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6.1 AGRICULTURE BIOLOGIQUE CERTIFIÉE


La publication de la FAO Agriculture biologique, environnement et sécurité sanitaire des aliments, traite de l’impact de l’agriculture biologique, certifiée et non certifiée. L’étude note que la rentabilité des systèmes biologiques peut paraître élevée au cours d’une saison, en raison des primes de prix perçues pour la culture commercialisée, mais peu élevée la saison suivante parce que sont cultivés des aliments pour animaux ou des engrais verts. Il est donc essentiel de prendre en considération la rotation dans son ensemble dans l’évaluation de la rentabilité des systèmes biologiques.[88]

Le tableau 5 offre un panorama des études de cas de production biologique certifiée de petits exploitants dans les pays en développement.

Tableau 5 - Panorama des données économiques agricoles tirées d’études de cas de production de cultures commerciales certifiées biologiques dans les pays en développement

Cas

Nb.
d’exploitants

Coût de production

Rendement

Prime de prix

Profit net

Remarque

FRUITS ET LÉGUMES

1. El Salvador, Las Pilas, légumes

66

Exigence en main-d’œuvre plus forte

?

Oui

?

Difficile de comparer le système conventionnel basé sur deux saisons avec une rotation biologique tout au long de l’année.

2. Pérou, Alto Piura, mangues

200 (dont 64 certifiés)

Coûts de production/caisse: -33% Coûts de récolte: -82%

Similaire ou légèrement supérieur

-18% (pulpe biologique par rapport à la pulpe fraîche conventionnelle)

Bénéfice/caisse +170%

Aucun classement nécessaire pour l’usine de pulpe.

3. Ouganda, fruits tropicaux

10-20

Similaire (certification payée par l’exportateur et dont il est titulaire)

Similaire

Aucune

Similaire

Certification du système existant, pour la sécurité du marché.

4. République dominicaine, bananes

> 450

+8%

Similaire

+22-29%

+50%

Les problèmes de qualité et le pouvoir de l’exportateur sur le marché rendent l’avenir incertain pour les petits producteurs.

5. Costa Rica, Talamanca, bananes + cacao de l’APPTA

1 100

Supérieur (main-d’œuvre)

Supérieur

150% (cacao)

Positif en termes de rémunération du travail

3 systèmes de production: a) cacao + fruits + arbres b) bananes + fruits + arbresc) cacao + bananes + fruits + arbres

CAFÉ

6. Brésil, massif de Baturité

158 (dont 110 certifiés)

Supérieur

?

Seulement pendant trois ans

Supérieur pendant trois ans

Certification abandonnée en raison de la perte du marché d’exportation à prix élevés au bout de trois ans.

7. Costa Rica, études de paires

10 paires 1 conventionnel + 1 biologique

Moyenne: +4,5%

Moyenne: -22%

Moyenne: 20% ±7

Moyenne: - 4,5%

Forte variation entre les paires.

8. Guatemala, massif des Cuchumatanes

370

Au moins +15% (subvention de projet pour les coûts de certification)

+38% à +67%

+30% en 2000 et +18% en 2001 (café vert)

Supérieur

La construction de routes a réduit les coûts de transport (et a également profité aux exploitants conventionnels).

COTON

9. Inde, Projet Maikaal

>1 000

-30% à -40%

+20%

25%

Supérieur


10. Ouganda, EPOPA

24 000

Similaire (certification payée par l’exportateur et dont il est titulaire)

Similaire

15-30% (sur le prix à la sortie de l’exploitation)

Jusqu’à <30% (ainsi que des bénéfices supplémentaires pour l’exportateur).

Fondamentalement, certification du système de production existant

SUCRE DE CANNE

11. Argentine

600

Similaire par ha +34% par tonne en 2001

-25%

+75% en 2001. +35% en 1998.

+118% en 2001.

Principal avantage: maintien en activité du transformateur de sucre

THÉ

12. Sri Lanka, Biofoods, thé et épices

443

?

?

Thé: 100% (y compris la prime du commerce équitable?) Épices: 10-30%

?

Certification payée par l’exportateur ou un autre organe

Légumes biologiques frais pour les supermarchés locaux au Salvador

Sur la base du rapport de Damiani, 2001a.

Historique et organisation

A la fin des années 90, deux ONG nord-américaines, CLUSA et Technoserve, ont encouragé la création de trois coopératives d’exploitants à Los Planes et Las Pilas, en El Salvador. Le climat dans la zone convient à la production de légumes biologiques et les ONG ont identifié des opportunités pour une commercialisation dans les supermarchés. Au total, 66 exploitants ont participé. Une des motivations les plus importantes de l’adoption des méthodes biologiques était la préoccupation relative à d’éventuels problèmes de santé associés aux intrants chimiques conventionnels. Les exploitants cultivaient auparavant sur la base de deux saisons, avec des légumes irrigués pendant la saison sèche et du maïs pendant la saison des pluies. Les exploitants avaient vendu leurs légumes conventionnels par le biais d’agents intermédiaires, qui les ont vendus sur le marché «La Tiendona» à San Salvador. Par le biais de ces projets, les exploitants ont vendu à certaines des principales chaînes de supermarchés en El Salvador.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

Les supermarchés exigeant un flux constant de produits, les exploitants devaient disposer d’une infrastructure d’irrigation, ce qui était une condition imposée par CLUSA et Technoserve lors de la création des groupes d’exploitants. Les groupes devaient programmer leur production afin de pouvoir récolter chaque semaine, prévoir scrupuleusement la récolte et distribuer des quotas de récolte à chaque exploitant. Les supermarchés exigeaient également une qualité supérieure par rapport aux marchés traditionnels, et une couleur, une taille et un goût plus uniformes. Certains investissements spécifiques devaient être effectués, en particulier la construction de terrasses et les plantations sur billon pour la préservation des sols. CLUSA et Technoserve ont toutes deux aidé les groupes à obtenir des fonds pour construire les stations de conditionnement collectif et une serre pour produire des plants de laitue.

