The state, collective tenure and community participation in Burkina Faso
Religion and culture, rather than laws or a preoccupation with development, have established customary tenures in Burkina Faso as has been the case elsewhere in Africa. Nevertheless, opposing official ideologies have existed since colonization; support of private property and capitalization of land was replaced, in the case of Burkina Faso, by the state-centred agrarian and tenure reforms of the revolutionary regime, beginning in 1984. Customary tenure is not synonymous with collective tenure. As early as 1953, Clausson articulated the distinction between primary collective tenure, built on a shared religion, and secondary collective tenure, based on consensus or law, and manifested as cooperatives, collectives or states. Policy in Burkina Faso since 1984 strongly favours the latter, since customary law is viewed as an obstacle to economic development as well as being held responsible for general social stagnation. The institutionalization of a state-defined and sponsored collective tenure regime became a central element of the agrarian and tenure reforms of 1984, although it was diluted somewhat with the reintroduction of private property in the reforms of 1991 (even though it remains a mere legislative principle until the appropriate enabling legislation is enacted). Although the Burkina Faso state has yet to find the most efficient model for its implementation, a state-directed effort towards a collective tenure regime is suggested to be an essential part of the most appropriate package to promote modernization of agricultural production techniques, access to capital and inputs, and social goals such as justice and social cohesion.
El Estado, la tenencia de tierras comunitarias
y la participación popular en Burkina Faso
La religión y la cultura, más que las leyes o la preocupación por el desarrollo, han ido creando tenencias consuetudinarias en Burkina Faso, cosa que también ha ocurrido en otras partes de África. Sin embargo, han existido ideologías oficiales contrapuestas desde la llegada del colonizador: en primer lugar, una ideología que preconiza la propiedad privada y la capitalización de la tierra, y, en el caso de Burkina Faso, las reformas públicas centrales del Estado en materia agraria y de tenencia de tierras por parte del régimen revolucionario que inició en 1984. La tenencia consuetudinaria no es sinónimo de tenencia colectiva. Ya en 1953, Clausson formuló la distinción entre tenencia colectiva primaria, basada en creencias religiosas compartidas, y tenencia colectiva secundaria, basada en el consenso o en la ley, como las cooperativas y granjas colectivas o estatales. Desde 1984, la política de Burkina Faso favorece mucho esta última posibilidad, ya que las leyes consuetudinarias se consideran como un obstáculo al desarrollo económico y responsables del estancamiento social general. La institucionalización de un régimen de tenencia de tierras colectivo definido y patrocinado por el Estado se ha convertido en un elemento central de las reformas agraria y de tenencia de 1984, aunque un tanto diluido con la reintroducción de la propiedad privada en las reformas de 1991 (sigue siendo un mero principio hasta que se promulgue la legislación que lo haga posible). Aunque el Estado tiene todavía que encontrar el modelo más eficaz para su aplicación, un régimen colectivo de tenencia de tierras es parte esencial del paquete de medidas de modernización de las técnicas de producción agraria, el acceso al capital y a los insumos, así como la justicia y la cohesión social.
Djibril Traoré
Directeur général,
Études et
réalisation de projets d'aménagement et de développement (ERPAD),
Ouagadougou.
Ce sont davantage la religion et la culture que la loi et une volonté de développement qui ont fixé les régimes fonciers coutumiers au Burkina Faso, si l'on compare la situation avec les autres pays d'Afrique. Toutefois, des idéologies officielles divergentes se sont affrontées depuis l'arrivée du colonisateur: une première idéologie privilégiant la propriété privée et la capitalisation des terres puis, dans le cas du Burkina Faso, des réformes du système agraire et des régimes fonciers lancées par l'État à partir de 1984 sous le gouvernement révolutionnaire. Régime foncier coutumier ne veut pas dire régime collectif. Dès 1953, Clausson établissait une distinction entre la tenure communautaire primaire, fondée sur une identité religieuse et la tenure communautaire secondaire reposant sur le consensus ou la loi et revêtant la forme de coopératives, privées ou publiques. Depuis 1984, c'est le second système qui est privilégié au Burkina Faso, le droit coutumier étant considéré comme un obstacle au développement économique et un facteur de stagnation sociale. L'institutionnalisation d'un régime foncier collectif décidé et parrainé par l'État s'est imposée comme une composante essentielle des réformes des systèmes agraires et des régimes fonciers lancées en 1984 même si elle a été quelque peu tempérée par un certain retour à la propriété privée, réintroduite à l'occasion des réformes de 1991 (qui resteront purement théoriques tant qu'une législation habilitante n'aura pas été adoptée). Bien que l'État burkinabè doive encore trouver le modèle le plus efficient nécessaire à sa mise en oeuvre, il semblerait qu'une recherche par l'État d'un régime foncier collectif constitue un élément essentiel du régime le plus approprié pour promouvoir la modernisation des techniques de production agricole, l'accès aux capitaux et aux intrants ainsi que la réalisation d'objectifs tels que l'équité et la cohésion sociale.
