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DEUXIEME PARTIE - IDENTIFICATION, PREPARATION ET APPRECIATION DES PROJETS (Continued)

Etape 6 - Spécification schématique d'un projet possible

Pour les étapes précédentes, les procédures de formulation normalement adoptées sont à peu près les mêmes pour les projets du secteur public que pour ceux du secteur privé; au contraire, pour l'Etape 6, l'approche est presque toujours très différente.

Dans l'élaboration des projets du secteur privé, les activités de la Phase I (Etapes 1 et 2) et du début de la Phase II (Etapes 3 et 4) auront produit des réponses très précises aux questions ci-après:

Dans ces projets, les spécifications schématiques sont très détaillées de sorte que les estimations de coût qui font partie de cette étape le sont elles aussi. Le produit final de l'étape, le document provisoire de projet, est une étude de préfaisabilité.

Au contraire, quand il s'agit de formuler des projets du secteur public, l'équipe n'a pas encore pu répondre à toutes ces questions. Elle en est encore à examiner et cribler les diverses lignes d'actions qui permettront d'atteindre les objectifs identifiés aux Etapes 3c et 4c.

Dans cette sixième étape, l'équipe derva donc:

Comme pour les projets du secteur privé, le produit de cette étape est un document provisoire de projet, qui, lorsqu'il est l'aboutissement du processus de formulation de projets du secteur public, est souvent appelé rapport d'identification ou rapport de reconnaissance.

Etape 6a - Clarification des options

Comme on l'a dit plus haut, cette étape est généralement propre aux projets du secteur public et elle est omise dans ceux du secteur privé.

Il faut maintenant répondre de façon assez précise aux six questions posées ci-dessus. Ces réponses, prises dans l'ensemble, doivent déboucher sur une spécification schématique des options. L'ordre des questions n'a donc pas d'importance, car toutes les réponses doivent être prises en compte parallèment; mais différentes combinaisons de réponses constituent collectivement différents schémas de projet possibles.

Les options doivent être considérées par l'équipe dans le contexte des objectifs du projet (Etape 1), des critères adoptés pour la formulation du projet (Etape 2), de la zone du projet (Etape 3) et des agents cibles (Etape 4). Les facteurs à prendre en compte pour répondre à chacune des questions peuvent être notamment les suivants:

  1. Emplacement géographique du projet. L'assiette géographique des projets de production, assez vaste, est généralement définie en fonction des activités à réaliser, des disponibilités d'intrants et éventuellement des responsabilités institutionnelles. Par exemple, dans un projet de développement de la pêche par la pisciculture, l'équipe devra comparer les emplacements possibles en tenant compte de facteurs tels que la taille des plans d'eau et leur potentiel halieutique, l'effort de pêche actuel et potentiel, l'emplacement et le fonctionnement des écloseries, les possibilités d'introduire des pratiques d'aménagement efficaces, les disponibilités de facteurs de production halieutique (bateaux, filets, moteurs, carburant) et l'impact écologique. Dans un projet de renforcement de la capacité nationale de recherche et de formation, l'équipe devra comparer les emplacements du point de vue de facteurs tels que la proximité et la qualité des infrastructures institutionnelles, les objectifs de politique générale (à l'échelle du pays, de l'Etat et de la zone) et les installations matérielles (laboratoires de recherche, sources d'information, facilité d'accès, possibilités de logement).

  2. Participants au projet. Qui doit participer au projet? Là aussi, il peut y avoir des options: ainsi, dans un projet visant à accroître la production de mollusques, l'équipe peut opter entre trois solutions: installer de nouveaux producteurs dans de nouvelles zones, aider les conchyliculteurs existants à accroître leur production, ou les deux à la fois. Ou bien, elle peut estimer que la réduction des pertes au cours du transport et de la commercialisation permettrait d'accroître la production; en tel cas, il faudra que les agents “en aval” participent au projet.

  3. Activités du projet. Dans les projets de production, les systèmes et pratiques sont dans une large mesure déterminés par des facteurs externes, et les options ne sont donc en général pas nombreuses. Cela ne veut pas dire qu'elles soient inexistantes. Ainsi, s'il s'agit d'accroître la production de mollusques, il faudra choisir l'espèce à cultiver: huîtres, moules ou les deux? Pour accroître les rendements, il peut y avoir plusieurs options technologiques: structures flottantes ou fixes en mer, amélioration de l'aménagement des bancs existants ou les deux. On pourra aussi s'occuper des stades après récolte, par exemple introduire des systèmes de dépuration et de traitement pour prolonger la conservation du produit. Dans certains projets, par exemple quand il s'agit d'accroître la production dans certaines zones d'un pays en développement, il peut n'y avoir d'autre alternative à la simple culture en étang que d'accroître l'intensité. Dans d'autres projets, il est plus facile d'identifier des options. Par exemple dans un projet destiné à introduire les nouvelles technologies d'écloserie, on se demandera s'il faut former le personnel de direction dans des cours nationaux ou dans des stages sur le lieu de travail; dans un projet destiné à améliorer l'éducation, on pourra opter entre la création d'un troisième cycle dans les universités nationales et l'utilisation des programmes existants à l'étranger.

  4. Dimension du projet. La dimension du projet peut être déterminée par des facteurs extérieurs, par exemple un plan national de développement, ou intérieurs, par exemple le coût maximum ou les limites de la zone allouées au projet. Pour les projets de production, on pourra opter entre plusieurs objectifs chiffrés de production. Le choix peut être influencé par les contraintes évoquées plus haut (emplacement des projets et participants) ainsi que par le risque perçu. A part la taille du projet, il peut y avoir des options au sujet de son échelonnement. Ainsi, si le risque est relativement grand, l'équipe peut envisager (a) un assez grand projet sans stade pilote, (b) un stade pilote faisant partie d'un projet plus grand ou (c) uniquement un projet pilote. Dans d'autres types de projets, par exemple ceux de renforcement des institutions, les options peuvent être limitées par l'insuffisance des ressources institutionnelles ou humaines (certaines options peuvent être trop exigeantes en personnel qualifié). En l'absence d'un plan de développement sectoriel, l'équipe peut élargir l'éventail des options en proposant différents scénarios de renforcement des institutions correspondant à plusieurs estimations de la production aquacole.

  5. Coordination et programmation des activités. Dans presque tous les projets de production, les options sont limitées par le cycle de reproduction de l'espèce envisagée. Ainsi, on peut prendre un an de retard sur le programme s'il y a le moindre retard dans une activité qui doit avoir lieu avant la saison du frai par exemple la construction d'une écloserie. Dans un projet d'amélioration d'une pêcherie par l'empoissonnement, si l'on se rend compte que des retards inévitables de la construction des écloseries et d'autres installations risquent de faire perdre beaucoup de temps, une option possible est de commencer par acheter les juvéniles et mettre en oeuvre des pratiques d'aménagement améliorées en attendant que l'écloserie soit opérationnelle. Les options possibles peuvent aussi être limitées dans d'autres types de projets par exemple, ceux du renforcement des institutions. Ainsi, dans les projets de recherche et de formation, les principales options peuvent avoir trait au calendrier des activités, qui peut avoir des incidences sur les coûts.

  6. Organisation du projet. Dans les petits projets d'aquaculture, les options en matière d'organisation sont peu nombreuses ou inexistantes: le projet doit s'accomoder des structures administratives existantes. Dans les grands projets, le choix de l'institution compétente pour la gestion est souvent délicat car celle qui est la plus compétente n'a pas toujours participé à la conception du projet. C'est en particulier le cas dans des projets d'aquaculture continentale: ceux-ci peuvent avoir été élaborés par le Ministère des pêches mais, étant donné leur interaction possible avec les ressources en eau, les coopératives agricoles, les services de vulgarisation, etc., il vaudrait mieux qu'ils soient rattachés au Ministère de l'agriculture. Ou bien, si le secteur agricole joue un rôle dominant, il peut être préférable d'avoir recours à un organisme para-étatique existant tel qu'un office régional de développement pour gérer le projet d'aquaculture afin de donner à celui-ci une certaine indépendance et une identité spécifique.

Etape 6b - Quantification des options

Dans les projets du secteur privé, l'étape 6a est omise et l'équipe passe directement à la quantification des options. Elle doit chiffrer très précisément les principaux critères techniques et biologiques à prendre en compte les principaux critères techniques et biologiques à prendre en compte dans l'agencement physique d'une installation à vocation commerciale. Au contraire, dans un projet du secteur public, l'équipe qui n'a fait jusqu'ici qu'esquisser un certain nombre d'options possibles doit maintenant les chiffrer dans la mesure nécessaire pour qu'une décision puisse être prise ultérieurement. Dans ce cas, cette tâche vise seulement à établir des estimations préliminaires des coûts et des bénéfices de chaque option pour faciliter la décision.

Projets du secteur privé

Dans les projets du secteur privé, la quantification des critères techniques et biologiques s'appelle bioprogrammation. Il s'agit d'assembler tous les éléments de la conception et de chiffrer toutes les fonctions et opérations de chaque composante. La bioprogrammation peut être simple ou détaillée selon la nature et le but du projet. Les éléments à étudier sont les suivants:

  1. Critères biologiques. Il faut identifier les conditions écologiques qui doivent être satisfaites dans la conception du système, compte tenu de l'espèce à élever, ainsi que les conditions optimales. Des recherches approfondies sont nécessaires, et il faut en général se reporter à des comptes rendus de recherche, aux rapports d'autres piscicultures existantes et aux tendances des techniques de culture. Les principaux critères biologiques sont: description des espèces, caractéristiques comportementales, techniques de culture, exigences environnementales (densité, renouvellement de l'eau, qualité de l'eau) exigences nutritionnelles, taux de croissance, taux de mortalité, maladies, etc.