Aspects économiques

Il est difficile de faire une comparaison entre une production de légumes biologiques continue sur l’année et le système saisonnier maïs-légume. En raison de la plus forte demande de main-d’œuvre, les exploitants ont légèrement réduit leur surface cultivée. Les exploitants qui avaient continué de cultiver la même culture ont fait état de rendements baissant beaucoup au cours des deux ou trois premières années, puis se redressant et se stabilisant légèrement au-dessous des rendements des méthodes conventionnelles. L’étude indiquait que les prix payés par les supermarchés étaient supérieurs à ceux de La Tiendona, et qu’il existait également une prime pour le biologique. La plupart des exploitants biologiques étaient des hommes, ce qui s’explique peut-être par le besoin de formes stables de propriété foncière pour faire des investissements dans la préservation des sols qui ne sont rentables que sur le long terme, et l’exigence d’une infrastructure d’irrigation (les femmes dans la région peuvent être désavantagées en raison d’inégalités de propriété). Une autre explication peut être que les mesures de préservation des sols requéraient un travail physique considérable et que la plupart des exploitants n’ont pas les ressources pour engager du personnel. Les trois usines de conditionnement ont conduit à la création de postes salariés, employant au total 45 travailleurs dont la plupart étaient des femmes.

Pulpe de mangue biologique d’Alto Piura, au Pérou

Sur la base du rapport de Cardoza, 2001.

Historique et organisation

L’Asociación de Productoras y Productores Ecológicos del Alto Piura, dans le nord du Pérou, réunit les petits exploitants avec, en moyenne, 2,1 ha sous irrigation, essentiellement des arbres fruitiers. Depuis 1993, l’ONG Centro IDEAS a encouragé l’agriculture biologique dans la vallée. Au moment du rapport, IDEAS conseillait environ 200 exploitants, pour une superficie totale de 3 000 ha. Parmi ces producteurs, environ 32 pour cent étaient certifiés. Un des plus forts volumes produits est la mangue. En 1999, un importateur nord-américain (Douglas Stewart) a commandé un conteneur (20 tonnes) de pulpe de mangue biologique, mais il n’a pas pu être livré parce que la certification a été obtenue trop tardivement. L’année suivante, cependant, des préparatifs corrects ont été réalisés et il fut décidé que les mangues seraient transformées sur le site d’Agrobackus à Motupe-Lambayeque. Les exploitants et le site ont été inspectés et ont reçu la certification à temps.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

Une des techniques biologiques les plus adoptées est l’utilisation du paillis. En 2000, quelque 60 ha de vergers fruitiers ont été mis en place ou restaurés. La mise en place d’un verger fruitier coûte 500 $E.-U./ha. Pour l’élagage et le greffage de nouvelles variétés sur de vieux arbres, 175 $E.-U./ha sont nécessaires. En outre, l’incorporation de matériel biologique est un investissement important. Centro IDEAS a fourni une assistance technique par le biais de sites de démonstration pour les petits exploitants, de la formation de coordinateurs et de promoteurs, de recherche participative, et d’investissements 1-et-1 (ce que l’exploitant investit, IDEAS le double).

Aspects économiques

Après sa mise en place, l’entretien d’un ha de manguiers coûte en moyenne 400 $E.-U. pour un verger biologique, contre 1 015 $E.-U. pour un verger conventionnel. Les rendements de la mangue biologique se situent autour de 25 tonnes/ha. Pour les mangues fraîches conventionnelles, les charges variables de production et de récolte étaient de 7 nouveaux sols (NS)/caisse, alors qu’ils atteignaient un prix moyen en ville de 9 NS/caisse. Pour la mangue biologique sur le site d’Agrobackus, les charges variables étaient de 2 NS/caisse, et le prix perçu était de 7 NS/caisse, ce qui engendrait une marge de profit bien supérieure. Les coûts de récolte en particulier étaient inférieurs (en baisse de 5,5 NS à 1 NS/caisse), essentiellement parce qu’aucun calibrage n’était nécessaire pour l’usine de pulpe. Les coûts annuels de certification pour l’ensemble du groupe étaient de 1 300 $E.-U., ce qui correspondrait en moyenne à seulement 20 $E.-U. par exploitation.

Fruits tropicaux biologiques - une opportunité commerciale en Ouganda

Sur la base du rapport de Kidd, Tulip et Walaga, 2001.

Historique et organisation

L’exportation de fruits biologiques en provenance d’Ouganda s’est développée sans le soutien de donateurs. Deux exportateurs, Bio Tropical Garden et AMFRI Farm, ont réuni 10 à 20 exploitants sous la forme d’un système de production raisonnée. Les exploitants reçoivent peu d’informations techniques outre les interdictions. Les exportateurs avaient déjà traité avec les mêmes exploitants pour la production conventionnelle.

Investissements et aspects économiques

Les exploitants n’ont pas eu à beaucoup modifier leurs pratiques. Les exportateurs payent la certification (pas de système complexe de contrôle interne, mais une certification de groupe avec de simples registres et une inspection à 100 pour cent) et sont détenteurs du certificat. Les surplus que les exportateurs n’achètent pas sont vendus sur le marché conventionnel local ou sur le marché conventionnel à l’exportation. Les exploitants ne reçoivent pas de prime de prix; la prime est utilisée par l’exportateur pour couvrir les coûts de certification, avec un certain accroissement de la marge de profit. Le bénéfice pour les exploitants est d’avoir un point de vente connu et sûr.

Bananes biologiques de la République dominicaine

Sur la base du rapport de Damiani, 2002c.

Historique et organisation

Depuis la fin des années 80, la production de bananes à Azua est caractérisée par une faible utilisation d’intrants chimiques. En raison de la sécheresse du climat, aucun problème de cercosporiose noire ne s'est posé. Une société nationale de commercialisation, Plantaciones Tropicales, a établi des liens entre les petits producteurs et une entreprise de certification. Les premières exportations ont eu lieu vers 1988. Une seconde société de production et de commercialisation, Horizontes Orgánicos, a été établie à Azua, travaillant conformément aux principes de la biodynamique. En 1994, un technicien de Horizontes a créé sa propre société, SAVID. SAVID et Horizontes a commencé à signer des contrats avec des associations de petits producteurs, et SAVID a étendu ses activités vers d’autres parties de la République dominicaine.

