Page précédenteTable des matières

ANNEXE 2

Application de l'analyse des risques aux programmes de contrôle de la sécurité sanitaire des aliments



ANALYSE DES RISQUES

Il existe plusieurs dangers, associés aux aliments, qui peuvent causer des préjudices à la santé humaine. Tous les ans, à travers le monde, des millions de personnes souffrent de toxi-infections alimentaires de toute sorte. L'application non contrôlée de produits chimiques en agriculture, la contamination par l'environnement, l'utilisation d'additifs non autorisés, les dangers microbiologiques, ou d'autres abus effectués sur les aliments tout au long de la chaîne alimentaire peuvent contribuer à introduire des dangers directement liés aux aliments ou empêcher de réduire ces derniers. La prise de conscience croissante des effets néfastes des toxi-infections alimentaires sur la santé, la croissance rapide, l'importance du commerce mondial des denrées alimentaires et l'exigence d'aliments sains pour les consommateurs sont telles que l'analyse des risques associés aux aliments a acquis une importance sans précédent.

Les consommateurs ont exprimé leur inquiétude sur l'innocuité des additifs alimentaires, des résidus chimiques des produits agricoles et vétérinaires, des contaminants biologiques, chimiques et physiques, de la contamination radioactive et des pratiques non contrôlées et inacceptables pendant la manutention et la transformation des denrées alimentaires peuvant conduire à l'introduction de dangers alimentaires, et ce tout au long de la chaîne alimentaire, de la production primaire jusqu'au consommateur. Même si ces inquiétudes proviennent le plus souvent de consommateurs appartenant à des pays développés, il est intéressant de remarquer que le développement constant des moyens de communication a augmenté l'intérêt des consommateurs du monde entier à ce propos.

DANGERS ALIMENTAIRES

La Commission du Codex Alimentarius définit un danger comme tout agent biologique, chimique ou physique dans un aliment, ou la condition d'un aliment pouvant causer des effets néfastes à la santé. Les dangers alimentaires peuvent donc être classés en trois catégories: physique, chimique et biologique. Les dangers physiques (présence de pierres dans le riz; d'os dans la viande désossée, etc.) sont les plus simples à comprendre. Mais l'impact des dangers chimiques et biologiques sur la santé humaine est beaucoup plus difficile à appréhender, à cause de la complexité de leurs interactions avec la physiologie humaine et l'absence de données scientifiques pouvant confirmer certaines théories. La réaction humaine aux maladies ou à des agents qui engendrent des réactions néfastes dépend de plusieurs variables, généralement liées entre elles. Qui plus est, les conséquences sur la santé des personnes dépendent de celle-ci: elles peuvent être graves pour certaines, un peu moins pour d'autres, voire inexistantes.

PROCESSUS DE L'ANALYSE DES RISQUES

Le risque émanant des dangers alimentaires pour la population mondiale dépend largement du degré de maîtrise exercé par les producteurs, les transformateurs et les services officiels de contrôle alimentaire pour prévenir ou minimiser les risques à des niveaux de sécurité acceptables. L'analyse des risques liés à la sécurité sanitaire des aliments est une discipline nouvelle, et les méthodes nécessaires pour évaluer et gérer ces risques sont encore en cours d'élaboration.

Il est important de reconnaître la différence entre "danger" et "risque". Comme nous l'avons déjà dit, un danger est représenté par tout agent biologique, chimique ou physique qui est présent dans un aliment, ou par la condition d'un aliment pouvant causer des effets néfastes à la santé. Le risque est la probabilité et la gravité estimées des effets d'un danger alimentaire sur la santé des populations. La compréhension de la relation entre la réduction des dangers qui pourraient être associés à un aliment et la réduction du risque des effets néfastes sur la santé du consommateur revêt une importance particulière pour l'élaboration de systèmes de contrôle des denrées alimentaires efficaces. Malheureusement, le "risque zéro" n'existe pas en industrie alimentaire (ni pour tout autre produit d'ailleurs).

Le processus d'analyse des risques comprend trois éléments distincts: évaluation des risques, gestion des risques et communication sur les risques. Il est actuellement admis que ce processus représente la méthodologie fondamentale pour l'élaboration des normes de sécurité sanitaire des aliments. Des décisions sont nécessaires pour déterminer les dangers à prendre en considération et identifier leurs effets immédiats, à moyen et long termes, sur la santé humaine (évaluation des risques); établir les mesures de maîtrise appropriées pour prévenir, réduire ou minimiser ces risques (gestion des risques); et déterminer la meilleure façon de communiquer ces informations aux populations affectées (communication sur les risques).

