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Chapitre 1 - Éléments de planification de la production de charbon de bois


1.1 Définition d'une politique des combustibles ligneux
1.2 La notion de bilan énergétique
1.3 Calcul d'un bilan énergétique
1.4 Les différentes phases de la carbonisation


1.1 Définition d'une politique des combustibles ligneux

La première mesure à prendre, pour un pays qui cherche à garantir à ses citoyens un approvisionnement suffisant en bois et charbon de bois, est de définir une politique nationale des combustibles ligneux. Elle doit être nationale dans sa portée, parce que l'allocation des ressources nécessaires pour satisfaire les besoins en combustibles ligneux demande une action au niveau national (4).

Une politique nationale des combustibles ligneux doit par ailleurs s'insérer étroitement dans une politique nationale de l'énergie couvrant toutes les formes d'utilisation d'énergie' étant donné que l'accroissement des disponibilités de combustibles ligneux nécessite un apport correspondant en combustibles liquides, électricité, etc... Néanmoins il est possible, dans une première étape, de commencer par le bois de feu et le charbon de bois, et autres combustibles utilisés par les ménages en quantités appréciables.

Le bilan énergétique des pays en développement se caractérise en général par une prépondérance marquée du bois et du charbon de bois à usages domestiques pour la cuisson des aliments et le chauffage.

Les trois principaux aspects à prendre en considération dans l'élaboration d'une politique des combustibles ligneux sont les suivants:

- Importance et caractéristiques actuelles des ressources ligneuses, et évolution future.

- Structure actuelle de la consommation de bois de feu et charbon de bois, et évolution future probable.

- Modes actuels de production et de distribution, et possibilités d'amélioration et de rationalisation.

1.2 La notion de bilan énergétique

La consommation moyenne de combustibles ligneux (bois de feu et bois de carbonisation) dans le monde était estimée en 1978 à 0,37 m par personne. Toutefois, elle n'était que de 0,13 m dans les pays développés, contre 0,46 m3 dans les pays en développement. Les pays développés ont une consommation individuelle d'énergie élevée, dont le bois ne représente qu'une faible part, alors que les pays en développement ont une consommation faible? constituée en grande partie par le bois et le charbon de bois.

Le tableau 1, provenant de la Conférence des Nations Unies sur les sources d'énergie nouvelles et renouvelables (1981), montre l'importance relative des combustibles ligneux dans les différentes régions du monde (30).

Comme point de départ, il est utile d'élaborer une série de projections des structures de la consommation actuelle et future, que l'on peut déduire assez aisément à partir des données démographiques et des besoins individuels normaux. Partant de là., on pourra calculer immédiatement le rythme auquel le bois est vraisemblablement récolté, et la superficie de forêts exploitée et sans doute détruite chaque année. Connaissant la répartition des surfaces boisées participant à la production et les principales zones de consommation, on pourra dresser un schéma du réseau de distribution, et déterminer les quantités probables arrivant sur les divers marchés. A ce stade des "zones d'ombre" commenceront à apparaître sur l'image, et des enquêtes pourront être projetées en vue de fournir les données nécessaires pour clarifier le tableau.

Tableau 1 Part du bois de feu dans la consommation mondiale d'énergie en 1976


Population (millions)

Total - bois de feu a/(millions de m3)

Consommation par personne (m3)

Equivalent énergétique du bois de feu b/ (millions de gigajoules)

Energie d'origine commerciale c/

Bois de feu (% du total) d/

Mode

4258

1566

0.37

14720

256594

5.4


Pays développés

1147

145

0.13

1363

205115

0.7

- à économie de marché

775

54

0.07

508

145148

0.3

- à planification centrale

372

91

0.24

855

59967

1.4


Tiers monde

3111

1421

0.46

13357

51479

20.6

- Afrique

415

353

0.85

3318

2415

57.9


dont pays les moins développés

138

163

1.16

1532

255

65.7

- Asie

2347

796

0.34

7478

37556

16.6


dont pays les moins développés

130

34

0.26

319

180

63.9


économies planifiées

1010

220

0.22

2068

24048

7.9

- Amérique Latine

349

272

0,78

2,57

11306

18.4

a/ Comprend le bois de carbonisation
b/ 1 m = 9,4 GJ
c/ 1 t de houille = 29,3 GJ
d/ Non compris les autres sources d'énergie non commerciales, importantes dans certaines régions

A ce stade préliminaire de la planification il est utile de se rappeler que les besoins individuels en combustibles ligneux dans les différents pays en développement sont plus uniformes qu'on ne pourrait s'y attendre. La plupart de ces pays sont situés sous les tropiques, et sont par suite soumis à des régimes de températures assez uniformes. Les zones de montagnes et de hauts plateaux font exception, mais à l'échelle d'un pays ces différences sont généralement peu importantes, et on peut utiliser en première estimation les mêmes chiffres pour l'ensemble de la population.

