Commentaires sur CIN2

·         Commentaires généraux

Ce document représente un plan d’action judicieux et réfléchi, qui aborde les approches nécessaires dans différents secteurs et qui promeut l’action intégrée. Des efforts ont été déployés pour renforcer les dimensions santé du cadre d’action et pour tenir davantage compte des troubles nutritionnels de surcharge. On peut toutefois regretter qu’il reste très théorique, ne proposant pas de solutions stratégiques aux défis actuels impérieux pour la nutrition et la santé que représentent les changements climatiques, l’instabilité politique, la prise en mains des systèmes alimentaires mondiaux par les transnationales laissant peu de pouvoir aux états et les inégalités socio-économiques qui ne cessent de se creuser notamment en raison de l’écart croissant entre la rémunération du capital et la rémunération du travail. Nous souhaitons suggérer par ailleurs de ne pas négliger l’activité physique pour la prévention des troubles de surcharge, pour l’instant peu présente dans le cadre d’action. Enfin, le développement des compétences professionnelles nécessaires au niveau des pays pour la prévention et le contrôle des troubles de carence comme de surcharge nutritionnelle et le financement des formations mériterait d’être davantage en exergue dans les actions prioritaires plutôt que d’être relégué à une phrase ou deux  avec le niveau international. Il nous semble que ceci devrait être avec la gouvernance de la nutrition.

·         Commentaires spécifiques

1.      Le cadre d’action considère les différentes formes de malnutrition – dénutrition et « surnutrition » et ceci est précisé très tôt dans le document, sauf que par la suite, la malnutrition est synonyme de dénutrition. Il faudrait un peu de cohérence et un terme comme « dysnutrition » permettrait plus facilement de recouvrir tant les « malnutritions » (carences) que les troubles de surcharge.

2.      Sous « Environnement favorable » (2.1), il ne faudrait surtout pas oublier, outre l’environnement alimentaire et socio-économico-politique l’environnement sanitaire (assainissement, hygiène, accès aux soins) qui influence tellement l’état nutritionnel, même si la dimension sanitaire est traitée plus loin

3.      Sous « Gouvernance » (2.2), on revient encore avec la proposition de structures intersectorielles comme mécanisme approprié. Mais ceci est répété depuis des décennies, sans qu’on puisse démontrer, exemples à l’appui, que de telles structures peuvent être effectives. On a aussi oublié le développement des compétences professionnelles en nutrition, surtout en nutrition de santé publique où les besoins sont criants

4.      Sous « Systèmes alimentaires » (3) :

a.       Nous approuvons que soit rappelé que l’approche doit être intégrée et que les denrées animales ont une valeur santé

b.      Mais il n’est aucunement question du rôle parfois démesuré des transnationales sur les systèmes alimentaires, ce qui a pour effet de fragiliser les systèmes alimentaires locaux et d’ouvrir à voie à des choix qui ne sont pas nécessairement favorables aux populations locales, comme les cultures transgéniques

c.       Au lieu d’aliments « très élaborés », il vaudrait mieux les aliments « ultra-transformés »

d.      Il manque aux actions prioritaires l’importante analyse de l’impact de la mondialisation et de la libéralisation du commerce sur les systèmes alimentaires locaux et la consommation,  de manière à apporter des correctifs appropriés dans la mesure du possible.

5.      Sous « Environnement alimentaire » :

a.       Pour promouvoir une alimentation saine et encourager des choix alimentaires sains, des recommandations ou guide alimentaires sont un outil précieux, préconisé dans d’autres documents de lutte contre les malnutritions, surtout les troubles de surcharge. Cette action semble omise ici.

b.      Lorsqu’il est question de bio-fortification, il n’est jamais précisé si c’est par la sélection naturelle ou le génie génétique, ce qui devrait être précisé.

6.      Sous « Interventions performantes en nutrition » (3.3.1) :

a.       Il nous semblerait important d’insister sur l’intégration souhaitable des actions de nutrition ciblant les mères et les enfants (pour lutter contre la dénutrition) et de celles qui visent la lutte contre les troubles de surcharge et qui concernent généralement les adultes. Ces actions sont rarement reliées dans les services de santé

b.      De même, il est surtout question ici de dénutrition des jeunes enfants et des mères; les actions de lutte contre les troubles nutritionnels de surcharge et la prise en charge nutritionnelle de différentes pathologies afin de préserver un bon état nutritionnel chez les malades sont à peine évoquées

c.       Il faudrait remplacer « dépérissement » par émaciation, terme consacré

d.      Parmi les actions prioritaires pour lutter contre l’anémie, on retrouve l’éducation nutritionnelle à l’école et l’offre d’aliments sains au niveau scolaire et préscolaire. Il nous semble que l’intervention nutritionnelle et sanitaire à l’école mériterait une place privilégiée plutôt que d’être reléguée sous « lutte contre l’anémie »

e.       On parle maintenant d’allaitement « naturel » plutôt que « maternel »? Pourquoi ce changement?

7.      Mécanismes de suivi et de reddition des comptes : ce cadre d’action semble dans un vacuum. On ne perçoit pas son articulation avec les multiples autres plans que les pays ont déjà développé, souvent d’ailleurs à l’incitation de structures internationales. Il n’est pas non plus question de l’intégration de ce cadre avec d’autres initiatives internationales, telles que SUN et REACH, pour ne citer que celles-là.