1. Quelles innovations techniques conduisent à une amélioration de la production alimentaire dans le cadre de lagriculture et du développement rural durables (ADRD)? |
RÉSUMÉ |
Dix neuf cas ont été sélectionnés pour illustrer les types d'innovations techniques conduisant à une amélioration de la production alimentaire dans le cadre de l'ADRD |
Cet exemple concerne lintroduction dun seul composant renouvelable dans un système agricole, introduction combinée avec lamélioration de la capacité des agriculteurs à adapter de nouvelles technologies. La diffusion de la «Macuna» (Macuna pruriens) pour supprimer la mauvaise herbe agressive «Imperata» (Imperata cylindrica) a été justifiée par le manque de terres, la baisse de la fertilité du sol, le manque de fertilisants et linvasion des mauvaises herbes. Les sols des plateaux du Sud-Est du Bénin et du Togo sont presque épuisés. Chez la grande majorité des petits agriculteurs, lutilisation dengrais est faible. Mais, même si les engrais sont disponibles, le bénéfice dû à son utilisation est en baisse à cause de la dégradation de lensemble des sols. Une autre conséquence de la réduction des périodes de jachère est lenvahissement par lImperata, une mauvaise herbe agressive quil est difficile déliminer à la main. Grâce au projet «Recherche appliquée en milieu réel», les chercheurs, ont introduit la «Macuna» comme culture de couverture pour atténuer la contrainte dun faible apport de nutriments pour le maïs, la nourriture de base. Les services de la vulgarisation agricole du gouvernement (Centre daction régional pour le développement rural ou CARDER) se sont intéressés à cette réussite et ont commencé à tester le système. En 1990, le CARDER de la province de Mono a testé le système dans 12 villages de 180 agriculteurs. Il la étendu à dautres provinces du Sud-Est en 1991 et le nombre des agriculteurs utilisant la «Macuna» a atteint près de 500. Un grand nombre dorganisations non gouvernementales se sont engagées et 14 000 agriculteurs cultivent maintenant la «Macuna» sur lensemble du Bénin.
Les agriculteurs qui ont adopté la «Macuna» comme culture de couverture ont bénéficié de hauts rendements en maïs et ont utilisé moins de main duvre pour le désherbage. Le semis de maïs succédant à la «Macuna» a obtenu un rendement de 3 à 4 t/ha sans application de fertilisants azotés (rendement similaire à ceux obtenus avec les niveaux de fertilisation recommandés, soit 130 kg/ha). Par rapport aux rendements dautres parcelles plantées auparavant avec du maïs et du lupin et qui nétaient que de 1,3 kg/ha., la «Macuna» en tant que culture intercalaire ou en tant que monoculture apporte plus de 100 kg dazote /ha à la culture de maïs suivante. Lanalyse du rapport bénéfice/coût sur une période de 8 ans a donné un rapport de 1,24 lorsque la «Macuna» était présente dans le système et de 0,62 lorsque la «Macuna» était absente. Le rapport a atteint jusquà 3,56 lorsque les semences de «Macuna» ont été vendues. Néanmoins, lanalyse des variations annuelles du rapport bénéfice/coût a montré une tendance à la baisse pour tous les systèmes, laissant à penser que des apports extérieurs (probablement des fertilisants P et K) sont nécessaires pour atteindre une certaine durabilité. Lutilisation de «Macuna» sur lensemble de la province du Mono permettrait de faire des économies denviron 6,5 millions de kg dazote ou denviron 1,85 millions de dollars EU par an.
Source: Robert Carsky, IITA, Bénin <[email protected]>
Environ 45 000 familles rurales
du Honduras et du Guatemala ont bénéficié de ladoption
de lagriculture durable, augmentant les rendements de leur culture pour
passer de 400-600 kg/ha à 2 000-2 500 kg/ha. Les agriculteurs utilisent
des engrais verts, des cultures de couverture, des bandes de graminées
en courbes de niveau, le labour en sillons, les bourrelets/murettes de pierres
et le fumier, toutes techniques qui, par le biais dexpérimentations,
sont soigneusement adaptées aux conditions locales. Ces programmes ont
revigoré les économies locales. Le prix des terres et la rémunération
de la main duvre sont plus élevés dans la zone dinfluence
du projet et les familles reviennent des grandes villes vers les zones rurales.
Il y a également des retombées bénéfiques pour les
forêts. Les agriculteurs affirment quils nont plus besoin
de couper les arbres de la forêt, car ils disposent de technologies pour
cultiver en permanence la même parcelle de terre. A travers toute lAmérique
Centrale, différentes organisations non gouvernementales se sont engagées
à promouvoir lutilisation de légumineuses, particulièrement
la «Macuna» (Macuna pruriens) comme engrais vert, une façon
économique pour produire la matière organique du sol. En profitant
de lexistence dun réseau de vulgarisation «de paysan
à paysan», comme le mouvement «campesino a campesino»
au Nicaragua et dans dautres pays, la diffusion de cette technologie simple
sest faite rapidement.
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Source: |
Roland Bunch, COSECHA, Honduras <[email protected]> |
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Juan Carlos Moreira, Centro Maya, Guatemala <[email protected]> |
Léquipe daction environnementale (EAE) conduit un projet de recherche au niveau de lexploitation agricole à Kitale, à lOuest du Kenya, en travaillant avec 130 agriculteurs sur une superficie de 80 ha. Dans cette région de Trans-Nzoia, linsuffisance alimentaire est généralisée chez les petits agriculteurs. Les agriculteurs cultivent communément de 0,5 à 1 ha de maïs, habituellement avec des haricots comme culture intercalaire. Ils utilisent des hybrides de maïs tardif, lesquels restent sur le champ de 8 à 9 mois. Néanmoins, du fait de la faible fertilité du sol et parce que le manque de ressources des agriculteurs les empêche dacheter des engrais, les rendements ne sont que de 650 à 1 750 kg/ha. Les rendements des haricots, la principale source de protéines des foyers, sont également très bas du fait de la destruction partielle de la récolte par les ravageurs et les maladies (principalement la pourriture des racines et la mouche des haricots) et à cause de la pauvreté du sol. Cela conduit à une malnutrition protéique chez les ménages les plus pauvres. EAE cherche à résoudre ce problème par le biais de la recherche et de la formation participatives. Les agriculteurs sont formés à maîtriser les principes et les pratiques de lagriculture biologique, avec un intérêt particulier porté à létat sanitaire du sol. De nouvelles technologies sont testées sur les exploitations des agriculteurs eux-mêmes, adaptées et ensuite diffusées par les agriculteurs si elles donnent de bons résultats. Le projet soutient la formation de groupes dagriculteurs. Ce sont surtout des femmes qui viennent en premier, les hommes sont ensuite attirés par les changements spectaculaires de la productivité.