Le Burkina Faso a une superficie de
274 000 km2, une population de près de 10 millions d'habitants et des
ressources naturelles peu abondantes. La saison des pluies est courte, de juin à
septembre. Les précipitations décroissent rapidement de 1 000 mm au sud à
300 mm dans le nord qui connaît un climat sahélien. L'État aménage les vallées
où l'eau est moins rare, vallées dans lesquelles les populations, fortement
touchées par les sécheresses accourent.
La population du Burkina est composée
de nombreuses ethnies, dont les Mossis représentent à peu près la moitié.
Héritiers de peuples animistes, les Mossis ont su s'organiser pour résister aux
empires musulmans sahélosoudaniens. Fondés sur une aristocratie guerrière de
cavaliers, les royaumes mossis ont commencé à se constituer au 16e siècle sous
l'autorité des Mogho-Nabas, monarques absolus d'essence religieuse.
Maintenue
par sa forte cohésion, la nation mossi forme un bastion d'une densité rurale
supérieure à 80 habitants au kilomètre carré, population excessive sur des sols
surexploités et souvent dégradés. Ce surpeuplement relatif trouve son exutoire
dans l'émigration vers la Côte d'Ivoire et le sud-ouest du Burkina.
Mis à
part les Mossis, la frange septentrionale du territoire abrite d'autres groupes
ethniques comme les pasteurs peuls, touaregs et bellas que l'on retrouve dans la
boucle du Niger. Dans l'ouest, les Bobos se rassemblent autour de leur capitale
Bobo-Dioulasso. Par ailleurs des fractions de groupes occupent les marges de
certains pays limitrophes: il s'agit des Lobis et des Sénoufos aux confins de la
Côte d'Ivoire, et des Markas et Samos le long de la frontière
malienne.
La nature ingrate du sol et du sous-sol, la faiblesse du marché
intérieur et l'absence d'accès à la mer, entravent le développement du pays dont
l'économie repose à 90 pour cent sur l'agriculture et l'élevage extensifs. La
production vivrière reste soumise à la menace de sécheresses parfois
catastrophiques. Cependant, les plaines aménagées et irriguées échappent à ces
aléas et connaissent une grande extension.
Les populations rurales
burkinabèes, en majorité animistes, s'attachent encore aux coutumes
traditionnelles, même si une nette évolution est observable. Pour autant que
leurs intérêts soient ménagés, ces populations ne s'opposent pas au changement
sous la direction de l'État ou d'autres institutions. Les grands programmes de
colonisation rurale entrepris par l'État ont trouvé plutôt un écho favorable de
la part des populations qui y perçoivent un intérêt social et économique
bénéfique pour eux dans la mesure où ces programmes sont conçus en régime de
tenure communautaire.
En ce qui concerne
le Burkina, l'État ne s'est pas trop écarté des concepts traditionnels dans la fixation du régime juridique de la terre, même si le Domaine foncier national (DFN) est de plein droit propriété de l'État. Par le biais de la concession, les populations conservent leurs droits d'usage sur leurs terres sans la pleine propriété, qu'elles ne réclament pas du reste.
Ce ne sont ni les lois, ni le souci du développement économique qui ont établi en Afrique les modes de tenure traditionnelle, mais la religion. Cependant une autre idéologie a été introduite avec l'arrivé du colonisateur et les systèmes de propriété privée, la capitalisation de la terre, et ensuite avec le Conseil National de la Révolution et sa Réorganisation agraire et foncière (RAF). Ainsi le Burkina Faso a connu au cours de son histoire les systèmes fonciers traditionnels (coutumiers) et réglementaires (modernes), et donc les régimes de tenure foncière collective et privée que nous découvrirons dans le parcours de la période précoloniale à nos jours.
Les groupes sociaux du Burkina Faso, comme bien d'autres en Afrique noire à l'époque précoloniale, ont la même considération de la terre, notamment celle qui trouve le fondement de la propriété foncière dans la religion. Le concept coutumier de la terre fait partie d'une valeur transcendantale. Ces valeurs définissent une culture propre au monde africain que Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire ont appelée la négritude. Le système foncier traditionnel revêt plusieurs caractères que l'on retrouve dans toutes les régions du Burkina:
Un droit d'appropriation collectif. Ce droit est investi dans le lignage ou segment de lignage. Dans ce système l'appropriation individuelle des terres n'est pas permise.
Inaliénabilité et imprescriptibilité des terres. Le collectivisme agraire observable dans toutes les sociétés ne contient pas la notion de propriété, même au profit du groupe tout entier. Si une relative propriété existe au niveau de l'individu, elle n'a pas de valeur commerciale, et elle est dépourvue de toute incidence monétaire quant à la valeur intrinsèque même. La convertibilité en monnaie n'est possible qu'au regard des fruits mais non en ce qui concerne sa substance qui est inaliénable par essence. Le caractère sacré de cette copropriété fait qu'aucun de ses membres ne peut y mettre fin en réclamant un partage qui distinguerait sa part de l'ensemble.
Droit éminent sur les terres. Le droit sur la terre prend sa source dans l'acte initial d'alliance entre la terre et le premier occupant, et se transmet à ses héritiers. Ce droit implique de réactualiser périodiquement l'alliance dans le culte agraire. Dans son fonctionnement, ce droit est exercé par le chef de terre qui est l'intercesseur entre les hommes et les puissances naturelles liées à la terre. Il en résulte que les rapports entre l'homme et la terre sont sacralisés et que de nombreux interdits assujettissent les travaux agricoles au respect d'une divinité d'autant plus exigeante que les hommes attendent tout d'elle puisqu'ils vivent de sa fécondité et souffre de son avarice.