On peut se baser sur une consommation annuelle de 1200 kg par personne de bois à 30 pour cent d'humidité. Ce chiffre correspond à l'emploi de foyers et fourneaux traditionnels de faible rendement calorifique, des fourneaux améliorés à rendement élevé pouvant abaisser la consommation à 450 kg. La consommation de charbon de bois varie entre 60 et 120 kg environ par personne et par an; pour les besoins de la planification préliminaire on peut retenir un chiffre de 100 kg, et admettre que la fabrication de ces 100 kg de charbon de bois nécessite environ 700 kg de bois sec, compte tenu des pertes dans le transport. Le pouvoir calorifique de 100 kg de charbon de bois est approximativement équivalent à celui de 300 kg de bois sec à l'air. Ces chiffres montrent l'intérêt d'encourager l'emploi de fourneaux à rendement élevé pour brûler du bois sec, mais révèlent aussi qu'il vaut mieux brûler du charbon de bois que du bois dans les foyers ouverts et les fourneaux traditionnels à faible rendement calorifique - pouvant ne pas dépasser 3 à 5 pour cent. Les fourneaux à charbon courants ont un rendement calorifique de 23-28 pour cent (voir Chapitre 10). Le charbon de bois permet par ailleurs une économie sur le coût du transport.

Quelle que soit la stratégie adoptée, elle influera sur les prévisions de production et de consommation pour les années à venir, et aura une forte incidence sur la politique d'aménagement forestier.

Les chiffres et facteurs de conversion suivants seront utiles pour l'établissement d'un bilan énergétique:

Tableau 2

Consommation de bois de feu à usage domestique par personne dans les pays en développement (Les chiffres réels varient selon le climat local, les disponibilités, les traditions, etc.)

0,5 à 2,0 m3

Quantité de bois nécessaire pour produire 1 tonne de charbon de bois

7 à 11 m3

Quantité de bois obtenue par défrichement



(a) en forêt dense tropicale

80 - 100 m3/ha


(b) en savane boisée

20 - 45 m3/ha


(c) dans une plantation d'eucalyptus de bonne qualité


âgée de 12-15 ans (le rendement des plantations varie selon la rapidité de croissance obtenue. Il faut un inventaire pour pouvoir faire des prévisions de production fermes).

80 - 200 m3/ha

Accroissement annuel moyen de plantations d'eucalyptus bien conduites sur bonnes stations (révolution 12-20 ans)

14 - 20 m3/ha

1 tonne de charbon de bois fournit en brûlant une quantité d'énergie thermique équivalente à:



(a) Mazout

0, 55 t


(b) Electricité (utilisée pour produire de la chaleur)

7260 kWh


(c) Houille grasse

0,83 t


(d) Bois sec (15% d'humidité)

1,65 t


(e) Bois vert (environ 60% d'humidité)

2,5 t

L'étape suivante dans l'élaboration d'une stratégie des combustibles ligneux consiste à estimer la consommation de bois et charbon de bois pour l'année de base, et ensuite dresser un tableau qui montre les besoins annuels compte tenu de l'accroissement prévisible de population pour une période d'une vingtaine d'années. Cette durée est généralement suffisante pour stabiliser la situation production/consommation.

En introduisant dans le tableau les rendements à l'hectare caractéristiques des différentes zones de production, on peut calculer la superficie de forêt qu'il faudra exploiter chaque année.

Diverses perspectives commenceront à se dessiner. Dans le cas d'un pays à faible densité de population, ayant encore de vastes surfaces de forêts, ces perspectives seront généralement bonnes. Les superficies de forêts disponibles seront suffisantes pour répondre aux besoins, et il sera souvent même possible d'affecter à la production de charbon de bois des zones de forêt naturelle d'une étendue suffisante pour en tirer un rendement soutenu, même dans le cas où cette forêt a des accroissements annuels moyens plutôt faibles, quel que soit le régime d'aménagement applicable. Il faut cependant supposer implicitement que l'accroissement de la population pourra être stabilisé' sinon les ressources forestières, quelle que soit leur importance, ne suffiront jamais à la demande future.