La production bananière biologique de grande échelle a augmenté régulièrement dans les autres parties du pays, et en 2001 Azua produisait seulement 10 pour cent de la production totale. A Azua, la production est encore à 80 pour cent entre les mains de petits producteurs, avec une moyenne de 1,25 ha chacun. La plupart des exploitants sont organisés en associations, mais ces dernières sont fragiles. Les sociétés de commercialisation ont établi, géré et financé le système de contrôle interne, et elles sont détentrices du certificat. Les contrats avec les associations de producteurs étaient initialement prévus pour des périodes plus longues - jusqu’à trois ans - mais ils se sont récemment raccourcis afin d’éviter les problèmes de variation des prix.

Investissements

Le Centre dominicain pour la promotion des exportations (CEDOPEX) a organisé des ateliers et participé à des foires, assurant la promotion des exportations biologiques en général. Les propriétaires et les agronomes des deux sociétés de commercialisation ont introduit de nouvelles technologies et variétés. Les sociétés devaient initialement dépendre des navires qui transportaient d’autres produits, ce qui était coûteux et affectait de manière négative la qualité des produits. Finalement, SAVID a pu convaincre les navires de bananes d’inclure la République dominicaine sur leur trajet. Les entreprises ont obtenu des avances de fonds auprès des acheteurs et les ont utilisées pour accorder des crédits à court terme aux exploitants afin qu’ils puissent acheter des intrants. Les entreprises ont également fourni une assistance technique pour améliorer la qualité des produits. Cependant, en raison des ressources limitées des petits exploitants, les tâches étaient fréquemment repoussées et il n'a pas été possible d'améliorer le système d’irrigation.

Aspects économiques

Par rapport aux petits producteurs conventionnels de bananes, les producteurs biologiques sont confrontés à des coûts totaux de production en moyenne 8 pour cent supérieurs (2 560 $E.-U./ha contre 2 370 $E.-U./ha pour la production conventionnelle). Ces coûts reflètent les exigences plus fortes en main-d’œuvre, par exemple 50 pour cent de plus pour la lutte contre les mauvaises herbes par rapport aux techniques «modernes». Bien que la monoculture requière des quantités importantes d’engrais et de pesticides biologiques, les coûts totaux d’intrants biologiques étaient inférieurs aux coûts d’intrants conventionnels. Par conséquent, les coûts liés au travail constituent 71 pour cent des coûts totaux de production dans le système biologique, contre 51 pour cent dans le système conventionnel. Les rendements étaient similaires aux rendements conventionnels, à 14 tonnes/ha. Les rendements faibles s’expliquaient par l’utilisation de quantités insuffisantes d’engrais biologiques, l’entretien inadéquat du système d’irrigation et une grave sécheresse à la fin des années 90.

Les entreprises de commercialisation ont exporté environ 70 pour cent de la production, avec une prime significative, et ont vendu le reste sur le marché domestique comme étant de production conventionnelle. Les exploitants avaient des informations limitées sur le marché, et SAVID et Horizontes étaient les seuls exportateurs, SAVID représentant 80 pour cent de toutes les exportations de bananes biologiques; pour ces raisons, les petits exploitants se trouvaient dans une position de négociation relativement faible, d’autant plus que les entreprises de commercialisation étaient détentrices du certificat biologique, bien qu’Horizontes ait encouragé les associations à prendre en charge le système de contrôle interne et la certification.

Malgré cette position de faiblesse dans la négociation, les exploitants ont perçu une prime biologique d’environ 1 $E.-U./caisse en 2001 et 2002. En 2001, les exploitants biologiques recevaient 4,5 $E.-U./caisse (contre 3,5 $E.-U. pour les bananes conventionnelles, soit un facteur de +29 pour cent) et en 2002 il s’agissait de 5,5 $E.-U./caisse (contre 4,5 $E.-U.; +22 pour cent). Une partie de la production était vendue sur le marché du commerce équitable, pour laquelle les exploitants ont perçu 1,75 $E.-U. supplémentaires par caisse. En raison de la prime de prix, de la faible augmentation des coûts de production et de rendements similaires, le revenu net était de 52 pour cent supérieur pour les producteurs de bananes biologiques (1 720 $E.-U./ha contre 1 130 $E.-U./ha pour les conventionnelles). Cependant, les exploitants ont dû vendre une partie significative sur le marché intérieur au cours de l’été, lorsque la demande internationale était faible.

En raison de la plus grande disponibilité des bananes biologiques sur le marché international, les acheteurs sont devenus de plus en plus exigeants en termes de qualité, ce que les petits producteurs trouvent difficile à satisfaire. Les entreprises de commercialisation ont étendu la production sur leurs propres plantations, réduisant encore plus la part des petits exploitants dans la production totale de bananes biologiques dans le pays.

Production de cacao et de bananes à Talamanca, au Costa Rica

Sur la base des rapports de Damiani, 2002b, et Deugd, 2001.

Historique et organisation

Talamanca fait partie du Parc national La Amistad et du Couloir biologique de Talamanca-Caribe. Les petits exploitants à Talamanca ont cultivé le cacao dans un système qui comprenait des arbres d’ombrage et la forêt tropicale humide. A la fin des années 70, l’attaque d’un champignon, combinée aux prix bas du marché mondial, a conduit les exploitants à abandonner la culture. L’Association des petits exploitants de Talamanca (APPTA) a été créée en 1987, avec l’assistance d’ANAI, une ONG américaine. L’APPTA compte aujourd’hui environ 1 100 producteurs membres. Par le biais d’ANAI, des contacts ont été pris avec des acheteurs de cacao biologique aux États-Unis, qui recherchaient des régions où le cacao avait été abandonné, avec l’idée d’obtenir la certification biologique sans une période de conversion coûteuse. Dans sa phase initiale d’activités de conservation, l’APPTA a créé des comités locaux dans les différents villages pour des activités de reboisement. L’APPTA a utilisé ces comités comme base du système de contrôle interne. Plus tard, l’APPTA a réussi à négocier avec une entreprise costaricienne qui produit de la purée de bananes pour l’alimentation pour bébés (Gerber), afin de lui vendre des bananes biologiques. En 2000, l’APPTA exportait 210 tonnes de cacao biologique (dont 24 pour cent vers l’Europe) et elle vendait 1 300 tonnes de bananes chaque année.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

