Page précédente Table des matières Page suivante


Besoin d’action pour la gestion durable de la fertilité du sol


L’importance des approches intégrées et holistiques

La presque totalité de l'Afrique subsaharienne doit augmenter sa production de cultures vivrières, et ce besoin deviendra plus pressant pendant au moins les vingt-cinq années à venir.

Une partie des besoins sera satisfaite par la mise en culture de terres supplémentaires, mais la majeure partie des besoins doit être satisfaite en augmentant la productivité de la terre déjà cultivée. La productivité de la plus grande partie des nouvelles terres est susceptible d'être faible, vu que la plupart des terres ayant un potentiel de production élevé sont déjà cultivées. Des mesures pour augmenter la productivité, à la fois des terres actuellement cultivées et des nouvelles terres, sont nécessaires d’urgence.

10. Préparation de la terre en «demi-lune» pour la conservation de l’eau et du sol au Niger.

Pour rejoindre le taux de croissance de la population, les productions doivent augmenter à une vitesse considérablement plus grande qu’aujourd'hui, même pour maintenir les faibles standards alimentaires actuels. La production supplémentaire doit, également, être obtenue sans causer davantage de dégradation aux sols, et, en fait, la fertilité des sols devra être augmentée.

En premier lieu, les agriculteurs (hommes et femmes) devront faire les changements nécessaires, et les gouvernements devront les aider en développant leurs pratiques agricoles de telle manière que la production soit augmentée sur une base durable.

S'assurer que les options pour l’augmentation de la productivité sont disponibles est une tâche pour les scientifiques concernés par la production agricole et la gestion de la terre. Les sociologues et les économistes doivent également participer à la recherche pour s'assurer que les propositions de changement sont économiquement viables et socialement acceptables. En outre, tous les facteurs impliqués dans l’amélioration de la fertilité et de la productivité du sol devraient être intégrés. Les mesures pour empêcher la dégradation, ainsi que des méthodes pour augmenter la productivité doivent être incluses. Des approches intégrées et holistiques (et les interventions techniques non segmentées) de la gestion du sol et des éléments nutritifs sont nécessaires pour la conservation de la qualité du sol et l’augmentation de sa productivité.

11. Récolte dans les «demi lunes» au Niger.

Beaucoup d’essais à court et à long terme en Afrique subsaharienne - et ailleurs sous les tropiques - ont montré la nécessité de maintenir le taux de matière organique du sol aussi bien que le niveau des éléments nutritifs. La matière organique fournit un approvisionnement équilibré en macro- et oligo-éléments et aide à maintenir et améliorer l'état physique et biologique du sol.

Ainsi, les approches vers des systèmes plus productifs et durables doivent être holistiques en terme de participation de toutes les parties prenantes, y compris les agriculteurs, et doivent intégrer les divers facteurs et techniques qui seront employés.

Contrôle et suivi des efforts pour combattre la dégradation des terres

Des actions complètes et intégrées doivent être menées pour combattre les causes directes et sous-jacentes de la dégradation des terres, pour éviter la destruction des ressources en terre et pour atténuer la pauvreté, les pertes économiques au niveau national, et l'impact négatif sur l'environnement mondial.

Ceci implique qu’une coopération et des outils seront nécessaires pour augmenter la connaissance, pour contrôler l’état de dégradation des terres et renforcer les efforts pour combattre la dégradation; par exemple:

Etablissement d'un programme de collaboration régional ou sous-régional et de directives pour l'évaluation détaillée de la dégradation des terres, qui inclurait l'enquête sur l'état actuel de la dégradation et la surveillance des changements au niveau du sol.

Etude des effets économiques et sociaux de la dégradation sur les habitants, qui nécessitera la collaboration de spécialistes en ressources et gestion des terres et de sociologues.

A cet égard, il serait utile de lancer des programmes régionaux et/ou sous-régionaux sur l'évaluation de la dégradation des sols et ses impacts en Afrique subsaharienne (en conformité avec l'ASSOD «Etude de la Dégradation anthropique des sols en Asie du Sud et du Sud-Est»). De plus, il y a un besoin d'harmonisation des méthodologies et de promotion de l'évaluation quantitative des impacts de la dégradation sur la productivité au niveau national ou sous-régional, en utilisant la base de données SOTER 1:1 million.