Droits d'exploitation et d'usage individuels ou collectifs. Dans le statut
traditionnel de la terre, l'individualisme était pratiquement absent de
l'attitude psychologique et sociale des membres du groupe. La propriété de la
terre était dévolue collectivement à la famille proche et, par la suite,
toujours collectivement, à sa descendance. Il n'existe en réalité en droit
traditionnel que l'usufruit tant pour l'individu que pour la collectivité de
groupes.
Toutefois, les droits d'exploitation et d'usage de la terre n'ont pas les mêmes caractères suivant la qualité de l'individu ou du groupe. Pour les membres du lignage qui détient le droit d'appropriation collective, ces droits sont permanents et transmissibles à leurs héritiers. Par contre, ils sont provisoires, donc révocables pour tout bénéficiaire non membre du lignage du chef de terre, la terre dans ce cas étant simplement prêtée.
Nouvelles influences sur le Système foncier traditionnel et son évolution. L'une des manifestations externes qui ont influencé la
conception traditionnelle de la terre trouvera son origine dans la religion des
prosélytismes musulmans et chrétiens, notamment. En effet, l'histoire de
l'Afrique est révélatrice d'une islamisation du droit coutumier et indique que
le christianisme a également pénétré le système juridique des sociétés
traditionnelles par l'effet de massives conversions à la religion prônée par le
colonisateur européen. Toutefois les nouvelles religions n'ont pas réussi à
changer de façon significative le statut traditionnel de la terre. L'animisme,
la religion des ancêtres, est demeuré toujours dominant et attaché au patrimoine
ancestral.
L'intervention de la monnaie va engendrer de nouvelles notions
économiques. Parmi celles-ci, le concept de propriété commence à s'imposer dans
les sociétés traditionnelles qui arrivent à considérer leurs propres relations à l'égard de leurs propres terres comme atteintes d'un archaïsme qui se justifie de moins en moins. Ce constat a fait dire à E. Bècque dans ses notes sous décision du tribunal de paix de Libreville en 1945 que «c'est seulement du jour où les indigènes ont vu des étrangers chercher à acquérir des terres qu'ils ont appris que le sol pouvait avoir une valeur vénale; à partir de ce moment, leur esprit a commencé à concevoir l'idée qu'il était possible à un individu d'être propriétaire d'une certaine étendue de la terre».
La théorie coloniale de la domanialité reposait sur la conception que la propriété de l'État est directement issue du droit de conquête dont elle est la conséquence.
À l'origine, le
colonisateur pensait qu'elle devait permettre une meilleure exploitation des
terres dans l'intérêt du développement économique du territoire. Pour servir son
objectif, il va utiliser des instruments juridiques issus du système Torrens et
du Code napoléonien, lesquels sont diamétralement opposés à la conception
traditionnelle africaine en ce qu'ils visent à instaurer la propriété privée au
sens romain du terme, c'est-à-dire, le droit de jouir et de disposer des choses
de la manière la plus absolue.
Les actes qui vont consacrer définitivement le régime foncier dans toute l'Afrique occidentale française (AOF) sont les suivants :
Les décrets du 20 mai 1953 et du 10 juillet 1956 sont
venus renforcer le décret du 8 octobre 1925 en précisant que le livret foncier
était délivré à ceux qui possédaient sur le sol une emprise évidente et
permanente matérialisée par des constructions, ou par une mise en valeur
comportant droit de disposer. Le livret foncier introduisait ainsi la propriété
privée individuelle dans le système coutumier.
On constate que le législateur colonial, tout en donnant la possibilité d'une appropriation privée de la terre, a fait constater les droits fonciers coutumiers existants sur la terre. L'article 5 du décret de 1906 dispose que «l'immatriculation est facultative, exceptionnellement obligatoire: dans le cas d'aliénation ou de concession des terres domaniales; dans le cas où un immeuble détenu jusque-là dans les formes admises par les coutumes indigènes, doit faire pour la première fois l'objet d'un constat écrit, rédigé en conformité du droit français». Deux textes (décrets de 1906 et 1932) déterminaient donc le statut de la terre (au moins, de la terre non vacante) suivant deux modalités: les
terres immatriculées appartenant aux particuliers, et qui pouvaient faire
l'objet de transactions et les terres collectives régies par les coutumes.
En
même temps il a été précisé que «...
en AOF, les terres vacantes et sans maître appartiennent à l'État, de même que les terres qui ne font pas l'objet d'un titre régulier de propriété ou de jouissance, et qui sont inexploitées ou inoccupées depuis plus de 10 ans (décret du 15 novembre 1935)». En application de telles dispositions l'État devenait théoriquement propriétaire de la plupart des terres.