Un ensemble de technologies et de pratiques ont été adoptées pour améliorer la production alimentaire des ménages. Celles-ci comprennent: i) légumineuses et engrais verts, par exemple limplantation de lablab intercalée au maïs 120 à 140 jours après son semis, afin que la légumineuse recouvre le sol pendant la saison sèche, puis les résidus de la légumineuse et du maïs sont incorporés au sol, après la récolte; ii) utilisation de compost et des ordures domestiques organiques, avec ou sans phosphates diazotés, Tithonia et Sesbania. Comme résultat de cette méthode, les rendements du maïs sont passés de 3 300 à 5 000 kg/ha, et les rendements des haricots ont été multipliés par 4 ou 8. Des recherches plus récentes concernent les avantages et les désavantages de la récolte de légumineuses de grain et /ou de feuilles comparées avec lenfouissement des résidus comme engrais verts dans le sol. EAE essaie également de promouvoir la diversification des cultures en développant le millet africain, le soja, les pois chiches, le pois dAngole et la pomme de terre irlandaise, ainsi que la formation des agriculteurs à la production biologique de légumes sur billons dans des jardins potagers familiaux.
Source: Beth Kirungu, Joseph Mureithi
Claveria est situé au Nord
du Mindanao et se caractérise par des sols acides sur des versants en
pente, avec une érosion sévère. Le Centre international
pour la recherche en agroforesterie (ICRAF) et les agences de recherche et de
vulgarisation locales travaillent sur le développement de diverses technologies
de culture en courbes de niveau. Le projet a commencé avec des arbres
et des légumineuses, mais du fait dune réussite relativement
modeste, il a développé des méthodes plus adaptées
aux conditions locales sous la forme de bourrelets végétalisés
avec labour en billons. Un grand nombre de plantes pérennes ont été
testées par les 2 000 agriculteurs qui travaillent en 80 groupes locaux
créés par le projet. Ces cultures comprennent des arbres fruitiers,
des cocotiers et des espèces forestières à croissance rapide.
En travaillant sur les exploitations des agriculteurs et en utilisant des pratiques
damélioration du sol (sur une superficie denviron 6 000 hectares),
les rendements du maïs ont été améliorés de
15 à 25 pour cent et la valeur des terres de 35 à 50 pour cent.
Source: Dennis Garrity, ICRAF
Dans les pays de la Région
du Sahel, les principaux facteurs limitants de la production alimentaire sont
liés au déficit hydrique de sols dont la plupart sont sablonneux
et pauvres en matière organique. Dans les zones où les sols sont
plus lourds et de meilleure qualité, ils sont sujets à une utilisation
intensive et de ce fait, ils sont exposés aux érosions hydrique
et éolienne. Au Sénégal, lérosion hydrique
et la dégradation du sol menacent une forte proportion des terres agricoles.
Depuis 1987, le Centre de recherche dagriculture renouvelable de lInstitut
de Rodale (RARC) a développé une collaboration avec des associations
dagriculteurs et avec des chercheurs du gouvernement afin daméliorer
la qualité du sol au Sénégal en utilisant des méthodes
écologiques.
Lagriculture régénératrice
pratiquée dans le périmètre de production de larachide
a conduit à des bénéfices biophysiques, environnementaux,
sociaux et économiques. La culture alternée millet-cacahuètes
représente le principal système de production agricole de la région.
Les champs sont nettoyés grâce au brûlis et celui-ci est
suivi dun labour superficiel utilisant la traction animale. Mais les jachères
ont été fortement écourtées et lutilisation
dengrais minéraux et de pesticides par les petits agriculteurs
a beaucoup diminué du fait de prix trop élevés. Il sest
également avéré que les engrais minéraux ne donnent
pas les résultats escomptés, à moins quil ny
ait, par ailleurs, un apport important de matières organiques. Les éléments
nutritifs sont lessivés par les premières pluies ou sont absorbés
par les micro-organismes du sol et les mauvaises herbes. Les sols pauvres en
matière organique nont pas non plus une bonne capacité de
rétention de leau.
Le RARC travaille avec environ 2 000 agriculteurs et 59 groupes en vue daméliorer la qualité du sol, dintégrer lélevage intensif en stabulation au système agricole, dincorporer des légumineuses et des engrais verts dans le système de culture, daméliorer lutilisation dengrais et de phosphates, de mettre en uvre des systèmes de collecte des eaux de surface et de développer des systèmes de compostage. Comme résultat, les rendements du millet ont été améliorés de 75 à 195 pour cent, passant de 330 à 600-1 000 kg/ha et les rendements de larachide sont passés de 340 à 600-900 kg/ha. Les rendements sont aussi moins variables dune année à lautre et la sécurité alimentaire des foyers sest considérablement améliorée. Comme Amadou Diop la signalé: «Les rendements des cultures sont en fin de compte dissociés du montant des précipitations annuelles. Les sécheresses, malgré leur effet négatif sur les rendements, ne conduisent pas à un échec total de la culture.»
Source: Amadou Diop, Rodale Institute <[email protected]>
Les terres abandonnées et dégradées des zones arides du Burkina Faso ont été améliorées par ladoption des «tassas» et des «zaïs», trous de 20 à 30 cm de profondeur creusés dans les sols recouverts dune croûte de battance (mince couche de terre durcie par laction du vent et de leau). Les trous sont remplis avec du fumier qui améliore la teneur en matière organique du sol, ils favorisent lactivité des termites et augmentent linfiltration de leau. Quand il pleut, les trous se remplissent deau et les agriculteurs plantent le millet ou le sorgho. Les «tassas» sont habituellement associés à des bourrelets de pierres.
Au Burkina Faso, environ 100 000 hectares ont été réhabilités, chaque hectare produisant à présent 700 kg de céréales par an. Les rendements du millet sans «tassas», demi-lunes ou bourrelets de pierres en courbes de niveau ne sont que de lordre de 150 à 300 kg/ha; ils atteignent 400 kg avec du fumier lors dune année de faible précipitation, et de 700 à 1 000 kg/ha lors dune année de pluies abondantes. Reij (1966) indique quen utilisant ces technologies, la famille moyenne du Burkina Faso est passée dun déficit annuel de céréales de 644 kg (soit 6,5 mois de disette) à un surplus de production de 153 kg par an. Les «tassas» sont particulièrement adaptés aux exploitations agricoles disposant dune main duvre familiale ou ayant la possibilité de recruter des salariés. Cette technique a suscité le développement dun réseau de jeunes travailleurs journaliers qui la maîtrisent et qui, au lieu démigrer, vont de village en village pour satisfaire une demande croissante de main duvre des agriculteurs.