  2. Caractérisation du système d'aquaculture. Cette activité consiste à combiner les critères biologiques et les objectifs de production avec les propriétés du site envisagé et à traduire le tout dans un plan physique et opérationnel fonctionnel. Les caractéristiques du système à mettre en place dépendent des calendriers de production (il faut tenir compte de tous les stades du développement et de la récolte) et du nombre d'unités requises. Plusieurs itérations peuvent être nécessaires pour mettre au point un projet réaliste eu égard aux contraintes biologiques, techniques et financières. Par exemple, les modèles techniques standards ont une capacité de production limitée qui risque d'être inférieure au seuil de rentabilité si la taille du site est elle-même limitée. Si l'on choisit un modèle technique plus avancé - qui comporte des coûts plus élevés et davantage de risques - la production peut être plus intensive et les profits plus élevés. Si au contraire, la taille n'est pas un facteur limitant, on choisira d'aménager ce qu'il faut du site pour assurer la production et les bénéfices en minimisant les coûts de construction et d'exploitation. Il s'agit de choisir une solution technique optimale eu égard à tous ces facteurs.

  3. Programmation de l'infrastructure. Il faut établir les spécifications de l'infrastructure, notamment du réseau hydraulique de l'ensemble et de chaque unité de production, ainsi que de tous les espaces de production et de service. On construit un diagramme de la circulation de l'eau indiquant le volume et le type d'eau requis pour chaque unité de production et espace de services, ainsi que les variations saisonnières. En ce qui concerne les espaces de production, il faudra déterminer le nombre, la taille, etc. des espaces prévus pour la croissance de l'espèce cultivée, ainsi que des espaces réservés à l'écloserie, à la nourricerie, aux étangs de naissain, aux bassins de reproduction et de quarantaine, etc. Pour les espaces de service il faudra déterminer les dimensions et les fonctions de tous les services: laboratoires de recherche, bureaux, entrepôts, réserves d'aliments, ateliers, équipement de réfrigération, rampes à bateaux, etc.

  4. Etudes du site. Les caractéristiques du site doivent être identifiées. Les principaux critères sont: disponibilité de terres, régime de propriété, prix de la terre, topographie, disponibilités hydriques, qualité et température de l'eau, droits d'eau, autres usagers de l'eau, sans oublier les propriétés du sol (chimie, perméabilité, compaction). D'autres aspects du site sont aussi importants tels que la proximité des infrastructures de soutien (villes, viabilités, marchés), et les accès (routes et ponts).

  5. Les facteurs politiques et socio-économiques locaux doivent également être pris en compte (Etape 4b), ainsi que le climat et les risques de perturbations importantes (tremblements de terre, inondations) et l'utilisation des terres avoisinantes (Etape 3b). Il faut vérifier si l'aménagement du site et l'utilisation de l'eau sont subordonnés à l'obtention d'un bail ou d'une licence et d'une façon générale, penser à toutes les contraintes et retombées écologiques. Enfin, il faut se demander s'il existe dans le site des prédateurs naturels de l'espèce à cultiver ou des organismes pathogènes qui accroîtraient les risques.

  6. Plan schématique. Il faut traduire les critères en un plan réaliste. L'équipe doit identifier, évaluer et recommander un plan qui permette d'atteindre les objectifs de production et de tirer un parti optimal des caractéristiques du site. Le plan schématique comprend les éléments d'informations suivants:

On dessine des épures présentant toutes ces informations. Celles-ci sont ensuite utilisées pour établir un devis préliminaire et élaborer le calendrier de la construction.

Il faut alors introduire deux nouveaux éléments:

  1. Analyse financière. Cet élément consiste à effectuer l'analyse financière du projet proposé sur la base des objectifs du bailleur de fonds et du rapport coût/bénéfice qu'il veut obtenir. On se réfèrera aussi à l'étude de marché préliminaire et à la stratégie de commercialisation du produit. L'analyse est toujours présentée sous forme de tableaux financiers, avec un calcul du taux de rentabilité interne.

  2. Analyse écologique. Le dernier élément consiste à étudier les interactions entre le projet et l'environnement ainsi que les impacts tant positifs que négatifs. L'équipe peut être amenée à s'informer des lois nationales et des règlements locaux concernant l'environnement, afin que le projet les respecte.

Cette étape prend fin avec la production d'une étude de préfaisabilité, qui est une compilation des éléments (e), (f) et (g) ci-dessus. Ce rapport est complet dans la mesure où le promoteur l'accepte comme base pour fournir ou obtenir les financements nécessaires. Ce document est par ailleurs une description précise du projet qui peut servir de guide à tous les stades ultérieurs de la construction et de l'exploitation.

On notera que pour le plan schématique (e), il peut y avoir plusieurs façons possibles d'aménager le site. Chaque option comporte des coûts et des risques différents. Par exemple, si la station de pompage est installée sur la côte pour maximiser son rendement, il faut des structures coûteuses pour résister aux vagues, de longues lignes de transmission pour l'électricité et de grandes canalisations d'eau. Au contraire, si la station de pompage est implantée à proximité des autres installations à l'intérieur des terres, le rendement sera moins bon, mais on n'aura pas besoin de lignes de transmission et l'eau de la marée pourra être amenée à peu de frais au moyen d'un simple canal. De même, les coûts de construction et d'exploitation sont peut-être moins élevés pour de grands étangs, mais le volume de poisson frais à écouler en une fois risque de dépasser la demande projetée. Au contraire, les petits étangs peuvent coûter plus cher mais il est possible de les gérer et d'organiser la récolte d'une façon qui corresponde mieux aux besoins du marché local.

Face à de telles options - il y en a toujours - l'équipe de formulation applique les procédures décrites à l'Etape 6a ci-dessus pour le secteur public, mais de façon moins poussée.

Projets du secteur public

Dans les projets du secteur public qui comportent des composantes de production, la quantification des options porte sur les mêmes éléments de bioprogrammation et utilise chaque fois que possible les mêmes critères. Mais elle est rarement aussi détaillée car on n'a besoin que des informations nécessaires pour analyser chacune des options définies à l'Etape 6c afin d'en retenir une.

On peut se référer à ce sujet à l'exemple donné pour les Etapes 3 à 5 (figure 6); il s'agit d'un projet de construction de nouveaux étangs dans la mangrove et/ou de conversion des étangs existants pour produire des crevettes de mer destinées à l'exportation. Dans les étapes 3c et 4c, l'équipe avait identifié les lignes d'action possibles (construire de nouveaux étangs dans la mangrove, convertir les étangs existants à la crevetticulture en accroissant leur profondeur et le débit d'eau, ou combiner les deux formules). L'équipe doit faire la bioprogrammation pour chaque option comme il s'agissait d'un projet indépendant du secteur privé. En d'autres termes, elle mettra au point:

Comme dans les projets du secteur privé, l'équipe estimera les dépenses d'équipement et de fonctionnement, mais pas nécessairement avec autant de précision. A partir des données sur les rendements et les prix, elle peut estimer les rentrées d'argent et les recettes en devises correspondant à chaque option. Il est alors possible de calculer les bénéfices année par année et d'établir une estimation préliminaire du taux de rentabilité financière interne.

On peut alors faire des estimations préliminaires des avantages économiques et sociaux nets. Dans le calcul du taux de rentabilité économique interne, on aura tenu compte par exemple du nombre de nouveaux emplois et de l'accroissement des revenus résultant du projet. On pourra aussi faire une estimation préliminaire du coût économique, par exemple le coût fictif de la main-d'oeuvre et le coût d'opportunité (perte de production de poisson). On pourra aussi évaluer subjectivement d'autres coûts et bénéfices, par exemple la diversification de l'activité économique, la promotion de l'autosuffisance et de compétences de gestion, le transfert de compétences et de technologie. De même, il sera possible de porter des jugements qualitatifs sur d'autres coûts et bénéfices tels que la réduction possible de la pêcherie de crevettes ou la perte de diversité biologique résultant de la destruction des mangroves.

On procède alors (Etape 6c) à l'analyse des trois options, compte tenu de toutes ces informations.

Etape 6c - Analyse et choix des options

Qu'il s'agisse d'un projet du secteur privé ou du secteur public, le processus de quantification et qualification de chaque option aboutit à un schéma de projet différent. En principe, toutes les options sont possibles; mais l'équipe doit choisir la meilleure.

On commence par réexaminer les raisonnements justifiant chaque option pour vérifier s'ils sont conformes aux objectifs du projet. Cela fait, on soumet chaque option à un test de performance du point de vue de quatre critères à savoir:

Dans les projets du secteur public, une des tâches les plus difficiles de l'équipe est de répondre aux nombreuses questions ayant trait à ces quatre critères. Il n'existe aucune méthode toute prête pour mesurer et comparer la performance des diverses options. L'équipe doit donc s'en remettre à son propre jugement. La matrice de décision est un outil utile. C'est un tableau à deux entrées dans lequel les intitulés des lignes et colonnes sont respectivement les différentes conceptions du projet et les objectifs et critères spécifiques; les cases ainsi constituées sont utilisées pour noter la performance de la combinaison correspondante.

