Un système hybride pour le suivi et l’évaluation des écoles pratiques d’agriculture au Pakistan


Rebekah Bell, Représentante de la FAO au Pakistan (par intérim)

L’application e-FFS est un système de collecte et de gestion des données sur mobile Android élaboré, développé et géré par l’équipe de la FAO au Pakistan. ©FAO

18/03/2021

L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a créé les écoles pratiques d’agriculture en 1989, afin d’enseigner aux agriculteurs comment améliorer leurs pratiques agricoles. Les écoles pratiques d’agriculture ont été largement utilisées puisque des écoles étaient mises en place pendant toute une campagne pour que les agriculteurs participent en groupe à des activités d’apprentissage et de formation. Quand les écoles pratiques d’agriculture ont été déployées dans le monde entier, il est devenu nécessaire de s’assurer de leur qualité et de les suivre et de les évaluer efficacement, en particulier dans les zones reculées.

Où nous en étions

L’usage voulait que les formateurs des écoles pratiques d’agriculture se rendent dans les zones rurales et dispensent des séances de formation aux agricultrices et aux agriculteurs qui travaillent dans la région. Les formateurs gardaient une trace sur papier des métadonnées de la séance et présentaient des rapports indiquant les résultats quotidiens des participants. Toutefois, dans de nombreux cas, il était devenu presque impossible de suivre et d’évaluer dans quelle mesure le programme convenu était respecté lors des séances. Les formateurs sur le terrain n’arrivaient pas à collecter et gérer les données efficacement lorsqu’ils établissaient leurs rapports sur papier, prenaient note de la participation et de l’évolution de l’apprentissage, faisaient des photos et rendaient compte du déroulement des séances. Pour recueillir les informations sur les séances, ils devaient utiliser des documents papier et prendre des photos, qui étaient ensuite transférés sur ordinateur, ce qui prenait un temps considérable qui n’était pas consacré au terrain et pouvait aboutir à des divergences entre les informations sur la séance et les photos. Ce mécanisme d’établissement de rapport sur papier entraînait souvent des retards dans la collecte des données et l’enregistrement d’informations erronées sur l’apprentissage des agriculteurs.

L’application e-FFS permet de collecter sans difficultés et en temps quasi réel des données sur les interventions menées sur le terrain. ©FAO

Ce que nous avons souhaité faire

Pour résoudre ce problème, FAO Pakistan a lancé e-FFS en 2017, un système de collecte et de gestion des données sur mobile Android élaboré, développé et géré par l’équipe de la FAO au Pakistan, afin de collecter et de communiquer sans difficulté et en temps quasi réel les données sur les résultats des écoles pratiques d’agriculture. Cette idée faisait suite à deux constats: i) le Pakistan a le plus fort taux de pénétration d’Asie du Sud en matière de téléphonie mobile; ii) les systèmes de collecte, de gestion et de diffusion des données sur mobiles sont utilisés dans le monde entier par les Nations Unies, la Banque mondiale et d’autres entités pour améliorer les services de santé dans les zones reculées et la même approche a été improvisée dans le contexte de l’agriculture. Cette pratique a été mise en place pour répondre au besoin de réaliser un suivi à distance dans les zones qui n’ont pas ou presque pas Internet et où il était difficile d’obtenir des résultats précis avec les mécanismes traditionnels de suivi et de collecte des données. Le fait de pouvoir tirer parti de la forte disponibilité de téléphones Android au sein des équipes de terrain et des communautés pour enregistrer des informations en temps quasi réel, qui étaient déterminantes dans le suivi des progrès et pour les interventions en cours, a permis la création d’e-FFS.

L’application e-FFS permet de collecter sans difficultés et en temps quasi réel des données sur les interventions menées sur le terrain. L’architecture technique du système a pu être créée grâce au logiciel Open Data Kit (ODK). ODK comprend une série d’outils en accès libre initialement élaborés par l’Université de Washington avec l’aide financière de Google. Le système comporte deux composantes principales: i) une composante de téléphonie mobile, qui fonctionne avec tout type d’appareil Android; ii) une composante liée au serveur pour recevoir, stocker et gérer différents types de données. La composante de téléphonie mobile est axée sur l’application ODK collect, qui est installée sur les téléphones Android des formateurs des écoles d’agricultures de terrain. Les modèles de rapports de collecte de données qui sont intégrés aux dispositifs mobiles sont au format XML, compatible avec JavaRosa. En ce qui concerne le serveur, l’application ODK Aggregate assure la gestion des données au moyen du système principal PostgreSQL. Étant donné que l’ensemble du système est fondé sur des outils en accès libre et que tout le développement et toute la configuration ont été réalisés au moyen de capacités techniques internes, le développement du système, la formation de l’équipe et la maintenance du système n’ont eu aucun coût. Initialement, le système était hébergé sur une plateforme d’hébergement d’applications de Google. Il a ensuite été transféré sur un serveur indépendant autogéré.

Actuellement, 59 membres de l’équipe qui se trouvent dans 17 régions du Pakistan géographiquement éloignées mettent en œuvre le système hybride dans les écoles pratiques d’agriculture, afin de mieux former les agriculteurs. Les premiers résultats ont montré que 100 pour cent des données reçues étaient exactes et cohérentes. Les agriculteurs ont pu avoir accès à de meilleures technologies et de meilleures pratiques et des données concrètes permettant de réaliser des interventions ont été collectées et mises à disposition en ligne, leur accès étant restreint à toutes les parties prenantes concernées. Le fait de comprendre comment les interventions sont réellement réparties dans l’espace permet également une meilleure planification saisonnière. Grâce au balisage géographique, les responsables de la gestion du projet peuvent voir où les séances sont menées et, grâce à la prise systématique de photos, ils peuvent comprendre le processus.

Ce système apporte une solution à un problème concret auquel sont confrontées les équipes chargées de l’évaluation et du suivi, et ce dans l’ensemble des programmes de la FAO au Pakistan et ailleurs, et dispose donc d’un potentiel de reproduction très important. ©FAO

Une expérience concluante prête à être reproduite

Ce système apporte une solution à un problème concret auquel sont confrontées les équipes chargées de l’évaluation et du suivi, et ce dans l’ensemble des programmes de la FAO au Pakistan et ailleurs, et dispose donc d’un potentiel de reproduction très important. En effet, FAO Pakistan a déjà étendu cette pratique à l’échelle supérieure, c’est-à-dire au niveau national. L’une des conditions nécessaires est de disposer d’un fort taux de pénétration de la téléphonie mobile dans la communauté, taux qui est en augmentation au niveau mondial. Pour adapter ce système à d’autres domaines, il faudrait renforcer les capacités des équipes chargées de l’évaluation et du suivi et créer des tableaux de bord de suivi sur mesure qui correspondent à d’autres contextes nationaux. Le module sur les connaissances de l’application e-FFS qui est déjà disponible constitue un modèle qui permet de répondre aux besoins d’autres programmes, car il propose une solution que l’on peut adapter facilement. Ce système a été présenté à d’autres pays dans le cadre de l’atelier «Écoles pratiques d’agriculture et TIC» organisé par la Plateforme mondiale des écoles pratiques d’agriculture de la FAO.


1. No poverty, 2. Zero hunger