Source: Reij (1996)
La région de lEst de Gansu fait partie dune zone sèche de 51 millions dhectares dans le nord-ouest de la Chine. Ce projet dagriculture durable a été lancé par lAcadémie dAgriculture de Gansu en 1991, comme composante du neuvième Plan national quinquennal de développement, avec pour objectif dassurer la sécurité et lautosuffisance alimentaires. Le projet préconise une utilisation plus efficiente de leau de pluie au moyen de techniques de collecte des eaux de ruissellement, de construction de réservoirs deau, de dispositifs de pompage et de distribution, dactions de conservation de leau en micro-bassins couverts dun paillage, de cultures diversifiées et de sous-produits pour alimenter le bétail. Le nombre de ménages pratiquant lagriculture durable atteint 100 000 sur une superficie denviron 70 000 hectares. Les rendements des céréales ont augmenté considérablement - le blé de 40 pour cent (passant de 3 à 4,2 t/ha) et le maïs hâtif de 38 pour cent (passant de 6 à 8,3 t/ha). La disponibilité de leau est améliorée à la fois pour lirrigation, pour lusage domestique et pour labreuvement des animaux. Les bénéfices secondaires comprennent une diminution de lérosion du sol, une réduction de lutilisation de pesticides et de fertilisants, une amélioration et une augmentation du capital social sous la forme du développement de groupes dentraide des agriculteurs et dune amélioration considérable des compétences des femmes, qui jouent à présent un rôle important dans la gestion de la production de fruits et de légumes ainsi que dans lélevage du bétail.
Source: Fan Tinglu
La Société pour
leducation populaire et pour le changement economique (SPEECH) est active
depuis 1986 et a contribué à créer ou à renforcer
des institutions et des groupes locaux dans 45 villages de la Région
de Kamarajar, dans lEtat de Tamil Nadu. Cette région est connue
pour ses sécheresses extrêmes, ses moussons irrégulières,
linsuffisance des services publics et dimportants clivages culturels
et socio-économiques. Des groupes de villageois appelés «sanghas»
ont adopté divers thèmes de lagriculture durable afin daméliorer
lutilisation des leurs ressources naturelles. La technique de collecte
de leau ou «water harvesting» a donné des résultats
particulièrement intéressants dans la mesure où elle permet
non seulement de mettre en culture des terres abandonnées, mais aussi
de stocker suffisamment deau pour obtenir une récolte de riz supplémentaire
sur les petites surfaces irriguées. Des vaches laitières ont été
introduites, ce qui sest avéré particulièrement bénéfique
pour les femmes et pour les enfants. Les rendements du sorgho et du millet ont
été doublés; des récoltes supplémentaires
ont été possibles et des arbres fruitiers et forestiers ont été
plantés. A partir du moment où les «sanghas» se sont
consolidés, ils ont développé de nouvelles activités,
telles quun meilleur accès aux services de la santé publique,
la construction de routes ainsi que la gestion de plans dépargne
et de crédit. Des représentants sont élus pour participer
au conseil de gestion du groupe, une organisation indépendante qui constitue
une plate-forme permettant aux groupes de base daborder de nouveaux problèmes.
Source: John Devavaram, SPEECH, Madurai, Tamil Nadu <[email protected]>
Le Centre international de gestion des ressources bio-aquatiques (ICLARM) travaille pour intégrer des étangs de pisciculture à des exploitations agricoles économes en intrants au Malawi. Le programme utilise une approche participative dans laquelle les agriculteurs et les chercheurs identifient ensemble les flux de ressources sur les exploitations et déterminent ensuite quelles sont les adaptations susceptibles de générer un effet de synergie. Ce programme a travaillé avec 2 000 agriculteurs pour améliorer la production de légumes dans les jardins potagers ainsi que lélevage de poissons dans des étangs. Cette composante intégrant agriculture et aquaculture occupe 500 m2 sur une superficie moyenne dexploitation de 1,5 hectares. Néanmoins, lintensification de cette seule composante-clé du système de production a conduit à une amélioration significative de la sécurité alimentaire - les rendements de légumes sont passés de 2 700 à 4 000 kg/ha et la production de poissons délevage dans les étangs a atteint un volume équivalent à 1 500 kg/ha de poisson - une nouvelle source dalimentation pour les ménages ruraux. Ces fermes intégrées génèrent aussi six fois plus de revenus en espèces que les fermes conventionnelles - la production de légumes et de poisson assure jusquà 70 pour cent des revenus annuels en espèces.
LICLARM a montré que, chez les agriculteurs impliqués, la productivité saméliore de façon soutenue grâce à ce système. Ainsi, la productivité des étangs passe de façon progressive de 800 kg/ha à 1 500 kg/ha. Par contre, chez les agriculteurs qui nont été formés que dans le cadre du Système conventionnel «Formation et visite» (T&V System) au Sud du Malawi, les rendements diminuaient constamment, du fait que ces systèmes hyperstructurés se désintégraient dès que les agriculteurs en perdaient le contrôle. Une capitalisation misant à la fois sur le potentiel naturel de la ferme et sur le potentiel humain (savoir-faire et connaissances) des agriculteurs eux-mêmes permet des réajustements réguliers.
