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Module 2

GESTION DE LA BIODIVERSITÉ AGRICOLE SELON UNE APPROCHE FONDÉE SUR DES MOYENS D'EXISTENCE DURABLES



QU'EST-CE QU'UNE APPROCHE FONDÉE SUR DES MOYENS D'EXISTENCE DURABLES?

Cette fiche d'information vous fera découvrir le cadre dans lequel s'inscrivent les moyens d'existence durable. Le cadre des moyens d'existence durables1 permet d'explorer les relations existant entre la biodiversité agricole, le genre et les savoirs locaux. De plus, cela nous aidera à élargir notre approche et à traiter ces questions de façon plus globale. Ce Module est essentiellement théorique, mais vous trouverez dans les Modules 3 et 4 des exemples des questions développées ici. Une récente recherche, sur les récoltes traditionnelles et les races d'animaux d'élevage, laisse entendre qu'il existe un fossé significatif entre les priorités de la recherche et du développement et les besoins des agriculteurs (Blench, 1997). Nous pouvons tenter d'expliquer ce fossé en réfléchissant aux points de vues sous-jacents exposés par les différents acteurs. On peut identifier deux approches principales qui sont comparées dans le tableau ci-dessous.

[Tableau 1]Comparaison de différentes approches de la biodiversité 
PERSPECTIVES RELATIVES AUX MOYENS D'EXISTENCEPERSPECTIVES RELATIVES À LA GESTION DES RESSOURCES NATURELLES
On attire l'attention sur les populations locales et leurs stratégies d'existenceOn attire l'attention sur les ressources génétiques et leur production potentielle ainsi que leur utilisation
Compréhension holistique/exhaustive des objectifs et des fonctions jouées par la biodiversité agricole dans les stratégies relatives aux moyens d'existenceOn se limite à comprendre et renforcer certains objectifs et fonctions de la biodiversité agricole
Dynamiques sur le plan de l'évolution des priorités et des besoins de différentes populations à différents momentsStatiques en raison de la présélection des espèces prioritaires nécessaires à l'amélioration et la conservation
Basées sur la force des populations, par exemple, les savoirs locaux pour la sélection des espèces et les pratiques de conservation in situAbondamment puisées dans les connaissances externes et les technologies destinées à l'amélioration des espèces, y compris les pratiques de conservation ex situ
Relations macro-micro, par exemple, le lobby politique pour le droit des agriculteurs à l'accès local à la diversité génétique.Tendance à se concentrer davantage au niveau des ressources naturelles ou au niveau politique
Durables grâce à l'amélioration des capacités locales et à la responsabilisation des populations localesDurabilité discutable parce qu'on prête peu d'attention aux capacités de renforcement qui existent déjà au niveau local

Quel est le point de départ de la perspective relative aux moyens d'existence? Les populations elles-mêmes doivent représenter le principal point de départ pour l'analyse de la biodiversité agricole. Si les populations ne sont pas le point de départ, il sera difficile de trouver des priorités de recherche et de développement qui soient en ligne avec les idées des populations locales. Le bien-fondé de l'utilisation de la perspective relative aux moyens d'existence pour comprendre la gestion de la biodiversité agricole est décrite de façon plus détaillée ci-dessous:

CENTRÉ SUR LES POPULATIONS

Le point de départ de la gestion de la biodiversité agricole, ce sont les populations elles-mêmes. Une perspective relative aux moyens d'existence facilite une analyse plus méthodique des différents groupes sociaux, y compris de la distribution des bénéfices et de l'accès aux ressources dans un souci d'équité entre les sexes. L'adoption d'une perspective relative aux moyens d'existence facilitera, par conséquent, l'identification des multiples fonctions et des objectifs de la biodiversité agricole. Que ce soit concernant différents groupes sociaux et différents environnements, la sécurité alimentaire des populations pauvres sera placée au centre de la discussion.

DYNAMIQUE

L'utilisation et la gestion de la biodiversité agricole sont dynamiques. Différents constituants de la biodiversité agricole sont utilisés par différentes populations dans des lieux et des moments différents, contribuant ainsi au développement de stratégies de subsistance complexes. Comprendre la façon dont cette utilisation diffère en fonction de la santé, du genre, de l'âge et de la situation écologique est essentiel à la compréhension de la contribution de la biodiversité agricole aux moyens d'existence des différents membres de la communauté.

