Il convient de noter que le Sénégal, depuis son accession à la souveraineté internationale, a opté pour une politique dynamique, allant dans le sens de l’amélioration du cadre institutionnel régissant les activités socio-économiques.
En effet, des changements majeurs ont été notés dans le cadre de la politique globale sur la base d’un contexte institutionnel très évolutif. Cet état de fait s’est traduit par des mesures prises par l’Etat, touchant entre autres les communautés rurales (création 1972), l’Administration Communale (adoption d’un code communal 1990), la décentralisation / régionalisation (entrée en vigueur en 1997).
Toutes ces mesures constituent des facteurs non moins importants, visant essentiellement l’amélioration des politiques, des stratégies et des orientations devant aboutir au renforcement de la responsabilisation des populations pour une gestion de proximité effective.
4.1 FACTEURS CRUCIAUX D’AMELIORATION
Nous tenons, sur la base d’une analyse que nous voulons pertinente, à l’identification des facteurs cruciaux jugés importants pour améliorer le contexte actuel du secteur forestier.
Les populations:
Elles constituent des actrices de premier ordre pour la gestion des écosystèmes forestiers.
C’est pourquoi, actuellement, l’Etat par l’entremise de tous ses différents démembrements, développe des politiques de responsabilisation des populations sur la base d’un travail important de sensibilisation et d’information.
En effet, à travers les ONG, les services étatiques, les projets de développement, un important volet de sensibilisation, d’information, de suivi-évaluation est souvent conduit pour une meilleure prise de conscience des populations quant à la gestion durable des ressources naturelles.
Les stratégies de développement intégré (Gestion des terroirs):
Il a été constaté ces dernières années une option effective de développement global prenant en compte toutes les activités liées à l’intégration des arbres, des forêts, des sols, des animaux dans la vie quotidienne du monde rural.
Ainsi, est de plus en plus développé le concept de foresterie rurale prenant en compte l’agriculture, l’élevage et la forêt sur la base d’un cadre interactif, dynamique visant à sauvegarder l’équilibre écologique.
Le Cheptel (Stabulation / Elevage de case):
L’animal en piétant le sol et en broutant les jeunes pousses, demeure sans équivoque un facteur de dégradation du milieu (surcharge animale, capacité de charge).
En effet il a été prouvé de manière évidente, que la surcharge animale étroitement liée à l’erratisme pastoral, est un facteur causal non seulement de dégradation mais également de dépréciation du milieu.
C’est pourquoi, des ruptures sont effectives pour faire face à ce fléau par la pratique de l’élevage en stabulation couplé à l’élevage de case pour extirper l’élevage de prestige qui privilégie la quantité en lieu et place de la rentabilité.
Cette nouvelle option qui se consolide progressivement constitue une opportunité de taille pour la gestion rationnelle de l’environnement.
Les Actions intenses de Reforestation:
Depuis la calamité de 1970 marquée par des sécheresses successives aux effets dégradants et aux impacts péjoratifs sur les différents écosystèmes, une volonté politique a permis d’enclencher un engouement populaire pour les actions de reboisement comprenant entre autres le reboisement massif, le reboisement champêtre, les axes routiers, les plantations d’ombrages, les opérations de haies vives, les actions de conservation des eaux et des sols, …
Au Sénégal, la production a atteint de nos jours une moyenne de 10 à 15 millions de plants et des superficies emblavées de 25.000 (Vingt Cinq Mille) ha . De telles activités exécutées sur toute l’étendue du territoire national constituent sans équivoque des facteurs de réhabilitation, de restauration et de révégétalisation des différentes unités géographiques dégradées.
Subdivision du pays en zones éco-géographiques:
A titre de rappel, il importe de préciser que le Sénégal, sur la base des caractéristiques des milieux physique et humain, a été subdivisé en six (06) zones éco-géographiques (ZEG) relativement homogènes du point de vue des potentialités et des contraintes liées au développement forestier et rural.
Ce travail de caractérisation des différentes composantes du milieu confère aux développeurs des atouts importants susceptibles de les guider dans le cadre des programmes à conduire au regard des informations potentielles et spécifiques très parlantes disponibles pour chaque entité éco-géographique. Ce travail considéré comme capital renforce sans nul doute les conditions de réussite naturelle et aboutit à terme à inverser les tendances de dégradations actuelles.