Source: Randall Brummet, Daniel Jama; Brummet (2000)
Le projet agricole «Campos elevados» travaille avec des communautés quechuas dans la municipalité de Huatta, avec lobjectif de réhabiliter les anciens champs en billons. Ces «chinampas» ou «waru warus» ont été largement utilisés dans le bassin du lac Titicaca par les agriculteurs précolombiens, puis abandonnés. De plus, plusieurs milliers dhectares de tels aménagements ont été détruits par des projets dirrigation modernes à base dinvestissements coûteux, mais qui nont pas réussi à améliorer les rendements des cultures. Le bassin situé à environ 3 800 mètres daltitude constitue un environnement hostile pour lagriculture, à cause de lirrégularité des pluies, de la pauvreté de sols dégradés et de la fréquence de fortes gelées durant la courte saison de croissance des plantes. Les agriculteurs précolombiens avaient développé des méthodes très sophistiquées pour surmonter ces difficultés, en privilégiant la production intensive et diversifiée de cultures en terrasses, en cuvettes («gochas») et en billons («waru-warus»), tout en mettant en place des dispositifs sociaux permettant dassurer laction collective nécessaire pour obtenir des niveaux de productivité sûrs et élevés. Les organisations locales dagriculteurs de Huatta, qui comprenaient environ 500 familles dans dix communautés, ont commencé à reconstruire ces anciens champs en billons. La réussite de cet effort est attribuée à la participation de la communauté et au développement de moyens dapprentissage et de formation efficaces. Bien que la technologie fusse nouvelle pour les agriculteurs du projet, ce sont eux qui lont adaptée aux conditions locales. En 1986 le programme a été pris en charge par le gouvernement péruvien et sest étendu depuis cette date à 30 communautés de la région de lAltiplano.
Les «waru-warus» demandent une cohésion sociale forte pour le travail collectif nécessaire à la construction des billons et des canaux. Pour la construction de ces champs, le travail a été organisé au niveau familial, inter-familial et communal. La plupart des «waru-warus» ont été construits sur des terres appartenant à la communauté et qui avaient été abandonnées du fait du manque de motivation et dinstitutions locales adéquates. La main duvre nécessaire pour la construction est estimée à entre 200 et 900 hommes/jour/ha, en fonction de lenvironnement local. Les champs sont entourés de canaux qui retiennent les sédiments, améliorent le microclimat pour les cultures, forment un obstacle pour les parasites et pour le bétail et constituent un habitat pour la faune aquatique.
Le microclimat des billons et des canaux réduit lincidence des gelées. La fertilité du sol est améliorée grâce à lengrais vert fourni par les plantes aquatiques, au fumier du bétail et aux résidus des mauvaises herbes et des cultures; cette fertilité permet une forte productivité agricole. Le rendement des pommes de terre atteint 8 à 14 t/ha, sans utilisation de pesticides ni de fertilisants; ce résultat peut être comparé avec un rendement moyen de 1 à 4 t/ha obtenu avec utilisation de fertilisants dans le Département de Puno. Des cultures supplémentaires ont été introduites, telles que lavoine fourragère, le blé et lorge pendant lhiver. Ces champs en billons résistent mieux aux catastrophes. La destruction par des inondations de centaines dhectares de blé et de pommes de terre labourés mécaniquement a été observée, alors que les champs en billons avoisinants nétaient pas endommagés.
Source: Altieri (1999); Pretty (1995)
Le programme de gestion intégrée de ravageurs de la culture du riz au Bangladesh a été mis en uvre à travers trois projets (INTERFISH, NOPEST et GOLDA). Ces projets ont été financés par la DFID et lUnion européenne (UE) et mis en uvre par CARE. Ils cherchent à promouvoir la participation des agriculteurs tout au long dune saison de production de riz grâce aux écoles dagriculture de terrain («écoles sans murs»). Les agriculteurs se réunissent chaque semaine pour apprendre les nouveaux concepts et principes agro-écologiques concernant la culture du riz ainsi que la gestion des parasites et des prédateurs. Environ 6 000 écoles de terrain pour agriculteurs ont été mises en place et 150 000 agriculteurs ont adopté des pratiques plus durables de production de riz sur 54 000 hectares. Les programmes ont mis laccent sur lélevage du poisson dans les champs de riz irrigués et sur la production de légumes sur les digues des rizières. Les rendements du riz ont augmenté de 5 à 7 pour cent et les coûts de production ont baissé grâce à une utilisation réduite de pesticides - environ 80 pour cent des agriculteurs qui participent aux écoles de terrain pour agriculteurs nutilisent plus de pesticides. Les systèmes poisson-riz-légumes ont montré quils produisent des bénéfices synergiques: les revenus additionnels issus de la production de poisson sont de 156 dollars EU/ha, ceux provenant des légumes sur les digues atteignent 23 dollars EU/ha, mais ceux du poisson et des légumes réunis se montent à 250 dollars EU/ha. Le résultat est que la sécurité alimentaire des ménages des 150 000 participants ruraux est assurée pendant toute lannée.
Source: Desilles (1999)
Le travail du Centre international sur la physiologie et lecologie des insectes (ICIPE) soriente vers le développement de technologies de gestion intégrée de ravageurs qui soient à bas coût. LICIPE travaille en collaboration étroite avec les agriculteurs pour tester et adapter ces technologies. Il produit également des résultats synergiques inattendus, du fait de la manipulation des systèmes agricoles et des critères qui les définissent. Lune des activités importantes de ce centre est de mener des recherches sur des nouvelles approches de gestion des habitats afin de supprimer les insectes foreurs des tiges des céréales ainsi que les populations de Striga dans les cultures de maïs et de sorgho. Le projet développe de nouvelles stratégies «push-pull» (pousser-attirer) pour repousser les insectes prédateurs des tiges des céréales et les attirer vers les cultures intercalaires ou vers des cordons plantés de cultures fourragères. Le projet a découvert lextraordinaire multifonctionnalité dune série de légumineuses et de graminées fourragères introduites dans le système de production des céréales. La stratégie consiste à attirer les insectes ravageurs au moyen de plantes-piège très sensibles (pull) et ensuite de les éloigner des récoltes au moyen de cultures intercalaires - repoussoir:
1. Les graminées fourragères, lherbe du Soudan (Pennisetum purpureum) et lherbe à éléphant (Sorghum vulgare sudanense) stimulent la ponte des insectes ravageurs davantage que le maïs.
2. Les plantes fourragères non-parasitées telles que lherbe de mélasse (Melonis minutiflora) et Desmodium (Desmodium uncinatum) repoussent les femelles des ravageurs mangeurs de tiges (Chilo sp.)
3. En culture intercalaire avec le maïs, lherbe de mélasse (Melonis minutiflora) augmente le niveau de parasitisme, particulièrement pour le stade larvaire du parasite Cotesia sesamiae et pour le stade du cocon du parasite Dentichasmis busseolae. Lherbe de mélasse contient plusieurs composants physiologiquement actifs. Deux dentre eux inhibent la ponte de linsecte Chilo, même à très basse concentration.
4. Lherbe de mélasse émet également un composant chimique (E) - 4,8 diméthyle - 1, 3,7 nonatriène, qui attire les ennemis naturels de ravageurs foreurs de tiges.
