devenues de plus en plus fréquentes au cours des 25 dernières années, souvent combinées avec une insécurité alimentaire aiguë et chronique dans les pays touchés. Les réponses internationales à ces crises ont généralement porté sur le traitement des besoins humanitaires immédiats, comme en témoigne la part croissante de l'aide alimentaire destinée aux situations d’urgence. Toutefois, parvenir à une sécurité alimentaire durable nécessiterait la plupart du temps une approche intégrée du développement qui combine des mesures de secours à court terme avec des stratégies d'atténuation à long terme. Une Convention relative à l’aide alimentaire (CAA) réformée pourrait fournir un cadre institutionnel favorable à des interventions plus efficaces.

Qu’est-ce que la Convention relative à l’aide alimentaire ?
Plusieurs dispositions régissent l'aide alimentaire au niveau international. Parmi celles-ci, la Convention relative à l’aide alimentaire revêt une importance particulière car elle représente le seul instrument juridique permettant d’assurer une quantité minimale d'aide alimentaire.

Créée en 1967 pour «réaliser un programme d'aide alimentaire à l'aide de contributions au profit des pays en développement", la CAA a été renouvelée à plusieurs reprises, la dernière Convention datant de 1999. Au fil des ans, les composantes de la Convention sont globalement restées inchangées. Parmi les modifications notables, on peut citer l’élargissement de la base des produits qui peuvent être fournis en sus des céréales (par exemple les légumineuses, les racines et le sucre) et l'accent mis sur les questions plus larges de développement et de sécurité alimentaire.

Malgré ces ajustements, de nombreuses personnes pensent que la Convention n'est plus adaptée aux besoins d'aujourd'hui en matière d’aide alimentaire. En effet, la Convention actuelle devait expirer en 2002, mais elle a été prolongée à plusieurs reprises depuis lors. Les renégociations officielles ont été mises en attente, car les membres voulaient attendre les aboutissements des négociations sur l'agriculture du Cycle de Doha de l'OMC, en particulier celles qui sont liées à l'aide alimentaire.

Nouveaux défis, anciens mécanismes
On reconnaît de plus en plus que lutter contre une situation d'urgence en couvrant uniquement les besoins humanitaires immédiats ne permet pas d’apporter une solution durable. Les interventions devraient au contraire avoir un horizon à plus long terme et s'attaquer aux causes sous-jacentes de l'insécurité alimentaire. Ces réponses globales comprennent des mesures visant à accroître la productivité agricole, en soutenant les circuits de commercialisation et la fourniture d'intrants de base pour la production alimentaire.

Les modèles actuels en matière d'aide alimentaire ne reflètent pas cette réalité. Près de 80 pour cent de l'aide totale est destinée à des mesures d'urgence, contre moins de 20 pour cent en 1990. Bien que ce changement ne soit pas surprenant en raison de l'augmentation marquée des crises alimentaires, il montre tout de même que les interventions sont trop souvent axées sur la résolution des symptômes des situations d’urgence, et non sur leurs causes. Les opérations d'aide alimentaire qui favorisent le développement agricole et économique - ce que l'on appelle «les projets d’aide alimentaire" - ont représenté moins de 20 pour cent du total en 2008.

Le fort accent mis sur les mesures de secours à court terme, combiné avec un soutien limité à l'agriculture locale, est non seulement moins efficace pour surmonter les causes structurelles de l'insécurité alimentaire, mais il pourrait même décourager les investissements dans l'agriculture et la production alimentaire nationale.

Initiatives récentes en matière de sécurité alimentaire
L’augmentation de la faim dans le monde, suite à la crise des prix alimentaires en 2007-08 et le ralentissement économique de l'an dernier, ont catalysé les efforts visant à réexaminer les interventions en matière de sécurité alimentaire. Ce processus a été favorisé par des initiatives mondiales pour combattre la faim de manière plus efficace. Le Sommet du G8 à L'Aquila, la réforme du Comité de la sécurité alimentaire mondiale et le Sommet mondial sur la sécurité alimentaire (tous en 2009) ont renforcé une évolution vers des approches globales de la sécurité alimentaire. Indépendamment de la CAA, plusieurs donateurs ont déjà commencé à réajuster leurs interventions.

Alors que l'aide alimentaire était traditionnellement livrée sous forme d’aide en nature, un nombre croissant de donateurs comptent désormais sur des mécanismes d’achat dans les pays cibles eux-mêmes. Les achats locaux sont généralement moins chers que les aides en nature et peuvent générer des bénéfices pour le développement des marchés et des agriculteurs locaux.

Certains donateurs ont également œuvré pour une meilleure intégration des interventions d'urgence et des opérations de développement à long terme. L'Union européenne, par exemple, envisage un transfert rapide vers des mécanismes structurels en matière de sécurité alimentaire pour répondre aux situations d'urgence. Ces mesures devraient reconstruire les moyens de subsistance des populations touchées et renforcer leur résistance aux crises futures.

Ces exemples illustrent une rupture fondamentale avec les approches ad hoc et partielles des interventions en matière de sécurité alimentaire qui ont été suivies dans le passé. Ils démontrent également un accord général parmi les donateurs sur les principes qui devraient guider les interventions en matière d'aide alimentaire.
Vers une nouvelle Convention relative à l’aide alimentaire ?

Le processus de réforme de la CAA a été mis en veilleuse en grande partie en raison des négociations incertaines du Cycle de Doha. Compte tenu du degré élevé de convergence en ce qui concerne les disciplines relatives à l'aide alimentaire dans le projet de modalités concernant l'agriculture, la révision de la CAA devrait néanmoins aller de l'avant et se conclure sans plus tarder. Les dispositions spécifiques de la nouvelle Convention devront alors être constituées et «légalisées» en vertu de l'accord final du Cycle de Doha. Les modifications suivantes semblent possibles :

La nouvelle Convention pourrait envisager d'incorporer les intrants agricoles - comme les semences, les engrais et les outils agricoles - dans le cadre des contributions des donateurs en vertu de la Convention. Cela permettrait d'accélérer le redressement des pays dévastés par les situations d’urgence et d’éviter qu’ils ne soient constamment dépendants de l'aide alimentaire extérieure. Considérant que de nombreux nouveaux donateurs ont commencé à fournir une aide alimentaire (par exemple la Chine, la République de Corée et la Fédération de Russie) la CAA réformée pourrait aussi élargir sa base de membres pour mieux représenter les initiatives en cours.

Étant donné que les ressources actuelles peinent à couvrir les besoins d'urgence, relever les engagements minimaux de la CAA devrait être une composante essentielle de la réforme. Fournir à la Convention un financement adéquat serait économiquement logique étant donné que les interventions de dernière minute ont tendance à être plus coûteuses. Si les besoins réels s'avéraient être moins importants que prévus, des accords de financement flexibles pourraient permettre aux donateurs de transférer les cotisations d’une année budgétaire à l’autre. Cela se traduirait par une efficacité accrue de la Convention grâce à une disponibilité plus grande de ressources et de fonds en cas d'urgence.

C'est une heureuse coïncidence que la remise en question des stratégies des donateurs sur la sécurité alimentaire ait lieu à un moment où les principaux mécanismes internationaux de l'aide alimentaire sont dans un processus de négociation. La Convention relative à l’aide alimentaire devrait utiliser cette opportunité pour mieux s'adapter aux réalités du XXIe siècle.

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