Le Burkina (ancienne Haute-Volta) a maintenu la
situation juridique antérieure, de l'indépendance jusqu'en 1984. Ainsi, pour
compléter les silences de la législation coloniale la loi n° 77-60/AN du 12
juillet 1960 portant réglementation du domaine privé du Burkina, c'est-à-dire
l'ensemble des terres récupérées par l'État à la suite des décrets de 1904, 1932
et 1955, a été adoptée. Ce texte de 1960 organise l'occupation et l'aliénation
des terres au moyen de la concession, faisant de l'État le propriétaire
potentiel de toutes les terres non encore immatriculées au moment de son entrée
en vigueur, et distingue trois types de concessions: rurale, urbaine et
individuelle.
Trois ans plus tard, la loi n° 29-63/AN du 24 juillet 1963, relative aux périmètres d'aménagement, autorise le gouvernement à réserver pour l'État une part des terres ayant fait l'objet d'aménagements spéciaux en respectant la propriété immatriculée, mais permet à ce dernier de se réserver le monopole foncier sur les zones peu peuplées ou éloignées des agglomérations. L'espace aux termes de cette loi est réparti en trois catégories: les terres à vocation agricole, les terres à vocation pastorale, et les terres à vocation sylvicole. Ces dernières catégories, contrairement à la première, ne peuvent faire l'objet de concessions à des particuliers ni à des collectivités.
Selon M. Bachelet (1968), «le trait spécifique des
réformes agraires et foncières en Afrique c'est la substitution de l'État à
l'initiative privée». Pour y parvenir dit-il, «le législateur confisque,
exproprie avec ou sans indemnité, regroupe, distribue, contrôle, impose des
types d'exploitation et organise les marchés de l'économie agraire. Il
transforme par voie administrative la gestion de la terre et conditionne
celle-ci aux impératifs de son orientation économique générale. Il y a donc une
part d'intervention idéologique avec des tendances extrémistes ou libérales
(Rousseauïste ou physiocratique) qui manifestent leur prépondérance d'une façon
plus ou moins accusée».
Dans le cas du Burkina Faso, on trouve des
caractéristiques similaires dans l'ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août 1984
portant RAF et son décret d'application n° 85-404/CNR/PRES du 4 août 1985
promulgués par les autorités révolutionnaires. Cette ordonnance abroge toute
disposition antérieure en créant un Domaine foncier national (DFN) «de plein
droit propriété exclusive de l'État, comprenant les terres déjà classées comme
domaine public de l'État, les terres du domaine privé de l'État, mais aussi les
terres faisant l'objet de titres de propriété et les terres détenues en vertu de
la coutume». Cette ordonnance annule tout titre de propriété précédemment
délivré à des particuliers, et les remplace par un titre de
jouissance.
Envisagée dans son ensemble, la réforme agraire et foncière du 4 août 1984 apparaît comme un moyen de promotion socioéconomique et de justice sociale. Sous l'aspect politique, elle a engendré des problèmes particuliers, ayant bouleversé l'ordre ancien. En outre, son application a révélé des insuffisances et des difficultés qui conduiront les autorités du Front populaire, instance dirigeante ayant pris le pouvoir le 15 octobre 1987, à procéder à une nouvelle réforme agraire et foncière en 1991.
La réforme de 1984 ayant supprimé la propriété foncière privée, des réactions diverses se sont manifestées çà et là. Les propriétaires terriens dépossédés n'hésitent pas à s'ériger en obstacle à la nouvelle gestion des terres. A contrario, les migrants se sont
installés de manière anarchique, sans égard aux normes coutumières, sous le
prétexte que la terre appartenant à l'État appartenait donc à tout le
monde.
Par ailleurs, les populations ne consentent pas à investir dans les
zones aménagées, d'abord en raison du coût des investissements, ensuite par
crainte d'être délogées parce qu'elles n'ont pas de titres fonciers. De même,
les dispositions sur l'attribution et l'exploitation collective des terres dans
les zones aménagées constituent un obstacle en raison de leur caractère
collectiviste. En effet, la structure villageoise chargée de la question des
terres était une structure politique, le Comité de défense de la révolution
(CDR) du village, qui n'avait pas toujours la compétence ou le pouvoir social
nécessaire pour traiter des problèmes fonciers en milieu rural. La plupart des
structures d'aménagement du territoire n'étaient pas fonctionnelles en raison de
leur composition (structure politique), et se sont révélées trop lourdes et peu
opérationnelles pour la gestion des terres.
Après sept années d'application,
les différents acteurs se sont accordés à reconnaître que les textes de la RAF
de 1984 étaient inadaptés et qu'ils entraînaient des difficultés et contraintes
aussi bien d'ordre juridique qu'institutionnel. Ainsi un nouveau régime foncier
a été promulgué le 4 juin 1991 portant Réorganisation agraire et foncière au
Burkina Faso.
Les textes les plus importants de cette nouvelle réglementation
sont la réintroduction de la propriété privée (Art.3) qui donne la possibilité à
l'État de céder les terres du Domaine foncier national à titre de propriété
privée aux personnes physiques ou morales. Aussi, la garantie est-elle accordée
aux différents droits réels immobiliers (Art. 25) que sont: la propriété,
le droit de superficie, l'usufruit, le bail de longue durée ou emphytéose, le
droit d'usage et d'habitation, les servitudes ou services fonciers, le
nantissement immobilier ou antichrèse, et les privilèges et hypothèques.
