COMITÉ DE L'AGRICULTURE

Quinzième session

Rome, 25-29 janvier 1999, Salle Rouge

CONFÉRENCE MINISTÉRIELLE SPÉCIALE SUR L'AGRICULTURE DANS LES PETITS ÉTATS INSULAIRES EN DÉVELOPPEMENT (PEID)


Table des mati�res


I. GÉNÉRALITÉS

1. A sa vingt-neuvième session (7-18 novembre 1997), la Conférence de la FAO a souligné qu'il importe de reconnaître les contraintes particulières des petits Etats insulaires en développement (PEID) et elle a invité l'Organisation à tenir une conférence internationale sur l'agriculture dans les PEID, dans le cadre du suivi du Sommet mondial de l'alimentation (paragraphes 45 et 53, C97/REP). Pour donner suite à cette proposition et poursuivre ses efforts visant à aider les PEID à développer leurs capacités en matière d'agriculture, de forêts et de pêches, la FAO prépare actuellement une Conférence ministérielle spéciale sur l'agriculture dans les petits Etats insulaires en développement, qui se tiendra à Rome, le 12 mars 1999.

2. Les besoins particuliers des PEID ne sont pas une nouveauté pour la FAO. Elle a déjà organisé plusieurs conférences et autres manifestations régionales et internationales les années passées pour traiter ce problème, et en janvier dernier, un document intitulé "Problèmes commerciaux auxquels doivent faire face les petits Etats insulaires en développement", a été soumis au Comité des produits. En outre, dans le cadre du processus de décentralisation initié par le Directeur général, la FAO a créé deux bureaux sous-régionaux en 1996: un pour les Caraïbes, l'autre pour les îles du Pacifique. Chacun dispose d'une équipe technique chargée de veiller aux intérêts particuliers des PEID dans ces régions, en vue de renforcer les efforts participatifs et technologiques qui permettront de promouvoir le développement agricole et rural durable.

3. A sa sixième session, du 20 avril au 1er mai 1998, la Commission du développement durable a invité la communauté internationale, les institutions des Nations Unies et les organisations intergouvernementales à fournir une aide aux PEID par des initiatives pratiques et concrètes. La Commission a exhorté la communauté internationale, les institutions des Nations Unies et les organisations intergouvernementales à soutenir les initiatives régionales et à collaborer, en partenariat avec les organisations et institutions régionales, pour accélérer les préparatifs de l'examen qui aura lieu en 1999.

4. Dans sa Résolution 52/202, l'Assemblée générale des Nations Unies a réaffirmé l'engagement de la communauté internationale en faveur des PEID. Elle a recommandé que la septième session de la Commission du développement durable (CDD-7), qui se tiendra au printemps 1999, serve de réunion préparatoire à la session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies, à l'automne 1999. Cette réunion prendra la forme d'un examen et d'une évaluation approfondie sur deux jours de l'application du Programme d'action en faveur des petits Etats insulaires en développement.

5. Dans ce contexte et dans l'optique de contribuer aux futurs efforts de soutien des PEID, la Conférence ministérielle spéciale sur l'agriculture dans les petits Etats insulaires en développement souhaite mobiliser l'opinion publique et axer l'attention sur les problèmes particuliers de leur agriculture et de leur développement rural. Etant donné qu'un des objectifs spécifiques de cette Conférence est de concevoir des programmes prioritaires d'intensification de l'agriculture et de diversification de l'économie, le présent document met l'accent sur les problèmes et les contraintes rencontrés par les PEID en matière de développement du secteur agricole afin que le COAG puisse indiquer le type de programmes que la FAO devrait envisager.

II. PROBLÈMES ET CONTRAINTES DU SECTEUR AGRICOLE DANS LES PETITS PAYS INSULAIRES EN DÉVELOPPEMENT (PEID)

6. Les petits Etats insulaires en développement ont en commun certains problèmes structurels: ils sont géographiquement éloignés et dispersés; leur population et par conséquent leur marché sont restreints; leurs bases de ressources sont étroites, fragiles et aisément la proie des catastrophes naturelles; ils sont souvent tributaires pour leurs devises d'un petit nombre de produits d'exportation primaires; ils disposent de peu de capitaux d'investissement productifs locaux. Bref, leur potentiel de création de recettes est limité.