Actuellement, la plupart des exploitants ont un hectare de cacao + fruits et de tubercules + ombrage, et un hectare de bananes + ombrage. En outre, ils cultivent habituellement une surface de céréales de base. Le principal investissement fut la certification elle-même. Depuis 1995, toutes les entreprises de certification avec des activités au Costa Rica doivent avoir des bureaux au Costa Rica. On espérait que cela réduirait les coûts de certification, mais cela n’a pas été le cas. L’autre investissement important fut la remise en état de plantations de cacao autrefois abandonnées, ce qui exigeait une main-d’œuvre importante. Les femmes célibataires ont été particulièrement pénalisées, n’ayant pas les ressources pour employer des salariés. Pour l’APPTA en tant qu’organisation, la possibilité de crédit était essentielle pour pouvoir payer ses membres à la livraison. Ce crédit a été fourni par l’acheteur nord-américain du cacao, sous la forme de capital de démarrage.

Aspects économiques

En 2000, l’APPTA a payé 1 $E.-U./kg pour le cacao biologique à ses membres, contre un prix conventionnel moyen dans la région de 0,40 $E.-U./Kg. Les bananes biologiques ont été achetées à 81 $E.-U./tonne pour une production moyenne de 12 tonnes par exploitation. Une étude de Deugd (2001) a évalué la performance micro-économique des systèmes de production prédominants chez les membres de l’APPTA. Trois systèmes ont été étudiés: un système cacao-bananes; un système bananes; et un système cacao. Tous ceux-ci comprenaient des fruits et des arbres, bien que les systèmes bananes soient rarement mixtes. Le système cacao-bananes a généré 11,6 $E.-U./journée de travail; le système bananes, 14,9 $E.-U./journée de travail; et le système cacao, 5,50 $E.-U./journée de travail, alors que le salaire dans la zone pour un travail similaire est de 7,27 $E.-U./jour. Bien que la rémunération du travail dans le système cacao soit inférieure aux salaires, le revenu annuel net de ce système est de 264 $E.-U./ha, un supplément important au revenu familial, en particulier pour les foyers qui n’ont pas accès à d’autres opportunités d’emploi.

Impact environnemental

Selon Deugd (2001), le degré d’érosion et de perte de nutriments est minime, en raison de l’épais couvert du sol. Certaines études ont constaté que, bien que n’étant pas aussi diversifiés que la forêt naturelle, les systèmes forestiers étaient bien plus variés sur le plan écologique que les monocultures dans les plaines[89], et qu’on y trouvait autant d’espèces d’oiseaux que dans la forêt naturelle[90]. Deugd concluait que l’extraction de nitrogène, de phosphore et de magnésium était plus ou moins compensée, mais que l’équilibre en potassium était négatif, avec une perte d’environ 47 Kg/an. En 2001, un projet de l’Université du Costa Rica a été lancé en collaboration avec l’APPTA pour identifier les matériels et les pratiques permettant d'accroître les intrants dans le sol, en particulier le potassium.

Café forestier biologique du massif de Baturité dans le nord-est du Brésil

Sur la base du rapport de Saes, De Souza et Otani, 2001.

Historique et organisation

La plupart du café au Brésil est cultivé en plein soleil. Cependant, les exploitants dans le massif de Baturité de Ceará avaient conservé un peu d’ombrage, parce que les conditions climatiques locales, avec de fortes précipitations saisonnières et une saison sèche, ne permettaient pas de cultiver du café en plein soleil. Au cours des années 90, les rendements dans la zone sont tombés d’environ 10 sacs/ha à 5 sacs/ha, principalement en raison de l’absence d’élagage et du vieillissement des caféiers. En 1990, la Zone de protection environnementale du Massif de Baturité a été créée. Une des activités était le Projeto Café Ecológico, mis en œuvre par l’ONG CEPEMA Foundation, en lien avec une ONG suédoise. Le projet a débuté en 1995, avec une assistance technique, et la mise à disposition de nouveaux plants et fruits de caféiers et d’espèces d’arbres d’ombrage. En 1996, l’Association des cultivateurs écologiques du Massif de Baturité (Associação dos Produtores Ecologistas do Maçico de Baturité, ou APEMB) a été créée, impliquant 158 cultivateurs, dont 110 étaient certifiés. Avec l’aide d’une organisation suédoise, l’APEMB a trouvé un acheteur avec le torréfacteur suédois Classic Kaffe.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

L’APEMB a travaillé sur les améliorations de la qualité, essentiellement par l’introduction de meilleures pratiques de séchage et une meilleure sélection des haricots. Dans les premières années, la Banco de Nordeste a fourni un soutien financier pour payer les coûts de certification, représentant 5 000 $E.-U.

Aspects économiques

Comparé au café cultivé en plein soleil ailleurs au Brésil, le café forestier donne des rendements inférieurs, en raison d’une plus faible densité des plantations (3 000 plants/ha) et des rendements plus faibles par plant. Cependant, les rendements varient beaucoup, de 1,3 sacs/ha à 12 sacs/ha, avec une moyenne de 5,8 sacs transformés/ha. L’APEMB a exporté 6 tonnes au cours de la première année, pour augmenter à 30 tonnes en 1999, 60 pour cent de la quantité produite totale. L'association a perçu 160 $E.-U./sac, contre 100-110 $E.-U./sac sur le marché conventionnel (prix de 45-60 pour cent plus cher). Une partie de la prime était due au fait d’être en mesure de vendre le café comme arabica, alors qu’auparavant il était vendu comme «Conillon» (robusta), ce qui rapporte un prix bien plus bas. Au cours de ces trois années, l’offre mondiale en café biologique a augmenté de manière spectaculaire, et l’année suivante Classic Kaffe a décidé de cesser d’acheter à l’APEMB. L’APEMB n’a pas réussi à trouver de nouvel acheteur, et, en raison d’un manque de ressources financières, elle n'a plus pu payer la certification.