L'interprétation de la matrice dépend du type du projet et de ses objectifs. Si par exemple un des objectifs sectoriels du pays est d'améliorer les niveaux de vie et l'emploi dans les campagnes pour freiner l'exode rural, le critère primordial est le nombre de ménages qui bénéficieront du projet; mais si le projet vise à accroître les recettes en devises, les critères financiers et économiques sont plus importants.

Tous les projets comportent des risques, mais certains plus que d'autres. L'équipe doit aussi évaluer le niveau de risque correspondant à chaque option.

Le tableau 2 est une matrice de décision qui aurait pu être construite par l'équipe chargée de la formulation du projet pour choisir entre les trois options possibles (création de nouveaux étangs dans la mangrove, conversion des étangs de pisciculture existants par l'accroissement de la profondeur et du débit d'eau et combinaison des deux formules). Dans les colonnes de la matrice, on a fait figurer les critères les plus appropriés pour le projet.

Dans la formulation finale du projet, il y avait trois options, à savoir:
Option A: Construction de 2 500 ha de nouveaux étangs de crevetticulture dans les mangroves côtières (production annuelle 10 000 t en deux cycles) et d'une écloserie. Le capital nécessaire pour la construction des étangs provient en majeure partie (80 %) de l'assistance extérieure, le reste étant fourni par le gouvernement; la construction de l'écloserie et l'assistance technique sont aussi financées par l'assistance extérieure.
Tableau 2

Matrice de décision pour un projet de crevetticulture côtière
Option A: Construction de nouveaux étangs de crevetticulture
Option B: Conversion des étangs de pisciculture pour la crevetticulture
Option C: Combinaison de formules
Objectifs/critèresOption AOption BOption C
ECONOMIQUES
Taux de rentabilité économique interne (pourcentage annuel)272425
Taux de change utilisé pour le projet (monnaie locale)544
FINANCIERS
Taux de rentabilité financière interne (pourcentage annuel)122017
Coût des investissements publics (millions de dollars EU)312
Pourcentage des coûts recouvré par l'Etat (pourcentage)858585
Assistance financière extérieureOuiOuiOui
SOCIAUX
Emploi (cadres, employés et main-d'oeuvre)
Ecloserie161616
Fabrique de glace03010
Construction (homme/an)3 0005002 000
Création d'emplois indépendants2500100
Nombre de ménages dont le revenu augmentera250600400
Dispersion géographique des activités0+++
Autonomie de la gestion économique++++++
Transfert de compétences et de technologie+++++++
Effets sur le marché (consommation locale de poisson)0----
IMPACT ECOLOGIQUE
Destruction de l'écosytème---0--
Effet possible sur les pêcheries---0--
Effets physiques et chimiques possibles--0-
RISQUE
Niveau de risque++++++
Echelle: 0 = neutre; - = facteur négatif; + = facteur positif
Les financements du donateur sont fournis au moyen d'une ligne de crédit à la Banque de développement agricole qui l'utilisera pour octroyer des prêts à 250 aquaculteurs et à l'office para-étatique chargé de construire et d'exploiter l'écloserie. Les nouveaux crevetticulteurs seront recrutés dans les ménages de pisciculteurs additionnels existant dans la zone.
Option B: Conversion de 4 000 ha d'étangs de pisciculture existants à la crevetticulture; production annuelle 10 000 t en deux cycles; écloserie. Même plan de financement que ci-dessus; mais comme les étangs sont très dispersés (dans 600 exploitations), une composante supplémentaire de crédit est prévue pour trois fabriques de glace.
Option C: Combinaison des deux formules: construction de 1 000 ha de nouveaux étangs (pour 100 crevetticulteurs provenant des familles de pisciculteurs) et conversion de 2 000 ha d'étangs de pisciculture existants (300 exploitants); production totale 10 000 t. Financement comme précédemment, mais avec une seule nouvelle fabrique de glace.
Interprétation de la matrice de décision (tableau 2)

Critère économique. Toutes les options ont des taux de rentabilité économique interne élevés et proches les uns des autres; l'option B vient en tête parce qu'elle crée plus d'emplois indépendants. L'option A entraîne des avantages économiques parce qu'elle crée plus d'emplois dans la construction. Toutes exigent un certain investissement de fonds nationaux, qui devrait générer 1 dollar EU pour 4 à 5 unités de monnaie locale. Toutefois, ces taux de rentabilité économique pourront encore être remis en question par l'analyse d'impact écologique (voir ci-après).

Critère financier. Le taux de rentabilité financière interne est plutôt plus élevé dans l'option B que dans les deux autres, parce que les frais de construction sont plus faibles.

Critère social. L'option B produit plus d'avantages sociaux que les deux autres parce que la participation de travailleurs indépendants au projet est plus grande (600 familles). L'emploi dans les fabriques de glace prévu dans les options B et C serait saisonnier et l'emploi pour la construction dans l'option A serait temporaire. La mobilisation de la main-d' oeuvre locale pour ce travail non permanent risque de présenter des inconvénients et des problèmes peuvent se poser si l'on importe la main-d'oeuvre. Globalement, l'option B est celle qui produit le maximum d'avantages; de plus, elle accroît l'autonomie de la communauté locale en lui conférant de nouvelles compétences. C'est dans l'option A que les avantages sociaux sont les plus faibles. L'option B et, dans une moindre mesure, l'option C entraîneraient une réduction de l'approvisionnement des marchés locaux en poisson. Les 250 (option A) ou 100 (option B) nouveaux crevetticulteurs seraient recrutés dans les familles de pisciculteurs. L'enquête effectuée à l'Etape 4b a indiqué que (a) il ne devrait pas être difficile de recruter de jeunes crevetticulteurs possédant les attitudes et compétences nécessaires et (b) ce recrutement ne devrait pas avoir d'effets négatifs sur l'activité traditionnelle de pisciculture.

Critère écologique. C'est l'option A qui a le plus grand impact écologique car c'est elle qui entraîne le plus de destruction de la mangrove. Outre cette perte d'un écosystème côtier, la destruction des nourriceries à crevettes risque d'avoir des effets sur la pêche tant artisanale qu'industrielle, ce qui aurait un impact sur le taux de rentabilité économique interne de l'option C et surtout de l'option A. Les options A et C pourraient accroître la productivité des pêcheries grâce aux effluents riches en éléments nutritifs qu'émettront les nouvelles crevetticultures mais l'option A risque de provoquer des affouillements et une érosion côtière à cause de sa taille, qui implique l'utilisation d'un volume beaucoup plus grand d'eau.

Risque. Les trois options comportent un certain risque en ce qui concerne le rythme d'adoption de la nouvelle technologie. Mais ce risque devrait être moindre dans l'option B car les pisciculteurs existants peuvent utiliser cette technologie dans certaines de leurs activités traditionnelles. On peut considérer que dans les options A et C, la construction de vastes nouveaux étangs de crevetticulture comporte des risques élevés parce qu'elle accroît considérablement la complexité du projet.

Conclusion. Les taux de rentabilité économique et financière internes et le taux de recouvrement des dépenses de l'Etat sont semblables dans les trois options. Un argument contre les options A et C est qu'elles comportent plus de risque que l'option B; en outre, leur impact écologique est beaucoup plus grand et la mobilisation temporaire d'une main-d'oeuvre importante pour la construction risque d'avoir des répercussions sociales indésirables. Un avantage de l'option B est que le nombre de bénéficiaires est plus grand (et que donc les avantages du projet sont plus largement répartis). Mais les options A et C créeront plus d'emplois indépendants, une plus grande autonomie économique et plus de transferts de compétences et de technologie. L'option A ne réduirait pas l'approvisionnement des marchés locaux en poisson, l'option C entraînerait une certaine réduction et l'option B une réduction considérable.

Après avoir pesé le pour et le contre de chaque option, l'équipe choisirait probablement l'option B pour des raisons techniques, car les étangs sont déjà en place et exploités par des pisciculteurs traditionnels. Les risques de dépassement de crédits et d'adoption trop lente de la technologie sont faibles; l'impact écologique est neutre et la construction n'aura pratiquement pas de répercussions sociales négatives.

Mais il est possible que le gouvernement et le donateur préfèrent l'option C qui permet de ne pas trop réduire l'approvisionnement des marchés locaux en poisson, sans pour autant faire un trop gros sacrifice sur le plan du nombre de ménages bénéficiaires (450 au lieu de 600).

Etape 6d - Préparation du document provisoire de projet

La spécification schématique établie par l'équipe de formulation pour la conception (ou les conceptions) du projet retenue(s) est maintenant prête à être présentée en bonne et due forme au promoteur du projet.

Si l'on se rapporte au début de l'Etape 6, on se rappellera que le produit final, le document provisoire de projet, est appelé “étude de préfaisabilité” dans le secteur privé et “rapport d'identification” ou “rapport de reconnaissance” dans le secteur public. En présentant cette étape, on a appelé l'attention sur les différences entre les deux secteurs, en ce qui concerne l'approche de cette tâche et l'importance qui lui est attachée. Bien évidemment, le contenu des rapports provisoires reflète ces différences.

