3.1.1 Superficies
Comme déjà souligné dans les parties antérieures, la superficie forestière est estimée à 23.000.000 hectares. Le taux de dégradation est estimé à 0,6% par an. La superficie forestière en 2020 serait de 20.391.807 hectares soit environ 8,85% de moins que le couvert actuel en tenant compte uniquement du taux de dégradation avancé par la FAO en 1995.
3.1.2 Forêts naturelles
Principalement toutes les forêts du Tchad sont des forêts naturelles, cependant la proportion des forêts plantées reste modeste. L’aménagement des forêts proprement dit n’a commencé qu’à partir de 1991/92 avec le projet FAO/CHD/87/016. Depuis les forêts sous aménagement s’estiment à (Mogrom: 11.000 ha, ADER: 20.000 ha) environ 31.000 ha de 1992 à 2000,soit en moyenne 3500 ha aménagés annuellement. Dans les mêmes conditions, on peut envisager en 2020 aménager 107.000 ha au minimum.
3.1.3 Forêts plantées
Les forêts plantées ont été estimées en 1999 à 15000 ha avec une moyenne de 300 ha/an. Compte tenu du moteur de changement, on peut estimer à l’an 2020 à 20.021 ha. Si nous prenons les hypothèses favorables telles que l’ère pétrolière, la mise en œuvre de conventions ratifiées par le Tchad (Convention de Lutte Contre la Désertification, le Changement climatique, la biodiversité etc..) ces superficies pourraient s’améliorer.
La productivité a été estimée à 15,45 m³ par ha et par an entre 1991 et 1992 et pourrait être appréciée à la baisse à l’horizon 2020 compte tenu des changements responsables du rythme de dégradation de nos forets. Cette vision traduit un status quo.
3.2.1 Degré d’application des critères et indicateurs de gestion durable des forêts
Le Tchad, pays de transition entre les zones sahariennes et soudaniennes, est confronté aux multiples facteurs climatiques et anthropiques défavorables: sécheresses récurrentes sur 90% de la superficie; défrichements anarchiques pour l’implantation des cultures vivrières et industrielles; coupes abusives des bois pour répondre aux besoins en bois-énergie pour une population sans cesse croissante.
Le Tchad a procédé à l’analyse des critères et indicateurs de gestion durable des forets en Afrique sèche définis en 1995 à Nairobi (Kenya) et lors d’un colloque tenu à Dakar (Sénégal) en 1999 auxquels ont pris part des coordinateurs nationaux pour les critères et indicateurs. Pour le Tchad, ces critères et indicateurs jugés pertinents et applicables, si un appui conséquent est apporté pour la sensibilisation et, assurer la formation et la collecte régulière des données.
3.2.2 Contribution des forêts naturelles à la production du bois
Au Tchad, l’essentiel de la production de bois proviendrait des forêts naturelles qui représenteraient plus de 99 % en 2020 (base des moteurs de changement). Les forêts naturelles resteront les principales pourvoyeuses de bois pendant cette période, quelle que soit l’ampleur des plantations.
3.2.3 Forêts plantées
Surface et productivité:
La surface des forêts en 2020 a été estimée sur la base de taux de plantation annuel et le contexte favorable des autres moteurs de changement entre autres: amélioration de l’économie pour dégager des fonds d’investissement pour le secteur forestier; l’accroissement des besoins en bois; la mise en œuvre des conventions ratifiées par le Tchad. Le taux de plantation est estimé à 300 ha/an en 1999. Sur ce taux, les forêts plantées atteindraient 20021 ha 2020. A ce rythme de reboisement, il est impossible de répondre aux besoins en bois.
Scénario favorable: l’économie tchadienne permettra d’investir dans le domaine du secteur forestier pour répondre aux besoins en bois- énergie et bois d’industrie
Scénario défavorable: rien ne sera fait pour alléger les pressions actuelles sur les formations naturelles ligneuses
La productivité des forêts plantées et forêts naturelles enrichies a été estimée par le projet FAO/CHD/87/016 à 14,45 m3/ha. En tenant compte des moteurs de changement décrits ci dessus, la productivité des forêts serait plus favorable.
Contribution en pourcentage des plantations à la production de bois:
Si toutes choses égales par ailleurs la contribution des forêts plantées représenteraient 0.11 % en conservant la même productivité. Le degré de durabilité de la gestion des plantations est fonction de l’efficacité de l’administration et l’utilisation des forêts plantées d’une manière et un rythme qui maintient leur productivité, leur capacité de régénération, leur vitalité et leur aptitude à remplir à l’horizon 2020 des fonctions écologiques, économiques et sociales. Dans le contexte futur, le degré sera renforcé de la même manière que le reste des tendances économiques et la politique de l’environnement qui entrera dans une ère favorable où la gestion sera améliorée avec l’utilisation des critères et indicateurs de gestion durable des forêts au Tchad.