5. Lherbe à éléphant a, elle aussi, un mécanisme de défense contre les ravageurs foreurs de tiges: quand la larve pénètre dans la tige, la plante produit une substance semblable à de la colle qui tue les insectes.
6. Lherbe du Soudan augmente également lefficacité des ennemis naturels (pour Chilo partellus, le pourcentage dinsectes parasités au stade larvaire est multiplié par trois, de 4,8 pour cent il passe à 18,9 pour cent, quand lherbe du Soudan est implantée autour du maïs. Pour Busseola fusca, un autre ravageur important, ce pourcentage passe de 0,5 pour cent à 6,2 pour cent ).
7. ICIPE a trouvé quen culture intercalaire avec du maïs, les légumineuses fourragères Desmodium uncinatum et Desmodium intortum ont réduit lenvahissement de la mauvaise herbe Striga hermonthica, par un facteur de 40 comparé au maïs en monoculture. La réduction de lenvahissement de la culture de maïs par le Striga a été plus significative lorsque les plantes fourragères (Desmodium) constituaient les cultures intercalaires que lorsque celles-ci étaient constituées de soja, de sesbania ou de pois à vache.
Des chercheurs de lICIPE et de lIARC - Rothamsted ont trouvé que la stratégie «attirer-repousser» utilisant des plantes-piège et des plantes repoussoir comme cultures intercalaires réduit lattaque des ravageurs foreurs de tige et augmente le niveau de parasitisme affectant ces ravageurs dans la culture de maïs protégée, en permettant ainsi une augmentation considérable du rendement. Les essais conduits avec la participation active des agriculteurs en 1997 et en 1998 ont entraîné de fortes améliorations du rendement du maïs. Lobjectif est de développer maintenant un système de production ayant comme base la culture de maïs et qui permette de réduire simultanément les pertes de rendements causées par les ravageurs foreurs de tiges et par linfestation de la mauvaise herbe, Striga et qui puisse également améliorer la fertilité du sol du fait de la fixation dazote par Desmodium. Un tel système de production comporte plusieurs caractéristiques des fermes «traditionnelles» du Kenya.
Des recherches plus récentes de lICIPE montrent lefficacité du neem pour contrôler les scarabées des bananiers, les chenilles «diamond» des brassicas et les ravageurs foreurs de fruits dans les tomates. Ces recherches développent des variétés résistantes aux ravageurs basées sur le germoplasme traditionnel; elles mettent en évidence lintérêt de la stratégie consistant à relâcher des mâles stériles pour le contrôle de la mouche du fruit et elles montrent quil est possible de contrôler des ravageurs foreurs de tige, Chilo partellus, grâce à lidentification dun ennemi naturel provenant du Pakistan, la guêpe parasite Cotesia flavipes (Chilo sp. qui a été accidentellement importée dAsie dans les années 1930, et na pas généré dennemis naturels localement). Cette guêpe a été introduite au Kenya, au Mozambique, en Ouganda et en Somalie.
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Source: |
Dr Hans Herren, Director General de ICIPE <[email protected]> |
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Prof John Pickett, IACR, Rothamsted <[email protected]> |
Le Projet CABI Bio-Science de gestion intégrée des ravageurs de légumes sur les hautes terres a débuté en 1994; il a été financé par la Banque asiatique de développement. Les problèmes posés par la résistance aux insecticides et par la santé humaine sont devenus critiques, le projet IPM a donc créé des écoles de terrain pour les agriculteurs afin de les faire prendre conscience des dommages causés par les insecticides, de leur faire connaître les ennemis naturels des ravageurs et dencourager les échanges de connaissances portant sur de nouvelles pratiques entre les agriculteurs. Le projet concerne 1 719 agriculteurs, qui fréquentent 65 écoles de terrain pour agriculteurs (ETA), et 48 formateurs provenant principalement des gouvernements locaux ont été formés. Comme résultat, une gamme de méthodes alternatives de contrôle des ravageurs a été développée par les agriculteurs. Une baisse de 80 pour cent de lutilisation des pesticides a été observée durant la saison des pluies (55 pour cent de baisse durant la saison sèche) et lutilisation des engrais minéraux a été réduite de moitié, procurant aux agriculteurs une augmentation de leurs revenus de 17 pour cent. Les rendements des légumes ont également augmenté denviron 20 pour cent. Les écoles de terrain pour agriculteurs sont maintenant considérées par les autorités municipales comme constituant un bon investissement.
Source: FAO, Peter Kenmore
Le projet concerne 400 ménages ruraux, et a conduit à la suppression du système de production des pesticides organophosphorés et à base de pyrèthre. Il procure des informations aux agriculteurs, leur assure une formation sur lagriculture durable et conduit à la conservation darbres autochtones. Ce projet a été monté par un groupe de villageois à bas revenus, principalement par des femmes agricultrices souhaitant produire du coton sans pesticides pour des raisons économiques, de santé et denvironnement. Une ONG locale, ZIP-recherche, a été sollicitée pour offrir une formation et une assistance technique à ces agriculteurs, compte tenu de leurs faibles connaissances sur la gestion des ravageurs et sur lagriculture biologique. Cette formation est assurée par le biais des écoles de terrain pour agriculteurs, écoles dans lesquelles certains dentre eux sont sélectionnés par les membres du groupe pour former les autres. A cet effet, ZIP-recherche les forme pendant un mois à Eco-Lab, près de Harare. Ces facilitateurs (ou formateurs décoles de terrain pour agriculteurs) sont formés à la gestion naturelle de ravageurs et à lagriculture biologique en suivant un processus pédagogique intitulé «apprendre par le biais de lexpérimentation» (basé sur le Modèle FAO Gestion intégrée de ravageurs). Les formateurs «décoles de terrain pour agriculteurs» simpliquent dans la recherche participative au niveau des exploitations agricoles. Ils sont également chargés de mettre en place le «système de contrôle interne biologique». Ces activités sont suivies régulièrement par ZIP-recherche. Le financement de la formation et du suivi est assuré par Novib. Afin dencourager la participation des femmes dans ce projet, un marché local a été créé pour la commercialisation de leur production de cacahuètes. De plus, les inspecteurs en agriculture biologique (de Krav et dEcocert) ont accepté daccorder une condition exceptionnelle aux épouses. En effet, une épouse est autorisée à avoir un certificat de non-épandage du coton même si son mari en est resté à lagriculture conventionnelle. Et, bien que le coton, comme la plupart des autres cultures commerciales, soit considéré comme une «culture dhommes», un grand nombre de veuves de victimes du SIDA se sont cependant intéressées à cette culture afin dobtenir des revenus, lagriculture biologique étant accessible aux agriculteurs aux revenus modestes car elle ne demande pas dinvestissements coûteux. La commercialisation de la production biologique de ce projet en constitue un aspect crucial et ce service est offert par des consultants locaux dAgro-Eco. Les semences de coton biologique sont vendues à Cargill avec une prime de 20 pour cent. Ces dernières années, une tonne de fibres de coton biologique a été transformée localement en T-shirts imprimés de qualité export. Quand les agriculteurs ont produit plus de 25 tonnes de fibres de coton biologique (soit le volume dun container), ils les vendent sur le marché mondial à un bon prix. On estime que la récolte de semences de coton biologique de cette saison sera de 50 à 70 tonnes selon les pluies, celles-ci causant actuellement des inondations dans la région. Cinq pour cent du produit de la vente du coton est distribué aux agriculteurs formateurs des écoles de terrain pour agriculteurs qui ont été jugés performants pendant la saison par les agriculteurs et par ZIP-recherche.