Conception et exécution de programmes et de mesures pour combattre la dégradation des terres, qui incluraient:

  • une clarification des responsabilités institutionnelles, et peut-être l’établissement à un haut niveau de comités consultatifs sur les politiques relatives à la conservation des terres, à leur réhabilitation et à leur utilisation durable;

  • une identification des institutions responsables et des mécanismes de coordination pour l'évaluation et la surveillance de la dégradation des terres;

  • une identification des priorités en ce qui concerne le type de dégradation et les zones critiques;

  • une planification et une mise en place de programmes pour contrôler la dégradation et augmenter la productivité, comme les projets de conservation et de gestion des terres des bassins versants, les projets de gestion des ressources naturelles au niveau de la communauté «gestion des terroirs», les Programmes nationaux d'action pour combattre la désertification et les projets de développement des terres arides.

La base de données mondiale des sols et des terrains

La base de données mondiale Sol et Terrain (SOTER) est une initiative de l'ISSS et l'approche a été adoptée au 13ème congrès mondial de science du sol en 1986. Grâce à un projet PNUE, la méthodologie SOTER a été développée en étroite collaboration avec le centre de recherches sur les ressources en terres du Canada, la FAO et l'ISSS. En 1995, le PNUE, l’ISSS, la FAO et l’ISRIC ont conjointement édité le Manuel des procédures pour les bases de données numériques mondiales et nationales des sols et des terrains, avec une identification internationale.

Le programme fournit des données sur les ressources naturelles qui peuvent être aisément consultées, combinées et analysées du point de vue d'une utilisation et une production potentielle, par rapport aux conditions alimentaires, aux impacts sur l'environnement et à la conservation. L'approche est basée sur la cartographie des sols avec des informations sur le relief, la morphologie, les pentes, le matériau parental et les sols à l’échelle 1/1 000 000. Chaque unité SOTER est liée par un système d'information géographique (SIG) à une base de données électronique contenant toutes les caractéristiques disponibles sur la topographie, le modelé et le terrain, les sols, le climat, la végétation et l'utilisation des terres. Ainsi chaque type d'information ou chaque combinaison de caractéristiques peut être représenté dans l'espace comme une couche séparée ou en recouvrement ou sous forme de tableaux.

L’ISRIC, le PNUE et la FAO ont joint leurs ressources afin d’établir une carte SOTER du monde au 1/5 000 000 pour le 17ème congrès de l'ISSS (2002, Thaïlande). Ils ont reçu également l'appui d'autres organismes internationaux pour développer des bases de données SOTER pour des régions spécifiques. Les activités en cours et prévues relatives à SOTER sont présentées dans le tableau 7.

Tableau 7 Plan d’opération mondial SOTER: 1995-2002

Région

Statut

Principales agences en charge

Publié

Amérique latine et Caraïbes

Publié

ISRIC, PNUE, FAO, CIAT, Instituts nationaux d'étude du sol

1998

Afrique du Nord-Est

Publié

FAO-IGAD

1998

Afrique centrale et australe

En cours

FAO-ISRIC-Institutions nationales

2000*

Eurasie du Nord et Centre

Publié

IIASA, Institut Dokuchaev, Academia Sinica, FAO

1999

Europe de l'Est

Finalisé

FAO - ISRIC - Gouvernement hollandais - Institutions nationales

2000

Europe de l'Ouest

En cours

ESB - FAO - Institutions nationales

2001*

Afrique de l'Ouest

Proposition soumise

Fonds en attente (ISRIC, IITA)


Asie du Sud-Est

Proposition soumise

Fonds en attente


USA et Canada

Démarche propre



Australie

Démarche propre



* Partiellement publié

Bien que l'information soit rassemblée selon la même méthodologie SOTER, les détails spécifiques de l’information pour chaque région apparaissent en une échelle variable. Des cartes nationales SOTER ont été préparées, avec l'assistance de l'ISRIC, pour le Kenya (1/1 000 000), la Hongrie (1/500 000) et la République arabe de Syrie (1/500 000).