7. Ces généralités doivent toutefois être nuancées car les PEID forment un groupe divers quant à leur niveau de développement économique et leur compétitivité sur les marchés agricoles. Dans la tranche de revenus la plus élevée, avec un PIB supérieur à 6 000 dollars, on trouve: Antigua-et-Barbuda, les Bahamas, le Bahreïn, la Barbade, Chypre, la Jamaïque et Malte, où l'agriculture joue un rôle relativement faible dans l'économie, assurant moins de 10 pour cent du PIB et employant moins de 20 pour cent de la population active. A l'opposé, les pays les moins avancés (PMA) du groupe que sont: Cap-Vert, Comores, Guinée-Bissau, Haïti, Maldives, Samoa, Sao-Tomé-et-Principe, Salomon et Vanuatu, ont un revenu par habitant inférieur à 1 500 dollars et vivent de l'agriculture qui assure jusqu'à 50 pour cent du PIB et 75 pour cent des emplois.

8. L'agriculture reste la clef de voûte de l'économie dans les PEID les plus pauvres où elle représente la principale source de subsistance des habitants ainsi que la première source d'exportations. La plupart des PEID n'ont pas d'avantage comparatif évident en matière de production agricole globale, par contre plusieurs ont un avantage comparatif évident pour certains produits. Neuf PEID sont exportateurs nets de produits agricoles (Belize, Cuba, Fidji, Guyana, Maurice, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Saint-Vincent-et-les Grenadines, îles Salomon, Vanuatu). Toutefois, cette catégorie de pays est vulnérable aux fluctuations des marchés internationaux car leurs exportations agricoles sont très concentrées, avec un petit nombre de cultures commerciales sont vendues sur un nombre limité de marchés.

9. En 1994-95, la valeur totale des exportations de produits agricoles des PEID s'élevait à environ 8,2 milliards de dollars E.-U. contre 7,9 milliards de dollars E.-U. dix ans auparavant. Si la valeur des exportations de produits agricoles des PEID a peu augmenté durant la dernière décennie, celle des importations de produits agricoles a presque doublé passant de 4,3 milliards de dollars au début des années 80 à 8,0 milliards de dollars en 1994-95. Cuba a fourni à elle seule 45 pour cent de toutes les exportations de produits agricoles des PEID en 1994-95; Cuba, Chypre, la République dominicaine, Fidji, l'île Maurice, la Papouasie-Nouvelle-Guinée ont été les six principaux exportateurs qui ont assuré près de 80 pour cent du total. Les prix réels des principaux produits exportés par ces pays ont baissé dans les années 80 et sont restés stationnaires dans les années 90. L'indice des prix réels (1980 = 100) du sucre est tombé à 25 dix ans plus tard. Durant la même période, l'indice des prix réels des bananes est tombé à 92 et celui des boissons tropicales à 37. Depuis le début des années 90 la tendance à la baisse s'est ralentie, voire renversée, si bien qu'en 1998, les indices des prix réels estimatifs étaient de 23, 90 et 51 respectivement.

10. Le processus de libéralisation commercial résultant en partie de l'accord relatif à l'agriculture des négociations du Cycle d'Uruguay aura une incidence considérable pour de nombreux PEID. Cet accord réduit les droits NPF (nation la plus favorisée) pour les produits agricoles sur de nombreux marchés, ouvrant des possibilités en ce qui concerne les produits primaires et les produits transformés à valeur plus élevée, pour les producteurs pratiquant des prix concurrentiels comme c'est le cas pour beaucoup de PEID. Mais, comme la plupart des exportations agricoles des PEID bénéficient d'un accès préférentiel aux marchés des pays développés, la réduction des droits NPF risque de diminuer la marge préférentielle pour les exportations des PEID. La perte estimative de préférences tarifaires découlant de l'accord relatif à l'agriculture n'est pas importante globalement, mais certains produits et certains pays seront plus touchés que d'autres.1 Dans les PEID, les préférences commerciales pour deux produits - sucre et banane -ont une importance prépondérante. La plupart des préférences associées à ces produits n'ont été touchées que de façon négligeable par l'accord relatif à l'agriculture; Par contre, si ces produits étaient concernés à l'avenir par le processus de libéralisation, la situation pourrait changer.