Le rapport de préfaisabilité contient une description d'un système aquacole bien évalué et fonctionnel, une projection des coûts, un calendrier de la construction et des opérations, le tout suffisamment détaillé. Dans les projets relativement petits ou simples, dont le coût ne dépasse pas quelque $EU 500 000 (aux prix de 1990), le promoteur du projet peut décider à ce stade de passer directement à l'exécution. Quand il s'agit de projets plus grands et plus complexes, l'organisme de parrainage demande presque toujours que l'on passe par le stade de conception du projet (Phase III).

Le rapport d'identification ou de reconnaissance prend en général la forme d'une description claire de la nature, de la structure, des dimensions et de l'impact du projet, avec une explication et éventuellement une justification de tous les choix ayant trait aux diverses variables. La présentation du rapport suivra l'ordre inverse de celui de la procédure appliquée par l'équipe aux Etapes 3 à 6, c'est-à-dire que le rapport devra avant tout indiquer au lecteur en quoi l'option retenue est la meilleure et pour quelles raisons.

Il arrive, comme on l'a vu à propos de l'Etape 6c, que plusieurs conceptions du projet soient possibles. Il se peut aussi que l'équipe décide qu'un travail de conception plus détaillé est nécessaire (Phase III) ou qu'il est impossible de concevoir un projet qui réponde au mandat. Si l'équipe a travaillé avec conscience et compétence, cela ne doit pas être considéré comme un échec.

Quelles que soient les conclusions, un rapport contient toujours des recommandations claires sur l'opportunité de réaliser le projet ou de l'abandonner. S'il est recommandé de le réaliser, le rapport doit contenir des spécifications et un mandat pour la phase suivante.

Différences entre les procédures du secteur public et celles du secteur privé (Etape 6)
Les quatre tâches de cette étape sont trés différentes selon qu'il s'agit d'un projet du secteur privé ou du secteur public. Dans les projets du secteur privé (Modèle A), la précision de la quantification (Etape 6b) et de l'analyse financière (Etape 6c) est plus importante. Dans les projets du secteur public (Modèles B, C et D), le plus important est en général d'évaluer toutes les options identifiées; aucune étape n'est omise. Si une certaine quantification et une certaine analyse financière sont effectuées lorsque cela est possible, elles ne sont généralement pas aussi poussées que dans la formulation des projets du secteur privé.

Illustration de la Phase II: Reconnaissance et conception préliminaire du projet (Etapes 3–6)

Projet 1 - Projet d'écloserie commerciale dans un pays méditerranéen

Après la phase de préparation de la formulation du projet (Phase II), l'investisseur est retourné dans le pays et a passé contrat avec des sociétés locales pour les levés topographiques, l'analyse des sols et l'analyse de l'eau. Trois experts du bureau d'étude sont arrivés un mois plus tard, un ingénieur spécialisé dans les écloseries (chef d'équipe), un biologiste spécialisé dans la pisciculture et un économiste.

Pendant la première semaine, les trois membres de l'équipe ont étudié ensemble le cadre national et régional du projet (Etape 3a) et ses rapports avec la pisciculture dans la région méditerranéenne, sa croissance projetée, et les besoins en alevins, et ils ont fait une évaluation générale (Etape 3b). Ils ont rassemblé beaucoup d'informations pertinentes sur la base desquelles ils ont élaboré une ligne d'action générale (Etape 3c). Ils ont rencontré l'investisseur pour confirmer ses exigences; l'économiste a alors fait une étude de marché pour déterminer quels débouchés existent pour les alevins dans le pays et dans les six autres pays de la région méditerranéenne où il pouvait y avoir des débouchés, mais aussi peut-être une production concurrente (Etapes 4a et 4b). Il a établi un rapport comprenant une étude de marché (Etape 5b), une étude de l'état du développement dans les autres pays (Etape 5c), une étude socio-économique comprenant une évaluation des coûts de la main-d'oeuvre locale, etc. (Etape 4c) et il a confirmé la ligne d'action générale (Etape 4c). L'investisseur lui-même a fourni toutes les informations concernant tant la législation nationale et locale relative aux projets d'aquaculture que les incitations et services de soutien fournis par l'Etat (Etape 6b).

L'ingénieur et le biologiste ont passé les trois semaines restantes à quantifier le projet (Etape 6b). Le biologiste a établi tous les critères biologiques pour l'élevage du bar et de la daurade et, de concert avec l'ingénieur, il a élaboré l'infrastructure de programmation et traduit le tout en spécifications du système d'aquaculture. Le levé topographique et l'analyse de l'eau ont été reçus la deuxième semaine, mais l'analyse des sols n'a été reçue que juste avant le départ de l'équipe. Cette dernière avait rendu compte de l'avancement de ses travaux à l'investisseur avant de partir.

De retour à sa base, l'équipe a achevé le document de bioprogrammation (Etape 6b). L'étude de marché constituait une annexe séparée. Dans l'établissement du plan schématique du site, l'équipe a identifié deux options. Les nourriceries pourraient être implantées à proximité de l'écloserie qui était située dans une zone plate, mais élevée; ou bien elles pouvaient être installées au niveau de la mer pour éviter d'avoir à pomper de grands volumes d'eau; mais pour cela, il fallait de gros travaux de terrassement parce que le terrain du bord de mer était accidenté. Deux options étaient aussi possibles pour la commercialisation des alevins. L'économiste a indiqué que plusieurs piscicultures de la région souhaitaient s'assurer des approvisionnements réguliers en alevins dans le cadre de contrats prévoyant la négociation annuelle des prix et des pénalités en cas de non exécution du contrat. L'autre option possible était de vendre la production sur le marché selon les disponibilités. Le rapport de l'économiste indiquait aussi que deux écloseries analogues étaient en construction en France et en Italie (Etape 5) et que la production totale d'une vingtaine de millions de juvéniles chaque année serait de loin supérieure aux besoins de la région pour les dix prochaines années.

L'équipe a effectué au siège du bureau d'étude une analyse financière de quatre options (deux différents plans d'aménagement du site et deux niveaux de production: cinq ou trois millions de juvéniles par an) ainsi qu'une évaluation sommaire de l'impact écologique du nivellement à l'explosif et du rejet d'eau enrichie en mer. L'équipe a analysé les options (Etape 6c) et recommandé le niveau inférieur de production, à savoir trois millions de juvéniles (les installations de service seraient néanmoins construites en prévision d'une expansion future) qui seraient vendus sous contrat aux pisciculteurs de la région; la nourricerie serait installée sur la côte pour éviter le coût élevé du pompage. Le taux de rentabilité financière interne resterait marginal tant que l'écloserie ne serait pas agrandie.

Le chef d'équipe est alors retourné dans le pays et a présenté le rapport de préfaisabilité à l'investisseur en expliquant les recommandations.

La procédure avait pris huit mois.

Projet 2 - Projet de crevetticulture en eau saumâtre dans un pays de l'Asie du sud-est

Ce projet prévu pour des zones déterminées concernait la construction et/ou la remise en état de canaux et d'étangs de manière à accroître les rendements en crevettes; il prévoyait aussi la fourniture par l'Etat d'un certain nombre de services d'appui. L'équipe avait pour mandat d'examiner un certain nombre d'endroits dans deux régions du pays, de classer ses propositions par ordre de priorité (Phase II de l'exercice de formulation) et de planifier, jusqu'au niveau de l'étude de faisabilité, un projet pouvant être mis immédiatement en oeuvre (Phase III).

L'examen du contexte national et sectoriel (Etape 3a) a porté sur la stratégie et les politiques du gouvernement concernant les exploitants d'étangs de pisciculture et la fourniture des services d'appui. Grâce à de précédentes visites des membres de l'équipe dans le pays, la position du gouvernement concernant un certain nombre de ces questions était déjà connue. Il s'cst confirmé que la stratégie du gouvernement en matière de développement des pêches prévoyait l'octroi d'un soutien assez large aux pisciculteurs pour encourager un accroissement de la production de crevettes au moyen de l'aquaculture. Il s'est confirmé aussi que cette nouvelle production serait, dans la mesure du possible, transformée dans des usines existantes. L'équipe a visité un centre de recherche et de vulgarisation existant déjà pour la crevette et a pris connaissance des différentes méthodes de vulgarisation employées.

L'équipe s'est attelée à la tâche principale qui consistait à faire une évaluation générale (Etape 3b) des zones du projet dans chaque région. Aprés avoir évalué le nombre de pisciculteurs présents dans chaque zone de sousprojets, les conditions du terrain, l'état des canaux et des étangs, les rendements en crevettes et la proximité des usines de transformation et des fabriques de glace, elle a été en mesure de classer les zones de sous-projets selon des critères collectifs.

Parallèlement à cette évaluation générale, l'équipe a fait une estimation du taux potentiel d'acceptation du projet par les pisciculteurs et a examiné les contraintes qui pourraient les écarter du projet, et les incitations et l'aide qu'il faudrait leur apporter pour les aider à surmonter les difficultés (Etape 4). Pour aider l'équipe à identifier toutes les personnes qui pourraient être associées au projet (Etape 4a), l'expert en commercialisation a dressé un schéma des circuits de distribution du poisson et de la crevette en chiffrant, chaque fois que cela était possible, les volumes de produits acheminés par ces circuits et les marges bénéficiaires s'ajoutant à chaque stade. Avant d'effectuer cette analyse, une partie de l'équipe avait redouté qu'en accordant un soutien aux pisciculteurs pour qu'ils élèvent des crevettes destinées à l'exportation, on ne provoque une diminution de la production, dans les mêmes étangs, de chanos destinés au marché local. L'analyse a cependant indiqué que le prix du chanos était suffisamment élevé pour que les pisciculteurs continuent d'approvisionner le marché.

