La FAO et le PAM viennent de terminer une mission dans le pays pour déterminer les effets des pluies torrentielles et des inondations de la dernière semaine de juillet 1996 sur les cultures et les approvisionnements alimentaires. En 5 jours, du 24 au 28 juillet 1996, les parties sud du pays ont reçu en moyenne 800 mm de pluies battantes qui ont causé des inondations et de graves dégâts aux cultures, aux biens et aux infrastructures. Les régions les plus touchées ont été les Provinces de Hwanghae Nord et Sud, celle de Kangwon et la Municipalité de Kaesong. En outre, les récoltes des régions agricoles proches de la capitale Pyong Yang ont également été touchées mais à un moindre degré. Les rapports indiquent qu’au cours de ces cinq jours, Hwanghae Sud a reçu 910 mm de pluie, Hwanghae Nord 830 mm, et la Municipalité de Kaesong 630 mm, contre les 230 mm, 310 mm et 130 mm respectivement qui seraient tombés au cours de la même période en année normale.
En général, le sud et le sud-ouest produisent près de 60 pour cent des céréales vivrières du pays, le reste venant avant tout du nord-ouest et des provinces de Pyongan Nord et Sud. On estime que 7 comtés sur 20 ont été gravement touchés dans la province de Hwanghae Sud et que dans celle de Hwanghae Nord, la proportion est de 8 sur 17.
Vu l’ampleur des inondations, une grande partie des basses terres des régions affectées est restée submergée jusqu’à 5 jours de suite pendant les pluies et après. La principale cause des pertes, et de loin, a été l’ampleur et la durée de cette submersion, bien que certaines cultures aient aussi été entraînées par les eaux ou recouvertes par des bancs de sable surtout dans les zones proches des rivières et des canaux. En soi, cette submersion n’aurait pas entraîné de telles pertes si les cultures avaient été plus ou moins avancées. Mais le riz, principale culture touchée, et le maïs avaient atteint le stade critique de leur développement où ils sont le plus sensible aux mauvaises conditions de croissance.
Sur la base des observations sur le terrain, on estime, à titre provisoire, que 360 000 tonnes de paddy et 92 000 tonnes de maïs seront perdues cette année du fait des inondations. Avec un facteur de conversion de paddy en riz de 78 pour cent pour les variétés Japonica (IRRI), on prévoit que le total des pertes céréalières se montera à environ 373 000 tonnes. Cependant l’ampleur des pertes et leurs conséquences sur les approvisionnements alimentaires de l’année prochaine dépendront dans une grande mesure des récupérations possibles dans les zones affectées et des conditions météorologiques d’ici la récolte d’octobre.
Vu les difficultés des approvisionnements en produits alimentaires depuis quelques années, et notamment depuis les inondations de 1995, les rations alimentaires distribuées par le Système de distribution publique (SDP) ont été sensiblement réduites. Aujourd’hui, elles sont plus bas qu’elles ne l’ont jamais été et, pour une grande partie de la population, très inférieures aux quantités minimum nécessaires pour survivre en bonne santé. En outre, un nombre de plus en plus grand des 5 millions personnes travaillant dans les fermes collectives, qui n’avaient pas droit aux rations de céréales du SDP, a progressivement été absorbé dans le système depuis la mauvaise récolte de 1995, certains depuis novembre, d’autres, plus récemment cette année, à mesure que les réserves des ménages s’épuisaient. Depuis mai de cette année, la majorité des ouvriers des fermes collectives sont devenus tributaires du SDP. Ceux qui ne le sont pas vivent dans les régions non touchées par les inondations de 1995.
Face aux difficultés d’approvisionnement, le gouvernement a progressivement ramené, ces derniers mois, les ventes par l’intermédiaire du SDP à quelque 210 000 tonnes par mois. A ce niveau réduit, on estime qu’environ la moitié de la population, celle avant tout des secteurs non-essentiels/non manuels, pourra recevoir une ration de céréales d’environ 6 kg par mois, soit environ 200g par jour, ce qui est nettement en dessous du niveau minimum acceptable. De plus, étant donné que l’approvisionnement dépend entièrement des importations, il est probable que le niveau des ventes n’est pas constant et que les rations ne sont distribuées qu’irrégulièrement, quand et si les importations arrivent.