11. Cet accord impose aussi des conditions d'utilisation des mesures de soutien du marché intérieur et des subventions à l'exportation dans beaucoup des principaux pays producteurs et exportateurs de produits agricoles de la zone tempérée. Cela pourrait entraîner une augmentation des cours internationaux des produits vivriers encore supérieure à celle qui aurait dû être et une réduction des disponibilités d'importations alimentaires subventionnées. Etant donné que presque tous les PEID sont importateurs nets de produits vivriers, cela aura une incidence négative sur leur balance des paiements et accroîtra le coût de la vie en général. Certains d'entre eux pourront difficilement maintenir le volume de leurs importations alimentaires sans sacrifier d'autres importations essentielles.

12. Dans le cadre des Négociations du Cycle d'Uruguay, la plupart des PEID ont choisi de "consolider" leurs tarifs pour les produits agricoles, souvent à des niveaux supérieurs à 100 pour cent, et ils ne sont pas contraints d'offrir des réductions tarifaires. Parmi cette catégorie de pays, seul Chypre s'est engagé à offrir un soutien intérieur ou des subventions à l'exportation. En dépit du faible engagement des PEID dans le cadre du Cycle d'Uruguay, plusieurs d'entre eux ont entrepris d'importantes réformes économiques depuis les années 80, soit unilatéralement, soit au titre d'accords régionaux, notamment pour la libéralisation des politiques commerciales. Tous ces pays, qu'ils aient ou non engagé des réformes générales, connaîtront des difficultés mais tireront aussi des avantages de l'évolution de l'environnement commercial mondial. Dans ce contexte, les PEID cherchent à diversifier leur économie, et surtout leur secteur agricole, pour conserver des emplois intérieurs et produire des cultures d'exportation rentables.

13. L'intégration des PEID dans l'économie mondiale est particulièrement difficile en raison des contraintes suivantes:

III. SYSTÈMES DE PRODUCTION AGRICOLE ET CONTRAINTES

14. Le secteur agricole de la plupart des PEID comprend: i) un grand nombre de petits cultivateurs traditionnels pratiquant des cultures mixtes (tubercules, légumineuses, légumes et plantes pérennes) surtout destinées à la consommation familiale. Ils ont peu accès au crédit officiel; ii) un petit nombre de petites exploitations plus commerciales ayant accès au crédit; iii) un petit nombre de grandes exploitations commerciales ayant accès au crédit commercial qui dominent le secteur agricole et assurent une grande partie des cultures d'exportation traditionnelles et iv) un petit nombre de grandes exploitations qui sont actuellement en jachères, bien que la superficie limitée de la plupart des PEID crée une grande compétitivité pour l'emploi des sols. Les contraintes ci-après sont une entrave pour presque tous ces systèmes de production.

15. Main-d'ouvre et autres intrants: depuis toujours les agriculteurs utilisent très peu d'intrants achetés pour leur système basé sur un faible apport en intrants et une faible production. Souvent ces intrants ne sont pas faciles à se procurer et leur prix est élevé par rapport à la valeur de la plupart des biens produits. Le problème de la main-d'ouvre agricole représente une contrainte durable. Il est dû à l'émigration d'une grande partie des hommes jeunes et aux possibilités d'emplois mieux rémunérés dans le secteur agricole commercial, en zone urbaine et dans le tourisme. Le pourcentage de ménages dirigés par des femmes s'est par conséquent beaucoup accru.

16. Ressources phytogénétiques: bien que la FAO ait organisé diverses opérations d'information en matière de matériel génétique et des programmes de semences, les disponibilités de matériel génétique de qualité ne permettent généralement pas de satisfaire la demande, surtout si l'on envisage une forte expansion de la production. Pour de nombreuses cultures, on doit recourir largement à des semences importées.

17. Protection des plantes et situation après la récolte: les systèmes de production horticole utilisent largement les pesticides. Toutefois, les programmes efficaces de surveillance et de contrôle des ravageurs et des pesticides sont rares. Seuls quelques PEID participent aux activités d'échange d'informations dans le cadre de l'accord sur le principe du consentement préalable en connaissance de cause (PIC). La sélection inappropriée des produits pour la récolte et les mauvaises conditions de manutention, d'empaquetage et de stockage après la récolte, par manque de connaissances et de techniques adéquates, contribuent à aggraver les pertes après récolte.

18. Elevage: La plupart des petits éleveurs ont quelques porcs et de la volaille, mais les élevages sur une échelle plus commerciale sont relativement nouveaux. L'isolement géographique et les frais de transport élevés empêchent tout élevage dépendant d'intrants importés d'être rentable. Les contraintes les plus fréquemment rencontrées sont la mauvaise nutrition, l'insuffisance des services vétérinaires, le prix élevé du fourrage acheté, la difficulté à se procurer du fourrage commercial, la mauvaise qualité des animaux reproducteurs et la médiocre gestion des fermes de sélection et des écloseries, ainsi que le manque de main-d'ouvre. Les possibilités d'expansion rapide de l'élevage sont donc limitées mais les conditions se prêtent à une substitution des importations car les frais de transport élevés jouent contre ces dernières.