Dans le cas d'un pays à population plus dense, moins riche en forêt, les superficies de forêts disponibles s'avéreront généralement insuffisantes pour répondre aux besoins futurs de bois et charbon de bois, à moins que des mesures radicales ne soient prises pour maîtriser la situation.

La formulation de plans destinés à surmonter de tels problèmes exige des spécialistes compétents et expérimentés. Tous les facteurs en jeu, techniques et sociaux, doivent être pris en considération.

Les grandes options qui s'offrent aux pays confrontés à une telle situation sont les suivantes:

- Un meilleur aménagement, ou l'introduction d'un aménagement là où il n'en existe pas encore, des zones boisées peut être suffisant pour augmenter les rendements jusqu'au point où la régénération naturelle résoudra le problème.

- Des plantations forestières à haut rendement, souvent d'eucalyptus, peuvent être établies et produire suffisamment de bois pour rattraper la demande et résoudre le problème. Il y faut toutefois l'intervention de spécialistes, et une bonne planification. Les stations à reboiser doivent être soigneusement choisies, en tenant compte de la fertilité du sol, de la pluviométrie, de la distance aux centres de consommation, et de la possibilité pratique d'affecter les terrains de manière permanente à la forêt.

Il y a généralement conflit avec le besoin de terres pour des cultures destinées à nourrir une population en expansion, et dans ces conditions les facteurs sociaux qui motivent le maintien et l'expansion de plantations forestières au milieu des zones d'agriculture de subsistance prennent une importance prépondérante.

Les reboisements à grand rendement peuvent facilement fournir des accroissements moyens de 20 m/ha/an ou plus à une révolution de 10-12 ans. Par comparaison, une forêt naturelle non aménagée produira de l'ordre de 2 - 3 m3/ha/an. Il faut souligner toutefois que l'on n'obtient de rendements élevés des plantations artificielles que sur de bons sols, avec une bonne gestion des peuplements, et avec parfois même un apport d'engrais (11).

Le volume de bois consommé peut également être abaissé grâce à une amélioration des méthodes de production et de distribution du charbon de bois, et à l'emploi de fourneaux à bois d'un meilleur rendement. Les méthodes traditionnelles de récolte du bois de feu, avec des outils mal adaptés, laissent parfois sur place de grandes quantités de grumes et de branches de gros diamètre, qui pourrissent en pure perte.

1.3. Calcul d'un bilan énergétique

Le calcul ci-dessous de bilan énergétique concernant les combustibles ligneux dans une région hypothétique a pour but de montrer la méthode employée, et d'indiquer les facteurs les plus importants qui nécessitent de rassembler des données plus précises pour avoir une idée plus nette de la situation réelle.

Bilan énergétique des combustibles ligneux

Région

"X"

Superficie totale

5600 km² (2)

Terres cultivables

620 km² (3)

Terres boisées de relief modéré

3400 km² (4)

Montagnes escarpées, lacs, rivières, et zones urbaines

(2)-(3+4) = 1580 km²

Population

80600 dont environ 9000 en zones urbaines

Taux d'accroissement de la population estimé

2,1 % par an

Estimation préliminaire de la consommation annuelle de bois de feu par personne (d'après le tableau 2)

0,8 m3

Ventes de charbon de bois estimées dans les villes de la zone

110000 kg

Volume de bois de feu exporté de la région


(estimé)

Néant

Poids de charbon de bois exporté de la région


(calculé d'après les documents de transport)

35000 kg

Volume de bois de feu importé dans la zone

Néant

Poids de charbon de bois importé dans la zone


(calculé d'après les documents de transport)

7400 kg

Les données ci-dessus permettent de dresser un bilan énergétique préliminaire de la région en ce qui concerne les combustibles ligneux' la production et les importations représentant les entrées, la consommation et les exportations les sorties. Le bilan annuel s'établit donc comme suit:

Entrées

1) Bois utilisé pour produire du charbon de bois


Production totale de charbon

+ 110000 kg vendus


- 7400 kg importés


+ 35000 kg exportés


Production nette de charbon

37600 kg

Admettons que le taux de conversion du bois en charbon de bois est de 5 à 1 en poids de bois anhydre.