Toutes ces évaluations (Etapes 3a et 4a) et études (4b) ont été effectuées parallèlement par l'équipe, qui s'est néanmoins vue pressée par le temps. Il n'a pas été fait appel, pour déterminer les besoins des agents et les préoccupations que leur inspirait le projet, aux techniques d'évaluation rurale rapide. Au cours de quelques entretiens avec des exploitants locaux, des animateurs de coopératives et des fonctionnaires locaux du Département des pêches, l'équipe s'est convaincue que le taux d'acceptation serait élevé. Les contraintes critiques autres que physiques, comme la disponibilité d'eau et la profondeur des étangs (identifiées au cours de l'Etape 3b), concernaient le coût élevé et l'insuffisance et les à-coups de l'approvisionnement en graine de crevettes, et les médiocres connaissances techniques des pisciculteurs concernant l'élevage de la crevette.

Faute de temps, l'équipe ne s'est pas beaucoup penchée sur les besoins de crédit des pisciculteurs. Elle a pris pour hypothèse de travail que ceux-ci auraient besoin de prêts pour améliorer leurs étangs et pour acheter des intrants, hypothèse confirmée lors d'entretiens avec des responsables des banques locales dans chacune des zones du projet.

L'équipe a constaté aussi que l'organisation de la commercialisation de la crevette pouvait être améliorée. Le pouvoir d'achat était aux mains des transformateurs locaux, qui détenaient parfois un monopole. Toutefois, les prix perçus par les pisciculteurs semblaient être raisonnables et cette question n'a pas été considérée comme constituant une contrainte appréciable. Elle pourrait être résolue plus tard.

L'équipe a identifié un certain nombre de solutions possibles (Etapes 3c et 4c) selon le nombre et l'emplacement des écloseries et des installations d'appui, comme les fabriques d'aliments pour poissons. Elle les a ensuite classées par ordre de priorité pour chacune des zones de sous-projets, puis a refait le classement des zones du projet. Outre les travaux de génie civil nécessaires dans chaque zone de sous-projet, l'écloserie et les fabriques d'aliments pour poisson, chacun des sous-projets comprenait des services de vulgarisation et du crédit.

L'équipe a alors examiné ce qui pourrait se passer dans la zone du projet si celui-ci n'était pas mis en oeuvre (Etape 5). Elle est arrivée à la conclusion, que en l'absence d'une intervention du gouvernement, il n'y aurait pas d'accroissement appréciable de la production de crevettes et que beaucoup des usines de transformation devraient fermer si elles n'étaient pas approvisionnées en crevettes provenant des étangs de pisciculture. De plus, compte tenu de la difficulté inhérente à l'introduction et au fonctionnement d'un système de ramassage s'étendant sur une plus vaste zone, la valeur des crevettes produites serait probablement moindre en raison d'un médiocre contrôle de la qualité après capture.

L'équipe a procédé à des estimations préliminaires des coûts et avantages de chacun des sous-projets (Etape 6b) et, après analyse (6c), a recommandé un projet pouvant être financé (6d). Dans son rapport intérimaire, elle a recommandé qu'une institution nationale conduise, avant le commencement de la Phase III, des enquêtes topographiques et pédologiques détaillées et étudie la qualité des eaux (pour l'Etape 7) dans les zones retenues pour les sousprojets.

Cette partie du travail de formulation a pris trois mois, dont un mois pour le travail de terrain et deux mois pour la rédaction des rapports. (Cela correspondait au temps alloué, dans le budget, à la formulation du projet).

Projet 3 - Projet d'amélioration de la conchyliculture en Asie du sud-est

Après s'être préparée pour la formulation du projet, une équipe de six membres s'est rassemblée à Singapour pour entreprendre un travail de formulation d'un an concernant d'amélioration de la conchyliculture et le contrôle sanitaire des produits dans la région.

L'équipe a passé les quatre premiers mois à visiter les pays intéressés, étudiant le contexte sectoriel et tenant des réunions (Etapes 3a, 3b et 3c). Les différentes solutions possibles, une fois jetées sur le papier, tenaient en 15 pages. L'équipe a identifié sept espèces de mollusques dignes d'attention, huit zones géographiques prioritaires du point de vue de la production, ainsi que des composantes de recherche, formation, production, vulgarisation, contrôle sanitaire, dépuration, transformation et commercialisation, dont une étude à l'échelle mondiale des possibilités d'exportation s'offrant à divers types de produits transformés.

Analyse et diagnostic (Etape 4) ont pris encore huit mois. Les agents instruments, cibles et régulateurs (4a), quoique généralement les mêmes dans tous les pays concernés, différaient dans le détail d'un pays à l'autre. Les pays ont donc été regroupés de façon à réunir ceux qui présentaient des caractéristiques communes. Ce travail s'est révélé complexe et a pris plus de temps que prévu. Il restait donc moins de temps pour l'analyse (4b) qui n'a par conséquent, pas été aussi détaillée qu'il eût été souhaitable. Il était clair, cependant, que le principal facteur limitant du projet n'était ni la capacité biotechnique de produire davantage (du point de vue des superficies, de la productivité, des techniques) ni les capacités financières et humaines (argent et savoir faire), mais l'acceptabilité des produits par les consommateurs tant à l'intérieur qu'en dehors de la région. Les distances entre zones de production et marchés étant importantes, la surveillance sanitaire et le contrôle de la qualité joueraient un rôle crucial dans la confiance que les consommateurs auraient dans les produits. C'est pourquoi les solutions identifiées par l'équipe (4c) étaient centrées sur les moyens d'atteindre cet objectif.

L'évaluation de l'avenir “sans le projet” (Etape 5) a dû être condensée en deux mois et a été relativement superficielle. La conclusion a été que l'on ne pouvait s'attendre à ce que, sans le projet, l'offre excède de plus de 2 % en moyenne la progression de la demande résultant de l'accroissement démographique (avec des variations d'un pays à l'autre), et que les exportations resteraient modestes.

Compte tenu des différences entre pays, la spécification schématique d'un éventuel projet (Etape 6) se présentait sous la forme d'un agrégat de six sous-projets nationaux semi-autonomes, ne comprenant de composantes exportation que pour la Malaisie et la Thaïlande, avec un projet régional de coordination. Concernant le projet de coordination, deux options ont été retenues, l'une avec deux variantes, l'autre trois, suivant les possibilités de combination des sous-projets nationaux et le degré de participation de la CEE, tant au projet de coordination qu'aux sous-projets nationaux.

Le travail a pris les 15 mois qui avaient été prévus.

Thèmes de discussion

Les thèmes de discussion que l'on pourrait tirer des exemples donnés ci-dessus sont les suivants:

3. PREPARATION DU PROJET

La préparation du projet constitue le deuxième stade de la formulation. Elle comporte trois Phases (III-V): conception du projet, analyse des résultats attendus, documentation et présentation du projet.

Phase III: Conception du projet

But et produits

La conception du projet commence quand le promoteur du projet a examiné le rapport intérimaire de l'équipe de formulation et a donné son accord pour que l'on passe au stade de la conception.

La conception du projet a pour but de planifier, au niveau de détail approprié, les spécifications techniques, structures d'organisation, calendrier, arrangements administratifs, ressourcesnécessaires et devis du projet de manière à, premièrement, fournir au promoteur les renseignements dont il a besoin pour décider d'investir et, deuxièmement, préparer la mise en oeuvre du projet.

Comme il a été indiqué à la fin de la Phase II, dans les projets du secteur preivé, le promoteur aura sans doute, à ce stade, reçu un rapport de préfaisabilité sur la base duquel il pourrait investir immédiatement dans le projet, et il ne resterait plus qu'à planifier sa mise en oeuvre, une fois obtenues les autorisations locales. Dans des projets plus importants, le promoteur peut avoir encore à prendre certaines décisions concernant la conception, puis à obtenir les autorisations nécessaires et, éventuellement, à chercher un financement extérieur. Pour les projets du secteur public, il faut invariablement aller beaucoup plus loin dans la conception de l'hypothèse de développement préférée avant que soient faites les évaluations financières.

Les principaux produits de cette phase sont au nombre de cinq:

Durant l'identification du projet, l'équipe s'est occupée de rassembler et d'analyser des informations permettant d'identifier des possibilités et, poursuivant son analyse, parvenir au projet proposé. La présente phase, par contre, a un caractère itératif, l'équipe vérifiant plus en détail les possibilités de réalisation pratique et l'efficacité probable des propositions préliminaires. Durant la Phase II, l'équipe a dû se demander “avons-nous compris ce qu'il y a à faire?” Dans la Phase III, la question est “sommesnous sûrs de la façon dont cela fonctionnera?”.

Normalement, le travail se déroule en cinq étapes (Etapes 7–11), dont le contenu est résumé dans la figure 7, et décrit plus bas.

Etape 7 - Etudes techniques et socio-économiques détaillées

Cette étape concerne particulièrement les projets du secteur public pour lesquels l'option de développement préférée doit être davantage circonstanciée.

