Introduction

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Encourager la population rurale à déposer des fonds remplit deux fonctions principales. En premier lieu, les dépôts favorisent l'investissement. En second lieu, ils créent un lien entre l'institution de proximité et le déposant. Ce lien, qui établit un rapport de responsabilité et d'appartenance, s'est démontré particulièrement efficace car il est à la base de toute intermédiation financière réussie. Mais ce rapport favorable n'existe que lorsque les dépôts sont garantis. Toute perte entraîne de sérieuses conséquences.

La perte de dépôts est blessante et la détresse de l'épargnant affecté évidente, surtout s'il n'existe pas de mesures de protection qui pourraient assurer le remboursement. Les pertes de ce type signifient également que l'institution de collecte de dépôts doit avoir rencontré des difficultés. Il ne s'agit pas d'un fait anodin, surtout en matière de dévellopement où une bonne structure institutionnelle représente une part essentielle du processus d'évolution; Tout affaiblissement de cette sorte d'institution signifie que la fourniture des services financiers sera altérée. Si les pertes sont importantes, ce genre d'événement peut porter atteinte à la stabilité du système bancaire tout entier.

Ainsi, et pour de nombreuses raisons, la stabilité financière occupe l'une des premières places dans les priorités économiques. Du point de vue des autorités publiques, l'objectif de stabilité du système financier devrait être primordial. La faillite d'une banque, si petite soit elle, peut entraîner une perte de confiance dans le système, si le gouvernement ne démontre pas sa capacité à gérer la crise bancaire méthodiquement et systématiquement.

Du point de vue de l'épargnant, la stabilité des marchés financiers est tout aussi importante. Alors qu'un système bancaire stable garantit à l'épargnant des actifs financiers sûrs, l'instabilité croissante menace cette sécurité. En cas de faillite bancaire, le risque de perdre au moins une partie de l'épargne devient réel.

Malgré les efforts réalisés pour promouvoir la stabilité bancaire, les systèmes financiers de maints pays industrialisés et de pays en développement ont rencontré de graves problèmes dans les dix dernières années. Des établissements financiers ont subi de grosses pertes, beaucoup d'entre eux sont insolvables, et certains ont réellement fait faillite. Dans les années 80, plus de 25 gouvernements sont intervenus dans les pays en développement afin d'aider des réseaux financiers en difficulté lorsque le risque de panique et l'effondrement du système bancaire étaient évidents. Il s'agit de pays d'Afrique, d'Amérique Latine mais aussi d'Asie. Les établissements impliqués faisaient partie de tous les secteurs du marché financier: formel, semi-formel et informel.

La situation des épargnants dans les crises bancaires des pays en développement est plus fragile que dans les économies industrialisées. Les mesures de protection des dépôts y sont beaucoup moins complètes. Bien que les gouvernements, lors de nombreuses crises, soient intervenus pour sauver les épargnants, les ressources engagées pour ces opérations n'ont pas toujours permis d'assurer une pleine couverture, même aux petits épargnants. Dans les faillites du secteur informel et semi-formel, les pertes des épargnants ont parfois été plus élevées encore.

Ce document a pour objectif de mettre l'accent sur les différents aspects de l'instabilité bancaire, sur les mesures d'assainissement des établissements financiers en difficulté, et sur la sauvegarde des dépôts lors des crises financières. Si les techniques d'assainissement et les programmes d'assurance sur dépôts sont largement traités dans ce document, son principal centre d'intérêt réside dans la présentation des méthodes et des systèmes permettant de prévenir l'instabilité des établissements financiers dans les pays en développement. L'importance donnée aux méthodes de prévention contre l'insolvabilité des banques est justifiée par la constatation que les facteurs les plus importants dans la protection des dépôts dans les pays en développement sont la qualité et le type de gestion au sein même des banques, et non, entre autres, la disponibilité d'un système d'assurance sur dépôt.

La protection de l'épargne peut considéder soit la valeur réelle de l'épargne soit sa valeur nominale. Lorsque la valeur réelle de l'épargne a été considérée, la préoccupation principale est l'inflation, son impact sur la valeur réelle des dépôts et sur la propension à déposer l'épargne auprès des établissements financiers. Ce sujet a déjà fait l'objet de nombreux documents. La présente publication traite de la protection de la valeur nominale de l'épargne. La sécurité de la valeur nominale de l'épargne dépend de conditions telles que la gestion efficace et prudente des institutions d'épargne; la disponibilité de ressources adéquates pour des activités à risque; l'efficacité de la réglementation et de la supervision des établissements; et la disponibilité d'une garantie formelle de tous ou de la plus grande partie des fonds déposés auprès des établissements. Le test-clé pour évaluer le degré de cette protection porte sur la façon dont les droits des épargnants sont respectés lors d'une crise bancaire. Comme l'instabilité financière a augmenté dans les dix dernières années, la sauvegarde de l'épargne a atteint un degré relatif élevé tant en volume qu'en priorité du risque.

Ce document s'articule en plusieurs chapitres. Dans le premier chapitre il est traité du rôle de l'épargne dans le développement économique, et ce, d'après les différents types d'établissements de dépôts et les pays les moins avancés. Le deuxième chapitre traite de l'instabilité croissante du marché financier, qui représente une menace pour la sécurité des dépôts. Les trois chapitres suivants fournissent des informations sur les crises bancaires dans différents environnements, et les méthodes utilisées dans la protection de l'épargne dans ces circonstances. Le troisième chapitre illustre la crise et la chronologie des événements dans trois pays européens (la Finlande, l'Italie et la Hongrie), et analyse, à l'attention des pays les moins avancés, les leçons qui peuvent être tirées de ces cas. Le quatrième chapitre présente deux cas touchant au secteur semi-formel des coopératives, le premier en Malaisie, le second au Kenya. Dans le cinquième chapitre, les forces et faiblesses du secteur informel sont considérées du point de vue de l'épargnant. Les cinquième, sixième et septième chapitres visent à tirer leçon de l'expérience des banques dans le cadre des pays les moins avancés. Ils traitent du rôle-clé des politiques dans la prévention de l'instabilité des établissements financiers, des principales mesures de sécurité, et des méthodes de protection de l'épargne lorsque les établissements financiers deviennent insolvables.

Ce document, La protection de l'épargne: les leçons de l'expérience, contrairement à sa destination première, est envisagé comme un point de départ de futurs travaux dans ce domaine technique, en particulier ceux à même de préparer les dirigeants et le personnel des banques à développer, pour leur propre usage, les principes généraux qui y ont été évoqués.


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