Nouvelle stratégie

Étant donnés les problèmes de commercialisation, la CEPEMA a redéfini les stratégies du projet et a commencé à développer un réseau pour la commercialisation locale de café, de fruits et de légumes. Cela évitera des coûts élevés de certification, tout en gardant la possibilité de percevoir de petites primes de prix. Le projet a envisagé d’utiliser le tourisme croissant et a prévu de livrer des paniers à la capitale du district, Fortaleza. Des comptes-rendus dans l’actualité ont confirmé que la vente de «Café Ecológico Pico Alto» a été lancée en mars 2003 à Fortaleza[91]. Le café est présenté comme étant «certifié» par la CEPEMA et le fait qu’il était auparavant exporté est exploité dans la publicité comme une preuve de qualité.

Café biologique au Costa Rica

Sur la base du rapport de Lyngbaek, Muschler et Sinclair, 2001.

Méthodologie de recherche

L’étude a comparé dix petites exploitations de café par paires biologique et conventionnelle au Costa Rica. Les critères pour les exploitations biologiques étaient qu’elles devaient avoir été sous gestion biologique active pendant au moins trois ans. Quatre des exploitations biologiques n’étaient pas certifiées, et vendaient sur le marché conventionnel. Les exploitations conventionnelles ont été sélectionnées pour la proximité par rapport à leur équivalent biologique et pour la similarité d’altitude et de superficie sous culture de café. Les coûts fixes n’ont pas pu être inclus en raison d’un manque de données, mais étaient probablement très limités et d’importance mineure. Les rendements, les charges variables de production, les prix à la sortie de l’exploitation et le revenu net ont été étudiés pendant trois années (1995-1998).

Aspects économiques

En moyenne, les rendements du café biologique par hectare étaient inférieurs de 22 pour cent et les rendements par plant inférieurs de 17 pour cent. Cependant, de grandes variations existaient entre les paires. Pour trois paires, les rendements biologiques étaient supérieurs; pour deux paires, le rendement était similaire; et pour les 5 paires restantes, les rendements biologiques étaient nettement inférieurs. Les charges variables de production étaient en moyenne supérieurs de 4,5 pour cent pour les exploitations biologiques, essentiellement en raison de coûts de main-d’œuvre plus élevés pour préparer et appliquer les engrais biologiques. Les exploitations conventionnelles supportaient des coûts de main-d’œuvre plus élevés pour la récolte, un coût directement lié aux niveaux de production. Malgré des rendements moyens inférieurs et des charges variables légèrement supérieures, le revenu net moyen du café était juste légèrement inférieur (- 4,5 pour cent) pour les exploitations biologiques. De grandes différences entre les paires ont également été observées pour le revenu net, trois exploitations biologiques étant plus performantes que leurs équivalents conventionnels. Les auteurs ont calculé les primes de prix qui seraient nécessaires dans chaque cas pour au moins égaliser le revenu net pour chacune des deux exploitations de la paire. Ces primes hypothétiques allaient de 14 à 53 pour cent (en écartant les deux extrêmes). Les coûts de la certification n’ont pas été inclus dans l’étude soit parce que les exploitations n’étaient pas certifiées, soit parce que les coûts étaient supportés par un programme d’appui ou par l’usine de transformation. Lorsque les coûts de certification étaient à la charge d’une entité extérieure (trois exploitations), ils étaient probablement indirectement supportés par les producteurs en raison d’une prime de prix inférieure versée par l’usine de production.

Café biologique de Huehuetenango, au Guatemala

Sur la base des rapports de Damiani, 2002a, et Cifuentes, non daté.

Historique et organisation

En 1996, les Accords de paix ont été signés et peu de temps après le Projet de développement rural du Massif des Cuchumatanes a débuté dans le Département de Huehuetenango, un des plus pauvres du Guatemala. Le projet a abouti à la création ou la remise sur pied de trois associations: L’Association de développement de Cocolá (ADIPCO); la Coopérative agricole de San José Quixabaj; et la Coopérative agricole Chojzunil. Les producteurs de café de l’ADIPCO, de Quixabaj et de Chojzunil utilisaient traditionnellement peu ou pas d’intrants chimiques. La composante «commercialisation» du projet a identifié le café biologique comme une alternative pour les trois associations. Le projet a contacté AGEXPRONT, une association d’exportateurs de produits non traditionnels. Le projet est devenu membre de la sous-commission d’AGEXPRONT sur les produits écologiques, et par le biais d’AGEXPRONT il a établi des liens avec EXCAGUA dans la ville de Guatemala - un exportateur de café conventionnel et biologique vers l’Europe. Les associations ont obtenu leurs premiers certificats de production entièrement biologiques en 1998 et 1999.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

Les investissements les plus importants que les exploitants ont dû faire pendant la conversion étaient les mesures de conservation des sols et l’introduction de nouvelles espèces d’arbres d’ombrage. En outre, les associations ont dû faire un investissement pour la transformation collective du café, en-dehors du café conventionnel. Au cours des deux premières années, 70 pour cent des coûts de certification ont été payés par le projet et un organisme environnemental. Le projet a payé un agent de vulgarisation pour organiser le système de contrôle interne. Le projet a également formé les exploitants, qui se qualifiaient comme «promoteurs» et qui pouvaient obtenir un diplôme de «gestionnaires de crédit» et enfin d’«agents de vulgarisation paysans». Ces exploitants ont accompagné les équipes d’inspection interne qui effectuaient deux visites par an.

Aspects économiques

Alors que d’autres cultivateurs de café au Guatemala, qui avaient eu recours à des intrants chimiques, ont connu des diminutions importantes de rendement au cours des premières années de gestion biologique, cela n’a pas été le cas pour les cultivateurs de café d’ADIPCO, Quixabaj et Chojzunil. Au contraire, ils ont observé des augmentations de rendements de 38 pour cent à 67 pour cent en cinq ans (de 0,86 tonnes/ha à 1,40 tonnes/ha selon Cifuentes). Cela peut s’expliquer par les faibles intrants et les faibles rendements avant la conversion, un meilleur ombrage et une meilleure application d’engrais biologiques, ainsi que des mesures de conservation des sols. Cela signifiait également des coûts de production plus élevés, principalement sous la forme de travail supplémentaire, et des coûts de récolte plus élevés en raison du rendement accru. Selon Cifuentes, l’acheteur initial payait un prix bas en raison de problèmes initiaux de qualité. Après leur résolution, et en vendant exclusivement via EXCAGUA, les prix ont augmenté de 20 à 25 $E.-U. par tonne (+25 pour cent). Damiani a établi qu’en 2000 le prix perçu pour le café vert était supérieur de 30 pour cent aux prix des exploitants conventionnels, et supérieur de 18 pour cent en 2001. Cifuentes a établi que le revenu familial moyen avait augmenté de 1 250 à 1 970 $E.-U./an.