Une fois jetées les premières bases d'un projet, il est souvent nécessaire de réunir, sur certains points techniques et économiques, des informations plus détaillées au moyen d'enquêtes de terrain spécialisées. Normalement, l'équipe chargée de la formulation du projet aura recommandé ces enquêtes dans son rapport intérimaire.

Dans le cadre de l'identification et de la préparation des projets, ces enquêtes devraient être considérées comme des activités relevant normalement de la conception préliminaire des projets et devraient se faire au stade de l'identification mais, dans les projets du secteur public, leur exécution est fréquemment différée car elles sont coûteuses et que ces coûts, tant qu'ils ne sont pas identifiés dans le rapport intérimaire, ne sont pas autorisés. Ces enquêtes sont souvent désignées par l'expression “études de préconception”. C'est un travail distinct de la phase de conception du projet et qui est généralement achevé avant que l'on passe à une autre étape. Dans la plupart des cas, ces enquêtes sont exécutées par des équipes autres que celle qui formule le projet; elles travaillent sur la base de mandats établis par l'équipe.

Dans le cas des projets aquacoles, les enquêtes normalement menées concernent les capacités ou limitations des administrations publiques, des offices de commercialisation, des sociétés de services, et les types d'agents visés. Les enquêtes socio-économiques et écologiques prennent de plus en plus d'importance. Les premières sont nécessaires sur beaucoup de projets de production pour être sûr qu'on a identifié les bons agents instruments et que les contraintes et possibilités sociales sont clairement délimitées, et pour rassembler suffisamment de renseignements sur la structure sociale pour s assurer la participation des bénéficiaires à l'exécution du projet et par la suite. Une enquête socio-économique peut aussi être nécessaire pour, par exemple, calculer les coûts et profits des installations aquacoles employées par de petits exploitants, savoir quels sont les systèmes de pisciculture qui conviennent et leur attrait probable pour les petits agriculteurs du point de vue des recettes nettes qu'ils engendreront, du degré de risque, etc. Les enquêtes écologiques sont aujourd'hui pour ainsi dire indispensables et peuvent concerner, par exemple, l'évacuation des effluents des piscicultures, la destruction des écosystèmes, ou la diversité génétique des populations naturelles. On fera parfois aussi des enquêtes sur les formalités administratives et autres à accomplir car, dans certains pays, il peut être long (et, dans une certaine mesure, coûteux) d'obtenir les permis et licences nécessaires.

Figure 7

Figure 7 Phase III. Conception du projet

Il est parfois nécessaire aussi, à ce stade, de mettre en route des études de marché dont les résultats ne seront disponibles que plus tard, pendant la phase de conception ou d'analyse. Les études de marché peuvent aussi être faites pendant la mission de préparation, par un expert en commercialisation faisant partie de l'équipe chargée de la préparation du projet.

A ce stade aussi, quand il est probable que les projets auront besoin d'intrants tels que des aliments artificiels ou des alevins, il est souvent souhaitable de vérifier si ces intrants seront disponibles et à quelles conditions.

Dans les projets axés sur la production, où il faut resserrer le choix des emplacements, il faudra éventuellement, à partir du travail effectué à l'Etape 6b, aller plus loin dans le travail de quantification des sites.

Les enquêtes sont parfois si étendues et si importantes qu'il faut décider de repousser les étapes suivantes de la planification du projet en attendant d'avoir les résultats. Quand toutes ces activités sont terminées, l'équipe chargée de la formulation du projet doit avoir à sa disposition tous les renseignements nécessaires pour passer à la conception du projet.

Pour les projets du secteur privé, ce travail aura été presque entièrement fait durant les Etapes 4 et 6. Peuvent faire exception de grands projets dont le mandat général comprend des études de reconnaissance et un travail de conception préliminaire. Citons par exemple une société internationale qui s'intéresse à la possibilité de convertir en stations aquacoles plusieurs de ses plantations de canne non rentables, mais qui ne sait pas dans quelle mesure cela est réalisable. A la fin de la Phase II, l'équipe du projet peut avoir recommandé la conversion de deux plantations présentant les meilleures possibilités.

La société peut alors décider, pour l'une des deux, de passer à la phase de conception.

Différences entre les procédures du secteur public et celles du secteur privé (Etape 7)
L'Etape 7 s'applique aux projets du secteur public (Modèles B, C et D), et peut éventuellement s'appliquer aux grands projets du secteur privé (Modèle A) offrant plusieurs options à analyser en détail.

Etape 8 - Définition des objectifs, cibles et critères de conception du projet

Cette étape peut ne prendre que peu de temps dans le calendrier de l'équipe chargée de la formulation du projet, mais n'en représente pas moins un aspect important du travail de formulation. Elle marque la fin de la période principale de rassemblement des données et le début de la véritable planification du projet. Comme pour l'Etape 7, les tâches correspondant à l'Etape 8 concernent principalement les projets du secteur public; dans le secteur privé, elles ne concernent que les projets qui ont démarré avec des objectifs très généraux et assez peu spécifiques quant à l'emplacement et aux espèces.

Etape 8a - Examen et redéfinition des objectifs du projet

L'intervalle qui s'écoule entre la présentation du rapport intérimaire et le début du travail de préparation du projet offre la possibilité au promoteur du projet ou aux autorités nationales de planification (et à l'équipe chargée de la formulation), d'examiner les objectifs envisagés pour le projet et sa conception préliminaire.

Durant cette période, les unes ou les autres peuvent proposer des modifications des objectifs et de la conception préliminaire. Quand cela se produit, les modifications suggérées doivent être discutées et approuvées par le comité de direction du projet ou par l'organe officiel compétent, avant que l'équipe ne redéfinisse les objectifs du projet.

C'est la dernière occasion de revoir et réviser les objectifs.

Cette redéfinition peut consister, par exemple, à:

Cette tâche est particulièrement importante dans le cas de projets dont les objectifs sont des cibles chiffrées. Pour les fixer, l'équipe doit penser au déroulement du projet dans sa totalité. Par exemple, pour atteindre une cible concernant la formation de vulgarisateurs, elle doit tenir compte du nombre d'instructeurs nécessaires, du volume du matérial pédagogique, de la logistique, des taux d'abandon, etc. Dans des projets de production, pour atteindre un objectif de × tonnes de poisson ou de mollusques sur quatre ans, elle peut avoir à prendre en compte le temps nécessaire pour constituer le stock de géniteurs nécessaires pour assurer de façon fiable la quantité d'alevins correspondant à la production prévue. Quand elle fixe les objectifs, l'équipe doit donc être certaine qu'elle dispose des informations de base nécessaires. Ces informations auront été rassemblées pendant l'identification du projet (Etapes 3 et 4) et pendant l'Etape 7 de la présente phase. Si l'information manque, l'équipe doit prendre ici le temps de la rassembler.

Etape 8b - Spécification des paramètres du projet

Il faut maintenant décider des quatre paramètres principaux du projet. La succession et la teneur des activités nécessaires pour en arriver au point où l'on peut fixer chacun de ces paramètres varient selon le type et l'orientation de chaque projet. Comme il a été dit dans le chapitre sur l'identification du projet, quand il s'agit de projets reposant dès le départ sur une idée bien précise (Modèles A et B), une bonne partie des travaux correspondant à cette tâche aura été faite ou partiellement assemblée. Pour d'autres, en particulier pour les projets généraux du secteur public (Modèles C et D), cela ne sera pas le cas.

Ces quatre paramètres sont les suivants:

  1. Délimitation de l'étendue/zones du projet. Pour les projets de production dont l'emplacement précis n'a pas été identifié, l'équipe doit entreprendre une quantification complète de toutes les options restantes concernant la conception et des composantes de bioprogrammation décrites à l'Etape 6b. Par exemple, dans un projet qui a pour objectif d'accroître la production de mollusques, un certain nombre de zones côtières peuvent avoir été identifiées dans le rapport intérimaire mais le choix définitif des emplacements compris dans ces zones peut dépendre (a) des études concernant la qualité de l'eau et son débit, etc., effectuées pendant l'Etape 7, et (b) de la bioprogrammation faite pour calculer les rendements potentiels de chaque emplacement et les coûts des services d'appui (surfaces à construire, usines de dépuration, usines de transformation, etc.).

    Pour d'autres types de projets, par exemple la création d'un centre régional de formation, des considérations semblables s'appliqueront. Dans ce cas, l'équipe devra suivre la formule de bioprogrammation (en remplaçant le nombre de stagiaires et leurs besoins par des critères biologiques), puis en tirer les besoins d'infrastructures et les coûts. .

  2. Sélection des agents du projet. Le plus souvent, les agents auront été identifiés et sélectionnés durant l'Etape 4c, quand l'emplacement du projet a été relativement bien défini. Si, toutefois, le choix définitif de l'emplacement a été subordonné à l'exécution d'enquêtes et d'études (Etape 7) l'équipe doit maintenant sélectionner les agents instruments et les agents régulateurs du projet.

    Un des problèmes qui peuvent se poser dans les projets de production est que, en pratique, il n'est possible d'estimer que provisoirement le nombre de producteurs qui participeront au projet (taux d'adoption). Ce problème montre à quel point il est important que l'équipe de formulation ait d'ores et déjà une compréhension complète des structures sociales et économiques de la zone du projet (Etape 4b) et du “profil d'identité” des individus qui seront le plus probablement attirés par le type d'activité proposé. Il est moins probable que le problème se pose dans des projets ne concernant pas la production mais, par exemple, la recherche et la formation, où la sélection des agents instruments ne devrait pas présenter de difficultés.