Les aspects des politiques et les responsabilités des gouvernements

Les méthodes pour établir des systèmes réellement durables pour les zones à faibles précipitations avec une forte densité de population ont besoin de beaucoup plus de recherche approfondie. Une intervention gouvernementale considérable serait indispensable pour faciliter la fourniture des intrants nécessaires aux cultures vivrières adaptées à la population existante.

Les problèmes sont peut-être moins aigus dans les régions plus humides, où les cultures arborées pérennes protègent le sol et recyclent des éléments nutritifs. Ils peuvent également fournir une source de revenus pouvant être réinvestis dans les méthodes destinées à augmenter les rendements et la fertilité du sol. Mais l'exemple du cacao cultivé au Ghana vaut la peine d’être cité. En rendant les jeunes plantes de cacao largement disponibles pour les petits propriétaires, une industrie a été établie avec succès. Tant que les bénéfices économiques parvenaient au moins chez une partie des agriculteurs, l'industrie et le pays ont prospéré. Quand le gouvernement a contrôlé le prix du cacao à la sortie de l’exploitation agricole, modifiant les bénéfices économiques, l'industrie s'est effondrée.

Même un système de production biophysiquement durable ne sera pas économiquement et socialement durable à moins que les politiques gouvernementales soient adaptées aux besoins de la communauté agricole et que les gouvernements investissent dans le renforcement des capacités.

Développement économique

Les améliorations de la production agricole dépendent non seulement de la mise en place de technologies pour obtenir des rendements croissants, mais également de beaucoup d'autres aspects de développement économique. Comme l’illustre bien l'exemple de la région de Machakos au Kenya, les offres d'emploi alternatives, les routes, l'accès aux marchés et les écarts de prix sont tous importants. Malgré de nombreuses années d’efforts du gouvernement pour réduire la dégradation des sols et augmenter la productivité agricole dans cette région, il y a eu peu d'impact jusqu'à ce que tous ces aspects soient devenus favorables. Puis, la production a augmenté, diverses mesures nécessaires pour renverser la dégradation des sols ont été introduites et la terre a récupéré de beaucoup d'années de mauvaise gestion.

Utilisation des engrais

Le développement de l'utilisation des engrais en Afrique subsaharienne a été lent, en dépit des grandes augmentations de rendement démontrées dans des expériences au champ (en stations de recherche et champs des agriculteurs). La raison principale est le coût élevé des engrais par rapport au prix des productions vivrières. Les prix des engrais dans les pays d'Afrique subsaharienne sont plus élevés que dans la plupart des autres endroits au monde. Là où les engrais ont été subventionnés, leur utilisation a généralement augmenté rapidement, mais, quand les subventions ont été supprimées, il y a eu une diminution importante de leur utilisation.

À l'heure actuelle, les éléments nutritifs des sols continuent à s’épuiser. Plutôt que d'augmenter la productivité des sols, les pratiques actuelles continuent à les dégrader. À moins que ces tendances soient renversées, il continuera à y avoir des pénuries alimentaires, et une diminution des contributions de l'agriculture au revenu national.

La recherche et les services techniques peuvent également aider à augmenter l'efficacité en termes de réponse de la culture par unité d'engrais utilisée. Ceci peut être obtenu en adaptant plus spécifiquement au climat, aux sols et aux cultures les types et quantités d'engrais ainsi que la période et la méthode d'application. Ceci exigera plus d'efforts de recherche et des approches innovantes et participatives de vulgarisation, telles que les champs-écoles des agriculteurs (Farmer Field School - FFS).