CONSTRUIRE SUR LA FORCE ET LES BIENS

Si nous nous basons sur une perspective relative aux moyens d'existence, cela signifie que nous nous concentrons avant tout sur les forces et les biens des moyens d'existence qui existent plus que sur les faiblesses et les nécessités. Du point de vue d'une approche fondée sur les moyens d'existence, les savoirs locaux et les ressources génétiques sont considérés comme des contributions importantes. Le savoir détenu par les agriculteurs, par exemple, sur les animaux d'élevage et les variétés de plantes est une composante fondamentale de la sélection des espèces, de leur conservation et de leur amélioration. Les plantes locales et les animaux font partie de l'écosystème agricole ; les agriculteurs ont accumulé une quantité significative de connaissances sur la façon dont celles-ci doivent être gérées dans certaines conditions spécifiques.

RELATIONS MACRO-MICRO

La recherche et les activités de développement on tendance à se concentrer soit sur le niveau macro ou soit sur le niveau micro. En appliquant une approche fondée sur les moyens d'existence, il est important d'établir des liens entre ces niveaux pour que la gestion de la biodiversité agricole soit couronnée de succès. Comme nous l'avons vu dans le Module 1.1, de nombreux facteurs concernant la perte de biodiversité agricole sont liés au niveau macro. Des facteurs contribuant à la perte de la biodiversité agricole comprennent la globalisation des marchés, les stratégies de financement, la définition des priorités pour la recherche et le développement et les priorités d'accès aux ressources génétiques. D'un autre côté, le niveau micro est en rapport avec la prise en considération que la biodiversité agricole est un bien de grande valeur géré par une grande variété de personnes.

HOLISTIQUE

D'une perspective relative aux moyens d'existence, la gestion de la biodiversité agricole n'est pas vue comme une activité séparée qui tend à conserver les espèces individuelles, les variétés ou les races. Elle est plutôt vue comme faisant partie intégrante des stratégies quotidiennes de subsistance dans le monde. Les agriculteurs ne sauvegardent pas la biodiversité agricole dans un simple but de conservation. Ils appliquent une perspective plus intégrée et globale pour l'utilisation des espèces, des variétés et des races au sein de leur système agricole. La biodiversité agricole est gérée par les agriculteurs pour de multiples raisons, et le succès de la conservation et de l'amélioration dépend des bénéfices obtenus par les populations.

DURABILITÉ

L'approche fondée sur des moyens d'existence durable souligne l'importance de construire sur des forces et des capacités déjà existantes. Les aspects clé sont la responsabilisation des populations locales par le biais du partage des informations et la capacité de renforcement. En outre, la négociation des Droits des agriculteurs et le partage équitable de ces bénéfices contribueront à des moyens d'existence durables (voir Module 4).

En général, l'approche fondée sur les moyens d'existence concerne d'abord et avant tout les populations. On essaie de comprendre de façon exacte et réaliste quelles sont les forces des populations en présence (biens ou dotations en capital) et la façon dont elles peuvent les convertir en résultats positifs pour leurs moyens d'existence. L'approche est fondée sur la croyance que les populations ont besoin d'une gamme de biens pour parvenir à des résultats positifs en matière de stratégies relatives aux moyens d'existence. Aucune catégorie de biens n'est à elle seule suffisante pour produire les résultats nombreux et variés des stratégies relatives aux moyens d'existence que les populations recherchent. Ceci est surtout vrai pour les pauvres dont l'accès à n'importe quelle catégorie de biens donnée, a tendance à être très limitée. Ils doivent trouver des moyens de se nourrir et de combiner les biens qu'ils possèdent de façon novatrice afin d'assurer leur survie.