Circonstances externes

En 2000, une route fut construite reliant les communautés à la ville de Barillas. Cela a réduit de moitié les coûts de transport et le temps de transport de 1 jour à 4 heures, ce qui a bénéficié tant aux exploitants biologiques qu’aux exploitants conventionnels. Le projet a également profité des activités de recherche de l’Association nationale du café (ANACAFE). L’ANACAFE a pris en compte les demandes des producteurs, et le programme de recherche est ainsi passé d’une augmentation de la productivité à une réduction des coûts de production. Le résultat est que l’ANACAFE avait travaillé sur le compost et le bocashi comme alternatives aux engrais chimiques, le contrôle manuel du broca (un térébrant du caféier, Hypothenemus hampei) et le recours aux ennemis naturels pour certains parasites. En outre, l’ANACAFE a formé 16 agents de vulgarisation en production de café biologique et contacté Mayacert pour organiser des ateliers sur la certification biologique.

Coton Maikaal d’Inde

Sur la base des rapports de Caldas, 1995; Myers, 1995; Myers et Stolton, 1999; et Parrott et Marsden, 2001, qui sont tirés de Caldas, 2000, et Barauah, 2000.

Historique et organisation

En 1992, une alliance entre les exploitants, leur moulin (appartenant à Maikaal Fibres), les agents commerciaux et un consultant biologique a mis en place des expérimentations sur exploitation et une exploitation expérimentale avec la culture de coton biologique. L’année suivante, 200 exploitants ont rejoint les expérimentations sur exploitation, et sept années plus tard plus d’un millier d’exploitants, avec plus de 6 000 ha au total, ont adhéré au système. La majorité des exploitants étaient de petits cultivateurs de coton détenant en moyenne 2 ha de terres. Le coton biologique est la principale culture, produite en rotation avec des cultures alimentaires.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

Le coton conventionnel était cultivé conformément aux «offres» techniques standards, y compris la pulvérisation d’engrais chimiques et de pesticides de 10 à 25 fois dans une période de croissance, et le développement d’une résistance aux pesticides a été signalé chez la mouche blanche. Pour le coton biologique, plusieurs rotations et associations de cultures ont été développées, et des arbres à usage multiple ont été plantés autour de la lisière des champs. Divers engrais biologiques sont utilisés, basés sur l’analyse du sol. Les ravageurs sont étroitement surveillés et combattus par une combinaison de pièges de phéromone, fournissant un habitat aux prédateurs naturels, un lâcher d’insectes bénéfiques et d'entomopathogènes, et le recours à des insecticides botaniques. Un système de crédit alternatif a été mis en place, financé par Maikaal Fibres, qui fournit de l’argent liquide et du crédit gratuit en nature. La conformité aux directives développées est contrôlée par le service de vulgarisation de Maikaal, et la certification par rapport aux normes biologiques internationales est accomplie par l'IMO.

Aspects économiques

Les rendements initiaux ont chuté, mais en 1995 les rendements étaient revenus aux niveaux antérieurs, et au bout de sept ans les rendements du coton biologique étaient supérieurs de 20 pour cent à ceux du coton conventionnel. Les exploitants ont un marché garanti et perçoivent une prime de 25 pour cent. De même, les rendements des cultures rotatives sont jusqu'à 20 pour cent supérieurs. De plus, la qualité des sols s'est améliorée. Les exigences en irrigation et en main-d’œuvre ont été réduites, aboutissant à une baisse de 30-40 pour cent des coûts de production. La combinaison de coûts de production inférieurs, de rendements équivalents ou supérieurs et de primes de prix aboutit à des marges plus fortes pour les exploitants. Les intrants biologiques externes, lorsqu'ils sont nécessaires, sont commandés en vrac pour réduire les coûts. Dans certaines zones, d'anciens détaillants fournisseurs de pesticides sont devenus des fournisseurs d’intrants bios.

Projet EPOPA et coton biologique d’Ouganda

Sur la base des rapports de Walaga, 1997; Malins et Nelson, 1998; Van Elzakker et Tulip, 2000; Van Elzakker et Leijdens, 2000; et Kidd, Tulip et Walaga, 2001.

Historique et organisation

La majorité des producteurs de coton en Ouganda sont de petits exploitants aux ressources modestes. Le projet Promotion de l’exportation de produits biologiques d’Afrique (Export Promotion of Organic Products from Africa, ou EPOPA) a débuté en 1994 avec le Projet de coton biologique de Lango (Lango Organic Cotton Project) dans les districts de Lira et Apac. La zone du projet a été choisie en raison de la présence de fourmis noires capables de lutter contre la plupart des ravageurs. EPOPA a accordé un prêt sans intérêt à l’Union coopérative de Lango (Lango Coopérative Union, ou LCU), qui émergeait alors tout juste du mouvement de coopératives sous contrôle gouvernemental. Les exploitants ont rejoint le système sur la base de groupes villageois appelés Sociétés primaires. Une fois un village accepté, les exploitants recevaient des graines à crédit, les coûts étant déduits du prix payé pour le coton. En 1996, Farmers Fair Trade Uganda (FFTU) fut créé par une société de négoce basée aux Pays-Bas.[92] FFTU a essayé d’acheter directement par le biais des Sociétés primaires, ce qui a donné à la LCU le sentiment que sa position était ébranlée. FFTU a également connu des problèmes pour justifier le financement des cultures, et s'est remis à acheter par le biais de la LCU. Cependant, les problèmes financiers se sont poursuivis et l’arrivée inopportune des fonds de FFTU a eu pour résultat qu’une partie significative du coton a été vendu comme conventionnel. Malgré les problèmes financiers, le nombre d’exploitants participants a rapidement augmenté, de 200 en 1994 à un nombre estimé à 7 000-8 000 exploitants en 1998. L’inspection et la certification sont effectuées par le certificateur suédois KRAV ou le certificateur néerlandais SKAL, en recourant à la certification de groupe. D’autres projets de coton biologique furent ajoutés au programme EPOPA, tels que dans la commune d’Adigo, le district d’Apac, avec Outspan Enterprises pour exportateur. Le nombre d’exploitants impliqués a augmenté pour atteindre quelque 24 000 en 2000. Alors que le gouvernement s’opposait initialement au coton biologique, les pouvoirs publics ont commencé, devant les résultats positifs, à dispenser certaines zones des campagnes de promotion des pesticides.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