19. Contraintes commerciales: le système commercial intérieur constitué essentiellement par des circuits non officiels assurés par des intermédiaires privés, est généralement peu développé. Des systèmes commerciaux efficaces sont difficiles à mettre en place en raison de l'éloignement des exploitations, de l'insuffisance de l'infrastructure et des frais de transport élevés, du manque d'investissement dans la recherche commerciale et du caractère rudimentaire des systèmes d'information commerciaux. Ni les producteurs ni les exportateurs ne maîtrisent bien les conditions du marché. Les économies d'échelle commerciales et le pouvoir de négociations des grands entrepreneurs font défaut aux petits producteurs et aux petits exportateurs.

20. Les autres contraintes graves qui entravent la promotion des exportations sont le coût élevé et l'insuffisance des systèmes de transport par air et par mer, l'absence de bonnes installations de manutention des produits frais et l'insuffisance des services de transport pour les produits non traditionnels. Les offices de commercialisation de nombreux PEID sont des organismes officiels de commercialisation. Leur but est avant tout de produire un revenu avec des activités commerciales liées aux exportations de produits agricoles traditionnels et ils n'ont pas réagi de façon compétitive face à l'augmentation du nombre d'exportateurs privés plus efficaces de produits agricoles.

21. Contraintes institutionnelles: la recherche agricole est essentiellement financée par l'Etat et manque de moyens financiers et humains. Elle est mal reliée aux services de vulgarisation, à la communauté agricole et aux autres secteurs importants comme les entreprises de transformation agricole et le tourisme. Bien peu de PEID fixent des priorités de recherche claires prenant en compte les intérêts des petits exploitants. Un effort de formation considérable du personnel local est nécessaire pour le développement de la recherche et des technologies, au niveau universitaire. L'influence des organisations d'agriculteurs reste limitée car elles sont généralement mal gérées, disposent de services de mauvaise qualité, leurs membres manquent de motivation et leurs ressources financières sont insuffisantes.

IV. STRATÉGIES FACE AUX PROBLÈMES ET AUX CONTRAINTES DU SECTEUR AGRICOLE

22. Actuellement, le secteur agricole des PEID est en phase de transition, poussé par l'évolution du marché mondial, les déséquilibres commerciaux, la quête de sécurité alimentaire accrue et la pression démographique croissante. Etant donné que les systèmes de préférences commerciales pour les exportations de cultures traditionnelles sont menacés, la diversification et l'intensification de l'agriculture peuvent contribuer efficacement à multiplier les sources de revenu des agriculteurs, ainsi qu'à les aider à atteindre l'objectif de la sécurité alimentaire accrue.

23. A court terme, les PEID chercheront à tirer le maximum de profit des possibilités actuelles d'accords commerciaux préférentiels ainsi que des ouvertures commerciales offertes par les négociations du Cycle d'Uruguay. A long terme, ils axeront leurs efforts sur l'amélioration de la position concurrentielle de leurs exportations agricoles traditionnelles et se diversifieront vers d'autres produits agricoles et produits de plus grande valeur. Obligés d'être compétitifs sur le marché mondial, les PEID tireront profit d'études approfondies sur leurs avantages comparatifs en matière de production et d'exportation de produits agricoles, notamment en ce qui concerne les possibilités de diversification vers des produits et des marchés à expansion rapide ainsi que vers des produits à haute valeur ajoutée. Ces études se baseront sur l'expérience des autres pays et chercheront à cerner les facteurs qui entravent leur compétitivité.

24. Les exportations de certains produits alimentaires bruts, certains fruits tropicaux frais à forte valeur, fruits et légumes répondant à un créneau de marché durant la saison d'hiver dans l'hémisphère Nord, et produits transformés à haute valeur ajoutée, sont extrêmement importants pour les producteurs et les transformateurs et pour l'ensemble de l'économie. Les PEID se prêtent bien à la production de fruits et légumes frais et certains sont relativement proches des marchés d'Australie, de Nouvelle-Zélande, du Japon et des Etats-Unis. Il existe également des possibilités de commerce de ces pays entre eux ou de substitution des importations. Une structure de production plus diversifiée assurerait davantage de stabilité aux recettes d'exportation et encouragerait la substitution des importations. Si un ensemble de mesures appropriées est adopté, la diversification peut contribuer à promouvoir l'agriculture durable, la bonne utilisation des ressources naturelles et la protection de l'environnement.