Une alternative serait d’augmenter le prix que reçoivent les agriculteurs pour leur production. Ceci crée un problème pour les gouvernements qui cherchent des moyens de maintenir un prix bas pour les denrées alimentaires. Il n'y a aucune solution facile, mais la ligne de conduite appropriée pourrait être de maintenir des subventions partielles dans des conditions biophysiques et socio-économiques spécifiques. En période de pénurie, les gouvernements peuvent importer de la nourriture ou recevoir une aide alimentaire. Ces deux mesures maintiendront les prix bas, au détriment de l’agriculteur et de sa production.

Les droits fonciers et l’accès à la terre

Un des principaux problèmes est que les agriculteurs sont peu disposés à investir dans l'amélioration des sols sans être sûrs qu'eux et leurs héritiers garderont leurs droits d'utiliser la terre. Bien que la sécurité nécessaire procurée par un régime foncier soit généralement soulignée, un titre légal et des ventes de terres peuvent signifier que quelques personnes ayant de grandes ressources financières achèteront de grandes propriétés, qui pourront être développées pour le bénéfice d’un privé plutôt que celui de la communauté.

En outre, dans plusieurs zones plus sèches, la libre circulation du bétail et des gens a été essentielle pour la survie de certaines communautés. Sauf si les restrictions de mouvement sont accompagnées de politiques qui s'assurent qu'un autre mode de vie économiquement viable et socialement acceptable est offert aux personnes affectées par ces restrictions, les problèmes créés sont susceptibles de l’emporter sur tous les avantages.

Le développement du capital biologique - plantation d’arbres, bandes enherbées sur les courbes de niveau, établissement de pépinières pour la production de graines ou de jeunes plants des espèces nouvelles et améliorées ou des variétés - peut être plus aisément financé sur des ressources locales, mais demandera souvent quelques intrants externes. Ceci peut être peu coûteux, par exemple si les droits fonciers nécessaires et l'assurance de la stabilité sociale sont donnés à la communauté locale.

Fragmentation des propriétés et migration

Quand les petites exploitations agricoles sont à nouveau divisées, la taille de la propriété devient moins capable de subvenir aux besoins d’une famille. En désespoir de cause, des parties des terres communales réservées au pâturage sont cultivées, ayant inévitablement pour résultat des conflits. Quand les problèmes deviennent trop difficiles, de grands groupes peuvent émigrer vers une autre terre, ou vers la ville, s'ajoutant aux chômeurs.

Pour atténuer ou résoudre ces problèmes, des mesures de conservation du sol et de l'eau devraient être mises en place. La communauté locale peut financer et mettre en application de telles mesures, comme à Machakos au Kenya mais, le plus souvent, un soutien gouvernemental ou un crédit à un coût raisonnable sont nécessaires.

Participation des intéressés

Comme il a été discuté lors de la consultation d’experts de Harare en 1997, les systèmes de cultures réussis et durables ont été développés quand les agriculteurs étaient impliqués dans toutes les étapes. Parmi les exemples de réussite, se trouve l'association des agriculteurs formée en Ouganda. Il y a beaucoup de formes d'associations d’agriculteurs et de communautés qui peuvent contribuer au développement agricole. Les agriculteurs eux-mêmes sont parmi les agents de vulgarisation les plus efficaces.

Pour s'assurer qu'un système agricole est durable, il est souvent nécessaire qu'une grande surface de terres soit gérée convenablement. Plus généralement, le bassin versant doit être géré de telle sorte que les pentes supérieures ne soient pas érodées et que les précipitations soient retenues dans les sols de la partie supérieure du bassin, pour éviter l’inondation et la sédimentation dans les parties inférieures du bassin versant. La protection des parties supérieures du bassin versant contre l'utilisation agricole, qui peut entraîner de l'érosion, a été souvent imposée par des décrets gouvernementaux. Mais quand les agriculteurs ont besoin de terre pour survivre, de tels décrets tendent à perdre leur autorité. Si les conseils régionaux ou de district - dans lesquels les agriculteurs constituent une majorité - ont le droit de déterminer la gestion du bassin versant, il est naturellement essentiel que les agriculteurs et autres personnes aient accès à des conseils nécessaires. Les organes consultatifs nationaux ou internationaux peuvent devenir indispensables quand il y a des intérêts communs dans la gestion d’unités foncières transfrontalières régionales et nationales.