Toutefois, ces différents droits ainsi que les actions tendant à leur
revendication doivent, pour être opposables aux tiers, faire l'objet de
publicité (Art. 26).
Par ailleurs, il y a lieu de souligner que les
nouveaux textes de la RAF, contrairement aux anciens textes, offrent un cadre
juridique indispensable à la mise en oeuvre de la politique nationale
d'aménagement du territoire. Ils traitent, en effet, des principes, des
instruments, des structures, des conditions et des types d'aménagement pour une
approche globale et intégrée. Dans cet ordre, quatre types de schéma ont été
définis: le schéma national d'aménagement du territoire (SNAT), les schémas
régionaux d'aménagement du territoire (SRAT), les schémas provinciaux
d'aménagement du territoire (SPAT) et les schémas directeurs d'aménagement
(SDA).
Cependant, si la loi portant Réorganisation agraire et foncière pose
le principe de la propriété privée, son décret d'application engendre un flou
juridique qui rend inopérationnels les titres d'occupation et de jouissance dans
tous leurs effets, notamment en matière d'aliénation des terres. Du reste,
l'État n'a ni réhabilité les anciens titres fonciers, ni délivré d'autres titres
au niveau du domaine rural depuis l'entrée en vigueur des textes, toutes choses
qui laissent apparaître une ambiguïté dans l'attitude de l'État à l'égard de la
tenure foncière privée.
Dans la perspective de rendre plus conformes les
textes de la RAF aux revendications des populations et aux réalités actuelles du
pays, un séminaire, tenu à Ouagadougou du 20 au 24 septembre 1993, a recommandé une relecture des textes de 1991. Mais, au moment où nous abordons cette étude, le gouvernement ne s'est pas encore prononcé.
On peut regrouper les concepts de la tenure
communautaire en deux catégories et, pour plus de commodité, nous emploierons
une terminologie empruntée à G. Clausson. Dans la première catégorie,
l'expression «tenure communautaire primaire» désigne le cas où la propriété
foncière trouve son fondement dans un sentiment religieux, où la terre
appartient, au sens plein du mot, au groupe social dans la totalité,
c'est-à-dire à l'ensemble des vivants et des morts. C'est dans cette catégorie
qu'on retrouve les formes: famille, lignage, communauté.
Dans la deuxième
catégorie, l'expression «tenure communautaire secondaire» désigne le cas où par
suite d'un consensus ou d'une loi un choix s'établit d'exploiter en commun une
propriété foncière suivant des modes sociaux de mise en valeur de la terre. Il
peut s'agir ici d'un choix économique ou politique, ou les deux à la fois.
Ainsi, aujourd'hui, une volonté de restructuration communautaire se manifeste un
peu partout en Afrique; les réformes agraires se proposent justement de
convertir le monde paysan à une meilleure utilisation des ressources agricoles
et humaines. Parmi les moyens envisagés, le développement des institutions
communautaires tient une place de premier plan. L'appartenance ici au groupe est
un choix volontaire, et non une appartenance de naissance comme dans la première
catégorie. Dans ce deuxième groupe se situent les formes: coopérative,
collectivisme, État.
Dans le cas spécifique du Burkina, après avoir reconduit
la conception coloniale de la dualité du droit foncier (privé et coutumier), le
choix semble avoir été porté à partir des années 80 (du moins dans sa seconde
moitié), vers le collectivisme agraire pour ce qui est des politiques
officielles. En même temps, les autorités burkinabèes manifestent une tendance
contraire au droit traditionnel considéré comme obstacle au fait national. Elles
estiment que les coutumes obstruent les perspectives globales, en particulier
les objectifs nationaux, qu'elles dévient les comportements responsables,
qu'elles faussent et compliquent les circuits nationaux. Le droit traditionnel
est tenu responsable de la stagnation sociale de ceux dont il règle la vie. Il
est considéré comme archaïque, joignant à sa complexité juridique une
insuffisance manifeste quant aux impératifs du développement économique. Par
ailleurs, on reproche à l'individualisme foncier de favoriser l'inégalité, et
ses effets sur la production ne sont pas non plus satisfaisants.
En
pratique, la tenure communautaire secondaire se traduit par un mode
d'exploitation communautaire d'une propriété foncière suivant des modes sociaux
de mise en valeur de la terre, et des moyens communs. Les mots: coopérative,
collectivité et association évoquent l'idée de groupement et de développement
communautaires. Élargie à la dimension politique recouvrant la souveraineté
d'une nation, cette idée devient vite synonyme de déterminisme étatique. On
observe donc le phénomène de l'État, et principalement la volonté d'intervention
de celui-ci dans toutes les activités des sociétés qui composent l'entité
nationale.