  3. Confirmation des technologies et pratiques d'aménagement retenues. Cette vérification n'est faite par l'équipe de formulation que pour les projets du secteur public et concerne le projet au niveau des exploitations. Il s'agit le plus souvent de confirmer que la technologie proposée correspond aux besoins des producteurs et, en particulier, qu'elle est fiable dans la plupart des conditions; c'est une confirmation de sa micro-faisabilité et de sa compatibilité avec les ressources et avec les contraintes des exploitants, de ses incitations et de son attrait pour les utilisateurs, ainsi que de ses incidences et de ses effets plus lointains sur des agents autres que les exploitants.

    Dans des projets se référant à un emplacement, à des espèces déterminées, etc., la technologie aura été décidée au stade de la formulation du projet et le travail s'arrête là. Pour des projets de caractère général, les options disponibles concernant la production peuvent encore dépendre du choix définitif de l'emplacement et des agents retenus. Par exemple, un emplacement destiné à une production conchylicole accrue peut se prêter à la culture sur radeaux car la profondeur est suffisante. Ailleurs, il peut être préférable de produire sur le substrat, car la profondeur n'est pas suffisante. Même ainsi, ces conditions physiques peuvent passer au second rang si l'on considère que le choix de la technologie doit être fait en fonction des besoins des agents ciblés. Si les agents sont déjà familiarisés avec la culture sur radeaux, l'équipe peut décider de retenir cette technologie de préférence à l'aménagement et à l'exploitation de bancs de mollusques installés sur le substrat, même si la zone est peu profonde.

    Il n'est pas toujours facile de se prononcer car l'aquaculture est un secteur qui ne dispose pas d'une longue tradition permettant de comparer un type d'élevage avec un autre. Des calculs relativement faciles peuvent être faits pour choisir le système le plus viable, par exemple pour choisir entre des systèmes extensifs, semi-intensifs et intensifs, car le facteur décisif est souvent représenté par les ressources disponibles plutôt que par des considérations purement économiques. Mais le choix de la juste pratique, par exemple entre un élevage sur radeaux flottants et un élevage sur bancs ensemencés, ou entre des étangs en terre, des cages et des enclos en filet, voire le choix de la combinaison d'espèces est beaucoup plus ardu. La bonne décision est le fruit d'une connaissance approfondie des techniques disponibles et des personnes auxquelles elles s'adressent.

  4. Phases et déroulement des activités du projet. Ce travail s'applique à tous les projets. Il ne s'agit pas de fixer le calendrier du projet, ce qui sera fait plus tard (Etape 9d), mais de comprendre et d'estimer correctement le degré de difficulté, tant psychologique que physique, que les transformations représentées par un projet quel qu'il soit peut présenter pour les agents instruments. A la fin de la phase d'identification, l'orientation générale de la plupart des projets aura été définie. Dans ce cas, l'équipe doit confirmer que les phases et le déroulement du projet, et de ses composantes d'appui, sont en rapport avec la nature des changements envisagés.

La série de directives préparée initialement pour les projets de développement agricole et adaptée ici pour les projets d'aquaculture peut faciliter la tâche de l'équipe.

Caractéristiques des options envisageables

Etape 8c - Confirmation des critères de conception applicables à la planification détaillée du projet

Cette tâche, comme les deux précédentes tâches de la présente étape, s'applique surtout aux projets du secteur public et à un petit nombre de projets du secteur privé définis de manière générale.

Dans l'Etape lc, le promoteur du projet aura fixé certains critères. Le chef de l'équipe devra maintenant vérifier si ces critères restent tels qu'ils ont été posés, ou s'ils ont évolué depuis la soumission du rapport intérimaire. Une fois définitivement arrêtés tous les critères appropriés, il doit s'assurer que chacun des membres de son équipe les connaît bien pour que la conception des différentes composantes du projet soit cohérente.

Pour faciliter ce travail, il est commode de ranger les critères applicables au projet dans les catégories ci-après:

Etape 8d - Préparation des plans de travail et mandats des étapes suivantes

Après examen des objectifs et activités (re)définis du projet, et accord sur les principaux critères, le chef de l'équipe doit établir le mandat de chacune des personnes qui participeront aux Etapes 9, 10 et 11, et le calendrier de travail. Ces mandats doivent:

  1. définir les responsabilites de chacun pour ce qui concerne:

  2. identifier toutes les interfaces entre:

Déjà à ce stade, le chef de l'équipe doit penser à la préparation du rapport final du projet, dont il aura établi les principaux chapitres, les documents de travail et annexes techniques l'accompagnant. La meilleure façon de procéder consiste à préparer une table des matières complète. Il est bon, souvent, que le chef de l'équipe fournisse dès ce moment aux membres de son équipe des exemples du type de travail qu'il attend d'eux, par exemple les détails qui devront figurer dans les rapports et le style de présentation.

Différence entre les procédures du secteur public et celles du secteur privé (Etape 8)
Les trois premières tâches de l'Etape 8 s'appliquent entièrement aux projets du secteur public (Modèles B, C et D), et uniquement aux projets du secteur du secteur privé qui ont démarré avec des objectifs très larges ou très généraux. La quatrième tâche (8d) s'applique à tous les projets passant à la phase de conception (Etape 9).

Etape 9 - Conception des différentes composantes du projet

En guise de prélude à l'Etape 9, il est bon que l'équipe de formulation répartise, avant de passer à leur conception, les différentes composantes du projet en catégories. Ces catégories sont les suivantes:

La conception du projet doit livrer suffisamment d'informations concernant chaque activité pour pouvoir servir de document de référence complet et prévoir de maniére aussi exacte que possible les coûts et les délais. Toutefois, comme avec l'Etape 6, il y a une grande différence entre le niveau de conception de chaque composante selon qu'il s'agit de projets du secteur public ou du secteur privé.

Dans les projets du secteur public de caractère général, prenons par exemple un projet de soutien de la petite pisciculture en étangs, la conception de la plupart des composantes d'appui, des composantes de soutien social et des composantes d'assistance technique n'est pas menée de façon tro rigide car, comme on l'a observé, certaines activités ont un caractère aléatoire et qu'il est souhaitable de se réserver un peu de souplesse durant l'exécution. La mise en oeuvre d'un projet peut, dépendre, par exemple, du rythme auquel les petits pisciculteurs déjà installés et nouveaux adopteront la technologie. Dans de tels cas, l'équipe pourra ne fournir que des estimations approximatives du rythme d'avancement du projet et des ressources nécessaires dans le temps.

Même avec les projets du secteur public comprenant la conception de composantes de production et de certaines composantes d'appui (installations ou structures), le degré de détail demandé dépend souvent de l'organisme de parrainage. Certaines organisations donatrices, par exemple, ne demandent le plus souvent que des “tracés préliminaires” (diagrammes ou croquis des installations), accompagnés de listes générales des équipements/outillage regroupés par grandes catégories.

Dans les projets du secteur privé, cette étape concerne presque entièrement la “conception finale” des composantes de production et éventuellement de certaines composantes d'appui, et une estimation des coûts assez poussée. Il faut donc dessiner tous les plans et dresser des bordereaux chiffrés. Ces documents ne sont pas toujours préparés par l'équipe de formulation si celle-ci ne comprend pas d'architectes ni d'ingénieurs, et l'organisme parrainant le projet sous-traitera cette tâche à une société spécialisée.

Quelle que soit la nature du projet et de ses composantes, le degré de détail de la conception doit être spécifié dans le mandat (Etape 8d).

Etape 9a - Conception des composantes de production

Pour produire, il faut des installations ou des structures. Pour la conception des composantes de production, il faut donc faire appel à des professionnels pour être sûr qu'elles fonctionneront correctement, répondront à toutes les normes de construction et offriront la sécurité voulue.

Généralement, la conception de composantes de production concerne trois types de projets, à savoir:

  1. presque tous les projets du secteur public (Modèle A);

  2. les projets du secteur public auxquels est associée une installation de caractère public, comme une écloserie d'Etat, une ferme modèle, une ferme de production ou un centre de recherche-développement (Modèle B);

  3. les projets du secteur public dont les installations seront financées par les investissements d'exploitants privés (Modèle C).

Pour les projets décrits en (a) et (b), pour lesquels il faut fournir des installations, les spécifications chiffrées et l'analyse préliminaire auront été faites pendant l'Etape 6. Le travail des architectes et des ingénieurs durant cette phase reposera donc sur le rapport de l'étude de pré-faisabilité et sur le document de bioprogrammation (si celui-ci constitue un rapport distinct) établis pendant les Etapes 6b et 6c.

Le travail peut se diviser en deux parties, à savoir:

  1. la conception préliminaire,

  2. la conception finale.

Cela, parce que la réponse donnée à différents choix structurels permettra de resserer un peu plus la conception et les coûts. Par exemple, l'écloserie sera-t-elle construite en briques ou en bois; les couloirs à poisson seront-ils construits au-dessus ou au-dessous du niveau du sol; faudra-t-il construire les salles de classe et les laboratoires du centre de recherche et de formation dans un même bâtiment ou dans deux, etc.