[Boîte 1] LA CULTURE DES HARICOTS AU KENYA
La culture des haricots parmi les Kikuyu au Kenya fournit un bon exemple. Un témoignage indique qu'à l'époque précoloniale, une grande variété de différentes espèces de haricots était cultivée dans les zones montagneuses du Kenya. Les haricots, constituaient en outre, un élément fondamental du régime alimentaire des populations rurales dans la mesure où ils fournissaient une riche source de protéines pour compléter la consommation de maïs et des autres denrées alimentaires disponibles. En particulier, les variétés de haricots noirs autochtones appelées njahe en Kikuyu (Lablab niger et Dolichos lablab de leur nom scientifique), étaient cultivées par les femmes et représentaient une bonne quantité des récoltes. Le njahe avait en outre une signification spéciale pour les femmes; on pensait que ce haricot augmentait la fertilité et avait des vertus curatives pour les mères après l'accouchement. C'était en même temps une nourriture presque sacrée car le haricot poussait sur la montagne Ol Donyo Sabuk qui est la deuxième résidence la plus importante du Créateur dans la religion Kikuyu et était largement utilisé au cours des cérémonies divines. Les haricots, au Kenya appartiennent essentiellement aux cultures des petits propriétaires, en grande partie cultivées par les femmes pour nourrir leur famille. Les femmes ont traditionnellement tendance à faire pousser de multiples variétés sur un même champ - et elles mettent de côté de nombreuses provisions de semences - c'est un peu comme une protection contre les maladies et le climat imprévisible. En outre, les plats locaux, tels que le githeri et le irio sont à base de nombreux types différents de haricots.
Source: IK Notes

L'exemple du Kenya montre la complexité derrière une simple activité telle que celle de faire pousser des haricots. Les femmes agricultrices essaient de réaliser une gamme de différentes stratégies de subsistance en utilisant une grande diversité de variétés de haricots. Dans ce cas, leurs variétés de haricots constituent un bien central dans leurs moyens de subsistance. Les terres qu'elles utilisent pour planter ces cultures constituent un autre bien important et il en est de même du travail qu'elles fournissent pour gérer ces cultures. Les résultats des stratégies de subsistance auxquels elles parviennent comprennent la sécurité alimentaire, la gestion des problèmes de santé, les stratégies de lutte ciblée contre les ravageurs.

L'approche fondée sur les moyens d'existence souligne en outre, l'importance d'un plus vaste contexte dans lequel les moyens d'existence des populations et leurs biens s'inscrivent. Il est important de bien avoir à l'esprit, quand on discute de la biodiversité agricole et de sa contribution potentielle aux moyens d'existence des populations, le contexte de vulnérabilité des populations, les politiques existantes, les institutions et les processus qui doivent également être pris en considération. Nous devons prendre en considération les différentes stratégies des moyens d'existence dont les résultats détermineront la meilleure manière d'utiliser les biens. Le tableau ci-dessous est une représentation schématique du cadre des moyens d'existence durables. Les termes utilisés dans ce cadre seront maintenant expliqués et présentés plus en détail.

[Tableau 1] Cadre des moyens d'existence durables2

Le cadre des moyens d'existence durable présente les facteurs principaux qui influencent les moyens d'existence des populations et les relations habituelles entre ceux-ci. Le cadre peut être utilisé à la fois dans la planification des nouvelles activités de développement et dans l'évaluation de la contribution des activités existantes aux moyens d'existence durables. Le cadre en particulier:

Le cadre ne progresse pas de manière linéaire et n'essaie pas de représenter un modèle de réalité. Son objectif est d'aider les parties prenantes, avec leurs différentes approches, à s'engager dans un débat structuré et cohérent sur les nombreux facteurs qui influencent le niveau de vie, leur importance relative et la façon dont ils interagissent. Dans le cas présent, le cadre devrait aider à explorer les relations entre biodiversité agricole, genre et savoirs locaux et à comprendre dans quelles mesures ils peuvent contribuer à améliorer les moyens d'existence.

Les moyens d'existence sont influencés par une multitude de forces et de facteurs différents qui sont eux-mêmes en évolution constante. L'analyse centrée sur les populations commence par une investigation simultanée des biens des populations, leurs objectifs (le résultat des stratégies relatives aux moyens d'existence qu'ils recherchent) et les stratégies des moyens d'existence qu'ils adoptent pour parvenir à ces objectifs. Par la suite, les termes utilisés dans le cadre et leur intérêt seront expliqués.

Les BIENS c'est ce que les gens utilisent pour vivre. Ils représentent l'aspect essentiel des moyens d'existence. Les biens peuvent être classés en 5 catégories - humains, sociaux, naturels, physiques et financiers. Les populations accèdent aux biens de façon différente; par exemple par le biais de possessions particulières ou via les droits coutumiers pour les groupes.

