Halimatou Moussa

FAO
Niger

English translation below

CONTRIBUTION DE MME HALIMATOU MOUSSA IDI / COORDINATRICE NATIONALE DU RWEE AU NIGER

Question 1 : Quels sont les principaux défis que doivent relever les femmes et les filles rurales ?

Dans le contexte particulier du Niger, des facteurs tels que le changement climatique, des contingences liées à la sécheresse, aux crises alimentaires et nutritionnelles, aux inondations régulières, les invasions de criquets, les afflux massif de réfugiés, créent un environnement difficile qui menace les moyens de subsistance de la population rurale.

En outre, filles et femmes rurales adressent chaque matin des défis qui font obstacle à leur bien-être et leur potentiel socio-économique (4 des 5 pauvres sont des femmes). Ces contraintes incluent :

  • l’analphabétisme (taux d’alphabétisation pour les personnes âgées de 15 et plus haut (c'est-à-dire qui peut lire et écrire) est de 19,1 % (hommes : 27.3%; femme : 11 % (2015).Leur faible taux d’alphabétisation et de scolarisation, limitant leurs connaissances et compétences indispensables pour mieux conduire leurs activités productives, économiques et politique
  • le très haut taux de fécondité (indice de fécondité est de 7, 6 enfants par femme – (EDSN 2012),
  • l’accès limité aux ressources productives (terre, intrants agricoles, finances et crédit, services de vulgarisation et technologie) : Une étude réalisée par le NEPAD[1] en lien avec l’accès aux services de vulgarisation, de formation/d’information/de communication, de diffusion de la technologie et de l’alphabétisation démontre que : 76% de personnes n’ayant pas accès à un service sont des femmes ; seules 34,7 % des femmes ont accès aux services de vulgarisation ; 38 % des femmes ont accès aux semences ; 32,5 % des femmes ont accès aux engrais ; 22,8 % des personnes qui bénéficient d’un crédit rural sont des femmes ; 88,5% des terres appartiennent aux hommes. Les 11, 5% restants sont détenus conjointement par le mari et la femme, ou par la femme et les enfants.
  • Les femmes sont surchargées avec les travaux domestiques : (préparation des repas, la corvée de la collecte de l’eau et de bois, de transformation de produits agricoles, le travail pastoral et l’éducation des enfants), prendre soin des malades et personnes âgées, le poids des traditions et des coutumes, la confusion entretenue sur les préceptes de l’islam (mauvaise interprétation), les règles des communautés et les droits de la femme.
  • Le faible accès des femmes rurales aux services publics, à la protection sociale, aux innovations, aux marchés locaux et nationaux et aux institutions en raison de normes culturelles enracinées et des défis sécuritaires.
  • L’accès difficile au foncier et aux moyens de production éloigne les jeunes en milieu rural (filles et garçons) du monde agricole ; les formations professionnelles y sont peu accessibles et les opportunités de s’installer à son propre compte sont limitées par manque d’accès aux crédits. Les hommes décident sur les dépenses des ménages, de la vente du bétail (84,7% des cas) et l’utilisation de la culture (84,1%). Dans les espaces privés et publics, les hommes incarnent l´autorité, fixent les règles, les codes de conduite et assurent le contrôle des biens familiaux et communautaires. Cela contraste fortement avec la participation massive des femmes dans les activités agricoles et génératrices de revenus. Pour ce qui est des décisions par rapport aux produits agricoles 30,3% des femmes en décident, 29,6% pour les produits de l’élevage et l’accès au crédit (20%)[2].
  • L’accès à l’information, qui pourrait permettre aux femmes rurales d’élargir leurs connaissances et d’échanger leurs savoirs et pratiques, est très restreint. L’accès et le contrôle des biens et des services ; les inégalités sociales, économiques et politiques entre hommes et femmes compromettent la sécurité alimentaire, freinent l’accroissement économique, atténuent les avancées dans tous les domaines et limitent la prise en charge des changements possibles par les populations rurales elles-mêmes en générale et par les femmes rurales en particulier.

Question 2 : Sommes-nous en train de suivre les bonnes approches et politiques pour réduire les inégalités entre les sexes ?

