La situation des femmes sur le marche du travail en Europe et l'initiative now
1. L'entrée massive des femmes sur le marché du travail au cours des dernières années a enfin fait disparaître l'idée qu'elles sont une force de travail marginale ou accessoire.
2. Les femmes représentent aujourd'hui pas moins de 41 pour cent des adultes de la Communauté qui ont un emploi ou en cherchent un. On peut se demander si cette situation a renforcé l'intégration des femmes dans le monde du travail rémunéré, si elle a supprimé la démarcation traditionnelle entre emplois masculins et féminins; ou si la croissance de l'emploi des deux sexes dans le secteur tertiaire a amené plus de femmes et d'hommes à occuper côte à côte des postes similaires; ou encore si la double division - verticale et horizontale - des emplois, existe toujours, les femmes étant confinées aux échelons inférieurs ou tenues à l'écart dans des tâches censées être mieux adaptées aux compétences et qualités spécifiquement féminines.
3. Malgré les progrès réalisés en matière d'égalité de traitement entre hommes et femmes, le droit au travail dans des conditions égales est encore loin d'être acquis. Plusieurs études montrent que l'augmentation de la participation croissante des femmes au marché du travail a coïncidé avec des évolutions structurelles négatives. La reprise de la croissance économique a entraîné une réduction relative du taux de chômage masculin. Mais, les chiffres du chômage féminin n'ont pas diminué, et ont même augmenté dans certains Etats Membres.
4. L'écart s'est creusé au point que le taux de chômage des femmes (12 pour cent) atteint aujourd'hui presque le double de celui des hommes (7 pour cent); et la présence toujours croissante des femmes dans les rangs des chômeurs de longue durée dont elles représentent maintenant 55 pour cent est encore plus préoccupante.
5. Par ailleurs, il ne fait aucun doute que dans une conjoncture de stagnation économique comme celle qui s'annonce, les catégories de travailleurs les plus vulnérables du marché seront les premières à subir les chocs. La restructuration du marché du travail pour répondre aux besoins à la fois du marché unique européen et aux innovations technologiques sera bien sûr créatrice d'emplois, mais ces emplois nouveaux seront difficilement accessibles aux femmes qui sont déjà exclues du marché du travail ou sont en situation précaire en raison de leurs faibles qualifications.
6. Une nouvelle étude du Réseau européen d'experts concernant la situation des femmes sur le marché du travail montre que des changements profonds ont accompagné la progression de l'emploi féminin mais qu'ils n'ont pas fait disparaître la division du travail entre hommes et femmes.
7. Au contraire, de nouvelles formes de ségrégation et de division entre hommes et femmes se manifestent aujourd'hui: des femmes occupent maintenant des emplois à haut niveau de qualification traditionnellement réservés aux hommes; dans le même temps, le pourcentage de femmes parmi les employés à faible qualification du secteur tertiaire continue de progresser, ce qui accroît la prédominance féminine dans ces catégories d'emploi. Les tendances à la désagrégation de certains secteurs du marché du travail se trouvent donc compensées par le renforcement de la ségrégation dans d'autres. Les progrès réalisés par certaines femmes, plus jeunes et plus instruites, ne traduisent pas une tendance plus générale à l'intégration et à l'égalité dans l'emploi.
8. La ségrégation des femmes et des hommes dans différents secteurs d'activité est bien connue. En outre, les emplois particulièrement vulnérables ou peu qualifiés, comme les emplois à temps partiel, familiaux ou temporaires, sont presque tous occupés par des femmes. Les études révèlent que la ségrégation de l'emploi selon le sexe est une caractéristique à la fois répandue et persistante de tous les marchés du travail en Europe, indépendamment du taux de participation féminine ou du niveau de productivité de l'économie.
9. On constate encore que la moitié des femmes qui travaillent occupent des emplois administratifs ou de service, alors que moins de 20 pour cent des hommes sont dans ce cas.
10. Au premier abord, on pourrait croire à de fortes similarités entre les modes de ségrégation rencontrés dans chaque pays. Les femmes occupent des emplois fortement orientés vers les soins, l'éducation l'assistance, alors que les hommes monopolisent les tâches "lourdes" manuelles, techniques et directoriales.
11. Un examen plus approfondi révèle cependant que ces schémas très généraux présentent des différences importantes selon les pays. En outre, la situation devient plus complexe avec l'apparition de tendances nouvelles qui varient selon leur origine dans les diverses sociétés.