Au Tchad, l’«arbre hors forêt» est considéré comme source importante pour divers produits (fruits, bois de feu) et autres produits forestiers non ligneux (gomme arabique) ainsi que le bois de service. L’ «arbre hors forêt» constitue le seul fourrage appréciable pour certaines régions en temps de sécheresse. Malgré son importance, il est très difficile de donner un ordre de grandeur de manière exhaustive, quand bien même ce type de formation est majoritaire dans les zones saharienne et sahélienne(environ 60 %).
La gomme est représentée largement dans la partie sahélienne sur 380.000 km². La production moyenne annuelle de la gomme est environ 5000 tonnes. Certaines années, la production peut atteindre 12000 à 15000 tonnes. Le Tchad produit 6.7 % de la gomme mondiale et occupe le deuxième rang après le Soudan. Si l’on admet la dernière définition de la Haye en 1999, qui inclut la gomme d’Acacia seyal comme étant de bonne qualité, et que le Tchad dispose d’importantes ressources en Acacia par rapport au Soudan. La gomme tchadienne est commercialisée par des privés depuis la production jusqu’à l’exportation. La gomme rapporterait plus 20 milliards de FCFA par an au pays comme devise. Il est fort probable que le pays occuperait le premier rang à l’horizon 2020, si l’Etat tchadien et les privés prennent conscience de cet état de fait.
Le karité regorge d’excellentes potentialités mal connues jusqu’à ce jour, ce qui fait que la contribution de ce produit bien perçue. Au niveau mondial, la noix de karité est de plus en plus dans l’agro-industrie. Certains pays africains tirent déjà d’énormes profits en devises à partir de karité par l’exportation. Dans l’avenir, le secteur forestier du Tchad aura d’importants atouts à l’horizon 2020 avec les enjeux économiques que revêt cette filière(avantage comparatif par rapport aux autres pays de la sous région).
La principale modification dans la pratique au niveau des forêts à vocation de production est la gestion locale organisée dans les zones de production par des techniques d’aménagement des forêts et l’application des critères et indicateurs de gestion durable des forêts.
Selon le projet énergie domestique, eu égard aux tendances prévues de la demande, la production du bois au plan national, restera supérieure à la demande. Cependant au niveau des grands centres urbains, en particulier la capitale, ces tendances indiquent d’éventuelles pénuries de bois. Compte tenu de ces tendances, l’exploitation dans la région de N’djamena passera de 410.000 tonnes actuelles à plus d’un million en 2020. S’ajoutent à cela les terres pour l’agriculture, les infrastructures, etc. qui vont émietter sur le secteur forestier, ce qui pourrait à la longue compromettre l’équilibre entre l’offre et la demande si des mesures adéquates ne sont pas prises pendant cette période.
Si des mesures telles que l’application des nouveaux textes prévus, les projets destinés à améliorer l’offre, l’amélioration de l’état des routes pour atteindre les zones forestières, l’exploration des combustibles de substitution ont pu donner des résultats escomptés, l’équilibre entre l’offre et la demande sera maintenu. Dans le cas contraire, il faut s’attendre à la dégradation de plus en plus poussée des ressources ligneuses.
3.7.2 Politique sectorielle et cadre institutionnel
Au niveau de l’offre:
Dans le cadre de la rationalisation de l’offre de combustibles ligneux, les nouveaux textes forestiers consacrent un certain nombre d’outils de gestion et définissent le cadre juridique et institutionnel de la participation des populations à la gestion du domaine forestier. A cet effet le cadre d’une telle politique est consigné dans le plan national de la lutte contre la désertification ( PNLCD ) que le Tchad a adopté en 1999 sur lequel trois volets figurent:
La protection des ressources écologiques par des efforts visant à réaliser le potentiel forestier notamment l’amélioration des aménagements des cultures, la protection des sols, la rationalisation des activités d’abattage des arbres, et différents types de boisements et de sensibilisation des populations pour un usage efficace
L’élaboration d’un plan d’aménagement des terres à mettre en œuvre au niveau des villages
Le renforcement institutionnel mettant l’accent sur la nécessité d’établir des structures adaptées au programme intégré de développement local et l’amélioration des systèmes de production et de fixation des prix propices à la conservation des ressources.
Au niveau de la demande:
Deux actions sont envisageables: en direction des foyers améliorés et de substitution entre les combustibles.