En termes d’approches, j’aimerais souligner l’importance d’agir en partenariat à tous les niveaux (partenariat entre acteurs au développement et partenariat hommes-femmes pour un bienêtre partagé), car les défis sont nombreux et aucun acteur pris individuellement ne peut les gagner tout seul.

Ceci m’amène à partager l’expérience du programme conjoint « Accélérer les progrès vers de l’autonomisation économique des femmes rurales » (Rural women economic empowerment) RWEE au Niger. Il vise à soutenir l’effort du Gouvernement Nigérien pour l’autonomisation de la femme et la sécurité alimentaire à travers une approche multisectorielle basée sur le renforcement de la synergie entre l’ONU Femmes, la FAO, le FIDA et le PAM pour une mise en œuvre conjointe et complémentaire, afin d’avoir un impact plus important sur les bénéficiaires au niveau des communes.

Les quatre agences ont convenu que l’approche des clubs Dimitra soit la porte d’entrée pour les activités du programme, ce qui a permis de travailler avec les hommes et les femmes, jeunes et non jeunes sur plusieurs questions du bienêtre en milieu rural en gros investissement extérieur. D’importants résultats ont été atteints par ce programme en termes d’accès à l’information et à la communication participative, d’augmentation de la production agricole par les agricultrices, d’accès aux marchés avec les produits agricoles par les femmes, d’allègement des tâches ; de la participation des femmes et des jeunes aux processus de prise de décision communautaire, le score de diversité alimentaire est passé de 3,8 à 5 en moins d’une année etc. On note également l’amélioration de la participation des femmes aux institutions rurales telles les comités de gestions des établissements scolaires, les organisations paysannes etc.

Question 3 : Quelle est la meilleure manière de générer des changements significatifs en matière de genre ?

La meilleure manière de générer des changements significatifs en matière de genre est de s’attaquer aux causes profondes de l’inégalité entre les sexes et du déni de droit avec plus d’engagement des hommes. Il est important de travailler avec les femmes, les hommes afin de transformer les normes sexo-spécifiques néfastes à l’équité et à l’égalité de genre, de transformer les attitudes et les considérations sociales qui légitiment la discrimination. Étant donné la place sociale et le rôle que les hommes jouent dans la famille et dans la société, il est important de reconstruire avec eux, une masculinité positive aux droits des femmes ; de bâtir une masculité et une féminité qui perçoivent les droits des femmes comme partie intégrante des droits humains. L’expérience du RWEE au Niger a permis une fois de plus de confirmer qu’hommes et femmes sont victimes de socialisation, qu’ils peuvent ensemble être le moteur du changement social. Il s’agit maintenant d’aller de l’avant, en mobilisant plus de ressources afin que les hommes et les femmes revoient ensemble les processus de gouvernances qui régissent les institutions, les normes qui règlementent les relations de pouvoir dans lesquelles chacune et chacun se bat pour se frayer le chemin.

[1] Etude réalisée par NEPAD dans le cadre de son Programme africain d’appui au genre, aux changements climatiques et à l’agriculture, 2012

[2] Etude réalisée par NEPAD dans le cadre de son Programme africain d’appui au genre, aux changements climatiques et à l’agriculture, 2012

CONTRIBUTION from MME HALIMATOU MOUSSA IDI /National Coordinator for Rural Women Economic Empowerment (RWEE) in Niger

Question 1: What are the main challenges rural women and girls are facing today?

In the context of Niger, factors like climate change, events related to drought, to the food and nutrition crisis, to the recurring floods, the invasion of locusts, the massive influx of refugees, create a difficult environment that threatens the livelihoods of the rural population.