Si la densité du bois vert est de 750 kg/m3 et sa teneur en humidité 40%, 1 m3 de bois vert renferme 750 x = 535 kg de bois anhydre ("sec à l'étuve") équivalent à 535:5=107 kg de charbon de bois.

Pour produire 137600 kg de charbon de bois il faut: 1286 m3 de bois, soit 964500 kg de blis vert, ce qui correspond à un taux de conversion, en poids de bois vert, voisin de 7 pour 1.

2) Volume de bois récolté


a) utilisé pour fabriquer du charbon de bois

1280 m3


b) consommé directement sous forme de bois de par la population rurale

feu 80600 x 1,2 = 96720 m3 en admettant une consommation annuelle de 1,2 m par personne, et une population rurale de 80600 habitants

Total:

98000 m3 de bois vert par an

Cette estimation de la consommation annuelle de combustibles ligneux dans la région nous permet d'évaluer les superficies de forêts exploitées annuellement pour le bois de feu et de prédire, compte tenu des estimations d'accroissement démographique, les superficies de forêts de différents types nécessaires pour satisfaire les besoins en combustible d'une population croissante. Les calculs ci-dessus donneront probablement des résultats peu précis. Dans le cas où ceux-ci montreraient que la région risque de connaître un déficit de combustibles ligneux, il faudra s'efforcer d'améliorer la précision des chiffres afin d'apprécier plus exactement si les ressources forestières sont ou non suffisantes, et prendre les mesures nécessaires en vue d'améliorer les disponibilités.

Une fois que l'on a estimé la consommation annuelle de bois de feu, on peut calculer l'incidence que les coupes correspondantes peuvent avoir sur les ressources forestières de la région, en tenant compte de l'accroissement de la population. Il est raisonnable de baser les calculs sur une période d'une vingtaine d'années, ce qui est à peu près le temps qu'il faudra à des reboisements pour atteindre leur production maxima, d'autre part les résultats de l'aménagement de forêts naturelles jusque là négligées pourront mettre de dix à vingt ans pour se manifester. Si la population restait stationnaire nous pourrions faire le calcul suivant.

Superficie de forêt primaire exploitée pour le bois de feu à raison de 80 m3/ha (98000: 80) = 1225 ha par an. Si l'on connaît la superficie de forêts primaires disponibles, on pourra calculer pendant combien d'années cette source d'approvisionnement de bois de feu pourra se maintenir. De même, si ce sont des savanes ou des plantations qui sont utilisées, on pourra calculer de la même manière la surface à exploiter chaque année.

En règle générale, le bois de feu et le charbon de bois proviennent de forêts exploitées et plus ou moins dégradées, et il est intéressant de calculer quelle superficie il convient de soumettre à l'aménagement afin de maintenir indéfiniment cette production. Une forêt dense exploitée, normalement non aménagée mais surveillée, peut maintenir un taux d'accroissement de 2-4 m/ha/an. Si la durée de la rotation est fixée à 40 ans, on pourra escompter une production de 80 m de bois de carbonisation à l'hectare. L'accroissement de la population implique un accroissement des surfaces à exploiter chaque année, et la superficie totale à mettre en réserve pour assurer une rotation de 40 ans, par exemple, doit être calculée en conséquence. En prenant le chiffre ci-dessus de 1225 ha/an à exploiter pour satisfaire les besoins initiaux, et en supposant un taux d'accroissement démographique de 2,1 % par an, on constate qu'il faut réserver 75617 ha de forêt primaire pour une rotation de 40 ans' la surface à exploiter augmentant chaque année pour satisfaire les besoins d'une population croissante.

Le chiffre ci-dessus a été calculé aisément par l'équation du "fonds d'amortissement par annuités progressives", La formule est la suivante:

FV - PMT

dans laquelle:

FV = valeur finale (en surface de forêt)

PMT = surface à exploiter la 1ère année
i = taux d'accroissement démographique %/100
n = nombre d'années considéré