4.2 TYPES DE CHANGEMENTS REQUIS
Comme indiqué à titre de rappel dans le chapitre, les conditions de changement, une dynamique effective a été opérée et relative aux politiques et aux aspects institutionnels au Sénégal.
4.2.1 Changements politiques et institutionnels
Décentralisation – Régionalisation:
Nous précisons à titre de rappel, que la loi sur la décentralisation- régionalisation qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1997, constitue la 3ème étape d’un processus de décentralisation initiée en 1966 (administration communale) et poursuivie durant la période 1972-1984 avec la création des communautés rurales.
La régionalisation a permis à l’Etat de rendre effectif le principe de la libre administration des collectivités locales en leur reconnaissant l’autonomie financière et l’existence d’affaires propres locales gérées par les autorités locales élues (Conseil Régional, Conseil Municipal, Conseil rural). L’enjeu principal de la régionalisation est l’implication et la responsabilisation des acteurs à la base. A cet effet, des collectivités locales sont dotées d’instruments pouvant leur permettre de promouvoir des politiques de développement durables à partir d’une gestion de proximité.
Parmi les organes mis en place, figure l’Agence Régionale de Développement (A.R.D) qui est notamment chargée d’apporter un appui de coordination et une assistance technique.
Planification nationale et régionale:
Il est utile de rappeler que le neuvième Plan d’Orientation de Développement Economique et Social (PODES 1996-2001) qui est un plan d’orientation nationale vise un développement durable.
Ce plan qui définit les orientations stratégiques et des lignes d’actions prioritaires du gouvernement précise à sa 10ème orientation une option de gestion saine des ressources de l’environnement pour un développement durable par:
La rationalisation des ressources naturelles
Le développement de l’éducation environnementale
L’élaboration et la mise en œuvre de plans et schémas d’actions environnementaux au niveau national, régional et local
Le Plan National d’Aménagement du Territoire (PNAT) constitue également un cadre de conception pour le développement spécial. Sa décentralisation, par le biais de schémas régionaux d’aménagement du territoire (SRAT) confère aux régions des outils opérationnels de planification, d’organisation harmonieuse de l’espace régional. D’autres outils de planification existent également:
Le Plan Régional de Développement Intégré (P.R.D.I)
Le Plan d’Investissement Communal (P.I.C)
Dans le domaine de l’environnement, le Sénégal dispose également d’un outil de planification appelé Plan National d’Action pour l’Environnement (P.N.A.E). Le P.N.A.E qui est adopté en 1997, est conçu comme un outil d’affirmation concrète de la politique environnementale exprimée dans le P.O.D.E.S.Ce plan s’est appuyé, entres autres sur l’élaboration de Plans Régionaux d’Action pour l’Environnement (P.R.A.E) et leur synthèse sur une base éco-géographique.
Toujours dans le cadre de l’environnement, le Sénégal est parmi les premiers pays à avoir ratifié la convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (C.D.D). Il a également ratifié en Juin 1994 la convention sur la Diversité Biologique (C.D.B) . Il s’est engagé également en Février 1995 dans un processus de ratification du programme d’Actions National de Lutte contre la Désertification (P.A.N/L.C.D).
Nous constatons que le Sénégal est engagé politiquement et techniquement à faire face à la dégradation des ressources forestières par sa participation au niveau international à tous les programmes de lutte contre la désertification et la dégradation de l’environnement de manière générale.
4.2.2 Renforcement de l’investissement dans le secteur forestier
Documentation pas encore disponible (à développer pour la DCEF)
4.2.3 Progrès techniques
Les mutations scientifiques et techniques du présent siècle ont favorablement influencé les facteurs cruciaux d’amélioration de la situation actuelle. En effet, dans la partie extrême du Nord Sénégal (bassin du fleuve Sénégal), les activités qui y sont initiées et relatives à la restauration des terroirs asylvatiques, s’appuient effectivement sur un outil mécanique communément appelé «charrue Delphino».
Il s’agit d’une charrue conçue par un agro-machiniste italien dans le cadre de la lutte contre la désertification en zone sahélienne pour l’amélioration de la capacité de rétention en eau des sols, favorisant ainsi une production agro-sylvo-pastorale plus substantielle. Elle doit être attelée pour son fonctionnement à un tracteur d’une puissance de 160 à 180 CV.