Les difficultés d’approvisionnement devenant de plus en plus manifestes, diverses contre-mesures ont été mises en place. Fin mai-début juin, au moment de la récolte, les pommes de terre ont été introduites pour la première fois dans le SDP pour compléter les rations. Comme la superficie en culture est faible - 35 000 ha - la récolte aurait été de 525 000 tonnes, soit 131 000 tonnes d’équivalent céréales. Les pommes de terre ne font pas partie de l’alimentation de base et, normalement, elles sont utilisées à des fins industrielles. Néanmoins, on estime qu’elles ont constitué une partie importante de la nourriture de la population pendant les six semaines allant du début de juin au milieu de juillet. En outre, au début d’août, une partie de la récolte de maïs a fait l’objet d’une moisson précoce et a été distribuée par l’intermédiaire du SDP sous forme de maïs vert/en épi. Il s’agit d’une mesure d’urgence destinée à alléger les pressions mais il est évident qu’elle aura pour effet de réduire les quantités de maïs disponible au moment de la récolte.
Les quantités de céréales destinées à l’alimentation du bétail et autres usages ont été radicalement réduites et on pense maintenant que seuls sont préservés les animaux reproducteurs indispensables, les autres étant vendus, confiés aux ménages ou éliminés. Bien que l’on ne connaisse pas l’ampleur de cette réduction, les estimations vont de 30 à 90 pour cent.
Le gouvernement a également autorisé toutes les provinces et tous les comtés à troquer directement leurs produits pour de la nourriture avec les pays voisins, surtout la Chine. Les produits échangés comprennent le poisson et les coquillages, la ferraille, le marbre et le bois, dont on pense que l’exploitation a considérablement accru les problèmes de déboisement et d’érosion. Les provinces et les comtés ont aussi été autorisés à utiliser les réserves financières locales pour acheter des produits alimentaires, notamment de la farine de blé. On estime que les importations passant par ce système se montent, depuis le début de 1996, à quelque 250 000 tonnes. Les régions du pays qui ont réussi à importer des produits alimentaires de cette manière sont exclues des allocations centrales pendant tout le temps que leurs importations leur permettront de tenir. Bien que le gouvernement ait beaucoup de difficultés à financer ses importations commerciales, il a réussi à organiser des approvisionnements en troquant avec certains pays. Les principaux produits troqués comprennent le ciment, l’acier et l’or. Il a également accru ses efforts visant à obtenir des produits alimentaires par l’intermédiaire d’accords d’aide bilatéraux ou sur la base de paiements différés. Depuis le début de la campagne de commercialisation 1995/96, en novembre, on estime que les promesses de contribution et les livraisons de ces importations, classées comme aide alimentaire allouée aux programmes, se montent à près de 523 000 tonnes de céréales.
Au début de septembre 1996, l’aide alimentaire passant par le système des Nations Unies représentera quelque 46 500 tonnes de céréales et 6 000 tonnes de mélanges alimentaires. Les donations des organisations non gouvernementales, notamment de CARITAS et de la Fédération internationale des sociétés de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, se monteront à près de 28 800 tonnes de céréales et 1 600 tonnes de produits non céréaliers. Au total, ces sources auront donc fourni quelque 75 300 tonnes de céréales et 7 600 tonnes de produits non céréaliers au titre de l’aide alimentaire.
Par rapport aux besoins d’importation pour 1995/96, qui avaient été estimés à 1,47 million de tonnes lors de la dernière Alerte Spéciale FAO/PAM No. 267 de mai de cette année, les quantités de produits alimentaires importées par troc, et fournies ou promises dans le cadre des programmes d’aide alimentaire et d’aide d’urgence (céréales) se montent à 848 300 tonnes, soit près de 58 pour cent des besoins.