Foro Global sobre Seguridad Alimentaria y Nutrición (Foro FSN)

Note de l’ORU-FOGAR et de son Core group sécurité alimentaire, présidé par la Région Basse-Normandie (France) avec la participation de son comité scientifique : Philippe Godin (Agroéconomiste), Hélène Hollard (Réseaux des agroécologistes), Jean-Paul Pellissier et Julien Frayssignes (CIHEAM-IAMM)

Le Core group sécurité alimentaire de l’Organisation des Régions Unies/FOGAR (Forum Global des Associations de Régions) recense depuis 2010 les actions menées par ses Régions membres, visant à lutter pour la sécurité alimentaire, au travers de coopérations régionales. Des exemples concrets de financements innovants visant la pérennité des projets grâce à la responsabilisation et l’augmentation de l’indépendance financière des acteurs sont présentés ci-après.

1/ La formation en alternance

Le Centre de formation de techniciens-animateurs ruraux (CEFTAR) de Tamatave à Madagascar a été initié par le biais d’une coopération entre la Région Basse-Normandie en France et la Région Atsinanana à Madagascar, avec une mise en œuvre par les Maisons Familiales Rurales (MFR). Il s’agit d’un centre de formation en alternance, accueillant des stagiaires souhaitant devenir techniciens formateurs agricoles.

Sources de financement et cibles

Les entreprises et associations de la Région Atsinanana financent la formation de leurs employés stagiaires. A Madagascar, convaincre un professionnel d’investir dans l’humain par le biais de la formation, est un concept innovant. Des salariés de différents organismes peuvent être intégrés à la formation. Une bourse d’étude est apportée par la Région pour soutenir le projet et encourager les entreprises à financer la formation de leurs salariés.

Outils et mécanismes de financements innovants

A terme, la formation en alternance permettra de financer la formation (enseignants, hébergement et nourriture) sans financements extérieurs. Ce mécanisme favorise l’ancrage sur le territoire et vise à aller vers une autonomie croissante du centre de formation.

La formation apparait être un moyen de démultiplier les bonnes pratiques par la formation de formateurs. Les stagiaires gardent le lien avec l’entreprise, peuvent échanger sur des sujets concrets et des problématiques du territoire. Cette formation agit de manière pérenne sur le territoire. Les fonds mobilisés pour former les techniciens impactent directement le territoire.

Par ailleurs, les exportateurs font des marges importantes sur les produits de rente (vanille, girofle …). Des taxes pourraient être prélevées par l’interprofession sur la filière pour permettre sa structuration. La création d’un fonds d’investissement de l’interprofession permettrait de cibler les investissements selon les besoins (aménagement rural, formation …). Ces besoins pourraient être recensés par un observatoire.

2/ Des pratiques agricoles novatrices

Le programme pisciculture paysanne a été initié par le biais d’une coopération entre la Région Basse-Normandie en France et la Région Atsinanana à Madagascar, avec une mise en œuvre par l’APDRA (Association Pisciculture et Développement Rural en Afrique tropicale humide) Pisciculture paysanne. Il s’agit de proposer un appui technique aux paysans souhaitant construire un étang-barrage permettant l’élevage de poissons.

Sources de financement et cibles

Le programme est financé par l’Union européenne et les Régions partenaires. Il permet la mise en place d’un système innovant de pisciculture, adapté au territoire, comme expliqué ci-dessous.

Outils et mécanismes de financements innovants

Les petits paysans, propriétaires de terres adaptées à la mise en place de ce système « étang-barrage », peuvent bénéficier de l’appui technique de techniciens piscicoles. La construction de l’étang-barrage nécessite du matériel rudimentaire, et peut donc être conçu par la population locale.

Une des conditions pour bénéficier de l’appui est que le paysan soit entouré d’un groupe (villageois, famille …). L’approche groupe favorise l’appropriation des pratiques techniques et la réalisation des travaux par la mutualisation de la main d’œuvre, et également la mise en commun du matériel et des intrants (alevins). Cela permet une économie d’échelle et une réduction des contraintes quotidiennes. Un pisciculteur isolé fait difficilement face aux imprévus (aléas climatiques ou autres).

Le financement de l’étang-barrage est à la charge du paysan ; cela permet d’impliquer les acteurs locaux et d’intégrer l’action sur le territoire. Seul l’appui technique est financé par des sources extérieures et apporté aux paysans pendant les années de mise en place du projet. Ce mécanisme de financement vise à terme l’autonomie des propriétaires d’étang-barrages.