12. La participation des femmes aux emplois qui ont progressé au cours de la décennie, principalement aux emplois spécialisés et administratifs, s'est accrue. Les femmes ayant des qualifications suffisantes ont occupé des emplois spécialisés et réduit la prépondérance masculine dans ce type d'emplois. C'est là une évolution positive vers la désagrégation, constatée dans tous les pays et indépendante des variations des taux de participation féminine selon les pays. Dans le même temps, la ségrégation aux niveaux professionnels les plus élevés du marché du travail est évidente, car les femmes sont présentes principalement dans les professions à vocation sociale et dans le secteur public.
13. La ségrégation a des conséquences préoccupantes sur la qualité de l'emploi des femmes. Celles-ci occupent plutôt des emplois à prédominance féminine et à basse qualification, beaucoup moins bien rétribués que les emplois à prédominance masculine.
14. Cependant, lorsque les femmes accèdent aux emplois mieux rémunérés de haut niveau, il semble que les salaires ont tendance à baisser tandis que les hommes passent à des positions mieux rétribuées dans d'autres secteurs de l'économie. Pour évaluer l'incidence de la ségrégation sur les femmes dans toute la Communauté, il faut prendre en compte l'organisation des régimes de rémunération dans chaque pays, et les écarts de salaires selon le sexe qui en résultent. Les politiques de salaire égal pour travail égal doivent être associées à des programmes d'action positive pour réduire la ségrégation.
15. L'agriculture est une source importante d'emplois tant pour les femmes que pour les hommes dans les pays du Sud de l'Europe, et pour les hommes en Irlande.
16. Les emplois agricoles occupent près d'un tiers des femmes actives et 21 pour cent des hommes actifs en Grèce, et respectivement 21 pour cent et 16 pour cent au Portugal. En Espagne et en Italie la concentration dans les emplois agricoles est moindre (10 pour cent de femmes et 13 pour cent d'hommes en Espagne, 9 pour cent pour chaque sexe en Italie). En. Irlande, la part de la population active masculine employée dans l'agriculture est plus grande (21 pour cent), mais celle des femmes est la même que dans les autres pays du Nord (5 pour cent). L'agriculture est un secteur mixte en Grèce et au Portugal où 44 pour cent et 50 pour cent des emplois sont occupés par les femmes; en Italie et en Espagne, les femmes occupent 35 pour cent et 27 pour cent des emplois agricoles, et 10 pour cent seulement en Irlande.
17. Si de prime abord, dans les pays du Sud, la discrimination sexuelle semble moins forte dans les emplois agricoles que dans beaucoup d'autres secteurs professionnels, un examen plus approfondi révèle une forme différente de ségrégation entre hommes et femmes qui est liée à leur type de contrat d'emploi.
18. Dans le secteur agricole de tous les pays, les hommes sont plus souvent travailleurs indépendants que les femmes, qui travaillent le plus souvent à leurs côtés comme main-d'oeuvre familiale non rémunérée. Le tableau est encore plus sombre en Grèce où deux tiers des femmes employées dans l'agriculture sont des travailleurs familiaux non rémunérés, un peu moins d'un tiers travaillent à leur compte et 3 pour cent seulement sont salariées; en revanche, 15 pour cent seulement des hommes de ce secteur sont des travailleurs familiaux et plus de 80 pour cent des travailleurs indépendants.
19. La situation du Portugal contraste avec celle de tous les autres pays méridionaux: les femmes employées dans le secteur agricole y sont plus souvent que les hommes des travailleurs familiaux ou des travailleurs indépendants, et moins souvent des travailleurs salariés.
20. Le travail indépendant dans des secteurs traditionnels comme l'agriculture et le petit commerce occupe souvent plus d'un membre de la famille, par exemple à la fois le mari et la femme. Mais les femmes sont le plus souvent des travailleurs familiaux non rémunérés et les hommes des travailleurs indépendants. S'il est vrai que le travail dans le cadre d'une entreprise familiale offre plus d'autonomie et de satisfaction que le travail pour un employeur, la sécurité financière des femmes dans l'entreprise familiale dépend entièrement des relations familiales. Même lorsqu'elles n'appartiennent pas à des entreprises familiales, les femmes qui travaillent pour l'agriculture ou le petit commerce sont en général employées par un agriculteur ou un commerçant de sexe masculin et donc dépendantes de lui.