Évaluation des risques

L'évaluation des risques est une analyse quantitative des informations relatives aux dangers potentiels pour la santé humaine suite à l'exposition à divers agents. Elle implique quatre étapes liées entre elles:

L'ensemble du processus d'évaluation des risques nécessite l'utilisation d'informations fiables, scientifiquement valables, et l'application de procédures scientifiques bien établies et mises en œuvre de façon transparente. Malheureusement, les données scientifiques fiables ne sont pas toujours disponibles et ne peuvent pas toujours permettre une évaluation qualitative et quantitative pouvant servir de base pour une décision sûre et définitive. Il faut donc accepter une certaine marge d'incertitude dans cette prise de décision.

L'évaluation des risques présente un intérêt non seulement pour l'estimation des risques pour les humains, mais également comme base pour l'organisation des données et pour la répartition des responsabilités pour l'analyse. Le processus de l'évaluation des risques peut inclure divers modèles pour arriver à des conclusions, comme le concept de la dose journalière acceptable (DJA) qui peut être considéré un élément de l'évaluation des risques.

Les dangers biologiques pour la santé publique incluent des souches pathogènes de bactéries, virus, moisissures, protozoaires, algues, et des toxines qu'ils peuvent synthétiser. Parmi ces dangers, la présence de bactéries pathogènes dans les aliments représente l'un des plus grands problèmes à l'échelle mondiale. L'évaluation des risques associés aux bactéries pathogènes se caractérise par des complications particulières. Toute méthode adoptée à cet effet constatera le développement de complications dues à des facteurs liés aux méthodes utilisées pour la production, la transformation et le stockage des denrées alimentaires destinées à la consommation. Qui plus est, ces facteurs peuvent varier énormément en fonction de la culture et de la situation géographique des consommateurs. De tels facteurs caractérisent le scénario pour un aliment donné et représentent des éléments essentiels pour l'évaluation des risques liés aux dangers d'orgine bactérienne.

Dans de nombreux cas, les données suffisantes ne seront pas disponibles pour servir de base à l'évaluation des risques associés aux bactéries pathogènes. Pour plusieurs raisons, y compris l'incertitude concernant la méthode et le moment de l'expression du potentiel pathogène d'un organisme, il n'est pas encore clair et définitif qu'une approche quantitative d'évaluation des risques soit possible et appropriée pour la caractérisation des risques associés aux bactéries pathogènes dans les aliments. Mais l'approche qualitative visant à caractériser les risques représente actuellement la seule alternative. Pour introduire des modifications dans la réglementation alimentaire, la communauté scientifique doit dépasser l'évaluation qualitative des risques microbiens et produire les données nécessaires à l'évaluation quantitative. Les consultations de la FAO/OMS se heurtent souvent à des difficultés d'évaluation quantitative des risques microbiens, et il a été recommandé de constituer un comité d'experts FAO/OMS sur l'évaluation des risques de nature microbienne.

L'évaluation des risques chimiques est un processus assez bien établi et se fait généralement suite à l'exposition chronique, à long terme, à un agent chimique. Ceci inclut l'évaluation des additifs alimentaires, des résidus de pesticides et autres résidus chimiques agricoles, des contaminants chimiques de toute origine et des toxines naturelles telles que les mycotoxines et les ciguatoxines.

Le processus d'évaluation des risques implique l'évaluation des informations appropriées et le choix de modèles à utiliser pour tirer des conclusions à partir de ces informations. Qui plus est, elle requiert la reconnaissance des possibilités d'incertitudes et, lorsque cela est possible, l'admission que d'autres alternatives d'interprétation des données disponibles sont scientifiquement plausibles. Ces incertitudes proviennent des limites des données disponibles et de l'évaluation et interprétation des données obtenues à partir d'études épidémiologiques et toxicologiques. Les incertitudes des modèles se manifestent lorsqu'il y a une tentative d'utilisation de données concernant des phénomènes qui peuvent avoir lieu sous d'autres conditions pour lesquelles les données ne sont pas disponibles.

Gestion des risques

La gestion des risques est définie dans le Codex Alimentarius comme étant un processus d'examen des différentes politiques résultant de l'évaluation des risques et, si nécessaire, de choix et mise en œuvre d'options de contrôle appropriées incluant des mesures légales. Le but de la gestion des risques est d'établir la signification du risque estimé, de comparer les coûts de sa réduction aux bénéfices obtenus, de comparer les risques estimés aux bénéfices pour la société suite au risque encouru, et d'appliquer les procédures politiques et institutionnelles nécessaires à la réduction du risque.