Pour la conception préliminaire, on met surtout l'accent sur la conception civile, mécanique et architecturale de chaque installation. La conception de tous les systèmes mécaniques (par exemple, le réseau hydraulique) sera faite ici pour être sûr que ces installations s'intègrent bien dans les ouvrages. On met au point les concepts d'architecture et les systèmes de structures. D'après les renseignements recueillis dans la bioprogrammation, les ingénieurs établissent des critères pour des facteurs tels que le compactage du sol utilisé pour la confection des banquettes et des diguettes, et le traitement de l'eau. Un nombre suffisant de plans préliminaires sont tracés pour donner forme aux concepts théoriques et pour pouvoir recalculer les coûts.

Dans la conception finale, les “bleus” ou épreuves détaillées des architectes et des ingénieurs sont tracés pour toutes les composantes physiques; ce travail peut être accompagné d'un rapport final de conception. Cela permet de recalculer les coûts avec encore plus de précision et d'approcher des coûts réels de réalisation. Pratiquement, tous les problèmes théoriques auront été résolus avant la conception finale et les modifications apportées à ce stade entraînent généralement des dépassements de coûts.

Dans les projets décrits en (c), à savoir les projets du secteur public qui nécessitent un investissement privé, cette tâche se limite normalement à la conception préliminaire. Cela permet de fixer des normes communes pour toutes les installations ou ouvrages qui seront construits grâce à l'investissement privé, si le projet doit fournir du crédit. Par exemple, un projet du secteur public visant à accroître la production de crevettes d'eau douce peut avoir besoin d'une écloserie gouvernementale centrale, pour laquelle on ira jusqu'à la conception finale, tandis qu'on se contentera de la conception et des spécifications préliminaires pour les étangs de grossissement, par exemple en déssinant les plans d'étangs de 0,5 et 1 ha avec prises d'eau et déversoirs normalisés, banquettes de largeur minimum avec talus et compactage normalisés.

Enfin, dans le secteur privé, les plans et spécifications finales se présentent sous une forme permettant de demander à des soumissionnaires et à des fournisseurs des offres préliminaires qui serviront à étayer les devis estimatifs du projet. Dans le secteur public, les plans et les spécifications restent généralement moins détaillés et les devis sont établis au moyen de catalogues et de demandes de renseignements.

Etape 9b - Conception des composantes de soutien de la production

Si l'on exclut celles qui nécessitent des installations ou des ouvrages (dont la conception a été décrite ci-dessus), la plupart des composantes de soutien de la production se rapportent à des services: services de vulgarisation, cours de formation, voyages d'étude, crédit, conseils vétérinaires, etc. Elles sont généralement moins courantes dans les projets du secteur privé que dans les grands projets polyfonctionnels du secteur public, en particulier ceux qui bénéficient d'une assistance internationale. La plupart des institutions donatrices ont des directives et des manuels qui facilitent le travail des équipes de formulation durant cette étape.

L'équipe de formulation, quand elle s'occupe des composantes de soutien de la production, doit garder présents à l'esprit un certain nombre de points essentiels. Premièrement, la conception de beaucoup de ces composantes doit se faire en étroite relation avec celle de la composante de production correspondante; par exemple, toute proposition de création d'institutions doit être en rapport avec la dimension envisagée pour le sous-secteur. Dans certains cas, les composantes de soutien de la production peuvent représenter une proportion considérable du coût du projet et il importe de trouver un juste équilibre pour en minimiser le coût tout en faisant en sorte qu'elles répondent pleinement aux nécessités du projet. Pour ce qui concerne les services de vulgarisation, la formation et l'assistance technique, par exemple, il est important (mais difficile) d'estimer la place qui reviendra à chacun dans la production ou la production unitaire supplémentaire de la composante de production correspondante.

Etape 9c - Conception des composantes de soutien social

Beaucoup de projets régionaux de développement agricole et rural sont un moyen d'étendre la portée et d'améliorer la qualité des services sociaux assurès à des communautés rurales, car il peut y avoir un lien direct entre les composantes de soutien social et les composantes de production. Par exemple, certains projets d'irrigation peuvent inclure un réseau d'approvisionnement en eau potable des communautés villageoises; ou un centre de vulgarisation peut être utilisé aussi comme centre d'informations sur l'hygiène et la santé publique.

On a eu jusqu'ici assez peu l'occasion de vérifier si et comment les projets d'aquaculture du secteur public comprennent des composantes de soutien social, en dehors du partage des installations ou éventuellement de l'apport d'eau potable à une petite collectivité.

Mais jusqu'à présent, il n'y a pas eu grand risque non plus de voir leur inclusion rendre des projets difficiles à gérer ou exagérément compliqués. Les planificateurs doivent cependant être avertis de cette question et veiller, quand l'occasion se présente, à ce qu'il y ait un équilibre raisonnable entre la satisfaction des besoins essentiels des agents visés et la réalisation des objectifs du projet.

Etape 9d - Echelonnement des composantes du projet et calendrier des activités à l'intérieur des composantes

Vers la fin de l'Etape 9, il faut, dans les projets du secteur public, réunir les plans définitifs et semi-définitifs des différentes composantes pour étudier leur échelonnement et leur calendrier. On peut le faire aussi pour certains grands projets du secteur privé, si l'on veut rentabiliser l'investissement sans engager tout le capital ou attendre que toute l'installation soit construite.

Pour les projets du secteur public relativement simples, comprenants un ou deux composantes, l'échelonnement ne doit pas poser de problèmes particuliers. Par contre, dans le cas de grands projets multi-composantes, il peut y avoir des décisions difficiles à prendre.

L'ordre logique des activités d'un projet complexe peut être le suivant:

Dans la plupart des cas, l'exécution du projet prendra du retard par rapport au calendrier établi dans les documents de formulation du projet. La fréquence avec laquelle ce retard se produit laisse à penser qu'il est invariablement dû plus à un manque de réalisme des plans qu'à une mise en oeuvre inefficace. Par exemple, dans beaucoup de pays, les services publics ont des procédures d'achat complexes, auxquelles la direction du projet doit se soumettre. Inversement, l'équipe doit se garder de fixer un calendrier qui tienne pleinement compte des procédures de l'agent d'exécution, mais pas de celles de l'institution de financement. Le calendrier des arrivées du personnel spécialisé pour les diverses activités requiert une appréciation particulière des contraintes logistiques du recrutement, des affectations et du soutien nécessaire à ce type de personnel; les lenteurs du recrutement sont très souvent une cause de retard. En outre, il y a des contraintes saisonnières inévitables dont il faut tenir compte tant dans les procédures administratives (années financières et engagements budgétaires annuels) que dans le travail d'exécution proprement dit (il est difficile de construire pendant la saison des pluies). Il n'est pas rare que, pour avoir pris quelques semaines de retard dans l'exécution, on finisse par perdre presque une année entière si, par exemple, on a raté le début de la période de reproduction.

L'équipe doit donc se garder d'un optimisme excessif en ce qui concerne le temps nécessaire pour mettre en route un projet et l'exécuter. Les différentes formes d'analyse de réseau, par exemple le PERT (technique d'evaluation et d'examen des programmes) ont ici leur utilité. Les équipes de formulation ne possèdent souvent pas les compétences nécessaires pour entreprendre un PERT, mais beaucoup de projets aquacoles sont de portée relativement modeste et ne nécessitent pas une technique aussi sophistiquée. Ce qu'ils demandent, par contre, c'est une approche plus rigoureuse que la simple intuition, ce qui n'est pas toujours le cas.

L'équipe doit, d'abord, tenir compte des résultats obtenus par l'agent d'exécution avec d'autres projets, le cas échéant en discutant avec les institutions donatrices concernées afin d'identifier les points où des retards ont pu se produire; deuxièmement, elle doit analyser les activités entrant dans la mise en oeuvre des composantes et les disposer sur un graphique à barres. La plupart des projets comprennent plusieurs activités, comme la construction d'un plan de crédit, etc. Quand des calendriers d'activités ont été etablis pour chaque composante, il faut les intégrer dans un graphique à barres couvrant l'ensemble du projet. Une partie importante de ce travail consiste à identifier et à introduire dans les graphiques à barres les conditions à réunir préalablement à chaque activité, par exemple l'achat de terres pour l'écloserie.

Différences entre les procédures du secteur public et celles du secteur privé (Etape 9)
Les quatre tâches de l'Etape 9 s'appliquent, à des degrés divers, aux projets du secteur public et du secteur privé. La conception des composantes de production (9a) est commune aux projets décrits dans les Modèles A, B, et C. Si les composantes comprennent des installations et des infrastructures, la conception nécessite l'établissement, par des spécialistes, des documents de conception préliminaires et, dans la plupart des cas, des bleus définitifs. Si les Modèles A, B et C comprennent des composantes de soutien (9b) nécessitant elles-mêmes des installations et des ouvrages, cette remarque s'applique également. Il est plus probable que les projets du secteur public (Modèles B, C et D) comprendront plusieurs autres composantes d'appui, concernant par exemple la vulgarisation et la formation. Les composantes sociales (9c) s'appliquent presque uniquement aux projets du secteur public (Modèles B et C), mais leur nécessité dans le cas l'aquaculture n'est pas vraiment dé montrée. L'échelonnement et le calendrier des activités (9d) doivent être établis pour tous les projets du secteur public et du secteur privé décrits dans les quatre modèles.

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