Le capital humain est la partie des ressources humaines dont font partie par exemple les qualités des populations, les personnalités, les attitudes, les aptitudes, les capacités, le savoir et également la santé physique, mentale et spirituelle. Le capital humain est le plus important, non seulement pour sa valeur intrinsèque mais parce que les autres capitaux en dépendent. Comme le capital social décrit ci-dessous, il peut être difficile de le définir et de le mesurer. Par exemple, l'étude de cas sur la culture des haricots au Kenya (voir Boîte 1) montre que le savoir des femmes en ce qui concerne les différentes variétés de haricots est un bien important pour la sécurité alimentaire du ménage aussi bien que pour la santé des femmes.

Le capital social est la partie des ressources humaines qui est déterminée par les relations que les gens ont entre eux. Ces relations peuvent s'étendre aux membres d'une famille, aux amis, aux communautés et aux organismes. Elles peuvent être catégorisées en fonction de leurs buts et de leurs qualités comme la confiance, la proximité, la force, la flexibilité. Le capital social est important en raison de sa valeur intrinsèque; parce qu'il augmente le bien-être, facilite l'arrivée d'un autre capital et sert à construire le cadre de la société en général avec ses normes de comportements culturels, religieux, politiques et autres. La biodiversité agricole nous amène à penser aux relations qui existent entre les générations et qui facilitent le flux d'informations et de savoir. Nous pouvons également penser aux stratégies d'échanges de semences entre les ménages comme à un filet de sécurité en cas de perte des récoltes, etc.

Le capital naturel est constitué de ressources naturelles utilisées par les populations: l'air, la terre, le sol, les minéraux, l'eau, la vie des plantes et des animaux. Elles fournissent des biens, des services soit par elles même, c'est-à-dire sans même l'intervention des populations (faune et flore de la forêt, stabilisation des sols) soit via leur intervention active (cultures agricoles, plantations d'arbres). Le capital peut être mesuré en terme de quantité et de qualité (superficie, tête de bétail, diversité et fertilité). Le capital naturel est important en raison de ses bénéfices environnementaux généraux et parce qu'il est à la base de bon nombres d'économies rurales (en fournissant de la nourriture, du matériel de construction, du fourrage). C'est probablement le bien le plus facile à comprendre parce que la biodiversité agricole est en elle-même un capital naturel.

Le capital physique provient des ressources fabriquées par les populations. Cela comprend les constructions, les routes, les transports, l'eau potable, l'électricité, les systèmes de communication, les équipements et les machines qui contribuent à produire plus de capital. Le capital physique est constitué de biens et de services de production et de biens de consommation qui sont à disposition des populations. Le capital physique est important, parce qu'il répond directement aux besoins des populations en fournissant l'accès aux autres capitaux à travers le transport ou les infrastructures. Un exemple pertinent concernant la gestion de la biodiversité agricole est la disponibilité de facilités d'entreposage pour garder les semences d'un cycle de récolte au suivant.

Le capital financier est une partie spécifique importante des ressources fabriquées. Il comprend les finances à disposition des populations sous forme de salaires, d'économies, de fournitures de crédits, de remises de fonds, ou de pensions. C'est souvent, par définition, le bien le moins facilement accessible pour les pauvres. Il pourrait même être le plus important dans la mesure où il peut être utilisé pour acheter d'autres types de capitaux et peut avoir une influence positive ou négative sur d'autres personnes. En ce qui concerne la biodiversité agricole, les biens financiers revêtent une importance particulière car ils empêchent les populations de manger ou de vendre toutes leurs récoltes et leurs semences ou encore d'abattre tous leurs animaux d'élevage.

ÉQUILIBRE
La quantité relative de biens possédés ou disponibles pour un particulier variera en fonction du sexe, du lieu ainsi que d'autres facteurs. Le diagramme de pentagone, représentant les biens peut être redessiné, comme en témoigne l'exemple, pour visualiser la somme de chaque capital disponible auquel peut accéder un particulier ou une communauté. Il est important de savoir comment cet accès et cette disponibilité varient dans le temps.