La surface nécessaire, toutefois continuera d'augmenter si la population continue à s'accroître, et il pourra finalement se poser des problèmes de disponibilité de forêts. Dans le cas ou il n'existe pas de grandes étendues de forêts non exploitées, le problème devient plus complexe du fait que les coupes dans la forêt déjà exploitée devront extraire un volume plus faible et variable. L'intensité de la coupe doit permettre une régénération qui redonnera au bout de 40 ans, par exemple, une forêt normale fournissant une récolte de bois de feu et de bois de carbonisation de 80 m/ha. La mise en oeuvre d'un tel aménagement entraîne de délicats problèmes de relations entre la collectivité et ses forêts, et requiert l'intervention d'un spécialiste, dont nous ne pouvons traiter ici. L'objet de la présente étude est de souligner les conséquences qu'implique le maintien d'un approvisionnement continu en bois et charbon de bois, et de montrer comment s'y prendre pour évaluer la superficie de forêts nécessaire. Un rendement à l'hectare plus élevé de la forêt' une utilisation améliorée du bois de feu, des méthodes de carbonisation plus efficaces, permettant de reculer l'échéance de la pénurie de ressources ligneuses.

1.4. Les différentes phases de la carbonisation


1.4.1 Qu'est-ce que le charbon de bois?
1.4.2 Opérations élémentaires de la carbonisation


Le processus de fabrication du charbon de bois, jusqu'au moment où il arrive au consommateur, comporte un certain nombre de phases qui sont toutes importantes et doivent être exécutées dans un ordre déterminé. Elles ont une incidence diverse sur les coûts de production, c'est en notant ces différences que l'on pourra apprécier l'importance relative de chacune d'elles, et concentrer son attention sur les maillons les plus coûteux de la chaîne de production.

1.4.1 Qu'est-ce que le charbon de bois?

Le charbon de bois est le résidu solide qui reste lorsque le bois a été "carbonisé" ou "pyrolysé" dans des conditions contrôlées, dans un espace fermé tel qu'un four à charbon. On contrôle l'entrée de l'air au cours du processus de pyrolyse ou carbonisation, de telle sorte que le bois ne soit pas réduit en cendres comme dans un feu normal, mais se décompose chimiquement pour donner du charbon de bois.

L'air n'est, en réalité, pas nécessaire dans le processus de pyrolyse. De fait, les techniques les plus évoluées de fabrication de charbon de bois ne comportent aucune admission d'air, ce qui procure un meilleur rendement du fait qu'il n'y a pas de bois brûlé inutilement avec cet air, et facilite le contrôle de qualité.

Le processus de pyrolyse, une fois amorcé, se poursuit de lui-même en dégageant une quantité de chaleur considérable. Toutefois, cette pyrolyse ou décomposition thermique de la cellulose et de la lignine dont le bois est constitué ne démarre que lorsque le bois a été porté à une température d'environ 300°C.

Dans une charbonnière ou un four à charbon traditionnel, une partie du bois est brûlée pour sécher le reste de la charge et élever sa température, de telle sorte que la pyrolyse s'amorce et se poursuive ensuite d'elle-même jusqu'à la fin. Le bois ainsi brûlé est perdu. Au contraire, les fours continus perfectionnés permettent de produire avec un rendement élevé du charbon de bois de haute qualité, grâce à l'utilisation ingénieuse qui est faite de la chaleur dégagée par la pyrolyse' normalement perdue, pour élever la température du bois qui arrive de telle sorte que la pyrolyse s'effectue sans avoir à brûler d'autre bois, bien qu'il faille un apport de chaleur pour compenser les pertes par les parois et autres parties du four. Les gaz combustibles qui se dégagent du bois lors de la pyrolyse peuvent être brûlés pour fournir cette chaleur et sécher le bois entrant. Tous les systèmes de carbonisation donnent un meilleur rendement lorsqu'on utilise du bois sec, étant donné qu'il faut un apport d'énergie thermique important pour éliminer l'humidité du bois.

Le processus de pyrolyse produit du charbon de bois qui se compose principalement de carbone plus une petite quantité de résidus goudronneux et les cendres contenues à l'origine dans le bois, des gaz combustibles, des goudrons, un certain nombre de composés chimiques - principalement acide acétique et méthanol - et une quantité importante d'eau qui se dégage sous forme de vapeur lors du séchage et de la décomposition pyrolytique du bois.

Lorsque la pyrolyse est achevée on laisse le charbon, qui a atteint une température d'environ 500 C, se refroidir à l'abri de l'air; on peut alors décharger le four ou la charbonnière en toute sécurité, et le charbon est prêt à l'emploi.

La très grande masse du charbon de bois produit dans le monde se fait par le procédé simple brièvement décrit ci-dessus, dans lequel une partie de la charge de bois est brûlée en pure perte pour produire la chaleur initiale, et qui ne récupère aucun des sous-produits ni la chaleur dégagée par la pyrolyse.