12. Gestion durable des ressources naturelles par de petits agriculteurs dans un programme participatif (soutenu par le PNUD et la FAO) au Malawi.

Les services nationaux de recherches et de vulgarisation, souvent associés avec des organismes, internationaux ou non, ont un rôle clé à jouer en s'assurant que toutes les options pour l'amélioration de la productivité des exploitations agricoles et de la conservation des ressources sont connues des agriculteurs. Les projets «Contil» au Zimbabwe sont de bons exemples de la façon dont ceci peut être fait.

Beaucoup d'ONGs travaillent plus étroitement avec les communautés d'exploitants agricoles que des services gouvernementaux de conseil, et peuvent aider les agriculteurs et les autorités nationales à acquérir une meilleure compréhension des problèmes locaux. De même, le secteur privé a un rôle à jouer, comme la fourniture d’engrais ou d’amendements convenablement emballés, avec une étiquette claire et complète, à des prix concurrentiels. Afin de satisfaire les besoins des agriculteurs, les producteurs d'engrais doivent avoir une bonne connaissance de la façon dont les engrais pourraient être mieux employés, en association avec des fumiers et d'autres amendements organiques.

La participation des exploitants agricoles à la recherche est un outil puissant pour augmenter l'intérêt des agriculteurs et comprendre la façon de faire les meilleurs choix à partir des options disponibles. La connaissance doit être mise en commun entre la recherche, les services de vulgarisation et les organisations commerciales; les informations doivent être échangées avec les organisations d’agriculteurs. Pour qu'une approche holistique soit réussie, avec une information librement partagée, il est essentiel qu'il y ait de l'information utile à partager. Les organismes nationaux et internationaux ont un rôle à jouer en établissant les mécanismes pour ces échanges d'information.

Besoins de recherche

La connaissance indigène est fondée sur une longue expérience, mais peut ne pas être adaptée au changement des conditions. Une recherche claire doit alors offrir des options pour répondre aux changements. Des informations importantes sont disponibles au sujet des méthodes de gestion des sols destinées à augmenter la productivité. Mais l'information manque concernant l'adaptation des méthodes et les meilleures politiques pour les rendre socialement acceptables et économiquement viables. Les institutions nationales de recherche vont avoir besoin d’aide et d'assistance pour conduire les études nécessaires. Des réseaux doivent être établis ou renforcés pour permettre d'obtenir et partager les résultats de la recherche. La recherche doit inclure les questions sociales et économiques pour compléter l'information sur la terre et pour permettre l'extrapolation des résultats.

Les sources et les qualités du fumier et des amendements organiques nécessitent davantage d'études. Le fumier est rarement entassé et manipulé avec des pratiques qui maintiennent sa qualité. Les arbres - et autres espèces - employés comme sources d'amendement organique méritent beaucoup plus d’attention. En outre, on devrait connaître plus de choses sur la quantité et la qualité de la biomasse produite, les conditions dans lesquelles les arbres poussent bien, la valeur du bois pour d'autres usages, la valeur des fruits produits et les conditions de son utilisation. Bien que les légumineuses aient été favorisées en raison de leur capacité de fixation d'azote, les non-légumineuses ont souvent d'autres dispositifs intéressants tels que la capacité de récupérer le phosphore du sol, comme le fait Tithonia diversifolia qui est une espèce utilisée pour les haies.

Les taux de dégradation et de récupération de différents types de sol dans des environnements variés devraient être expérimentalement étudiés. Ceci implique que des expériences à long terme soient établies et surveillées. Ces expériences doivent être complétées par un programme plus large de surveillance des changements de sols dans une large gamme de conditions de sol. Par conséquent, des engagements forts des gouvernements sont nécessaires pour soutenir le développement du secteur agricole et des services nationaux de recherche et de vulgarisation; l'assistance des organisations non gouvernementales et internationales doit également être encouragée.