LE CONTEXTE DE VULNÉRABILITÉ
La mesure dans laquelle les biens des populations peuvent être accrus, tenus en équilibre et la façon dont ils contribuent à leurs moyens d'existence dépend d'une fourchette de facteurs externes qui change la capacité des populations à gagner leur vie. Certains de ces facteurs ne sont pas sous leur contrôle et peuvent exercer une influence négative. Cet aspect des moyens d'existence peut être défini comme le contexte de vulnérabilité. Ce contexte doit être compris le mieux possible afin d'élaborer des solutions pour en atténuer les effets. Il y a trois types principaux de changements:
POLITIQUES, INSTITUTIONS ET PROCESSUS (PIP)
En plus des facteurs qui déterminent le contexte de vulnérabilité, il y a toute une gamme de politique, d'institutions et de processus conçue pour influencer les populations et leurs façons de vivre. Ces types d'influence sur la société peuvent être positifs, s'ils sont bien conçus. Cependant, vu leur objectif de base, ils peuvent avoir un impact négatif sur les populations.
Les politiques, les institutions et les processus dans le cadre des moyens d'existence durable, sont les institutions, les organismes, les politiques et la législation qui modèlent les moyens d'existence. On ne peut pas leur accorder trop d'importance. Ils fonctionnent à tous les niveaux, allant du ménage à l'arène politique. Ils fonctionnent dans toutes les sphères, de la plus privée à la plus publique. Cela détermine effectivement:

En outre, ils influencent directement les sentiments d'appartenance des populations et leur bien-être. Parce que la culture est comprise dans ce domaine, les PIP rendent compte des autres différences inexpliquées dans la manière dont les choses sont faites dans les différentes sociétés.

Les exemples de PIP comprennent:

STRATÉGIES DES MOYENS D'EXISTENCE
Pour résumer les caractéristiques des moyens d'existence: les populations utilisent des biens pour vivre. Elles essayent de se débrouiller avec les facteurs qui échappent à leur contrôle et qui rendent leurs moyens d'existence vulnérables. Elles sont influencées par les politiques, les institutions et les processus existants et qu'elles-mêmes ne peuvent influencer qu'en partie. Il existe trois types principaux de stratégies que l'on peut combiner de multiples façons:

Des études récentes ont attiré l'attention sur les énormes diversités de stratégies de subsistance à tous les niveaux - au sein d'une région géographique, dans certains secteurs, au sein des ménages et dans le temps. Il est rarement question de changer complètement d'une activité (agriculture, pêche) ou d'un emploi pour un autre. C'est plutôt un processus dynamique dans lequel les gens combinent différentes activités qui leur permettent de répondre à leurs besoins en temps voulu. Une manifestation commune de cela, au niveau du ménage, c'est ce que l'on pourrait appeler «nager entre deux eaux», différents membres du ménage vivent et travaillent temporairement dans des lieux différents, par exemple la migration saisonnière ou permanente.

RÉSULTATS DES STRATÉGIES RELATIVES AUX MOYENS D'EXISTENCE
Le but de ces stratégies relatives aux moyens d'existence est d'affronter les exigences des populations de façon aussi efficace que possible. Ces nécessités peuvent être exprimées en tant que résultats désirés (réalisés grâce au moyen d'existence choisi). Quand on prend en considération les populations «pauvres», il y a cinq besoins élémentaires qui seront toujours retenus parmi les plus importants. La priorité donnée à chacun d'eux dépend de la perception individuelle des circonstances. Ce sont les suivantes:

Points clé

FICHE DE PROCESSUS - NOTES À L'ATTENTION DU FORMATEUR

OBJECTIF: la fiche d'information 2.1apour but d'introduire le cadre des moyens d'existence et de faire prendre conscience aux participants des différents biens que les populations pauvres utilisent pour construire leurs moyens d'existence. En outre, elle souligne l'importance de la vulnérabilité du contexte et les relations entre le contexte de vulnérabilité et les biens relatifs aux moyens d'existence.

BUTS DE L'APPRENTISSAGE: les participants comprennent la complexité des moyens d'existence des populations. Ils sont capables d'utiliser le cadre des moyens d'existence comme instrument d'analyse afin d'identifier les forces et les biens des populations. Les participants devraient être capables de reconnaître le savoir local et la biodiversité agricole comme les actifs essentiels des moyens d'existence des populations pauvres.

PROCESSUS

  1. En fonction du temps disponible et de l'intérêt/ formation des participants, le formateur peut, avec les participants, soit analyser la différence entre les moyens d'existence et l'approche de la gestion des ressources naturelles plus en détail (Etape 1) soit passer directement à l'Étape 2.

  2. En formant deux groupes, les participants devront explorer eux-mêmes la signification d'une approche fondée sur les moyens d'existence comparée à une approche de la gestion des ressources naturelles. Cet exercice encouragera les participants à réfléchir sur leur compréhension des concepts avant l'introduction du cadre des moyens d'existence.