Régime foncier:
Pour pallier l’ambiguïté de la législation forestière actuelle, les pouvoirs publics ont mis au point un code forestier qui sera adopté, acte qui devrait leur conférer d’autorité pour contrôler l’utilisation des ressources forestières et donner de droits des propriétés spécifiques aux particuliers qui régénèrent des zones boisées. Ce code proposé se fond sur deux principes:
Le transfert de responsabilité de gestion des ressources naturelles aux populations locales ( loi 36 /PR/94 )
La réorientation du rôle de l’Etat
3.7.3 Degré de dépendance à l’égard des importations pour couvrir les besoins
Déjà en 1979, les études menées par TITRION ont révélé que le pays importe entièrement le bois d’industrie de la Centrafrique, du Cameroun et du Gabon. Cependant, le bois énergie se trouvait à moins de 10 km autour de la capitale.
Les études menées à l’époque étaient favorables pour une production de bois d’industrie à base de Daniella spp et de Khaya senegalensis qui peuvent couvrir au moins 25 % des importations du pays.
Aujourd’hui, 20 ans après, la dégradation s’est accentuée à tous les niveaux, ce qui a diminué les potentialités et les exploitations ont été abandonnées pour des raisons de sécurité comme souligné plus haut. Le pays continue d’être dépendant de l’import pour le bois d’industrie.
Le pays ne dispose pas d’une comptabilité nationale intégrant les différents éléments de ressources naturelles ligneuses pour estimer la part de contribution du secteur de manière exhaustive. Néanmoins, l’estimation est faite à partir des analyses des potentialités des ressources ligneuses mobilisables pour le développement économique du pays d’une part, d’autre part la contribution des éléments au budget de l’Etat.
Présentement, les superficies cultivables sont estimées à plus de 39 millions d’hectares et celles des terres irrigables à 5,6 millions d’hectares. C’est le plus important potentiel agricole du sahel. Avec la croissance démographique galopante, le secteur forestier sera le seul pourvoyeur de terres agricoles pour répondre à la demande alimentaire des années 2020. Cet état de choses entraînera encore la diminution des superficies forestières si les responsables politiques ne prennent pas conscience à temps et prévoient des solutions adéquates telles que la politique des populations, la politique agricole et d’élevage plus approprié que celle d’aujourd’hui.
La mise en œuvre du plan d’action de biodiversité permettra de conserver la diversité par des propositions concrètes d’intervention en mettant un système d’information surtout l’atlas sur la biodiversité du Tchad; imposer à chaque projet de développement une évaluation de départ et à la fin de manière à constituer une base des données. Développer des projets de biodiversité dans les différentes niches écologiques déjà identifiées afin de mettre au point une méthodologie d’analyse et de diagnostic pour élaborer des indicateurs devant servir des évaluations futures; développer des projets pour caractériser les paysages et élaborer une typologie des biodiversités dégradées ou dégradantes conséquentes de l’intervention humaine exogène, endogène ou hétérogène.
Dans la partie 2 (moteurs du changement) du document, il a été précisé les faits nouveaux dans le cadre institutionnel. Ce cadre permettra au secteur forestier de s’épanouir dans tous ses aspects, notamment, éclairer la responsabilité de chaque acteur, approfondir la connaissance par la formation continue et initiale et la recherche afin de mieux appréhender les différents problèmes du secteur dans le cadre de la décentralisation en cours.
3.10.2 Rôle du secteur privé et des communautés locales dans la gestion forestière
Au Tchad, le secteur privé est impliqué dans la gestion forestière esquissée par le Plan de Lutte Contre la Désertification en 1989. Tous les projets sont gérés de manière participative consistant à responsabiliser la population locale dans son terroir. Cette politique peut-elle être poursuivie dans les années à venir notamment à l’horizon 2020 dans le cadre de la décentralisation conformément à la constitution en vigueur. Si oui, comment sera la gestion participative? si non quel sera la gestion future?
Cette politique sera renforcée par le projet de loi portant régime des forêts, de la faune et de la pêche. Dans les prochaines 20 années à venir, le pays consolidera sa politique de décentralisation qui renforcera davantage les collectivités locales et les privés dans la gestion forestière.
3.10.3 Nouveaux accords pour l’éducation et la recherche
Compte tenu des changements des politiques forestières qui consiste à renforcer les capacités techniques et humaines, il est indéniable que les nouveaux accords auraient lieu dans le secteur notamment pour l’éducation environnementale qui comprendra le volet gestion des ressources ligneuses où la loi 14/PR/98 prévoit amplement et aussi le Plan National d’Action Environnementale(PNAE), projet qui débutera au courant de l’année 2000. La recherche est laissée pour compte actuellement au niveau du secteur.
Si à l’horizon 2020, il n’y a pas eu de structure de recherche, quel sera le niveau de la connaissance du domaine? et quel sera l’impact de la méconnaissance du secteur à l’avenir? Si des mesures sont prises à temps, quel sera l’avantage général du pays?
Une division de recherche prévue dans le cadre du nouvel organigramme sera opportune au sein du ministère. Cette structure permettra d’approfondir les connaissances et améliorer la gestion forestière dans tous ses aspects.