Dans le domaine de la vie agricole, l'État, par l'intermédiaire
des organismes de coopération, se substitue à l'initiative privée. Il remplace
donc une microéconomie par une macroéconomie en éliminant les concepts
individuels naissants ou renaissants au profit de collectivités nouvelles. La
coopérative est non seulement sociale, mais également économique au sens moderne
de l'acceptation. Participation et responsabilité sont les deux fondements de
toute coopération. Dans ce sens, les activités coopératives sont avantageuses
pour les jeunes États africains, car elles apparaissent une solution de réforme,
et se révèlent un moyen excellent de construction de leur économie, et un cadre
de vie permettant de replacer l'homme au sein d'une nouvelle collectivité. Le
Burkina Faso semble l'avoir bien compris en lançant un mouvement coopératif
«tous azimuts», en instituant des programmes de développement rural sur la base
de concept de la coopération. Un ministère de l'action coopérative paysanne
avait même été créé pour appuyer ce mouvement.
Une autre logique a guidé la
conception du Programme national de gestion des terroirs (PNGT), conçu dans le
cadre de la politique nationale de mise en oeuvre de la RAF. La gestion des
terroirs peut être définie comme une approche de développement basée sur la
responsabilisation et la participation des communautés rurales à la gestion
rationnelle des ressources de leurs terroirs, en vue d'assurer leur durabilité.
Cette approche associe intimement les actions d'aménagement, les activités de
production agro-sylvopastorales, et la création d'infrastructures
socioéconomiques dans la perspective d'un développement durable au niveau local.
L'idée de base est simple: les villageois participent volontairement à la
gestion de leur terroir et, en échange, il leur est donné la sécurité foncière
individuelle et collective, l'État mettant à leur disposition les
infrastructures sociales et économiques indispensables.
On constate que la
sécurité foncière individuelle n'a pas de sens en dehors de la collectivité. Le
terroir est défini comme une portion d'espace physique exploitée par la
communauté rurale, qui en a le droit d'usage, droit qui lui est reconnu par les
communautés voisines. Cependant la mise en oeuvre du PNGT n'a pas été sans
problèmes. On n'oublie pas que la création du Domaine foncier national est
fondée sur le principe d'appartenance exclusive de la terre à l'État. Des chefs
de terres et autres responsables coutumiers se sont sentis frustrés et se sont
souvent érigés en censeurs des réformes. À l'inverse, certains migrants se sont
anarchiquement installés sur de nouvelles terres, défrichant à tout va sous
prétexte que la terre appartient à l'État donc à tout le monde. En plus, la
suppression des titres fonciers a mis un frein à l'investissement tant en milieu
rural qu'en milieu urbain, car les populations n'étaient pas prêtes à consentir
les efforts nécessaires à la mise en valeur des zones aménagées, sans la
garantie d'en être vraiment propriétaires.
La connotation collectiviste de
certaines dispositions des textes de la RAF constitue un obstacle à la gestion
des terres en milieu rural, car on insistait sur l'exploitation collective des
terres mises en valeur par l'État. En effet, le foncier est au centre de
nombreux conflits dont la nature et l'ampleur varient suivant les zones. Dans
les zones aménagées, ils sont souvent provoqués par les revendications
d'installation à postériori des autochtones, l'identification des groupes
bénéficiaires et les migrants à travers les installations anarchiques et
incontrôlées. Dans les zones traditionnelles, ils sont surtout occasionnés par
les rapports entre agriculteurs et éleveurs, les revendications de terres entre
différents lignages, l'identification des limites des exploitations ou des
villages, et les migrations massives qui accentuent les pressions foncières.
En dépit de tout, l'approche gestion des terroirs, dans son effort de réflexion avec les populations pour un développement à la base, peut beaucoup contribuer à l'atteinte des objectifs de la RAF en milieu rural, et particulièrement dans les terroirs traditionnels.
L'absorption du sous emploi dans l'agriculture ne
pourrait se faire que par une redistribution des terres pour installer les
sans-emploi. Des enquêtes menées à l'ouest, au sud-ouest et au centre du Burkina
par la Direction des études et programmes du Ministère de l'agriculture en 1988
ont montré que les petites exploitations absorbent plus de travail par hectare
que les grandes. Ces petites exploitations sont constituées de terres aménagées
collectives destinées, dans la plupart des cas, aux cultures de rente, tandis
que les grandes exploitations sont des tenures foncières privées affectées le
plus souvent aux cultures vivrières. Une autre étude menée par la SAED dans la
Zone d'expansion agricole de Bama (Province du Houet) en 1989 montre que la
quantité de travail par hectare s'est située, en 1988/89, entre 250 à
300/hommes/jour sur les petites superficies rizicoles inférieures à 15 ha, alors
que les superficies plus grandes occupent 120 à 155 hommes/jour. Finalement, au
cours de la campagne 1992/93 on observe que la taille de l'unité d'exploitation
privée est comprise entre 1,5 et 2,5 ha pour trois à quatre actifs, alors que
pour la même surface en exploitation collective, neuf à 12 actifs sont
requis.
Ces statistiques nous permettent de dire que la propriété collective
est plus créative d'emplois que la propriété privée. Les différents régimes qui
se sont succédé au pouvoir au Burkina de l'indépendance jusqu'à nos jours l'ont
compris, en adoptant une politique d'éradication de l'onchocercose et de
colonisation des terres à travers le pays.
Notons que l'exploitation privée
des terres fait rarement appel à la main-d'oeuvre salariée, tandis que la tenure
collective absorbe plus de main d'oeuvre salariée, avec une pointe à la récolte.
