Maroc

Discours du Représentant de la FAO au Maroc à l’occasion de la Conférence de la Green Growth Academy sous le thème « Agriculture et Pêche : Créer les conditions de la durabilité »

15/07/2016

, Agadir -  Monsieur Michael George Hage Représentant de la FAO au Maroc a prononcé son discours lors de la Conférence de la Green Growth Academy Spéciale Climat sous le thème « Agriculture et Pêche : créer les conditions de la durabilité »

1. Permettez-moi tout d’abord de remercier, au nom de la FAO, la Green Growth Academy pour l’organisation de cet événement important sur un sujet de préoccupation majeur pour des millions de personnes, au Maroc et de par le monde : la durabilité des secteurs de l’agriculture et de la pêche.

2. C’est la préoccupation centrale de l’Organisation pour l’Agriculture et l’Alimentation. Depuis 2011 et son rapport « Save and Grow », Produire plus avec moins, la FAO promeut un nouveau modèle de production agricole intensive alliant à la fois productivité et durabilité environnementale, en cherchant à préserver et à valoriser les services écosystémiques dans les systèmes de production agricole.

3. L’intensification agricole est une préoccupation historique et naturelle liée aux systèmes de production agricole. De tous temps, les hommes et les femmes ont cherché à améliorer la productivité agricole pour satisfaire des besoins alimentaires et nutritionnels croissants, notamment en sélectionnant et en cultivant des espèces végétales offrant de meilleurs rendements et une plus grande résistance aux aléas climatiques et aux maladies.

4. L'intensification de l'agriculture au XXe siècle, qui recourt à la biochimie et à l'ingénierie modernes, a représenté un changement de paradigme par rapport aux systèmes agricoles traditionnels, qui s'appuyaient en grande partie sur la gestion des ressources naturelles et des services écosystémiques.

5. La FAO a constaté qu’au de ces cinquante dernières années, une agriculture basée sur l’utilisation intensive d’intrants avait permis d’accroître la production mondiale d’aliments et la consommation alimentaire moyenne par habitant. Ce faisant, toutefois, ce type d’agriculture a entraîné la surexploitation de bon nombre d’écosystèmes, mettant en péril la productivité future, et provoqué une augmentation des émissions des gaz à effet de serre responsables du changement climatique. Elle n’a en outre pas permis de réduire le nombre de personnes qui souffrent de faim chronique.

6. Il en va de même pour le secteur de la pêche et de l’aquaculture, dont la durabilité est confrontée à d’importantes menaces telles que la pollution, la dégradation des habitats, la surpêche et les pratiques préjudiciables.

7. Nous devons faire en sorte d’asseoir la production et la consommation alimentaires sur une base véritablement durable. D’ici à 2050, d’après les projections, la population de la planète passera de 7 milliards à 9,2 milliards d’habitants, ce qui exigera une augmentation de la production alimentaire mondiale de l’ordre de 60 pour cent si les tendances actuelles se confirment.

8. Étant donné la diminution des surfaces de terre inutilisées présentant un bon potentiel agricole, il faudra, pour répondre à cette demande, accroître sans cesse le rendement des cultures et, ce, dans un contexte de concurrence de plus en plus féroce autour des ressources foncières et hydriques, et de lutte contre les effets du changement climatique.

9. Il est donc aujourd’hui nécessaire de produire plus avec moins, en préservant et en valorisant les services écosystémiques ; c’est un premier message important que la FAO tient à adresser ici.

10. A cela s’ajoute une menace additionnelle et sans précédent sur les systèmes de production agricole et halieutique : celle du changement climatique. Les impacts physiques qui lui sont associés, tels que les évènements extrêmes par exemple, ont des répercussions sur les écosystèmes, donc les agro-systèmes, puis sur les systèmes de production agricole, sur les chaînes de valeur, et sur les revenus et le commerce, avec des impacts finaux à la fois économiques et sociaux sur les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Cela vaut également pour le secteur des pêches et de l’aquaculture, affecté par l’acidification des océans, qui est une conséquence directe de l’augmentation du niveau de CO2 dans l’atmosphère.

11. C’est que la FAO dénomme les impacts en cascade du changement climatique sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Et c’est l’objet du second message que je souhaite porter ici, et qui est celui que la FAO portera à l’occasion de la Journée Mondiale pour l’Alimentation : le climat change, et l’agriculture et l’alimentation doivent également changer.

12. La FAO a déjà pu constater comment les pêcheries côtières sont souvent utilisées en tant que filet social de sécurité en période de crise, y compris climatique. De même l’aquaculture, lorsqu’elle est bien planifiée et gérée, offre un grand potentiel de croissance durable dans le contexte du changement climatique. Elle peut non seulement fournir une alimentation saine et nutritive, pour une empreinte carbone relativement faible, mais aussi fournir un système de production alimentaire alternatif dans les zones qui ne sont plus appropriées pour la production végétale dû à la montée du niveau de la mer.

13. C’est le troisième message que je souhaite adresser, et que la FAO a promu lors de la COP21 et promouvra encore lors de la COP22 à travers son initiative « Blue Growth » : il faut libérer le potentiel de « croissance bleue » des systèmes aquatiques, en particulier face au changement climatique.

14. Je voudrai enfin rappeler avec force l’importance de l’accès à l’eau et de sa gestion durable, à la fois pour asseoir la durabilité des systèmes de production agricole, et pour faire face aux impacts du changement climatique. Une rareté de l’eau accrue dans de nombreuses régions du monde pose un défi majeur en terme d’adaptation au changement climatique. Cela concerne l’ensemble des secteurs agricoles, y compris celui de la pêche continentale et de l’aquaculture, qui dépendent des apports quantitatifs et qualitatifs en eau douce.

15. C’est là le quatrième et dernier message que je souhaite adresser ici : une attention toute particulière doit être portée à la problématique de la rareté de l’eau (water scarcity), au même titre que l’on porte aujourd’hui une attention particulière à la problématique de la dégradation des terres et de la désertification.

16. Sur chacun de ces messages, la FAO s’est engagée à appuyer le Ministère de l’Agriculture et de la Pêche Maritime du Royaume du Maroc dans le développement de l’Initiative Africaine Triple A pour l’Adaptation de l’Agriculture Africaine.

17. Au mois de novembre se tiendra à Marrakech la vingt-deuxième Conférence des Parties à la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques. Je réitère également l’engagement de la FAO à pleinement accompagner et appuyer le Royaume du Maroc dans le succès de cette COP de l’Action.