V. STRATÉGIES DE PRODUCTION

25. Systèmes d'exploitation durable: l'intensification de l'agriculture semble inévitable pour répondre aux besoins des marchés intérieurs et extérieurs. Toutefois, pour protéger l'écosystème fragile des PEID, des systèmes de production durable doivent être mis en place. Les cultures nouvelles et traditionnelles doivent être produites en appliquant des pratiques agricoles intégrées de conservation et d'aménagement pour parvenir à une production durable et respectueuse de l'environnement. Les méthodes suivantes méritent considération:

26. Ressources phytogénétiques (RPG): une production agricole intensifiée et diversifiée nécessite un bon programme de semences, au niveau régional ou sous-régional. Les éléments d'une telle stratégie incluent: i) le développement d'une capacité technique régionale de fourniture de semences; ii) la mise au point de politiques appropriées en matière de semences pour promouvoir les efforts nationaux et régionaux d'utilisation des RPG et de fourniture de semences et iii) l'établissement d'un réseau d'information sur le matériel génétique pour relier entre eux les îlots séparés et surmonter les déficits d'information dans la région.

27. Protection des plantes: les stratégies actuelles de lutte phytosanitaire reposant essentiellement sur l'emploi de pesticides doivent être revues. La protection intégrée (PI) est une solution de substitution efficace, équilibrée et bonne pour l'environnement. Le lutte biologique peut être efficace et relativement facile à mettre en ouvre dans les PEID, compte tenu de leur petite taille et du fait que les ravageurs ne peuvent aisément atteindre les territoires voisins. Les zones officiellement exemptes de ravageurs pourraient être mises en production afin de satisfaire les besoins particuliers de certains créneaux d'exportation.

28. Les programmes d'éradication des ravageurs doivent être sérieusement pris en considération pour les cultures importantes et pour un petit nombre de ravageurs dont le cycle de vie et le processus d'infection/infestation est simple. Les autres domaines d'intervention sont les suivants: i) harmonisation des critères en matière d'enregistrement et de législation sur les pesticides afin de créer un cadre juridique commun pour l'importation et la distribution des pesticides; ii) surveillance des résidus de pesticides dans l'environnement (par exemple dans l'eau potable) et dans les produits agricoles; iii) participation active et prise de décisions conjointes concernant la procédure PIC; iv) vérification de l'existence de pesticides obsolètes en vue de l'amélioration de leur stockage.

29. Irrigation: les exportations de cultures traditionnelles ont baissé ces dernières années et la productivité des cultures non traditionnelles est faible. Pour contrecarrer la forte baisse des recettes, l'irrigation offre une possibilité de réduire le coût unitaire de chaque culture en augmentant les rendements, en améliorant la qualité et en diversifiant la production avec de nouvelles cultures. Dans les îles où l'eau manque, des systèmes d'irrigation localisés très perfectionnés (systèmes commerciaux d'irrigation au goutte à goutte, micro-aspersion) ou peu perfectionnés (systèmes d'irrigation au goutte à goutte simples adaptés au jardinage) peuvent être introduits pour les cultures à haute valeur commerciale. Dans les zones d'altitude arides ou semi-arides, diverses techniques de récupération des eaux d'écoulement et de collecte de l'eau peuvent être introduites, surtout pour l'eau potable, pour le bétail et dans une moindre mesure pour les jardins.

30. Nouvelles cultures: de façon générale, les PEID ont un bon avantage comparatif pour la production de certains fruits tropicaux (papayes, bananes, plantains, mangues, ananas, pastèques, taro, etc.) des plantes racines et tubercules (taro, ignames, patates douces, manioc), des fruits à coque et des épices (noix de pili, noix du Brésil, terminalia, vanille, poivre noir) des légumes et des fleurs coupées. Le surcroît de production pourrait être absorbé sur le marché intérieur (tourisme local) pour répondre à une demande accrue ou pour remplacer des importations, et sur les marchés extérieurs. Pour cette dernière éventualité, il faudrait étudier les créneaux du marché pour certaines cultures qui pourraient être produites en agriculture biologique.