Furthermore, rural women and girls have to face each morning the challenges that obstruct their well-being and their socio-economic potential (4 out of 5 poor people are female). These restrictions include:

  •  Illiteracy (the rate of literacy for people aged 15 and over (that is they can read and write) is 19.1% (male: 27.3%; female: 11% (2015). Their low rate of literacy and schooling limits their knowledge and the much needed skills in order to carry out their productive, economic and political activities.
  • The very high fertility rate (fertility index is 7.6 children per woman (EDSN, 2012).
  • The limited access to productive resources (land, agricultural inputs, funding and credit, information and technology services): A study carried out by NEPAD [New Partenership for Africa´s Development][1]in connection with access to services for dissemination, training/information/communication, for promotion of technology and literacy have shown that: 76% of the people who do not have access to a service are women; only 34.7% of women have access to dissemination services; 38% of women have access to seeds; 32.5% of women have access to fertilizers; 22.8% of people who benefit from a rural credit are women; 88.5% of land belongs to men. The other 11.5% are owned jointly by husband and wife or by the wife and children.
  • Women are overloaded by domestic work: (preparation of meals, the chore of collecting water and firewood, the transformation of agricultural products, farming and the education of children), taking care of the ill and elderly, the burden of traditions and customs, the confusion maintained on the precepts of Islam (faulty interpretation), the community rules and women´s rights.
  • The poor access of rural women to public services, to social security, to innovations, to local and national markets and to institutions owing to deep rooted cultural norms and security risks.
  • The difficult access to land ownership and to the means of production, pushes rural youth (girls and boys) away from the world of agriculture; very  little professional training is accessible there and the opportunities to start up on their own are limited because access to credit is not available. Men decide on household expenditure, on the sale of animals (84.7% of cases) and the management of crops (84.1%). In the private and public spheres, men personify authority, fix the rules, the code of conduct and undertake the control of family and community assets. That contrasts strongly with the enormous involvement of women in agricultural activities and the generation of income. For decisions on agricultural products, 30.3% of women decide, 29.6% for livestock products and for access to credit (20%)[2].
  • Access to information systems, which could allow rural women to increase their knowledge and exchange their knowhow and practices, is very restricted. The lack of access and control of goods and services; social, economic and political inequalities between men and women,  jeopardize food security, hold back economic growth, reduce progress in all areas and limit the undertaking of possible changes by the rural population themselves in general and by rural women in particular.

Question 2: Are we using the right approaches and policies to close the gender gap?

In terms of approaches, I would like to underline the importance of acting in partnership at all levels (partnership among development agencies and partnership between men and women for shared wellbeing), because the challenges are many and no actor working alone can overcome them by themselves.

This brings me to share the experience of the colaborative program « Accelerating Progress towards the Economic Empowerment of Rural Women» RWEE in Niger. It aims to support the effort of the Nigerien government for the empowerment of women and food security through a multisectorial approach based on the reinforcement of the synergy between UN Women, FAO, IFAD and WFP for joint and complementary implementation, in order to have a greater impact on the beneficiaries at the communal level.

The four agencies have agreed that the approach of the Dimitra clubs should be the entry point for the activities of the program, which has made it possible to work with men and women, young and not so young on several questions of wellbeing in the rural areas with major external investment. Important results were achieved by this program in terms of access to information and participative communication, increase of agricultural production by farming women, access of women to agricultural products markets, easing of taxes; participation of women and young people in the community decision process, and the rate of food diversity has moved from 3.8 to 5 in less than a year, etc.  One notes also the improved participation of women in rural institutions such as management committees of schools, farmers’ organizations, etc.

Question 3: How can we best achieve gender transformative impacts?

The best way to generate significant changes in terms of gender is to tackle the deep causes of inequality between the sexes and of the denial of rights with more involvement of men. It is important to work with women and men so as to transform the sex-specific norms damaging to equity and to gender equality, to transform the attitudes and social considerations that legitimize discrimination. Given the social status and role that men fulfil in the family and society, it is important to rebuild with them a masculinity positive towards the rights of women; to build a masculinity and femininity that perceives women´s rights as an integral part of human rights. The RWEE experience in Niger has allowed once again to confirm that men and women are the victims of their social upbringing, that they can together be the drivers of social change. Now it is a question of forging ahead, by mobilizing more resources so that men and women together revise the processes of governance that rule the institutions, the norms that determine the balances of power in the midst of which each one is trying to make their way.

[1] Study carried out by NEPAD in the framework of its program Gender, Climate Change and Agriculture Support Project, 2012

[2] Study carried out by NEPAD in the framework of its program Gender, Climate Change and Agriculture Support Project, 2012