  3. Le formateur effectue une courte introduction sur l'approche fondée sur les moyens d'existence et le cadre des moyens d'existence. En fonction du publique, il/elle pourra utiliser Power point pour la présentation de ses objectifs ou développer le cadre sur un vaste tableau situé face aux participants. La deuxième option est plus lente et peut être plus appropriée aux participants qui ne connaissent pas du tout le cadre des moyens d'existence. Durant cette présentation, il faudrait insister sur l'importance du cadre des moyens d'existence pour comprendre les relations entre la biodiversité agricole, le genre et le savoir local. Une courte session de retour d'information pour les éclaircissements nécessaires devrait suivre.

  4. Après la présentation conceptuelle, le formateur pourra introduire l'étude de cas sur le Mali (Module 5) pour aider les participants à appliquer la structure à une véritable situation. En fonction du temps et de l'humeur des participants, l'étude de cas pourra soit être lue par petits groupes soit être présentée par l'animateur. Cela nous amènera à l'exercice qui est décrit ci-dessous (voir Fiche d'exercices 2.1)

RÉSULTAT: les participants comprennent les aspects et les points principaux du cadre des moyens d'existence et sont capables de l'appliquer à la gestion de la biodiversité agricole.

TEMPS ATTRIBUÉ: minimum 4 heures

FICHE D'EXERCICES

Les participants sont invités à se mettre par petits groupes de 4–5 personnes

TÂCHE DE TRAVAIL DU GROUPE:

En utilisant le cadre des moyens d'existence durable comme un guide, «établir» les grandes lignes:

  1. Quels sont les différents biens décrits dans l'étude de cas? Quel degré de contrôle les différentes personnes du village ont sur eux?

  2. Y a-t-il des facteurs, en dehors du contrôle immédiat de la population du village qui pourraient les rendre vulnérables (par exemple, les tendances, les chocs, les saisons)?

  3. Quels politiques, institutions, processus influencent la gestion actuelle et celle future de leurs biens?

  4. Pouvez-vous identifier différentes stratégies de moyens d'existence dans cette étude de cas? A quoi les populations veulent-elles parvenir avec ces stratégies?

Après que cet exercice ait été complété, les groupes sont invités à présenter leurs résultats et à discuter entre eux des différences et des similitudes.

QUELLES SONT LES RELATIONS ENTRE BIODIVERSITÉ AGRICOLE, SAVOIRS LOCAUX ET GENRE DANS UNE APPROCHE FONDÉE SUR DES MOYENS D'EXISTENCE DURABLES?

Dans la fiche d'informations 2.1 nous avons appris que la biodiversité agricole peur être considérée comme un capital naturel, ou un bien, important pour les moyens d'existence des pauvres. Elle a la possibilité de contribuer à la sécurité alimentaire et créer des revenus. Le capital humain - tel que les savoirs locaux- est considéré comme un bien relatif aux moyens d'existence qui peut contribuer à des stratégies de subsistance différentes. Les rôles des hommes et des femmes et leurs relations font partie des politiques, des institutions et des processus, qui influencent la manière dont les populations vont utiliser leurs biens pour parvenir aux stratégies relatives aux moyens d'existence désirés.

Les défis que nous devons affronter, avec ceux qui s'occupent de recherche et de développement, c'est de comprendre les relations et les complexités qui existent entre les différents éléments des moyens d'existence. C'est seulement à ce moment-là que nous pourrons parvenir à la gestion durable de la biodiversité agricole et que nous pourrons contribuer à l'amélioration des moyens d'existence, au développement économique ainsi qu'au maintien de la diversité génétique et de son savoir local associé.

Il existe suffisamment de preuves, tirées des expériences passées et présentes, que ces trois aspects et les relations fonctionnelles qu'ils entretiennent entre eux ont un impact tantôt positif, tantôt négatif sur les stratégies relatives aux moyens d'existence.

Dans la section suivante, nous explorerons les relations et des liens potentiels plus en détail. Cette section illustre les problèmes de fond entre ces relations. Les mises en application de ces considérations sont présentées dans les Modules 3 et 4.