21. La Communauté européenne a joué un rôle de premier plan dans la promotion de l'égalité des chances entre hommes et femmes. Le Programme d'action sociale adopté en 1975, ainsi que les deux plans d'action ultérieurs sur l'égalité des chances, ont permis d'établir des principes directeurs à l'usage des Etats Membres. Le Troisième programme d'action communautaire à moyen terme (1991-95) définit les actions prioritaires pour l'adaptation aux changements économiques et sociaux que devrait provoquer le marché unique. En premier lieu, l'accent est mis sur la dimension économique de l'égalité des chances à la lumière de 1992. L'intégration des femmes dans le marché du travail constitue un élément essentiel de cet aspect du problème. La seconde priorité concerne la mise en place d'une approche plus intégrée à la promotion de l'égalité des chances - et la troisième concerne le principe d'association et de complémentarité au niveau des pouvoirs publics, nationaux, régionaux et locaux, et des partenaires sociaux.
22. Dans ce contexte, la Commission a décidé, le 18 décembre 1990, de lancer une initiative communautaire concernant exclusivement les femmes et visant à renforcer les mesures prises au cours des années récentes pour la promotion de l'emploi des femmes tant au niveau national que communautaire.
23. Il convient de noter que l'initiative NOW fait partie intégrante du Troisième programme d'action à moyen terme pour l'égalité des chances (1991-95).
24. NOW s'insère donc dans une stratégie de synergie et de complémentarité entre les politiques d'égalité des chances et les politiques d'emploi et de formation professionnelle.
25. NOW a deux objectifs principaux:
· Améliorer et promouvoir les compétences professionnelles des femmes, et faire changer la mentalité du monde des affaires pour que les femmes puissent créer leurs propres entreprises et coopératives.
· Contribuer au retour des femmes sur le marché du travail, afin qu'elles ne soient plus exclues des forces de travail permanentes ni obligées d'accepter des emplois qui ne leur apportent ni garanties ni stabilité.
26. NOW soutient les mesures suivantes:
· Mesures pour promouvoir la création de petites affaires et entreprises.
· Mesures d'insertion professionnelle par l'orientation et le conseil, la formation générale et pratique et un suivi actif des placements.
· Mesures d'assistance technique et prestations connexes, allant des services d'aide maternelle à la préparation de projets (études et recherches) jusqu'à leur suivi et évaluation.
27. Qui NOW peut-il aider?
· Les femmes en chômage de longue durée ou celles qui désirent retrouver un emploi après plusieurs années passées au foyer (elles font partie des chômeurs de longue durée) ainsi que les femmes de moins de 25 ans sans emploi. Elles ont toutes droit à cette aide, où qu'elles résident dans la communauté.
· Les femmes au chômage ou menacées de licenciement pour raisons économiques ou employées dans les petites et moyennes entreprises.
· Toutes les femmes en âge de travailler des régions de l'Objectif 1, si l'activité s'insère dans le cadre d'une opération intégrée (action conjointe ESF et FEDER).
28. L'Initiative NOW est maintenant bien avancée (elle se termine en décembre 1994) dans les 12 Etats membres de la Communauté: elle a eu une orientation transnationale dès le début. En d'autres termes, les projets mis sur pied dans un pays particulier s'insèrent dans le cadre général de ce qui est entrepris dans les autres Etats Membres. Les échanges de méthodologies et d'expériences lancent ainsi de nouvelles dynamiques.
29. Depuis la fin de l'année 1991, l'Initiative NOW a reçu une publicité considérable dans l'UE et bien sûr en Grèce. Cette publicité, s'ajoutant à l'absence jusqu'à ce jour de toute action sérieuse pour lutter contre le chômage des femmes ou pour faciliter leur accès au marché du travail, a donné un retentissement inespéré à l'Initiative.
30. En 1992 et 1993 - principales années de mise en application - l'impact global de l'Initiative a été amplifié par les actions de promotion des unités de coordination (conférences, imprimés, publications, discours officiels, etc.) et les efforts des principales organisations participantes.
31. D'une façon générale, la campagne organisée pour lancer et promouvoir NOW et l'idée de transnationalité qui l'inspire ont permis mieux que dans le passé, de mobiliser les organisations gouvernementales et non gouvernementales (ONG), les associations féminines, les autorités locales, les médias et le grand public pour faire comprendre les problèmes et les besoins des femmes dans la société européenne contemporaine.
32. L'Initiative NOW apporte à la Grèce un moyen de combler le retard dans la formation professionnelle des femmes, en facilitant leur entrée sur le marché du travail par la mise en place de partenariats à l'échelon national mais surtout européen.