31. Transformation agricole: il faudrait créer des programmes visant à introduire ou développer des techniques et des connaissances appropriées en matière de transformation agricole. Les PEID doivent créer des entreprises de transformation agricole sur petite échelle, à faible coût, pour accroître la valeur et le marché potentiel de leurs produits (huiles essentielles, cultures pharmaceutiques, arômes et colorants naturels).

32. Production et santé animales: la production et la productivité des petits élevages de volaille et de porcins peuvent être améliorées par l'emploi d'aliments locaux. Les noix de coco (coprah), l'igname et le taro sont des aliments hautement énergétiques et facilement disponibles. La plupart des Etats insulaires ont un secteur de la pêche commerciale ou artisanale et sont en mesure d'effectuer l'ensilage des déchets de poisson. C'est là un complément protéinique de qualité - surtout pour les porcs et la volaille - qui vient s'ajouter aux aliments "énergétiques" locaux. Le développement des broyeurs de fourrage utilisant des ingrédients locaux pourrait encourager l'élevage local semi-intensif axé sur les marchés urbains et sur la demande du secteur touristique. L'intégration de l'élevage aux systèmes de cultures mixtes et d'arboriculture en vue d'utiliser au mieux les résidus de cultures et la végétation recouvrant les terres non cultivées, tout en aidant à raviver la fertilité du sol, est une possibilité à prendre en considération.

33. Les capacités de gestion doivent être améliorées et les fourrages et les pâturages mis en valeur pour réaliser pleinement le potentiel de races sélectionnées. Outre le lait frais, un produit plus polyvalent comme le yaourt pourrait être développé sur certains créneaux de marchés. Les services vétérinaires devraient être développés, le personnel local formé et des programmes d'éradication de certaines maladies mis en place (amblyomma dans les Caraïbes).

34. Commercialisation: la stratégie de commercialisation des exportations agricoles vers les zones à devises fortes reposera sur la commercialisation en commun, la promotion des produits visant des créneaux de marchés, la surveillance des changements nécessaires des stratégies opérationnelles lorsque les produits de base sont introduits dans les marchés primaires et la constitution d'alliances stratégiques entre les participants (alliances producteur/exportateur/importateur). Les services de commercialisation en commun avec une forte participation du secteur privé doivent être au courant des marchés disponibles. Ils doivent fixer des normes, fournir des informations et coordonner les décisions d'achat de matières premières, de transport, d'emballage, de formation, de qualité etc. pour être plus compétitifs.

35. Les offices de commercialisation actuels et les exportateurs privés peuvent être considérés comme les organismes les mieux placés pour i) fournir des renseignements et informations sur le marché ii) accorder des facilités d'exportation et iii) promouvoir les organisations d'agriculteurs (OA). La création et le renforcement des OA est un élément important pour assurer la durabilité des systèmes de production de cultures agricoles non traditionnelles. Certaines OA devraient être orientées vers le marché commercial, gérer des unités économiquement viables et jouir de la sécurité foncière.

36. Mise en valeur des ressources humaines: la communauté internationale, et notamment la FAO, doit aider les parties prenantes, dans les secteurs public et privé, des PEID à mieux comprendre leurs possibilités et leurs obligations dans le cadre du système commercial international. La diversification agricole nécessite une approche proactive, axée sur des projets multidisciplinaires, pour développer les systèmes de production et de commercialisation nécessaires pour les cultures agricoles non traditionnelles visées. Les capacités de toutes les parties prenantes (agriculteurs, exportateurs, administrateurs et vulgarisateurs) doivent être améliorées par une formation. En particulier, les vulgarisateurs doivent être recycler vers la gestion des exploitations commerciales, en veillant à accroître la productivité et améliorer la planification, par le renforcement des capacités de gestion et d'organisation des agriculteurs.

VI. CONCLUSION

37. Le présent document résume les problèmes et les contraintes des PEID dans le secteur agricole et propose des stratégies pour y faire face. Le COAG est invité à suggérer le moyen d'affiner ces stratégies ainsi que des modalités d'application, pour assurer le développement agricole durable de ce groupe de pays.

1 Yamazaki (1996) a estimé la perte potentielle résultant de l'accord relatif à l'agriculture, pour tous lespays en développement à 632 millions de dollars de 1992 (soit 25 pour cent de la valeur totale des marges préférentielles cette année là), touchant essentiellement les fruits et fruits à coque, les boissons tropicales et les épices.