On utilise parfois pour faire du charbon d'autres matières ligneuses telles que coques de noix de coco et écorce. Le bois reste cependant la matière première la plus appréciée et la plus largement disponible. De nombreux résidus agricoles peuvent également donner du charbon par pyrolyse, mais ce charbon est obtenu à l'état de poussière qu'il faut agglomérer en briquettes pour la plupart des usages, d'un coût supplémentaire. Dans tous les cas, il serait en général agronomiquement malavisé d'encourager un plus large emploi de résidus de récoltes pour faire du charbon ou même comme combustible, quoique l'emploi de la bagasse comme source de chaleur dans la fabrication du sucre de canne, ou des chaumes de maïs et herbes grossières comme combustible domestique dans certaines régions, puisse être globalement avantageux lorsqu'il s'insère dans une politique agricole rationnelle.

En raison de sa disponibilité, des qualités du charbon qu'il fournit, autant que d'un point de vue écologique, le bois reste la matière première la plus appréciée et la plus utilisée pour la fabrication de charbon végétal, et il n'y a pas de raison pour que cela change dans l'avenir.

1.4.2 Opérations élémentaires de la carbonisation

La fabrication du charbon de bois peut se diviser en plusieurs phases ou opérations élémentaires, qui sont:

- Production du bois
- Récolte du bois
- Séchage et conditionnement du bois en vue de la carbonisation
- Carbonisation proprement dite
- Criplage, entreposage et transport du charbon de bois vers un dépôt ou un point de distribution.

Les coûts de production peuvent encore être commodément analysés selon les postes de dépenses suivants, qui montrent plus clairement les avantages et inconvénients des différents systèmes:

- Prix de revient du bois rendu sur le lieu de carbonisation' y compris coûts financiers.
- Coût de la main d'oeuvre pour la carbonisation, y compris chargement et déchargement.
- Coût du transport du charbon de bois vers les principaux marchés ou points de distribution.
- Coûts du capital d'exploitation.
- Coûts d'investissements fixes d'équipement.

Tous les coûts sont exprimés par rapport à la même unité de base, c'est-à-dire à la tonne de charbon de bois livrée, de façon à faire ressortir leur importance relative. Un extrait d'études effectuées par la FAO nous donne la ventilation générale suivante (3).

Dans le cas de carbonisation dans des fours traditionnels en briques, et de savanes boisées produisant environ 40 m de bois à l'hectare, les coûts unitaires se répartissent comme suit en pourcentage du prix de revient total du charbon livré:

Coût du bois rendu au four

60%

Coûts de main-d'oeuvre pour la carbonisation

9%

Coûts de capital d'exploitation

3,5%

Coûts d'investissements fixes

1,5%

Coûts de transport du charbon

26%


100%

L'importance des coûts de récolte du bois et de transport du charbon est évidente. Ces deux postes représentent 86% du total.

La fabrication du charbon de bois nécessite d'autres matières premières et facteurs de production qu'il ne faudrait pas oublier. Les fours nécessitent de l'argile pour l'étanchéité et pour la préparation de boue liquide pour le refroidissement, et des briques qui doivent autant que possible être confectionnées à proximité de l'emplacement du four. Pour les charbonnières en fosse et en meule il faut une terre de texture convenable, et des quantités importantes de paille et de feuillage et branches. Pour les fours métalliques il faut du sable, et des tôles d'acier, des outils de coupe et un équipement de soudure au chalumeau pour les réparations. Dans tous les procédés de carbonisation il faut une certaine quantité d'eau pour le refroidissement, l'extinction du feu et la préparation de boue argileuse. Par-dessus tout' toutes les opérations demandent aujourd'hui des carburants liquides pour les travaux de reboisement et d'exploitation, le transport du bois et du charbon, les transports de personnel, l'entretien de l'équipement, etc. Tous ces points sont essentiels au sucées des opérations. D'autres facteurs à ne pas perdre de vue sont: la nourriture, le logement et autres infrastructures pour les ouvriers, et le fourrage pour les animaux de trait lorsqu'on en emploie. Si le charbon n'est pas manutentionné en vrac, il faut ajouter le coût des emballages.

Les chapitres suivants examinent les aspects techniques des différentes phases de la fabrication de charbon de bois, en incluant des informations sur l'aspect économique et le contrôle des coûts.


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