Téra, Niger - "Au cours des dix dernières années, nous avons perdu un tiers de nos champs à cause des eaux de ruissellement. Aujourd'hui, nous ne pouvons plus vivre de nos terres", déclare Hassane Abdoulaye de Téra, une ville de 190 km au nord-ouest de Niamey au Niger.

Les choses ont commencé à changer lorsque les agriculteurs des communautés de Téra ont été formés à la restauration des terres dégradées. En 2014 et 2015, ils ont renforcé leurs connaissances en collection de semences forestières, en production et plantation de semences d'espèces fourragères locales ligneuses et herbacées, ainsi qu’en semis direct. Dix agriculteurs sont devenus de véritables «techniciens villageois» et ont commencé à produire des plants, à récolter des semences forestières et à préparer leurs terres à la restauration à l'aide d'une technique traditionnelle de récupération de l'eau de pluie connue sous le nom de demi-lunes. Ces techniciens ont commencé à gagner de l'argent en vendant des semences à des organisations non-gouvernementales, des associations et des institutions ayant besoin de semences forestières de qualité pour leurs propres interventions de restauration.

Les techniciens villageois se sont également organisés en comités de gestion villageois pour s’occuper des sites restaurés dans 10 villages et ont finalement créé une union appelée Toune-Bonsé Sadjo Ma Zada (en haoussa) qui signifie « Agissons pour la régénération des terres dégradées ». Depuis ses débuts, l'Union qui réunit 446 agriculteurs a connu une évolution rapide de ses activités de collecte, de traitement, de vente de semences forestières de qualité et d'entretien des terres restaurées. Aujourd'hui, l’Union vend des semences forestières au-delà des frontières du Niger.

"Entre 2016 et 2019, nous avons vendu environ 18 500 kg de semences de qualité de plus de 20 espèces forestières locales au Niger, ainsi que dans des pays voisins comme le Nigeria, le Burkina Faso et le Tchad", a déclaré Moumouni Nouhoun, président de l'Union. "Ces ventes représentent un chiffre d'affaires de 83 250 000 FCFA ».

Ce montant, équivalent à 140 700 USD, constitue une contribution réelle aux moyens de subsistance des familles rurales dans un pays dont le salaire minimum mensuel est d’environ 60 USD. "La vente de semences nous a permis de commencer d’autres activités génératrices de revenus, d’éduquer nos enfants et de mieux prendre soin de nos familles ", explique Zeynabou Mounkeyla, trésorière de l’union.

En cinq ans, Action contre la désertification, en appui à la mise en œuvre de la Grande Muraille Verte, a restauré plus de 13 000 hectares de terres dégradées dans des systèmes agro-sylvo-pastoraux, produit plus de 50 tonnes de semences forestières utilisées pour les ensemencements directs et a atteint 27 540 bénéficiaires au Niger.

Pour l'union de Téra, l'avenir est dans la restauration des terres. Elle entend continuer à mobiliser et conserver les semences, et souhaite devenir une entreprise forestière villageoise. La première étape a été franchie avec la construction d’un entrepôt pour le stockage des semences. "Nous sommes la preuve qu'il est possible d'être autosuffisants en exploitant de manière durable les ressources de notre environnement", a déclaré Adiza Mounkaila, membre du bureau de l'Union. "Nous continuerons à produire et à vendre ces semences afin de générer des revenus pour notre communauté et surtout pour sauver nos terres".