33. En Grèce, au cours des trois premiers, stades de NOW, plus de 150 projets ont été sélectionnés parmi les 500 propositions soumises par 280 organisations. Ces projets forment avec leurs partenaires européens, un réseau de plus de 350 organisations dans l'UE. Au total, dans les 12 pays membres, plus de 900 projets transnationaux ont été sélectionnés, constituant ainsi un réseau européen de plus de 2 000 partenaires.
34. En Grèce, les projets sélectionnés ont été soumis par des organisations dont 62 pour cent sont des collectivités locales et des autorités nationales, 24,5 pour cent des organisations non gouvernementales, des associations féminines, etc., 9 pour cent des organisations d'enseignement et de formation professionnelle et 4,5 pour cent des partenaires sociaux. Les organisations non gouvernementales ont bénéficié de la priorité puisque le pourcentage qu'elles représentent est passé de 4 pour cent de toutes les organisations ayant soumis des projets, à 24,5 pour cent dans la sélection finale.
35. Les partenariats transnationaux entre la Grèce et les autres organisations européennes s'établissent ainsi: Belgique 16 (5,9 pour cent), France 57 (21,1 pour cent), Luxembourg 0 (0,0 pour cent), Danemark 10 (3,7 pour cent), Pays-Bas 12 (4,4 pour cent), Espagne 14 (5,2 pour cent), Portugal 17 (6,3 pour cent), Royaume-Uni 63 (23,3 pour cent), Irlande 15 (5,5 pour cent), Italie 30 (11,1 pour cent) et Allemagne 36 (13,3 pour cent).
36. Le développement des partenariats transnationaux a permis organisations de mettre à profit l'expérience des autres Etats Membres et de réaliser des activités communes. L'échange de modèles issus de la pratique et de l'expérience, l'échange de formateurs et de stagiaires, contribuent à la mise en oeuvre d'approches européennes communes dans la formation professionnelle et technique des femmes.
37. Enfin, des efforts considérables ont été entrepris et sont poursuivis par les coordinateurs nationaux pour soutenir la coopération thématique et sectorielle des promoteurs, en créant et en consolidant des réseaux nationaux et transnationaux. En Grèce, le nombre considérable des projets NOW rend nécessaires les regroupements au niveau national, le partage des expériences et la diffusion des informations, avant l'élargissement en réseaux transnationaux.
38. Ces réseaux intérieurs permettront des économies d'échelle, une coopération transnationale plus efficace et plus productive et une diffusion plus large et plus facile de l'information, des connaissances spécialisées et du savoir-faire.
39. Trois réseaux principaux sont mis en place au niveau national:
a) projets tenant à la création d'entreprises par les femmes et à leur esprit d'entreprise;
b) projets visant à la promotion de l'aide maternelle;
c) projets visant à la promotion de la formation des femmes dans des secteurs nouveaux et/ou des technologies de pointe.
40. Plusieurs projets NOW concernent le milieu rural. Ils s'inspirent des idées directrices suivantes:
· maintenir la population dans les zones rurales en mettant fin aux migrations vers les villes, petites ou grandes;
· diversifier l'économie rurale;
· mettre en valeur les ressources locales compte dûment tenu du potentiel que représentent les femmes.
41. Ainsi, un nombre significatif de projets lancés dans les zones rurales concernent la création d'entreprises ou de coopératives dans le secteur de l'agritourisme ou du tourisme qui visent à exploiter les ressources locales pour créer des activités d'avenir.
42. D'autres projets portent davantage sur la protection de l'environnement et s'orientent vers la formation en matière d'agriculture écologiquement rationnelle et la commercialisation de produits "naturels".
43. Il existe aussi les projets qui cherchent à améliorer l'image des femmes exploitantes agricoles et à leur faire attribuer le statut correspondant, à revaloriser le travail agricole en améliorant les compétences des femmes et en ouvrant des perspectives nouvelles d'accès à des emplois rémunérés avec une reconnaissance sociale.
44. Les métiers d'art et d'artisanat, l'aide maternelle, les services de soins à domicile et le commerce sont les solutions de rechange aux activités agricoles développées par les projets NOW. D'autres projets ont pour but la formation des femmes à l'informatique et son matériel pour créer des activités de service, indépendantes ou coopératives, destinées au monde rural. En Grèce, plus de 40 pour cent des projets sont réalisés dans le monde rural.