Ce projet/entreprise est du type «Développement par les échanges» et les coûts de sa mise en route sont pris en charge par le SIDA/EPOPA. Le projet fonctionne grâce à lenthousiasme des agriculteurs et au soutien de Novib, du Réseau dAction des Pesticides du Royaume-Uni et grâce aussi au travail dévoué des consultants dAgro Eco et du personnel de ZIP-recherche. Les résultats les plus remarquables sont que les agriculteurs de la vallée de Zambezi ont été capables de commercialiser le premier coton biologique du Zimbabwe et que ZIP-recherche a mis au point un processus de reconversion à lagriculture biologique à partir de lagriculture commerciale conventionnelle, processus qui pourrait constituer un modèle de reconversion pour tous les petits agriculteurs dAfrique.
Source: Pesticides Action Network UK <www.pan-uk.org>
Le programme de double récolte blé-maïs est localisé dans la plaine de Hebei au Nord de la Chine. Il a débuté en 1996 avec lappui financier du gouvernement provincial, du comté de Xinji et du Comité de la science et de la technologie de la province dHebei. Après des essais de terrain réussis, le système de double récolte blé-maïs a été diffusé par le biais de fermes modèles, de vidéos et de prospectus. Environ 224 000 ménages ont ensuite adopté cette technologie sur une superficie totale de 100 000 hectares. Les rendements ont augmenté de près de 10 pour cent. Lutilisation de leau a été réduite de 20 pour cent. Il en résulte que les revenus nets ont augmenté de 30 pour cent.
Source: Liang Weili
La diffusion rapide de la culture de soja dans les systèmes de production de lInde montre que lintroduction dun composant régénérateur peut procurer de multiples bénéfices. La superficie du soja est passée de 0,04 million dhectares dans les années 1980 (avec un rendement moyen de 0,57 t/ha), à 5,6 millions dhectares actuellement, (avec un rendement moyen de 0,96 t/ha). Chaque année, la superficie de soja saccroît de 0,5 million dhectares et on estime quelle atteindra 8 millions dhectares en lan 2 000. Les exportations de soja ont rapporté à lInde 518 millions de dollars EU en 1997.
Les nombreux effets bénéfiques résultant de la culture du soja en Inde sont les suivants:
® la production dhuile. Le soja a joué un rôle important dans lautosuffisance nationale en huiles alimentaires;
® les échanges commerciaux;
® la fixation naturelle dazote dans le sol et sa contribution à la formation du capital naturel;
® lemploi rural par le biais du développement de lagro-industrie du soja;
® pendant la période de mousson, la compatibilité de la culture intercalaire du soja avec dautres cultures telles que le pois cajan, le maïs, le sorgho et le millet;
® des revenus en espèces pour les agriculteurs;
® une amélioration de la fertilité du sol par le biais de lincorporation au sol de matière organique. 0,5 à 2,5 t/ha de résidus de la culture et 45 kg/ha dazote fixé par la plante sont léquivalent de lutilisation annuelle de 250 000 tonnes dazote ammoniacal et de lincorporation au sol de 2,8 à 14 millions de tonnes de matière organique;
® la réhabilitation des terres dégradées, par exemple au Pendjab, où le système riz - blé pourrait bénéficier de lintroduction de la culture du soja dans la rotation;
® 95 pour cent des semences étant prélevées sur la récolte antérieure, les agriculteurs cessent dêtre dépendants des circuits externes de commercialisation des semences.
Source: Bhatnagar et Joshi, FAO
Le Système de production agricole Machobane constitue lexemple dun système dont les bases ont été restructurées afin de procurer des bénéfices multiples. Le Lesotho est un pays sévèrement affecté par lérosion et par la dégradation des terres. Durant les vingt dernières années, la surface des terres arables est passée de 14 à seulement 9 pour cent de la superficie totale du pays et les rendements des cultures sont actuellement environ la moitié de ceux obtenus dans les années 1970. Cest le Docteur J. J. Machobane, un agronome du groupe ethnique Mosotho, qui a conçu ce système il y a plus de 40 ans, lexpérimentant lui-même dans sa propre exploitation pendant 13 ans avant de chercher à le transmettre à dautres agriculteurs. A la différence de la majorité des méthodes de vulgarisation agricole, lapproche du Docteur Machobane prend en compte tout dabord les comportements qui permettent au processus dadoption de son message technique de se dérouler:
confiance en soi - les agriculteurs doivent être convaincus quils seront capables dassurer leur sécurité alimentaire sans assistance extérieure;
appréciation du potentiel en ressources - les agriculteurs doivent être prêts à travailler dur et être convaincus quils peuvent améliorer la production agricole par le biais dune pleine exploitation de leur potentiel de ressources;
apprendre et enseigner par laction - les agriculteurs doivent se former sur leurs propres terres et leurs formateurs doivent être prêts à travailler avec eux;
diffusion spontanée de la technologie - les agriculteurs apprennent dautres agriculteurs et ceux qui ont adopté le système Machobane ont lobligation daider leurs voisins.