L'initiative pour la fertilité des sols

La clef de la restauration et de l’amélioration de la fertilité du sol est la responsabilité collective de beaucoup de parties: des gouvernements, des organisations non gouvernementales, intergouvernementales et toutes les parties prenantes dans le processus de production vivrière. En conséquence, la Banque Mondiale, en collaboration avec la FAO, a fourni l’encadrement pour assembler et coordonner un effort global qui se concentrera sur le renversement des effets néfastes de la dégradation du sol et de l'épuisement des éléments nutritifs en Afrique subsaharienne. D'autres organismes internationaux, tels l’ICRAF et l’IFDC, sont actuellement impliqués dans l'Initiative.

Appuyant des actions plus larges comme la lutte contre la pauvreté, la sécurité alimentaire et la protection de l'environnement, l'objectif principal de l'Initiative pour la Fertilité des Sols (IFS) est d'améliorer la productivité des terres cultivées et le revenu des agriculteurs par la combinaison de l’adaptation de technologies et de réformes politiques.

Un atelier a été organisé au Togo (avril 1997) avec la participation de 120 délégués représentant 22 pays d'Afrique subsaharienne, ainsi que des institutions sous-régionales, des ONG et le secteur privé, aussi bien que des organismes internationaux de développement et de recherche, y compris la FAO. L'atelier a de nouveau souligné le besoin de recapitalisation, d'entretien et d'amélioration de la fertilité du sol comme base pour une sécurité alimentaire à long terme. Après une série de discussions et d’améliorations, impliquant la FAO, le «cadre des plans nationaux d'action pour l'amélioration de la fertilité du sol» a été développé.

La dynamique de l’IFS

· Diffusion des technologies appropriées pour la restauration et l'entretien de la fertilité du sol et l'intensification de l'agriculture par une approche intégrée utilisant des engrais organiques et minéraux, un contrôle de l'érosion, la gestion de la terre et de l'eau afin d’augmenter la sécurité alimentaire et le revenu agricole.

· Promotion des politiques permettant de corriger les contraintes institutionnelles et du marché pour améliorer la productivité du sol.

· Développement des programmes qui fourniront des incitations et assureront la pleine participation des différents agriculteurs et communautés pour la restauration de la fertilité du sol et la gestion améliorée des terres.

L’IFS a été officiellement lancée pendant le
Sommet Mondial de l’Alimentation de novembre 1996.

Dispositifs importants du cadre et de la préparation du Plan d’Action National de l’IFS

Un Plan d’Action National (PAN) favorise les actions et les investissements en capitaux et en travail pour l'amélioration de la fertilité du sol et pour les secteurs d’assistance (disponibilité et accessibilité améliorées des amendements et des intrants pour l'intensification agricole, etc.), et pour diminuer les contraintes socio-économiques et techniques.

Mise en place des ateliers et des groupes de travail nationaux

Les ateliers permettront l'identification des besoins d'amélioration de la fertilité des sols, créeront une prise de conscience générale et établiront des groupes de travail qui incluent toutes les parties prenantes (ONGs, représentants de groupes d’agriculteurs, producteurs et distributeurs d'intrants agricoles, services de recherche et de vulgarisation, personnes définissant la politique et techniciens multidisciplinaires). Ces groupes aideront à la préparation du Plan d’Action National.

Identification des ministères, des établissements et des services publics à impliquer

La création d'un environnement favorable et le développement d’un marché des productions agricoles et des intrants relèvent de la compétence de plus de ministères que le seul ministère de l'agriculture. D'autres ministères devront donc aussi jouer un rôle dans l’IFS, tels que les ministères de l'environnement, de la forêt, des finances, de la planification, des sciences et de la technologie ainsi que celui des affaires sociales. Des arrangements doivent également être pris pour clarifier les responsabilités et assurer la participation opérationnelle de diverses institutions au niveau national, régional et local.