Elle est spécialement conçue pour la confection de demi-lunes par le creusement mécanique de micro-bassins aptes à la plantation d’arbres et d’arbustes.
Il convient de préciser que la capacité de travail du tracteur est de 20 à 25 ha par jour, avec cependant une consommation de 180 l/j.
Les terroirs du Nord sont généralement constitués de sols compacts dominés par des concrétions ferrugineuses qui sont souvent des zones incultes à l’agriculture car, hors de portée des populations pour leur mise en valeur. C’est dans de tels endroits où intervient la charrue Delphino qui, par le creusement de micro-bassins multiples, favorise l’amélioration des conditions du milieu.
Caractéristiques des demi-lunes (micro-bassins)
longueur demi-lune: 4,5 – 5 m
profondeur demi-lune: 40 – 50 cm
volume demi-lune: 100 l (estimation)
nombre de demi-lune/minute: 10 – 12
nombre de demi-lune/100 m: 13
distance entre demi-lunes: 2,5 m
largeur demi-lune (partie remuée): 80 – 100 cm
distance en ligne sillonnée (variable) 5 – 7 m
profondeur sous-soleuse: 60 cm
raie-profondeur: 45 cm
largeur (fond de raie): 60 cm
largeur d’en haut 75 cm
nombre de demi-lunes par ha: 250 – 300.
4.3 REALISATION DES CHANGEMENTS
Le secteur forestier du Sénégal a longtemps bénéficié d’une attention particulière de la part de l’Etat. Cela s’est traduit depuis 1981 par l’adoption d’outils de planification et d’orientation stratégiques en vue d’une bonne gestion de ses perspectives forestières.
Il est à noter également la dynamique des stratégies qui sous-tendent la mise en œuvre des différents programmes avec une ouverture de plus en plus effective tournée vers les populations.
4.3.1 Renforcement des facteurs positifs:
Plan d’action forestier du Sénégal:
Le Sénégal a lancé depuis 1981 le Plan Directeur de Développement Forestier (P.D.F.F) qui constitue une véritable planification forestière. Ce plan a défini une première stratégie d’action à moyen et long terme qui a permis, non seulement d’impulser une dynamique en faveur de la conservation des forêts et des espaces naturels, mais également de promouvoir un accroissement substantiel des investissements publics dans le sous- secteur. En raison d’un contexte national et international évolutif, le PDDF a été actualisé en 1990 sous la forme du Plan d’Action Forestier du Sénégal (PAFS - 93).
Il s’avère utile de préciser que l’option directrice du PAFS est de s’inscrire, en tant que plan de développement sectoriel et opérationnel, dans le cadre global de la lutte contre la désertification (PAN/CLD) et d’être en parfaite harmonie avec les politiques transversales en vigueur (PODES, PNAT, PNAE). Le PAFS vise essentiellement la conservation du potentiel forestier et des équilibres socio- écologiques d’une part et d’autre part, la satisfaction des besoins des populations en produits forestiers ligneux et non-ligneux. Sa mise en œuvre se base notamment sur la responsabilisation des populations rurales dans la gestion des ressources forestières de leur terroir. Le PAFS accorde également une importance capitale à la pleine participation des organisations locales et autres partenaires à sa mise en œuvre.
L’expérience acquise a permis de démontrer qu’il est possible de réorienter l’intervention du service forestier dans le sens d’une intégration plus efficace de son action dans le cadre global du développement rural et de confirmer son rôle moteur dans le développement de l’approche terroir.
Régionalisation d e la politique forestière:
L’application de la politique nationale de désengagement de l’Etat s’est traduite dans le secteur forestier par la régionalisation des activités forestières. En effet, cette option constitue une avancée significative du processus de responsabilisation des acteurs à la base et des bénéficiaires que sont les populations des terroirs villageois. Ce travail est basé essentiellement sur une option d’harmonisation de suivie et d’évaluation de l’ensemble des activités forestières devant être réalisées au niveau régional.
Il convient de noter que l’approche participative a été considérée comme un outil de mise en œuvre dans un contexte de gestion des terroirs (utilisation d’outils méthodologiques et de supports de communication multimédias).
Cette approche qui privilégie la gestion de proximité permet aux communautés villageoises de concevoir et de conduire de véritables Plans de Gestion des Terroirs (PAGT) qui sont harmonieusement intégrés dans les Plans locaux de Développement (PLD).