Le processus de gestion des risques entrepris par les comités du système du Codex Alimentarius a abouti au développement de normes, de lignes directrices et d'autres recommandations de sécurité sanitaire des aliments. Au niveau national, plusieurs décisions de gestion des risques peuvent être prises selon des critères différents et des options de gestion des risques différentes. Lors de l'élaboration d'approches pour la gestion des risques, les responsables utilisent la caractérisation des risques qui résulte du processus d'évaluation des risques. De ce fait, les décisions de gestion des risques peuvent être basées sur l'établissement de procédures et de pratiques saines de manutention des denrées alimentaires, sur des méthodes de contrôle et d'assurance de la sécurité sanitaire et de la qualité des procédés de transformation alimentaire, et sur des normes de sécurité sanitaire et de qualité des denrées pour maîtriser les dangers. Ces normes doivent prendre en considération l'utilisation correcte des additifs alimentaires qui se sont révélés sûrs, ainsi que leurs niveaux autorisés et les niveaux scientifiquement acceptés de contaminants et autres résidus chimiques agricoles dans les aliments, en utilisant le processus d'évaluation des risques.

Le résultat de ce processus doit être comparé à l'évaluation des options disponibles de gestion des risques afin d'aboutir à une décision concernant la gestion des risques. La mise en œuvre de cette décision doit être suivie d'une surveillance de l'efficacité des mesures de maîtrise et de son impact sur le risque pour les consommateurs, et ce afin de s'assurer que l'objectif de sécurité sanitaire des aliments a été atteint.

Alors que la recherche et les études scientifiques continuent de fournir les réponses nécessaires à une prise de décisions justifiées après analyse des risques liés aux dangers alimentaires, l'incertitude et certaines questions qui n'ont pas encore trouvé de réponse continuent à inquiéter les décideurs. Seule une recherche scientifique continue peut fournir ces réponses. En attendant, la plupart des connaissances relatives aux dangers, à l'évaluation et à la maîtrise des risques sont basées sur des informations incomplètes et incluent des facteurs d'incertitude dans l'analyse.

Communication sur les risques

La communication sur les risques est le troisième et dernier élément du processus de l'analyse des risques. La définition du Codex Alimentarius de la communication sur les risques est limitée à: "un processus interactif d'échange d'informations et d'opinions sur le risque qui existe entre les évaluateurs des risques, les gestionnaires des risques et les autres groupes intéressés". L'Académie nationale des sciences des États-Unis d'Amérique donne une définition plus large: "un processus d'échange interactif d'informations et d'opinions entre individus, groupes et institutions... (qui) implique des messages multiples à propos de la nature des risques et d'autres messages, qui ne sont pas strictement liés aux risques, et qui expriment des inquiétudes, des opinions et des réactions aux messages relatifs aux risques ou aux arrangements institutionnels et légaux de gestion des risques".

Le fait de communiquer les résultats de l'évaluation et de la gestion des risques a plusieurs buts. La qualité et la sécurité sanitaire des aliments dépendent d'actions responsables entreprises par tous ceux qui sont impliqués à toutes les étapes de la chaîne alimentaire, y compris les consommateurs. Ces derniers doivent disposer d'informations appropriées relatives aux dangers potentiels et aux précautions à prendre pendant la préparation finale et en servant les aliments. De plus, les consommateurs doivent être conscients et comprendre les mesures de contrôle de sécurité sanitaire des aliments mises en œuvre par leur gouvernement pour protéger leur santé.

La communication informe le public des résultats d'expertises scientifiques sur l'identification et l'évaluation des dangers alimentaires par rapport à l'ensemble de la population ou à des groupes cibles tels que les enfants en bas âge ou les personnes âgées. Certaines personnes, telles que celles ayant un système immunitaire déficient, des allergies ou des carences nutritionnelles, doivent disposer d'informations spécialisées. La communication fournit aux secteurs privé et public l'information nécessaire pour prévenir, réduire ou minimiser les risques alimentaires à des niveaux de sécurité sanitaire acceptables à travers des systèmes de gestion de la qualité et de la sécurité sanitaire, systèmes obligatoires ou volontaires. Elle fournit également aux populations les plus exposées l'information nécessaire pour leur permettre de mettre en œuvre leurs propres options afin d'arriver à des niveaux de protection encore plus élevés.

Page précédenteTop Of Page