Données et études préliminaires

Les données indispensables pour la préparation d'un PAN pour l’IFS incluent: des caractéristiques géographiques et agro-écologiques, des données socio-économiques et agricoles ainsi que des informations sur les politiques agricoles en cours et l'orientation stratégique. Des études et l'analyse des contraintes agricoles seront également nécessaires. Les contraintes et les solutions possibles liées à l'amélioration de la fertilité du sol dépendront des conditions socio-économiques et agro-écologiques nationales, régionales ou locales du pays. Les stratégies pour mettre en application le PAN changeront d'un pays à l'autre, selon l'ampleur et l'importance de la dégradation des sols et l'épuisement des éléments nutritifs, la disponibilité des intrants au niveau local, les autres technologies de gestion des sols, les moyens disponibles et l'engagement des bailleurs de fonds.

La mise en place du PAN

Quand la stratégie aura été adoptée par le gouvernement, l’exécution comportera la participation de toutes les parties prenantes et l’assistance de bailleurs de fonds ou d’organismes de crédit. Les vrais promoteurs de la fertilité du sol (les agriculteurs) et le secteur privé peuvent agir efficacement une fois qu’une politique d'environnement et le développement du marché sont en place.

Indicateurs pour le suivi d’un PAN

Les performances d’un PAN doivent être surveillées et évaluées. Cela nécessitera un ensemble d’indicateurs incluant:

  • Des indicateurs physiques tels que le bilan des éléments nutritifs, les systèmes d'utilisation de la terre et l'intensité de cette utilisation, la couverture du sol, l’utilisation accrue des amendements, des engrais organiques et minéraux, et des mesures de paramètres de fertilité du sol (pH, CEC, MO, statut nutritif);

  • Des indicateurs économiques tels que les tendances des rendements des cultures, la productivité du bétail, les niveaux de rendement, les prix et le revenu rural;

  • Des indicateurs sociaux tels que le taux d'adoption des procédures de gestion améliorée du sol par les agriculteurs et les communautés d'exploitants agricoles, une plus grande stabilité des communautés rurales (par exemple migration réduite);

  • Des indicateurs environnementaux tels que le taux de déboisement, l'état des terrains de parcours et l'érosion, la séquestration du carbone.

Stratégie, synergie et coordination

Le Plan d'Action adopté par le Sommet Mondial de l’Alimentation demandait des efforts concertés à tous les niveaux pour augmenter la production alimentaire et améliorer l'accès à la nourriture. Il s'est concentré sur les pays en déficit alimentaire et à bas revenus (Low Income Food Deficit Countries: LIFDCs), en particulier en Afrique, avec l'objectif de réduire de moitié le nombre actuel de personnes sous-alimentées dans le monde, et ce, pour l'année 2015.

La collaboration entre la Banque Mondiale et la FAO a été renforcée dans le cadre du Programme Spécial pour la Sécurité Alimentaire (PSSA). Le PSSA favorise le développement rural et les programmes de sécurité alimentaire, par l'exécution de projets locaux (irrigation à petite échelle peu coûteuse, contrôle de l’eau, gestion améliorée des terres et augmentation de la fertilité du sol, intensification des cultures et diversification), analyse des contraintes et réforme de la politique et renforcement des capacités.

La Banque Mondiale et la FAO (divisions TCI et AGL) ont lancé la préparation des Plans Nationaux d'Action de l’IFS dans environ 20 pays en Afrique subsaharienne (Figure 9).

Figure 9 Pays d’ASS participant à l’IFS

Les projets entrant dans le cadre IFS-PAN doivent assurer la gestion participative de la terre et l'amélioration de la fertilité, en tirant parti des expériences des projets assistés par la BM et la FAO, tels que la gestion des terroirs: gestion des ressources naturelles au niveau de la communauté, méthodes améliorées de gestion de la terre, et champ-écoles des agriculteurs (un instrument pour le développement participatif de la gestion et de la conservation intégrées du sol et des éléments nutritifs spécifiques à une zone).

Les stratégies de l’IFS sont prévues pour différer selon les pays et les régions et pour tendre à être propres à une zone. La densité de population, la taille de l’exploitation agricole et le coût de livraison des engrais importés jusqu’aux zones agricoles ont une influence importante sur le choix des stratégies, de même que, naturellement, les conditions de sol.