Dans les zones de montagne du Lesotho, la plupart des cultures sont implantées sur des terrasses, mais la fragilité de la structure des sols, la gestion inadéquate de la fertilité et les pluies erratiques font que la productivité des terres reste faible et irrégulière. Daprès Machobane, ces contraintes peuvent être surmontées grâce à une exploitation rationnelle des ressources disponibles et en minimisant les achats dintrants externes. Les éléments techniques comprennent les cultures intercalaires, lapplication locale de cendres provenant des déchets domestiques et de fumier, le désherbage, lintroduction de la pomme de terre comme culture commerciale, la préservation des ennemis naturels des ravageurs, la rotation de cultures en sillons et limplantation des légumineuses avec les céréales.
Les agriculteurs qui ont adopté le système du Dr Machobane (SAM) en signalent trois avantages: i) une meilleure productivité des terres (une surface de 0,4 ha est nécessaire pour assurer la sécurité alimentaire dune famille par rapport à une surface de 1,2 ha habituellement); ii) un revenu en espèces plus important grâce à la culture de la pomme de terre; et iii) une meilleure résistance à la sécheresse, ainsi, avec ce système, les champs sont plus verts que ceux où on napplique pas le système. En plus, le SAM régularise les revenus en combinant une réduction de la fluctuation des rendements de chaque culture, une atténuation des risques liés aux fluctuations des rendements et des prix du fait dun élargissement de la gamme des cultures et dune moindre dépendance par rapport aux apports extérieurs dintrants (engrais et pesticides). Environ 2 000 agriculteurs pratiquent actuellement ce système.
Source: Pantanali (1996)
Le Système dintensification de la culture du riz (SIR) a été développé dans les années 1980 par Fr. Henri de Laudanié, puis diffusé par lAssociation Tefy Saina à partir de 1990 et enfin évalué par lInstitut international pour lalimentation, lagriculture et le développement de lUniversité de Cornell. Ce système a permis au rendement du riz de passer denviron 2 t/ha à 5, 10 et même 15 t/ha dans les champs des agriculteurs. Ce résultat a été obtenu sans lutilisation dintrants externes tels que des pesticides ou des fertilisants inorganiques. Le SIR cherche à valoriser au mieux le potentiel génétique du riz en se démarquant de beaucoup de «règles» conventionnelles de culture:
1. les plants de riz sont normalement repiqués au bout de 30 jours (quelque fois jusquà 40 ou 50 jours). Avec le SIR, ces plants sont repiqués au bout de 8-12 jours. Ceci augmente le tallage - avec le SIR, les plants possèdent de 50 à 80 talles, à comparer avec les 5 à 20 talles obtenues par les systèmes conventionnels.
2. les plants de riz sont habituellement plantés serrés pour réduire la propagation des mauvaises herbes. Mais avec le SIR, ils sont repiqués en quadrillage de 25 cm sur 25 cm plutôt quen lignes. Ceci facilite le désherbage mécanique et réduit la quantité de semences utilisée de 100 kg/ha à environ 7 kg/ha. Les plantes disposant dun espace plus grand pour les racines et pour les talles, elles développent donc une architecture différente. Un meilleur système racinaire diminue le risque que les plantes versent.
3. la plupart des chercheurs et des agriculteurs considèrent que le riz, en tant que plante aquatique, pousse mieux dans leau stagnante. Néanmoins, dans le système SIR, les champs de riz ne sont pas inondés durant la période de croissance végétative. Pour préserver l'humidité du sol, on arrose tous les 3 à 6 jours. Les champs de riz sont inondés seulement après la floraison, ensuite ils sont drainés 25 jours avant la récolte (comme pour le riz conventionnel). De telles pratiques favorisent un meilleur développement du système racinaire.
4. la pratique de linondation est un élément de lapproche conventionnelle pour le contrôle des mauvaises herbes. Avec le SIR, les agriculteurs doivent désherber jusquà quatre fois, mécaniquement ou à la main. Les agriculteurs qui ne désherbent pas obtiennent néanmoins un rendement de 2 à 3 fois supérieur au rendement conventionnel, mais ceux qui le font obtiennent un rendement multiplié par 4 ou 6. Les agriculteurs du SIR utilisent aussi du compost plutôt que des fertilisants inorganiques.
Laugmentation des rendements procurée par le système SIR a été telle que, jusquà une date récente, les scientifiques lont simplement ignoré. En fait, le SIR défie la plupart des principes de base de la culture du riz irrigué, ce qui a rendu la plupart des spécialistes tout à fait sceptiques. Mais cest le nombre des agriculteurs adoptant ce système qui prouve son efficacité et son bon fonctionnement. On estime que 20 000 agriculteurs ont adopté totalement ce système à Madagascar (Tefi Saina suggère que 50 000 à 100 000 agriculteurs ont expérimenté maintenant quelques éléments du système). Luniversité de Cornell a apporté son assistance aux institutions de recherche en Chine, en Indonésie, aux Philippines, au Cambodge, au Népal, en Côte dIvoire, au Sri Lanka, à Cuba, en Sierra Leone et au Bangladesh pour quelles puissent tester localement ce système. Dans tous les cas, les rendements ont été considérablement améliorés. Par exemple, en Chine, les rendements ont atteint 9 à 10,5 t/ha la première année (comparés avec une moyenne nationale de 6 t/ha).
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Source: |
Sébastien Rafaralahy, ASSOCIATION TEFY SAINA <[email protected]> |
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Prof. Norman Uphoff, CIIFAD, Cornell University, USA <[email protected]> |
Ce programme promeut le développement de la production de cultures vivrières dans 31 villages de Jajarkot Khalanga et il est financé par Aide en Action-Nepal. Un processus basé sur la communauté se développe en valorisant les savoir-faire et les connaissances de la population locale lors de la formation du capital social. Les principaux effets de ce programme sont laugmentation de la production de denrées alimentaires. Environ 40 pour cent des 580 ménages participant au programme, organisés en 44 groupes, sont devenus complètement autosuffisants grâce à une utilisation croissante de technologies de lagriculture renouvelable. Ces technologies comprennent lengrais vert, le compost, les cultures intercalaires, lagroforesterie et une diversification de systèmes de production agricole qui associent les arbres fruitiers, lapiculture, lélevage des moutons et des lapins, la culture du coton, la floriculture et lexploitation intensive de jardins potagers. Ce programme porte aussi sur lutilisation de cuisinières sans fumée et la construction de latrines, la formation de groupes pour gérer les systèmes dépargne et de crédit, le soutien apporté aux petites entreprises locales, le renforcement de la formation continue des adultes et lamélioration de laccès aux services de santé.
Source: Jajarkot Permaculture Programme (1997-2000); Chris Evans, pers. comm.