Sa complémentarité entre les différents éléments structurant de la démarche de la régionalisation de la politique forestière peut être résumée comme suit:
Plan d’Actions forestier du Sénégal: cadre politique national
Programme National de Foresterie Rurale: levier stratégique du PAFS
Schémas Régionaux de Développement Forestier (ZEG): levier
Opérationnel
Plans d’Action Forestier Régionaux: cadres politiques régionaux
Il est utile de préciser qu’au niveau régional, le PAFR demeure un outil de planification et d’orientation stratégique des activités forestières, considéré comme tel, il s’impose comme cadre référentiel du secteur forestier à la base.
Intégration de l’Approche genre:
Au regard des résultats obtenus dans de nombreux projets forestiers par la gente féminine rurale, les femmes au même titre que les hommes influencent la conception et la mise en œuvre des projets forestiers.
Ainsi, l’approche Genre est de nos jours considérée comme une composante de taille dans la conduite des projets forestiers. C’est pourquoi, depuis mars 1995, le service forestier appuyé par l’Ambassade des Pays-Bas à Dakar et la représentation de la FAO au Sénégal, s’est lancé dans une dynamique de réflexion portant sur le thème ¨Genre et développement durable dans le contexte de la gestion des ressources naturelles¨. Ce travail a permis de favoriser le renforcement des résultats de nombreux projets forestiers.
Nouveaux concepts et nouvelles missions:
Les forestiers ont progressivement compris que les causes du déboisement et de la dégradation des ressources forestières se situaient davantage dans la complexité globale des systèmes et pratiques de gestion des ressources naturelles en pleine mutation que dans la seule coupe symbolique de bois.
Ce constat a amené le service forestier à reconsidérer ses altitudes et intervention sur la base d’une intégration harmonieuse des activités rurales dans un cadre de terroir villageois caractérisé essentiellement par l’implication et la responsabilisation des collectivités villageoises.
De manière générale, cette conception de la foresterie englobe toutes les activités liées à l’intégration des arbres et des forêts dans la vie quotidienne du monde rural. A cet effet, la foresterie rurale se situe par conséquent au carrefour de la foresterie, de l’agriculture et de l’élevage. Par ce fait, elle contribue grandement à l’amélioration de la productivité des ressources naturelles tout en sauvegardant l’équilibre écologique.
4.3.2 Atténuation des facteurs négatifs
L’analyse du secteur forestier à travers de nombreux programmes a permis de mettre en évidence de multiples facteurs négatifs pour la conservation du potentiel forestier et la recherche des équilibres socio-écologiques. C’est pourquoi, des mesures et dispositions appropriées ont été prises allant dans le sens d’une meilleure gestion de ressources forestières marquée par une gestion de proximité.
Les pratiques anthropiques irraisonnées:
L’intensification des séances d’information et de sensibilisation a entraîné chez de nombreux partenaires une prise de conscience effective quant à la gestion des ressources naturelles. Cette prise de conscience s’est traduite par un engagement des populations qui sont versés aux efforts immenses pour la préservation des ressources naturelles par des opérations de restauration des zones dégradées.
Les Structures:
L’Etat par l’entremise de ses différents démembrements, intervient de manière multiforme dans les actions de conservation du potentiel forestier et des équilibres socio-écologiques par des opérations de reboisement, des séances d’animation et d’information …
Les organismes non gouvernementaux s’activent également de manière soutenue dans le cadre de la gestion des ressources naturelles de manière générale. En effet, ils sont souvent installés au niveau de la base et abattent un travail de proximité de premier ordre se traduisant par la responsabilisation des populations pour la gestion des ressources forestières.
Les institutions internationales assurent également des appuis financiers importants pour l’exécution des programmes de développement et la préservation des ressources naturelles sur la base d’une gestion dynamique et durable ( FAO, PNUD, ACDI, USAID).
La société civile est souvent présente sous forme d’associations multiples versées aux séances de sensibilisation et d’information des masses en vue d’en faire des actrices de premier ordre pour la sauvegarde de l’Environnement et la qualité de la vie (écologisme).
Il est noté actuellement aussi la présence de secteurs privés qui se sont organisés sous forme de coopératives et de sociétés et interviennent dans le secteur forestier par des opérations importantes pour la gestion rationnelle des ressources naturelles.