L'utilisation de main-d'oeuvre salariée est généralement due à la nature des
cultures (cultures de rente pour la propriété collective et cultures vivrières
pour la propriété privée) et n'est possible qu'à partir d'un certain seuil de
productivité du travail et de rentabilité de la production.
Par ailleurs il faut signaler que les aménagements agricoles en propriété collective ont permis de réduire l'exode rural des jeunes vers les pays côtiers. Les aménagements ont également limité le sous-emploi en agriculture en offrant une possibilité de double culture sur les parcelles aménagées.
La source des revenus en théorie est plus variée au
niveau de la propriété privée qu'au niveau de la propriété collective car, dans
la première, le propriétaire est chef d'exploitation et décide de ses sources de
revenus, et peut céder des terres aux membres de sa famille qui peuvent
également se procurer des revenus. Dans la seconde, les parcelles sont
attribuées aux chefs de famille qui sont tenus de préparer et d'entretenir une
surface déterminée de cultures imposées, en utilisant des pratiques culturales
précises et définies sans que l'on ne demande leur avis; le non-respect de ces
dispositions conduisant par ailleurs à des sanctions. Les paysans se trouvent
ainsi dans l'impossibilité de procéder à une accumulation dans la propriété
agricole.
Dans la propriété collective, on ne tient pas compte, au sein d'une
même famille, des choix, des contraintes et des logiques de chacun. On
sous-estime beaucoup le rôle des femmes et des cadets dans la production
agricole, ainsi que leur autonomie par rapport au chef de famille. Les parcelles
sont souvent attribuées aux seuls chefs de famille et les autres membres s'en
trouvent marginalisés. Par exemple, dans la zone du Projet Niéna-Dionkélé, les
femmes refusent de travailler sur les parcelles aménagées de leurs maris qui
sont obligés de faire appel à la main-d'oeuvre salariée. Par contre, elles
développent de nombreuses autres activités ignorées par le projet, tel le
maraîchage.
Mais dans la pratique, malgré l'imposition d'une culture donnée aux exploitants des parcelles de propriété collective, les sources de revenus sont plus diversifiées. En effet, sur la plupart des sites aménagés, on pratique la double production de riz d'une part et, d'autre part, malgré la faiblesse du niveau des eaux en mars-avril, celles-ci permettent aux exploitants de mettre en place des cultures intercalaires telles que maïs, tomates, etc. Cette double production de riz avec un rendement moyen de 4 700 kg/ha par production permet à l'exploitant d'avoir pour la seule culture de riz un revenu moyen par campagne de 300 000 FCFA soit 600 000 FCFA par an contre 35 000 à 40 000 FCFA par an pour le mil-sorgho dans les exploitations en propriété privée.
La productivité est généralement plus élevée dans la
propriété collective que dans la propriété privée. Diverses enquêtes ont été
effectuées sur plusieurs régions du Burkina Faso par la Société africaine
d'études et de développement (SAED) comparant les effets de la dimension des
exploitations sur les rendements. Les résultats de ces enquêtes montrent que la
production moyenne par hectare augmente lorsque la dimension moyenne des
exploitations diminue. En 1989/90, le rendement moyen en paddy était de
3 500 kg à 4 000 kg à l'hectare sur les parcelles de propriété
collective, et de 2 000 kg à 2 500 kg sur des parcelles plus
grandes dans la propriété privée.
Cette augmentation de la production et de la productivité dans les exploitations de propriété collective par rapport aux parcelles de tenure privée s'explique également par:
La force de la propriété privée résiderait dans le fait qu'un assolement peut-être pratiqué, tandis que cette possibilité est très limitée dans la propriété collective.
Le régime de la propriété foncière est l'un des
fondements essentiels de l'organisation sociale et des structures
institutionnelles des zones rurales. Or, dans le cas des groupes sociaux ruraux
habitant le Burkina, c'est la propriété collective des droits fonciers qui est
de règle. La terre appartient à la collectivité et l'accès est relativement
libre. La sécurité du groupe est intimement liée à cette forme de tenure qui,
par les normes d'entraide qu'elle contient, joue le rôle d'une véritable
sécurité sociale. Si la culture est en général pratiquée individuellement, le
régime maintient une communauté qui assure la cohésion du groupe qui la pratique
effectivement. Il faut bien comprendre que l'individualisme n'est concevable que
dans la communauté.
À vrai dire, les communautés rurales n'ont jamais accepté
les régimes de tenure foncière privée. Les rémanences du droit coutumier à
toutes les époques de l'histoire du Burkina prouvent l'attachement des
populations rurales à la tenure foncière communautaire. Cela est si vrai que
tous les projets touchant le domaine foncier, qui ont ignoré cette attitude, ont
connu un large échec, faute de participation populaire.
À la période
coloniale, déjà, lorsque le législateur a introduit l'immatriculation
immobilière, le livret foncier et le certificat administratif tendant à la
reconnaissance privée individuelle ou collective de la propriété foncière,
l'attitude des populations autochtones a été révélatrice d'un désintérêt total
car cette notion s'opposait au concept coutumier de la terre. La base du
raisonnement est que la terre étant d'essence divine, l'homme ne peut se
l'approprier.
