Le Swaziland cherche à revitaliser son secteur agricole

Une initiative UE/FAO soutenue par le gouvernement aide les petits agriculteurs à évoluer vers une agriculture commerciale.

Points clés

La grande majorité des habitants du Swaziland (1,2 million d'habitants) pratiquent une agriculture de subsistance dont ils tirent leurs moyens d’existence. Mais l’agriculture est un secteur en crise du fait de la récession économique et des récentes sécheresses liées au changement climatique. Selon les derniers chiffres de la faim publiés par la FAO, une personne sur trois au Swaziland est sous-alimentée. Améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition des communautés vulnérables et aider à transformer l’agriculture en un secteur commercial dynamique sont des objectifs clés du Projet de développement agricole du Swaziland (SADP), un programme quinquennal lancé par le gouvernement avec le concours de l'UE et de la FAO. Le programme a aidé plus de 20 000 petits agriculteurs à produire davantage de nourriture de meilleure qualité et à établir des liens avec de nouveaux marchés. Par ailleurs, le SADP a également axé ses efforts sur des travaux de réhabilitation et de construction dans le secteur de l'élevage, les infrastructures hydriques et les services publics. Dans le cadre du programme, 800 jardins potagers ont été mis en place dans les cours intérieures des habitations des ménages vulnérables, et 60 groupes de jeunes ont été établis, permettant ainsi d’atteindre 2 250 jeunes.

L'activité agricole a diminué au Swaziland ces vingt dernières années. Cette évolution s’explique en grande partie par les sécheresses liées au changement climatique qui ont récemment frappé le pays. Plus de 70 pour cent de la population totale du pays (un peu plus d'un million de personnes) dépendent de l'agriculture de subsistance, et dans les conditions actuelles, nombre d’entre eux survivent avec seulement un dollar par jour.

Selon les données les plus récentes de la FAO concernant la faim, un individu sur trois au Swaziland est sous-alimenté.

Face à cette situation, le gouvernement, avec le concours de l'UE et de la FAO, a lancé le Projet de développement agricole du Swaziland (SADP). Cette initiative publique vise à améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition des ménages ruraux vulnérables et à revitaliser l’agriculture, pour en faire un secteur commercial dynamique. Au bout de cinq années de mise en œuvre du programme, l'agriculture est en bonne voie pour devenir l’un des piliers du développement du Swaziland.

Commencer par les jeunes
Au cours de la phase de démarrage, le SADP a ciblé les catégories les plus vulnérables, à savoir les jeunes et les personnes âgées. Plus de 800 jardins potagers ont été créés dans les cours intérieures des habitations des ménages ruraux pauvres, leur permettant ainsi de cultiver des légumes pour leur propre consommation ou pour les vendre au sein de leur communauté. Soixante groupes de jeunes ont en outre été créés. Les groupes de jeunes (soit 2 250 personnes) ont reçu des fonds pour créer de petites entreprises, notamment d’aviculture, d’élevage porcin ou de production maraichère et de culture de plein champ. En juin 2012, l'un des groupes a réalisé un projet de production avicole, après avoir bénéficié d’une formation en matière d’élevage de poulets et de reconnaissance des maladies. Au cours de leur première année d'activité, les membres du groupe ont vendu 1 200 poulets et se sont partagés les bénéfices. Le programme a également mis en place le système d’identification et de traçabilité des animaux d’élevage au Swaziland (SLITS), en vue de garantir la traçabilité de toutes les bêtes du pays, tout au long de leur vie. 

Tout repose sur les petits exploitants
Le SADP a également commencé à progressivement sensibiliser les petits agriculteurs aux bonnes pratiques agricoles, leur permettant ainsi de produire plus et mieux. Plus de 20 000 agriculteurs ont été formés à des pratiques telles que l'agriculture de conservation, l'agroforesterie et la multiplication des semences qui préservent l'environnement et réduisent la pression exercée sur les ressources naturelles limitées.

Le manque d'accès à l'eau est l'un des principaux défis auxquels les agriculteurs sont confrontés. Pour résoudre ce problème, le SADP a supervisé la construction d'un barrage de terre, de deux déversoirs et d’un puits artésien, ainsi que la réhabilitation de deux autres barrages en terre et le développement de cinq projets d'irrigation. L’un des barrages, situé dans le village de Mayandzeni, a longtemps souffert d'un manque d'entretien, qui avait réduit son potentiel d'irrigation. Depuis sa remise en état, 63 agriculteurs se sont regroupés pour gérer l'eau du barrage et irriguer leurs champs.

«Grâce à un débit constant d'eau, les agriculteurs ne sont plus tributaires des précipitations pour faire pousser leurs produits», déclare Makhosini Khosa, qui a dirigé les travaux d'infrastructure hydrique pour le compte du gouvernement. «Cette étape est essentielle si l’on veut pouvoir commercialiser la production».

S’orienter vers la commercialisation
L'un des objectifs clés du programme était d'aider les petits exploitants agricoles à abandonner l'agriculture de subsistance pour évoluer vers une agriculture commerciale. À cette fin, un fonds d'investissement, destiné à soutenir la commercialisation et doté de 1 million d’euros, a été mis en place, pour renforcer le lien entre les agriculteurs et les marchés. Eswatini Kitchen, une petite usine de transformation alimentaire dans la banlieue de Mazini, la capitale économique du Swaziland, a bénéficié de l’aide du fonds. Eswatini Kitchen produit des confitures, des sauces et des chutneys, fabriqués essentiellement à partir de fruits et de légumes provenant de petits exploitants agricoles et vendus dans le monde entier à travers les circuits du commerce équitable. L'usine constitue une source importante de revenus pour les petits agriculteurs, qui rencontrent souvent des difficultés pour transporter leurs produits vers les marchés et concurrencer les prix pratiqués par l'Afrique du Sud voisine.

Sipho Matisa est l’un de ces agriculteurs, un fonctionnaire à la retraite qui doit faire vivre une famille de 18 personnes. Il cultive du piment de Cayenne qui est ensuite utilisé pour préparer le Swazi Fire, une célèbre sauce piquante. Il préfère vendre à Eswatini Kitchen car l’entreprise lui achète l’ensemble de sa récolte en une seule fois. Sipho est très content de savoir que son piment, une fois transformé en Swazi Fire, est vendu à travers le monde. «J'ai la responsabilité de produire la meilleure qualité possible.»

Et après
«Le Swaziland peut y parvenir», indique Nehru Essomba, conseiller technique en chef de la FAO auprès du SADP. «Le pays possède un potentiel d'exportation, dans l'élevage par exemple. Ou encore dans les cultures de niche. Cela demande juste un peu de réflexion».

Alors que le programme entre dans sa phase finale, des plans sont en cours d'élaboration pour l'avenir. Le gouvernement, avec le concours de partenaires régionaux, élabore actuellement un plan décennal d'investissement agricole, qui vise un taux moyen de croissance agricole de 6 pour cent par an d'ici 2015. Le plan est conforme aux objectifs du PDDAA, la principale initiative de développement agricole en Afrique. Les gouvernements qui ont adhéré à cette initiative pilotée par les États africains ont convenu d'accroître les dépenses publiques en faveur de l'agriculture et de consacrer au moins 10 pour cent de leurs budgets nationaux au secteur agricole. Au Swaziland, un tel changement pourrait bien faire de l'agriculture le moteur du développement économique du pays.

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