Les liens de parenté entre les biens

Les biens sont combinés de différentes manières pour produire des résultats positifs. Deux types de relations sont particulièrement importantes:

C'est une question importante à prendre en considération dans les efforts de protection de la biodiversité agricole. Est-ce avoir accès à une vaste gamme de diversités suffisant? Ou bien est-ce que les populations ont besoin d'autres types de biens pour faire un usage efficace de la biodiversité agricole? La brève étude de cas du Cameroun et de l'Ouganda, (voir Boîte 2) montre que le fait d'avoir accès à un marché est fondamental pour vendre avec succès ses produits. Les moyens d'existence des populations pauvres sont souvent assez complexes et tiennent compte de ressources très différentes pour leur survie. Il semble donc improbable qu'un seul type de biens soit suffisant pour gagner sa vie. En outre, l'augmentation des témoignages, laisse supposer que l'accès à l'information, au savoir et aux infrastructures du marché sont des facteurs importants qui déterminent une gestion de la biodiversité agricole fructueuse. Dans le Module 4 nous discuterons plus en détail de l'importance du savoir local dans la gestion de la biodiversité agricole.

Les résultats de la recherche et du développement montrent que ce sont surtout les populations pauvres qui dépendent du capital naturel. La possibilité de remplacer la perte de diversité avec d'autres types de biens est très limitée. Cependant, cette question ne peut pas être posée en termes généraux et dépend, pour beaucoup, des cas particuliers ou des conditions spécifiques. Par exemple, s'il y a d'autres possibilités d'emplois, hors du secteur agricole, les personnes ayant les aptitudes requises peuvent passer du secteur agricole à un autre secteur.

Relations avec d'autres composantes structurelles

Les relations au sein du cadre des moyens d'existence sont très complexes. Les comprendre représente un défi important et une étape essentielle dans le processus d'analyse des moyens d'existence, dont le but est l'élimination de la pauvreté.

Cependant, ce n'est pas une relation à sens unique. Les particuliers et les groupes eux-mêmes influencent les politiques, les institutions et les processus. En règle générale, plus les populations sont dotées en biens, plus il leur est possible d'exercer leur influence. Par conséquent, la responsabilisation peut être un moyen d'aider les gens à construire leur avoir.

Le bref exemple suivant illustre bon nombre des questions mentionnées ci-dessus. Il montre comment un bien naturel (les légumes autochtones) est utilisé pour contribuer aux différents stratégies de subsistance. Il montre également que l'existence de certaines infrastructures (les marchés) est nécessaire pour mettre en œuvre une stratégie particulière de subsistance (dans ce cas la commercialisation de ces légumes). En outre, il montre que des tendances telles que l'augmentation de la production de légumes exotiques, n'influencent pas nécessairement la stratégie de subsistance de façon négative.

[Boîte 2] LÉGUMES AUTOCHTONES AU CAMEROUN ET EN OUGANDA
Au Cameroun et en Ouganda, les légumes autochtones jouent un rôle important aussi bien pour la création de revenus que pour la production de subsistance. Les légumes autochtones offrent une occasion significative aux plus pauvres de gagner de quoi vivre en tant que producteurs et/ou marchands sans nécessiter un investissement important en matière de capitaux. Ces légumes constituent un produit de base important pour les ménages pauvres; leurs prix sont relativement abordables en comparaison avec d'autres types de produits alimentaires. Le marché des légumes autochtones représente sans doute, l'une des nouvelles chances pour les pauvres et les femmes sans emploi qui cherchent à gagner leur vie. En dépit d'une production de légumes exotiques croissante, les légumes autochtones continuent d'être très populaires dans les régions rurales où ils sont souvent considérés comme étant plus savoureux et nourrissants. De plus, les légumes autochtones jouent souvent un rôle cérémoniel et représentent les ingrédients essentiels des plats traditionnels.
Source: Schippers

Liens entre les politiques, les institutions et les processus au sein du cadre.

L'influence des PIP s'étend à toute la structure :

Points clé

FICHE DE PROCESSUS - NOTES À L'ATTENTION DU FORMATEUR

OBJECTIF: le but de la fiche d'information 2.2 est d'introduire les relations entre différents éléments relatifs aux moyens d'existence. Elle montre la nécessité de prendre en considération la biodiversité agricole au sein d'une structure complexe de façon à comprendre les liens entre biodiversité agricole, parité hommes - femmes et savoir local.

BUTS DE L'APPRENTISSAGE les participants sont conscients de l'importance des différents liens et sont capables d'utiliser le cadre des moyens de subsistance comme un instrument d'analyse.