Un fonds de réserve provisoire a été mis en place par l’APDRA, le temps d’adapter le système d’élevage aux conditions géo-climatiques de la zone. Ce fonds de réserve était prévu pour dédommager le paysan dans le cas d’un imprévu, le temps de la phase d’adaptation du projet sur le sol malgache.

L’objectif de ces actions est qu’elles puissent être financées à terme sans moyens extérieurs.

L’agroécologie, par son approche globale, prend en compte les aspects environnementaux, sociaux, culturels et économiques. Elle permet aux personnes d’être autonomes et de réduire fortement l’utilisation des intrants industriels, que ce soit pour la conservation des sols, la gestion de la matière organique et de la fertilité, la santé des plantes, les semences, la gestion de l’eau… Ce renforcement de l’autonomie financière s’acquiert grâce à des pratiques comme l’agroforesterie, le compostage, la couverture des sols. Ces techniques sont performantes sur le plan agronomique, mais aussi sur le plan économique et humain, et pour la nature, par exemple pour maintenir la biodiversité. Tous ces aspects font de l’agroécologie une pratique hautement innovante, y compris d’un point de vue économique.

3/ La valorisation territoriale

Deux concepts issus du projet "Novagrimed – Innovations Agricoles en Territoires Méditerranéens" peuvent constituer une base de réflexion sur les financements innovants (partenaires : IAMM, Régions de France, Italie, Grèce et Espagne) : le concept de District Agroénergétique Durable et celui de Bio-Itinéraire.

Sources de financement et cibles

Le travail mené sur la thématique agroénergétique a permis d'aboutir à l'élaboration d'un document stratégique et méthodologique relatif à la définition et à la mise en œuvre d'une démarche de production et de distribution d'énergie à l'échelle locale à partir de l'activité agricole (biocarburants, biomasse, effluents d'élevage…). A partir d'une coopération renforcée entre les composantes d'un territoire (agriculteurs, entreprises, autorités locales, organismes de formation et de R&D, association, société civile), l’initiative vise à répondre aux problèmes fréquemment posés par un développement trop important des cultures agroénergétiques (concurrence avec les cultures alimentaires, intensification). Le district agroénergétique apparaît comme un outil de référence innovant.

Inscrit dans une logique de développement intégré, le concept de "Bio-Itinéraire" est fondé sur une mise en réseau de différents partenaires sur un territoire donné : agriculteurs, professionnels du tourisme, autorités locales, artisans, associations… Il s'agit de valoriser à des fins pédagogiques l'ensemble des ressources d'un territoire : paysages, pratiques agricoles, savoir-faire, patrimoine culturel, ressources naturelles, de créer une dynamique de développement à l'échelle locale et de mettre en place un outil de concertation et de médiation entre le monde rural et les consommateurs urbains.

Outils et mécanismes de financements innovants

Ces concepts renvoient à des politiques intégrées vouées à s'adapter à des contextes territoriaux différents (notion de "sur-mesure" plutôt que de "prêt-à-porter"). Ils nécessitent de ce fait des modes de financement innovants relevant eux aussi d'une logique territorialisée. La valorisation de ressources spécifiques, c’est-à-dire non reproductibles, peut par exemple être identifiée. Dans un contexte de concurrence accrue, les territoires ruraux ne peuvent fonder leur stratégie uniquement sur une logique de coûts, mais doivent également mettre l’accent sur des démarches de différenciation.

Il pourrait être développé une approche sur la question du financement des politiques territorialisées "globales" ou "intégrées" visant à renforcer, directement ou indirectement, la sécurité alimentaire des populations résidentes.

Acteurs

Les Régions, par leur rôle d’« ensemblier » et une approche territoriale du développement, permettent la mise en relation d’acteurs du territoire pour la mise en place d’actions ancrées sur le territoire et répondant aux besoins concrets des populations.

Le Core group « sécurité alimentaire » souligne la nécessité de prendre en compte l’ensemble des acteurs tout au long de la chaîne alimentaire, de la production à la consommation, voire même à la gestion des déchets : la réduction des pertes et des gaspillages est source d’économie et de financement pour les paysans. L’ingénierie est à imaginer concrètement au cas par cas avec les différents acteurs, au niveau de la Région.

L’approche territoriale du développement vise à construire avec les acteurs concernés des programmes intégrés au territoire, où s’impliquent tous les acteurs de la chaine (producteurs, usagers, services publics, secteur privé …). Cette approche permet de cibler au plus juste les mécanismes de financement. Par conséquent, l’aide est utilisée de façon optimale et les pertes financières sont limitées.