FAO au Sénégal

Désormais productrice et facilitatrice

Des facilitatrices forment une couche d’herbes et de feuilles sèches sur les parcelles pour garder la terre humide plus longtemps, réduire la levée des mauvaises herbes et enrichir le sol en matière organique. ©Carrefour International/Jimmy Chicaiza
12/10/2020

Des champs-écoles de productrice - genre pour renforcer la résilience face aux changements climatiques

Alimatou vit à Kaolack, région située dans le bassin arachidier, dans le centre-ouest du Sénégal. Elle se dédie à l’agriculture depuis plus de 20 ans maintenant et cette année, elle est devenue facilitatrice à travers l’initiative Champs-école des productrices - genre (CEP-G).

Alimatou a pris connaissance du travail de l’Association pour la promotion de la femme sénégalaise (APROFES) un peu avant 2005 et depuis, elle s’est impliquée en tant que technicienne agricole, dans le développement du réseau de 40 périmètres maraîchers gérés exclusivement par des femmes de la zone.

«Avant la mise en place des périmètres maraîchers, il fallait aller à des kilomètres du village, dans les marchés hebdomadaires des villes voisines pour s’approvisionner en légumes. Maintenant, les femmes membres du réseau consomment leur production et en vendent pour être un peu autonomes financièrement. Mon objectif est d'aider d’autres femmes à améliorer leurs conditions de vie et celles de leurs familles».

Cependant, les changements climatiques limitent la production et sapent graduellement les efforts d’Alimatou et de ses consœurs. «Depuis quelques année […], il arrive que les puits se tarissent à cause du manque de pluie, et surtout vers le  mois d’avril, cela nous empêche d’arroser suffisamment les jeunes pousses» souligne Absa, responsable des changements climatiques à l’APROFES. Elle ajoute que la manifestation de vents très forts fragilisent les cultures, diminuent la fertilité du sol et coincident avec l’apparition de nouvelles maladies et prédateurs.

C’est dans ce contexte qu’est née le CEP-G. Menée par Carrefour International et l’APROFES, dans le cadre du projet «Sécurité alimentaire: une agriculture adaptée (SAGA) coordonné par la FAO, l’initiative vise la formation de 23 productrices provenant de 11 périmètres maraichers et deux techniciennes de l’APROFES.

Une école de pratique sur mesure

Dans les villages de Nguindor, Thiambene et Keur Balla Hane, le CEP-G cible un équilibre dynamique entre les discussions de groupe et les contributions de personnes ressources, les savoirs locaux et d’ailleurs, la théorie et la pratique. Les facilitatrices se sont concentrées sur la mise en pratique de techniques durables et adaptées aux changements climatiques, en particulier sur des pratiques agroécologiques de gestion de l’eau et de conservation des sols, le contrôle non toxique des ravageurs et la production de plants et le reboisement.

Au-delà du CEP conventionnel, le CEP-G est particulièrement sensible à l’égalité des sexes avec un module dédié développé à partir des réalités socio-culturelles locales.

«C’est un module sur lequel nous avons non seulement travaillé avec les femmes, mais aussi avec les hommes. Dans tous les villages où nous opérons, nous collaborons avec des hommes-champions, des références, à la sensibilisation de la communauté pour montrer qu’en responsabilisant davantage les femmes, nous pouvons arriver à de meilleurs résultats au niveau des conditions de vie de la famille», précise Soguy Ndiaye, responsable de programmes à l’APROFES.

À travers des causeries et des supports dynamiques, des questions liées au genre sont discutées afin d’initier une posture réflexive sur les rapports de genre et de stimuler les prises de conscience. Ainsi les formations ont cherché à aborder quelques questions transversales: la notion de genre elle-même, le genre et le leadership, les violences basées sur le genre, le genre et l’accès aux ressources de production.

Des résultats fructueux et des perspectives de mise à l’échelle

Alimatou, qui est également en charge du suivi rapproché et de la formation continue dans les nouveaux villages membres, compte capitaliser son expérience du CEP-G dans les nouveaux périmètres qui seront créés. Elle estime à 95 pour cent réglés les problèmes que ses consœurs et elle rencontraient dans la production de tomates, d’aubergine et de gombo grâce aux études spéciales et aux études de gestion: «Nous produisons ces trois spéculations depuis 2005, mais cette année, avec le CEP-G, nous avons obtenu des rendements jamais atteints auparavant».

La stratégie originale du CEP-G a permis la formation d’un réseau de femmes ressources, intégrées et légitimes au sein de leurs communautés. Elles sont bien informées sur l’égalité des genres, elles sont spécialisées dans la diffusion de pratiques de production adaptées aux changements climatiques et elles sont fortes de compétences pédagogiques et d’animation adaptées aux réalités paysannes locales.

L’initiative CEP-G s’intègre dans le projet global SAGA qui vise le renforcement des capacités de planification de l’adaptation pour la sécurité alimentaire et la nutrition dans deux pays francophones particulièrement vulnérables au changement climatique: Haïti et le Sénégal. Au Sénégal, les activités de SAGA convergent vers le processus de plan national d’adaptation pour le secteur de l’agriculture (PNA Agriculture). Les leçons tirées du CEP-G combinées à celles des autres initiatives pilotes de renforcement des capacités de la société civile représentent une opportunité d’informer le PNA Agriculture à partir d’évidences non seulement scientifiques, mais aussi pratiques, et ainsi assurer son alignement aux besoins et intérêts des communautés rurales.

En savoir plus

Page web: Projet global SAGA

Album Photos: Champs-écoles de productrice  -Genre (CEP-G) pour renforcer la résilience des productrices de Kaolack au
Sénégal

Publication: Etat des lieux du processus PNA du Sénégal pour le secteur de l’agriculture