Il y a peu de différences entre les méthodes de production des exploitants biologiques et conventionnels, excepté que les producteurs conventionnels peuvent occasionnellement utiliser de petites quantités d’engrais minéraux et de pesticides chimiques. Cependant, selon certaines sources, les exploitants devaient commencer à recourir à des rotations formelles, aux engrais verts et à l’intégration du bétail. Pendant trois ans, le projet a fourni une assistance technique, un appui au marché et une réduction de la proportion des coûts de certification. Les exportateurs n’ont pas l’habitude de s’impliquer avec les exploitants, sauf pour fournir des services de vulgarisation. En particulier pendant la première année, les exportateurs ont eu besoin d’une assistance pour s’habituer à ce nouveau rôle. Cependant, le projet a permis d'éviter de payer des frais normalement couverts par un exportateur.

Aspects économiques

Les primes biologiques perçues par les exploitants participant au Projet Lango étaient de 10 pour cent en 1994/95, 14 pour cent en 1995/96 et 50 pour cent en 1996/97. Dans la commune d’Adigo, les exploitants ont obtenu des prix supérieurs de 15 à 30 pour cent, sans augmentation significative des coûts de production. En moyenne, le coton biologique perçoit une prime biologique de 20 pour cent sur les prix à l’exportation. La moitié environ va à l’exploitant, impliquant une prime sur les prix à la sortie de l’exploitation de 15 à 20 pour cent. La prime à l’exportation rémunère également le personnel de terrain employé par l’exportateur, et les exportateurs parviennent également à des marges de profits plus élevées. Bien qu’initialement élevé, le coût de l’inspection et de la certification organisées et payées par les exportateurs, a maintenant chuté de manière conséquente en raison des économies d’échelle. En général, l’exportateur est le détenteur du certificat bio et cela signifie que les exploitants ne peuvent vendre leurs produits comme biologiques à aucun autre acheteur. Néanmoins, il leur est permis de vendre à d’autres acheteurs conventionnels. Le prix plus élevé pour le coton biologique a eu une influence positive sur le prix conventionnel et a forcé les acheteurs de coton conventionnel à offrir d’autres avantages, tels que la fourniture d’outils agricoles, afin d’assurer leurs livraisons. Les exploitants ont indiqué que les revenus supplémentaires tirés du coton biologique sont dépensés pour le logement, les frais scolaires, les ustensiles domestiques, les outils agricoles et les vêtements. Une évaluation récente a estimé qu’EPOPA a augmenté les revenus de plus de 24 000 exploitants de 50 $E.-U./an en moyenne. Depuis 2000, les projets de coton se poursuivent d'eux-mêmes. A noter que le projet EPOPA Tanzanie, géré par la même organisation, a été considéré comme un échec. La différence essentielle était l’approche commerciale du coordinateur local en Ouganda, alors qu’ailleurs les activités étaient davantage commandées par les notions de participation et de processus que par celles de profit.

Sucre biologique des petits producteurs à Misiones, en Argentine

Sur la base du rapport de Serrano, 2002.

Historique et organisation

L’Argentine a obtenu de l’UE le statut de Pays tiers depuis 1992. Le poids relatif des petits exploitants (minifundistas) dans le secteur de l’agriculture biologique est très faible. La production de canne à sucre biologique à Misiones est le seul cas en Argentine où un grand nombre (600) de petits exploitants (avec des tailles d’exploitations totales de l’ordre de 5 à 50 ha chacune) ont adopté une culture biologique. Les exploitants ont commencé à faire pousser de la canne à sucre selon des méthodes biologiques en 1997, lorsque la seule usine de sucre de canne dans la région a décidé de passer de la production de sucre conventionnel à la production de sucre biologique. L’usine s’était déclarée en faillite en 1995, et avait ensuite été gérée par l’IFAI, une agence autonome du gouvernement provincial de Misiones. La situation macro-économique a rendu très difficile de concurrencer les pays voisins sur le marché du sucre conventionnel, et le passage à la production biologique a été un moyen de maintenir l’usine en activité. L’idée de l’alternative biologique est venue de l’ONG Movimiento Argentino de Producción Orgánica (MAPO), qui a également fourni le lien avec l’acheteur.

Investissements et modification des méthodes d’exploitation

L’usine diffuse des variétés de canne à croissance rapide qui peuvent grandir plus vite que les mauvaises herbes après la récolte. Au moment de la récolte, les feuilles sont coupées plus soigneusement pour un couvert du sol et pour prévenir une contamination du sucre par les impuretés des feuilles (l’acheteur biologique s’est révélé plus exigeant sur la qualité). Le processus de certification a commencé en 1997, et en 2001 le sucre de presque toutes les usines était biologique. Dès le début, l’usine a pu produire de petites quantités de sucre biologique parce que la période de conversion de trois ans a été écartée par l’organisme de réglementation pour les terres qui étaient en jachère depuis plusieurs années (terres capoeira). Les coûts de certification sont payés par l’usine, et sont assez élevés. Selon la loi argentine, les inspecteurs externes doivent rendre visite à 100 pour cent des exploitants, donc les coûts de certification ne peuvent pas être réduits par la mise en œuvre d’un système de contrôle interne. En fait, chaque exploitant reçoit habituellement deux visites par an. Les coûts de certification atteignent 120 $E.-U. par parcelle par an, mais une agence concurrente a offert la même chose pour la moitié du prix. L’usine et l’IFAI essayent de diversifier la variété des cultures biologiques que les exploitants de canne à sucre produisent et elles ont déjà réuni un groupe de 20 exploitants qui vendent des légumes frais biologiques à une des plus grandes chaînes de supermarchés de la capitale provinciale. La diversification est également importante pour développer de meilleurs cycles de rotation. Un crédit a été débloqué par un fonds provincial de développement rural, financé par le FIDA, pour accroître la zone de canne à sucre biologique. Cependant, le crédit n’a été utilisé en 2001 que pour 150 ha, alors que l’usine estimait qu'une expansion de 450 ha avait été réalisée à partir des propres ressources des exploitants.

