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5 PROPOSITIONS FORMULÉES DANS LE CADRE DES NÉGOCIATIONS ET PERSPECTIVES


La Côte d'Ivoire n'a pas présenté une proposition autonome à la Session spéciale sur l'agriculture, mais elle s'est associée à la plupart des pays africains pour élaborer une proposition commune à défendre lors des négociations.

5.1 Accès aux marchés

La Côte d'Ivoire a mis en place des réformes commerciales qui ont réduit de manière considérable les droits de douane (au-dessous des droits consolidés). Des efforts considérables ont été déployés, dans le sens des réformes commerciales, même si le TEC n'a pas été totalement respecté. Le problème de l'incidence négative de la progressivité des droits a été examiné, mais aucune conclusion n'a pu être tirée, faute d'informations suffisantes.

Les autorités de Côte d'Ivoire déplorent les pics tarifaires et les taux progressifs appliqués aux pays développés car ils découragent les transformations et freinent la diversification des produits d'exportation (Ministère du commerce, 2002).

Au niveau macro-économique, les hausses brusques des importations alimentaires n'ont pas été enregistrées au cours de la période 1995-1999, par rapport à la période 1985-1994, sauf pour le poisson. Toutefois, comme cela a été mentionné, ces importations ont été réexportées. Les importations nettes n'ont pas enregistré de telles hausses. Au niveau plus désagrégé, la Côte d'Ivoire a enregistré de fortes hausses d'importation pour l'huile de palme, et les entreprises concernées ont demandé de bénéficier des avantages de la TCI pour obtenir des mesures compensatoires. Le prix de référence qui a été utilisé pour remplacer les mesures de sauvegarde a été modifié. Enfin, après quelques difficultés, le régime d'évaluation en douanes a été mis en place, en juillet 2001.

Les autorités ivoiriennes estiment que les sauvegardes ne devraient pas être limitées aux pays développés mais qu'elles devraient s'étendre aux pays en développement (Ministère du commerce, 2002).

5.2 Soutien interne

La position officielle des autorités ivoiriennes, compte tenu du niveau élevé de soutien, dans les pays développés (après 2000) le principe consistant à ne pas utiliser les mesures de la catégorie bleue devrait être revues à moins que le soutien des pays riches soit très rapidement réduit de manière radicale (Ministère du commerce, 2002)

Toutes les mesures envisagées au titre du soutien interne, dans le texte, sont des mesures de la catégorie verte prévoyant des financements publics. À la suite des réformes commerciales mises en place avant l'Accord sur l'agriculture, il ne reste pratiquement plus de mesures de la catégorie orange en vigueur. Compte tenu de ces efforts, des limites de production envisagées et du faible risque de distorsion sur les échanges des mesures de la catégorie bleue, il semble judicieux de réclamer que ces mesures soient utilisées.

Il peut sembler surprenant d'encourager des mesures de la catégorie bleue, du fait des problèmes budgétaire, mais on peut avancer que les limitations budgétaires seront partiellement surmontées avec les ressources imminentes des PPTE qui pourraient être affectées aux programmes de production alimentaire. Le mécanisme de réduction de la production contenu dans les mesures de la catégorie bleue, pourraient être appliqués sans problème au cacao, afin de limiter la surproduction. Le problème essentiel concerne toutefois les problèmes administratifs et tiennent à la faiblesse des capacités techniques locales.

5.3 Concurrence à l'exportation

De 1995 à 1999, la situation des prix unitaires à l'importation n'est pas univoque; les prix à la hausse (blé, boissons, tabac et sucre) et ceux à la baisse (poisson, riz, produits laitiers, fruits) s'équilibrent. D'une part, la chute du prix du riz, par exemple, du fait de l'expansion des subventions à l'exportation par les pays développés, est défavorable aux agriculteurs locaux car elle entrave la production. Par ailleurs, le déclin du coût des importations (pas entièrement compensé par l'accroissement prévu du volume des importations) permettrait de réduire les problèmes de la balance des paiements. Une amélioration des incitations à la production semble clairement souhaitable.

Le fait qu'après l'an 2000, le montant des subventions à l'exportation versées par les pays de l'OCDE à leurs agriculteurs représentaient 64 pour cent du niveau de référence (1986-1990) est considéré par les autorités ivoiriennes comme une concurrence déloyale entravant les échanges internationaux. Il prive ses agriculteurs de nouvelles possibilités d'accroître la production locale et de relancer la croissance économique. De ce fait, on a recommandé l'élimination de ces subventions à l'exportation dans les meilleurs délais (Ministère du commerce, 2002)

La Côte d'Ivoire est un pays exportateur net de divers produits alimentaires (fruits, oléagineux, huiles végétales) mais il n'utilise pas d'ordinaire des restrictions à l'exportation. Des taxes d'exportation, comme les droits uniques de sortie (DUS), ont été appliquées au café et au cacao mais elles ont été réduites. Comme les pays développés ont recours à la progressivité des droits de douane pour protéger leurs industries locales, il semble judicieux d'établir un lien entre la réduction des limitations et des taxes à l'exportation, et la réduction de la progressivité des droits.

5.4 Traitement spécial et différencié

En Côte d'Ivoire, 98 pour cent des terres sont exploitées de manière traditionnelle par de petites exploitations familiales. De ce fait, le traitement spécial et différencié s'applique aux problèmes nationaux du pays.

Les pouvoirs publics estiment que si ce traitement spécial et différencié est pris en considération, la libéralisation devrait avoir des résultats contraires à ceux envisagés avant la réforme (Ministère du commerce, 2002). Toutefois, aucun argument convainquant ne permet d'appuyer et d'appliquer cette position.

La question est de savoir pourquoi la Côte d'Ivoire devrait adopter des mesures de TSD puisqu'elle a presque totalement libéralisé sa politique des échanges. La libéralisation ne devrait pas être une fin en soi, comme c'est le cas, mais devrait viser à stimuler la croissance économique. Comme la croissance escomptée n'as pas été au rendez-vous (Easterly, 2001; Stiglitz, 2002), malgré les efforts de réforme entrepris dans le pays et les contributions financières, il semble judicieux de remettre en cause la réforme dans son ensemble. Les contraintes budgétaires sont un bon motif pour éviter d'utiliser les mesures de la catégorie bleue. En principe, rien ne justifie le fait que les pays développés utilisent des mesures de distorsion des échanges, pour limitées qu'elles soient, (si ce n'est la position dominante sur le marché et le pouvoir politique) et interdise à d'autres d'en faire autant.

La Côte d'Ivoire a donc besoin de crédits pour poursuivre activement ses efforts de libéralisation des échanges et elle devrait pouvoir accroître ses taux de droits, dans les limites engagées. Les mesures de la catégorie verte offrent la possibilité d'étendre les subventions d'investissement mais le recours aux mesures de la catégorie bleue est également envisageable.

Pour ce qui est des hausses brusques des importations, il conviendrait de favoriser les incitations à la production tout en réduisant les subventions à l'exportation afin de tenir compte des exigences de la balance des paiements. De telles réductions des subventions à l'exportation peuvent justifier les réductions des limitations restantes affectant les exportations, de la part de la Côte d'Ivoire. Aucun changement décisif des politiques ne peut intervenir si les pays en développement, ne renforcent pas leur esprit de groupe. Sans une amélioration de leurs pouvoirs de négociation, aucune croissance agricole significative ne sera possible. La sous-alimentation et la pauvreté subsisteront et prendront de même de l'ampleur.


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