La réforme agraire et foncière de 1991 et l'évolution politique du pays vers une tendance plus libérale connaissent aujourd'hui une adhésion populaire. Cette attitude est compréhensive parce que le souci de préserver la forme de tenure communautaire a prévalu dans l'institution des textes. En définitive, on peut affirmer que dans le contexte du Burkina, la tenure foncière communautaire rencontre plus de succès dans la participation populaire en ce qu'il maintient la cohésion sociale.
En milieu rural, les terres arables constituent une
telle proportion de la richesse totale qu'elles forment habituellement le
facteur déterminant de la richesse. Dans le système traditionnel, du fait de
l'application de la tenure communautaire, la concentration de la propriété aux
mains de grands propriétaires terriens n'existe pas. Seule la collectivité est
titulaire de droits souverains. Les membres de la collectivité jouissent d'un
droit d'usufruit, l'exploitation étant décentralisée. L'égalité socioéconomique
est assurée au moyen de la répartition équitable des terres en fonction des
besoins de chaque ménage. Ce système engendre en lui-même une justice sociale,
personne n'étant lésé dans ses droits, en tout cas, tant que les terres
resteront abondantes.
C'est la raison pour laquelle les réformes foncières et
agraires au Burkina n'ont pas porté sur la nécessité d'un morcellement de
grandes exploitations qui n'ont jamais existé. Les réformes ont plutôt visé à la
rationalisation de l'exploitation des ressources plus qu'à l'équité, sans
modifier fondamentalement la structure de la propriété foncière. Au contraire,
les réformes se sont traduites par un programme de gestion coopérative et
supervisée des ressources foncières.
Dans ces conditions on peut dire que la tenure foncière privée fera un grand tort aux populations rurales burkinabèes. Du reste, la propriété privée entraînant l'accumulation des richesses foncières entre les mains d'une minorité engendre dans ce sens des inégalités et une iniquité sociale qui ne sauraient être justes pour la population majoritaire.
Quant à la tenure privée, ses forces résident dans la participation individuelle au niveau de certains programmes de développement rural intégré avec au centre des préoccupations comme la conservation des eaux et des sols, l'agroforesterie, etc. Les faiblesses de la tenure communautaire résident dans le fait que ces actions reposent surtout sur le long terme d'une part et, d'autre part, que la gestion optimale des ressources naturelles ne peut être assurée dans les limites étroites du cadre villageois; la réussite de l'action dépend très largement de la bonne articulation des priorités. Malgré ces faiblesses, la tenure communautaire présente plus d'atouts que la tenure privée dont la lacune essentielle est l'absence de titre foncier qui n'encourage pas les paysans à faire des investissements à long terme sur les parcelles (plantation d'arbres, aménagements).
Les exploitants de la propriété privée ont tendance à consommer une part plus importante de ce qu'ils produisent que les exploitants de la propriété collective. Cette tendance impose à l'État l'importation de produits alimentaires destinés à subvenir aux besoins des consommateurs urbains et rend impossible aux exploitants de propriété privée d'investir dans l'agriculture. Par contre, la tenure communautaire pourra assurer une autosuffisance et une durabilité du développement rural.
Malgré le choix porté sur la tenure communautaire, il faut reconnaître que la tenure privée a quelques aspects positifs. L'avantage de la tenure privée serait sa contribution à l'autosuffisance alimentaire et à l'aménagement des terres rurales non aménagées avec des diguettes, des digues filtrantes, de l'agroforesterie, etc. Cependant, de sa part, la tenure communautaire:
Mais la tenure communautaire, comme toute autre tenure, comporte aussi des faiblesses:
Il est indispensable de procéder à une réforme agraire
et foncière pour modifier les structures sociales et augmenter la production
agricole. Cependant pour nécessaire qu'elle soit, la réforme ne suffit pas à
elle seule à améliorer la productivité des terres ni la répartition des
revenus.
Les modifications apportées aux structures de la propriété agraire
et foncière n'entraîneraient pas automatiquement une augmentation des rendements, ni un changement technologique dans le secteur agricole. Ces phénomènes n'interviendraient que si l'on prend des mesures appropriées pour mettre à la disposition des exploitants les facteurs de production et les services dont ils ont besoin. L'équipe propose les recommandations suivantes:
Bachelet, M. 1968 Systèmes fonciers et réformes agraires en Afrique noire. L.G.D.J., Paris.
Clausson, G. 1953. Communal Land Tenure. FAO, Rome.
Deschamps, H.1953. Méthode et doctrine coloniale de la France. A. Colin, Paris.
Deschamps, H. 1959. La fin des empires coloniaux. PUF, Paris.
Deschamps, H. 1962. L'Afrique noire précoloniale. PUF, Paris.
Deschamps, H. 1965 Les religions de l'Afrique noire. PUF, Paris.
FAO. 1966. Travaux de la Conférence mondiale sur la réforme agraire. Rome.
République du Burkina Faso. Le Plan d'action national pour l'environnement.
République du Burkina Faso. Le Plan national de lutte contre la désertification.
République du Burkina Faso. Textes portant Réorganisation agraire et foncière. Août 1984 et juin 1991.
République du Burkina Faso. Textes législatifs et politiques divers.