PROCESSUS

  1. Le point de départ pour cette session peut-être une brève présentation effectuée par le formateur. Le contenu de cette session est théorique et peut nécessiter une introduction guidée.

    1. Si le temps est limité, le formateur peut faire référence à l'étude de cas sur le Mali pour explorer les problèmes présentés dans la fiche d'information 2.2.

    1. S'il y a suffisamment de temps à disposition, les participants peuvent former un petit groupe et développer des scénarios sur les situations des pays dans lesquels les populations basent leurs moyens de subsistance sur la gestion de la biodiversité agricole. Il est important d'y inclure le savoir local et les rôles assignés à chaque sexe et les relations comme faisant partie de ce scénario. Ces scénarios peuvent être utilisés pour développer les questions conceptuelles présentées dans la fiche d'information 2.2.

  2. L'exercice 2.2 se concentre sur les effets qu'ont les politiques, les institutions et les processus sur les différents éléments de la structure de subsistance. En fonction du temps disponible, les participants peuvent soit travailler sur l'étude de cas du Mali ou sur les scénarios de leur pays afin de développer l'exercice (voir Fiche d'exercices 2.2).

  3. Les résultats des groupes de travail seront apportés à la réunion plénière. Ils peuvent ensuite être présentés sous la forme d'un podium de discussion. Il est important de suggérer différents mécanismes de feedback et de présentation. Cela rend la discussion plus vivante et plus intéressante.

RÉSULTATS: les participants ont exploré l'utilité du cadre des moyens d'existence. Ils comprennent maintenant la complexité de la gestion de la biodiversité agricole et les relations avec les autres éléments des moyens de subsistance.

TEMPS ÀDISPOSITION: le temps minimum à disposition est de 3 heures. Si les scénarios du pays sont développés et utilisés pour les exercices, le temps minimum est alors de 5 heures.

FICHE D'EXERCICES

GROUPE DE TRAVAIL

  1. Veuillez prendre du temps en tant que groupe pour lire les parties importantes de la fiche d'informations 2.1 et 2.2 sur les politiques, les institutions et les processus.

  2. Répartissez-vous en trois groupes. Identifiez les exemples de politiques, d'institutions et de processus au sein du contexte de la gestion de la biodiversité agricole qui ont des effets sur (Groupe 1) le contexte de vulnérabilité, (Groupe 2), les biens et les moyens de subsistance et (Groupe 3) les stratégies de subsistance et les résultats.

  3. Utilisez le scénario développé dans la session comme un point de départ pour la discussion. Soyez libres d'aller au-delà du scénario et puisez dans vos expériences personnelles et dans votre vie professionnelle.

MODULE 2 - LECTURES ESSENTIELLES

RÉFÉRENCES - MODULE 2

Anderson, S.2003. Soutenir les moyens d'existence grâce à la conservation des ressources génétiques animales In Conservation and sustainable use of agricultural biodiversity. Publié par CIP-UPWARD en collaboration avec GTZ, IDRC, IPGRI et SEARICE.

Blench, R. Espèces négligées, moyens d'existence et biodiversité dans les régions difficiles: comment le secteur public devrait-il répondre? 1997. London, ODI Natural Resource Perspective Paper 23.

Ghotge, N &Ramdas, S. Animaux d'élevage et moyens d'existence, 2003. (Paper 24). In Conservation and sustainable use of agricultural biodiversity, published by CIP-UPWARD en collaboration avec GTZ, IDRC, IPGRI, et SEARICE.

IK Notes, No 23, August 2000. Graines de vie. Les femmes et la biodiversité agricole en Afrique.

Fiche d'information sur Les animaux d'élevage, Royaume Uni, Institut des ressources naturelles (NRI), Université de Greenwich.

Schippers, R. 1999. Les légumes autochtones sont plus populaires en Afrique centrale, ph Action News, NO 1, ||TA.

Site Internet

DFID Web site on Sustainable Livelihoods: www.livelihoods.org/info/info_guidancesheets.html

1 Cette fiche d'information est fondée sur le Sustainable Livelihoods Guidance Sheets du DFID, que l'on peut consulter à l'adresse suivante : www.livelihoods.org/info/info_guidancesSheets.html.

2 Ce diagramme est basé sur la fiche d'information des moyens d'existence de l'Institut des ressources naturelles (NRI)


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