Le projet de développement du bassin hydrographique de Kharaiyanala, en Inde centrale, constitue un élément de la stratégie du gouvernement de lInde pour accroître la production agricole et parvenir à lautosuffisance alimentaire au niveau national, ainsi que pour répondre aux besoins de la population pauvre aux niveaux des communautés et des ménages. Le Plan daction pour la sécurité alimentaire en Inde se traduit par des politiques et des programmes ayant comme objectif daccroître la production de denrées alimentaires grâce à des programmes de développement intégré de la culture de céréales, en privilégiant la diffusion des technologies améliorées de production, lencouragement à lutilisation de semences de variétés de haut rendement certifiées (VHR) et lextension de lirrigation.
Une autre action prioritaire concerne la gestion améliorée des bassins hydrographiques. La stratégie est basée sur des politiques ayant pour but létablissement de systèmes publics dapprovisionnement, de stockage et de distribution, ainsi que la mise en place de réserves et la création de marchés ouverts. Dans le cadre de la stratégie de sécurité alimentaire de lInde, lapproche participative de développement mise en uvre dans le bassin de Kharaiyanala constitue un exemple de réussite dans la lutte contre linsécurité alimentaire et contre la pauvreté au niveau de la communauté.
Source: FAO, CSA
Le programme dagriculture conservatoire «labour zéro» mis en place à Santa Caterina, au Brésil, décrit une approche dagriculture non conventionnelle centrée sur la conservation à la surface du sol à la fois des plantes vivantes et des résidus végétaux en décomposition. Cette approche dagriculture conservatoire non seulement assure une couverture végétale continue au sol et supprime le labour. Elle conduit aussi à une planification de la succession des cultures au cours des saisons qui minimise lémergence des ravageurs et des maladies, tout en optimisant lutilisation des nutriments par les plantes. Cette approche a permis dobtenir en peu de temps des rendements élevés, de réduire les coûts de la main-duvre, de diversifier lagriculture par le biais de la production de bétail et de la transformation de produits agricoles, aboutissant ainsi à une amélioration de la sécurité alimentaire des petits agriculteurs.
Source: FAO, CSA
Le Programme spécial de sécurité alimentaire (PESA) du Burkina Faso relève dune approche intégrée centrée sur la promotion de technologies appropriées et de pratiques agricoles, une meilleure utilisation et gestion de leau en constituant un point clé. Au niveau des parcelles de démonstration, le programme PESA a permis une amélioration considérable des rendements du riz irrigué et pluvial, ainsi que des rendements des légumes. Ce programme fait partie du programme national pour la croissance durable de lagriculture et de lélevage. Le programme PESA permettra de conforter efficacement la sécurité alimentaire et déradiquer la pauvreté, à condition que des politiques macro-économiques et sectorielles soient mises en place, que laccès au crédit et aux intrants soit facilité et que la commercialisation soit améliorée. Ces conditions permettront la généralisation de techniques améliorées favorisant laugmentation de la productivité.
Source: FAO, CSA
Le Programme de développement de coopératives laitières au Bangladesh résulte de lobjectif à long terme du gouvernement daugmenter les revenus agricoles complémentaires des petits agriculteurs pauvres dans les zones reculées. Initialement centré sur la production, le ramassage, la transformation et la distribution du lait, le programme a par la suite fourni une large gamme dappuis techniques, allant du développement institutionnel par létablissement de coopératives à la facilitation de laccès au crédit au niveau de la communauté, à lorganisation dune distribution adéquate du lait et à la mise en place de systèmes de commercialisation dans les centres urbains. Le projet a non seulement été un succès en matière damélioration de la sécurité alimentaire, de la nutrition et des revenus pour les bénéficiaires et les agriculteurs sans terre, mais il a également créé des emplois pour un grand nombre de citadins pauvres et amélioré leurs revenus.
Source: FAO, CSA
En Zambie, les systèmes de multiplication et de distribution communautaires de semences ont mis laccent sur la distribution de semences de variétés précoces résistantes à la sécheresse afin de faire face aux problèmes posés par une productivité déficiente et par la sécheresse, avec lobjectif de lutter contre linsécurité alimentaire et la pauvreté. Le projet a montré quà partir du moment où les agriculteurs atteignent lautosuffisance alimentaire grâce à lintroduction de technologies améliorées, telles que des semences de meilleure qualité, et quils génèrent des excédents, des besoins impérieux se développent en matière dinfrastructures de commercialisation, daccès au crédit et aux dautres infrastructures physiques et institutionnelles.
Source: FAO, CSA
Les études de cas ci-dessus, rédigées dans le cadre du Programme spécial de sécurité alimentaire (PESA) de la FAO, en dépit de leurs dimensions et approches différentes, fournissent des enseignements utiles pour lutilisation de méthodes impliquant les communautés lors de ladoption de nouvelles technologies.
® Lamélioration de la sécurité alimentaire par le biais de technologies agricoles au niveau de la communauté peut renforcer la capacité de la population à sengager dans des activités de développement dans dautres domaines.
® Limplication directe des bénéficiaires dans ladaptation à leurs conditions de technologies améliorées savère fructueuse en termes denthousiasme et dintérêt lors de la mise en uvre du projet. De même, sassurer que les technologies répondent aux besoins prioritaires définis par les bénéficiaires eux-mêmes conduit à une forte probabilité den obtenir limpact souhaité.
® Laction communautaire peut être très rentable.
® Quand les améliorations de la productivité génèrent un revenu supplémentaire pour les membres de la communauté, cela stimule leurs efforts et les encourage à persévérer. Les comités de villageois peuvent constituer un mécanisme efficace pour gérer les activités communautaires dans lintérêt commun et pour établir des fonds de roulement permettant de générer du crédit pour lensemble des membres de la communauté.
® Des actions communautaires pour accroître la productivité grâce à ladoption de technologies et de pratiques appropriées répondent également aux objectifs de la gestion durable des ressources naturelles.
® La vulnérabilité aux désastres naturels peut être considérablement réduite par ladoption de technologies et de pratiques qui: a) empêchent ou atténuent les effets des désastres naturels, et b) améliorent la productivité, accroissent les revenus en espèces et créent des réserves sur lesquelles les familles peuvent compter en cas de désastre.
® Sans un environnement constitué par des politiques permettant aux surplus générés par les améliorations de la productivité de trouver des débouchés commerciaux, les actions pour améliorer la sécurité alimentaire et réduire la pauvreté par grâce à de nouvelles technologies et pratiques ne peuvent pas réussir.