Position commune actuelle sur l’IFS

Les participants à la consultation informelle sur l’IFS (Rome, novembre 1998) ont convenu que les activités de l’IFS devraient avoir comme conséquence des bénéfices économiques à court terme pour les agriculteurs, aussi bien que la restauration du capital d'éléments nutritifs du sol à plus long terme. La politique et les améliorations institutionnelles sont essentielles au succès de l’IFS.

Dans chaque pays où le processus de l’IFS est opérationnel, il gagne du terrain et un certain nombre d'experts nationaux ont été impliqués dans le développement des concepts et sont enthousiastes pour ce qui est de la poursuite. Dans la plupart des pays, même le modeste processus pas à pas de l’IFS est confronté à des contraintes de financement, bien que les principaux donateurs semblent être d’un grand soutien en principe.

L'appui au niveau politique varie selon les pays, et n'émergera probablement pas valablement jusqu'à ce que des résultats concrets soient observés au niveau du terrain. Le plus grand danger auquel doit faire face le programme est que cet élan pourrait être rapidement perdu en raison d'un manque de fonds pour avancer. Il y a besoin de passer en revue, pays par pays, les occasions d'inclure des activités relatives à l’IFS dans les projets et les programmes en cours (par exemple vulgarisation, recherche, ASIP, etc.). Cette revue devrait avoir lieu une fois qu'un consensus sera atteint sur la stratégie globale pour reconstituer la fertilité du sol.

La convention de l'ONU pour combattre la désertification

Le PNUE et la FAO ont défini la désertification comme étant simplement «la dégradation de la terre dans les zones semi-arides et subhumides». Cependant, à l'origine, elle a été définie en terme de dessèchement général du paysage, lié à une baisse des précipitations et à l'érosion du sol, entraînant des changements dans la végétation. L'étude de l’imagerie satellitaire indique que le recul de la végétation est plus lent qu’il n’était prévu à l'origine, et que le problème de la désertification a été exagéré. Les résultats du GLASOD prouvent clairement qu'il y a une dégradation significative du sol dans ces régions.

L'objectif de la convention de l'ONU pour combattre la désertification (UNCCD) est d'atténuer les effets de la sécheresse dans les pays éprouvant une sécheresse ou une désertification sérieuse, en particulier en Afrique. Les actions régionales, nationales et locales doivent être soutenues par des arrangements internationaux de coopération et de partenariat, et doivent être effectuées dans le cadre d'une approche intégrée en accord avec l’Agenda 21 de la CNUED.

A côté de ce système Global pour la mobilisation des ressources financières, le Secrétariat Permanent et le Comité des Sciences et Technologies (auquel participe la FAO) fonctionnent déjà. En collaborant avec d'autres agences de l'ONU (FIDA, PNUE, PNUD, FEM), la FAO aide les pays membres à élaborer et exécuter des programmes nationaux d'action (avec l’UNCCD) de même qu’à formuler des projets pilotes dans l'utilisation, la gestion et la conservation de ressources en terres (par exemple au Mali et à Cuba).

Il y a plusieurs questions complémentaires (par exemple diagnostic des contraintes, dégradation des terres, mesures régénératrices et technologies appropriées pour augmenter la productivité) dans le cadre du PAN-IFS, du PAN-UNCCD et du PSSA, particulièrement dans les environnements arides et semi-arides. Ceci réclame une étroite coordination et des efforts harmonisés, en particulier au niveau des pays.

La convention pour combattre la désertification

Programmes d'action: élaboration de programmes d'action nationaux, de programmes sous-régionaux d'action et coopération internationale.

Cadre pour la coopération technique et scientifique: collecte, analyse et échange d'information pour assurer l'observation systématique de la dégradation des terres dans les secteurs affectés et pour évaluer les processus de sécheresse et de désertification - un secteur d'intérêt principal à la FAO en général et AGLL en particulier, qui traite du transfert, de l'adaptation et du développement de technologie.

Mesures d’assistance: renforcement des capacités de tous types: un secteur où la FAO a une importance particulière.


Page précédente Début de page Page suivante