Aspects économiques

La production de canne à sucre biologique requiert une main-d'œuvre plus importante, mais les coûts totaux de production par hectare sont similaires à ceux de la production conventionnelle en raison des économies faites sur les produits agrochimiques. La productivité a baissé de 60 à 45 tonnes/ha. Cette baisse a été plus que compensée par la prime de prix biologique (35 pour cent en 1998 et 75 pour cent en 2001) et le bénéfice net pour les exploitants a même doublé au cours de cette période, passant de 168 $Arg/ha à 367 $Arg/ha. Cependant, l’usine étant la seule de la région, les exploitants ne perçoivent pas de primes de prix élevées. Les exploitants livrent la canne à sucre entre juin et août, et ne reçoivent alors qu’un paiement partiel, couvrant les coûts de récolte et de transport, le solde n’étant pas versé avant novembre-décembre. Il en résulte que les exploitants les plus pauvres manquent de liquidités pendant cette période, et doivent chercher un emploi salarié supplémentaire, au lieu de procéder au désherbage nécessaire à ce moment-là. La viabilité de la canne à sucre biologique a permis aux exploitants ayant également cultivé du tabac et préoccupés par leur santé de ne produire que la canne à sucre comme culture commerciale. L’usine a estimé qu’environ 40 exploitants avaient fait ce choix. Cependant, le principal avantage du passage au biologique était que l’usine pouvait rester en activité, préservant le secteur du sucre, y compris 50 camions locaux, les revenus générés par les besoins en bois pour fournir de l’énergie à l’usine, et la main-d’œuvre de l’usine (53 travailleurs permanents et 75 temporaires). Bien que l’usine ait amélioré ses revenus avec le passage au biologique, elle n’était toujours pas bénéficiaire, avec un déficit annuel net de 400 000 $E.-U. couvert par le gouvernement provincial. La principale raison était que l’usine ne fonctionnait qu’à 50 pour cent de sa capacité. L’usine presse les exploitants possédant de petites parcelles de canne à sucre d’accroître leur superficie ou d’abandonner la production de canne à sucre, parce que les coûts de certification pour les petites parcelles sont relativement plus élevés. Les grands exploitants avec plus de 15 ha de canne à sucre (taille totale de l’exploitation >50 ha) qui sont passés au biologique étaient ceux qui avaient d’importantes parcelles de terre en jachère de bonne qualité (capoeira), ce qui garantissait une productivité assez élevée. Inversement, les grands exploitants ne possédant pas de terres en jachère de bonne qualité ont abandonné la production de canne à sucre et sont passés à d’autres cultures, comme les agrumes.

Thé biologique de Bio Foods Ltd., au Sri Lanka

Sur la base des rapports d’Ediriweera, 2002.

Historique et organisation

Bio Foods a débuté en tant que société enregistrée en 1990, réunissant les petits producteurs de thé et d’épices dans la campagne autour de Kandy. Elle achetait à un total de 443 exploitants répartis sur 11 villages, avec un total de 704 arpents (285 ha). Bio Foods est composée d’une section vulgarisation et d’une section inspection (interne) locale, des centres de ramassage des produits, d'usines de transformation, d'une section exportation et d'une section administration. Les exploitants sont organisés au niveau du village en comités d’exploitants. Les principaux produits sont les thés verts, noirs, aromatisés et les tisanes, les épices et le café.

Investissements

Bio foods a dispensé une formation aux comités en matière de fertilité des sols, protection des plantes, préparation du compost, systèmes de contrôle interne, contrôle qualité du commerce équitable, et plans d’épargne. Tous les produits sont certifiés biologiques, par SKAL, Naturland, l’IMO ou JAS, selon le pays d’importation et les conditions requises par l’acheteur. Les coûts de certification sont payés par Bio Foods, qui est détenteur des certificats. Bio Foods est cependant remboursé par l’Association des petits exploitants biologiques pour les coûts de certification pour les exploitants membres de SOFA. Les producteurs de thé de Bio Foods sont également enregistrés par la FLO et une partie du thé est vendue sous les conditions du commerce équitable, auquel cas l’acheteur détient une licence de commerce équitable d’un membre FLO. Il est signalé que les périodes de conversion et l’installation du système de contrôle interne par groupe d’exploitants varient entre 1 et 5 ans. Un obstacle majeur a été la différence des conditions requises par chaque organisme de certification concernant la structure et le fonctionnement du système de contrôle interne.

Aspects économiques

D’après certaines sources, la prime de prix biologique pour les feuilles vertes est de 100 pour cent [cela peut inclure la prime du commerce équitable]. Les épices biologiques ont atteint des primes de 10 à 30 pour cent. Bio Foods offre également d’autres avantages aux associations d’exploitants au niveau du village, tels que des matériaux de couverture, des chaises, du bétail, des intrants pour le sol, des installations et équipements de pépinières pour l’éducation de leurs enfants, ainsi que des plans d’épargne avec facilités de paiement. Malgré ces résultats positifs pour les petits exploitants, Bio Foods a des doutes sur la durabilité de la société à long terme. Il a été difficile de trouver des acheteurs disposés à signer des contrats avec des prix ou des volumes garantis. Cependant, ils continuent d’acheter toute la matière première certifiée aux exploitants et les produits transformés finaux sont stockés jusqu’à ce qu’un acheteur soit trouvé. Certains exploitants au Sri Lanka ont abandonné la culture biologique en raison des prix et de la demande instables. Avec l’achat garanti de leurs produits, Bio Foods assure que les exploitants continueront de se conformer aux normes biologiques.


[88] FAO, 2002.
[89] Guiracocha, 2000; Parrish et al., 1999.
[90] Parrish et al., 1999.
[91] ADITAL, 2003.
[92] Bien qu’utilisant le terme "commerce équitable", le FFTU ne travaille pas avec les labels de commerce équitable certifiés FLO.

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