3. Quels exemples de politiques incitatives ont été mis en uvre par les gouvernements pour appuyer la gestion durable des terres et de lADRD? |
RÉSUMÉ |
Vingt cas ont été sélectionnés pour illustrer des exemples de politiques incitatives mises en uvre par les gouvernements pour appuyer la gestion durable des terres et de l'ADRD |
Bien quactuellement presque tous les pays ont à cur de déclarer quils soutiennent lagriculture durable à lévidence les réformes ne sont que fragmentaires. Deux pays seulement ont apporté un soutien national explicite à la politique dagriculture durable, en la plaçant au cur de la politique de développement agricole et des politiques dintégration. Ces deux pays sont Cuba et la Suisse. Cuba sest doté dune politique nationale pour une agriculture alternative; la Suisse dispose de trois niveaux dappui à lagriculture et au développement rural durables. LAutriche, comme le Danemark, la Suède et la Finlande ont officiellement favorisé lagriculture biologique, mais ce soutien na pas nécessairement eu des impacts sur les agriculteurs conventionnels.
Le tableau ci-dessous propose un récapitulatif dun côté, des types de contribution apportées par différents pays à lagriculture durable, de lautre, du développement dune agriculture durable significative sur le terrain. Trois pays ont bénéficié dappuis au niveau sous-régional: trois Etats du Brésil méridional ont obtenu des résultats remarquables du fait de systèmes agricoles conservationnistes et du labour zéro; certains Etats en Inde, particulièrement le Rajasthan, dans le domaine de la gestion de bassins versants et des sols et grâce à des subventions pour les fertilisants organiques et lEtat du Gujarat du fait de politiques de gestion participative de systèmes dirrigation impliquant une restitution totale des bénéfices aux groupes dutilisateurs.
Plus nombreux sont les pays qui ont réformé certains éléments de leur politique agricole en introduisant de nouvelles réglementations, des mesures incitatives et/ou des taxes en faveur de lenvironnement, ou encore de nouveaux mécanismes administratifs. Ces ensembles de mesures ont eu un impact considérable, quoique partiel. On peut citer le Kenya (approche de gestion des bassins versants pour la conservation des sols), lIndonésie (interdiction de certains pesticides associée au programme national décoles de terrain pour les agriculteurs et gestion intégrée des ravageurs du riz), lInde (appui au traitement et à la commercialisation du soja), la Bolivie (politiques agricoles et rurales dintégration régionale), le Burkina Faso (politique daménagement des terres basée sur la gestion des terroirs); le Sri Lanka et les Philippines (groupes dutilisateurs deau pour la gestion de lirrigation). Néanmoins, aucun de ces pays na, à ce jour, explicitement adopté lagriculture durable comme cadre de référence de sa politique agricole.
Pour un nombre encore plus important de pays, on observe des progrès en matière dagriculture durable au niveau des projets et des programmes, mais pour leur majorité, ces améliorations se mettent en place malgré des politiques inadaptées plutôt que grâce à un soutien politique. Ainsi, la plupart des réformes restent très fragmentaires et le concept dagriculture durable est encore largement en marge des politiques conventionnelles et de leurs objectifs. Aucun ministre de lagriculture ne dira quil est contre lagriculture durable, mais il reste à concrétiser les bonnes paroles dans dambitieuses et cohérentes réformes politiques.
Les systèmes dagriculture durable peuvent savérer viables à la fois aux plans économique, social et environnemental, et ils améliorent les conditions de vie locales. Mais sans soutien politique approprié, ils risquent fort, au mieux, de rester limités dans lespace, et au pire, de simplement disparaître.
Sélection de réformes progressives de la politique dagriculture durable selon le degré dintégration et les résultats obtenus | |
Pays avec des réussites à grande échelle |
Pays avec des réussites locales significatives |
Pays avec un appui déclaré à la politique d'agriculture durable |
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Cuba (Politique nationale pour lagriculture durable) Suisse (3 niveaux dappui à lagriculture et au développement durable) |
Danemark et Suède Soutien national pour lagriculture biologique; politiques de réduction des fertilisants inorganiques et des pesticides Finlande Schéma pour lagriculture et pour lenvironnement avec des primes aux agriculteurs: 82 pour cent dadhésion |
Pays avec un soutien politique déclaré au niveau régional ou provincial (mais non national) |
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Brésil (Labour zéro et agriculture conservatoire dans trois Etats du Sud) Inde, Rajasthan (Soutien à la gestion des sols, primes pour les bio-fertilisants) |
Inde, Gujarat (Gestion participative de lirrigation avec restitution totale aux groupes dutilisateurs) |
Pays ayant des éléments de politiques de soutien, mais non intégrés aux autres secteurs |
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Kenya (Approche «gestion du bassin versant» pour la conservation du sol) Paraguay (Promotion du labour zéro grâce à des subventions centralisées) Indonésie (Interdiction de certains pesticides, programme national décoles de terrain dagriculteurs et IPM pour la culture du riz) Inde (Soutien à la transformation et à la commercialisation du soja) Bolivie (Intégration régionale des politiques agricoles et rurales) Burkina Faso (Politique foncière de gestion des terroirs) Australie (Programme national de conservation des terres) Sri Lanka et les Philippines (Groupes dutilisateurs deau pour la gestion de lirrigation) |
Pays Bas (Politique de réduction des pesticides, réglementation des nutriments) Bénin (Soutien à la culture de «Macuna») Niger (Appui aux techniques de collecte deau) Inde (Politique national participative pour la gestion de bassin versant) Costa Rica (Agriculture conservatoire pour le développement durable) |
Lun des exemples les plus remarquables defforts politiques coordonnés en faveur de lagriculture durable est celui de Cuba. Jusquen 1990, le secteur agricole et alimentaire de Cuba était fortement dépendant du soutien du bloc soviétique. Cuba importait 100 pour cent du blé, 90 pour cent des haricots, 57 pour cent des calories consommées, 94 pour cent des fertilisants, 82 pour cent des pesticides et 97 pour cent de lalimentation animale. Le sucre vendu par Cuba était également payé trois fois plus cher que son cours mondial. A cette époque-là, Cuba avait le plus grand nombre de scientifiques par habitant de toute lAmérique Latine, le plus grand nombre de tracteurs à lhectare, le deuxième plus grand rendement en grain, la plus grande augmentation de la production alimentaire par habitant des années 80, la plus basse mortalité infantile, le plus grand nombre de médecins par habitant, le plus haut niveau de scolarisation secondaire et le rapport professeurs/élèves le plus élevé.
Mais en 1990, les échanges commerciaux avec le bloc soviétique se sont effondrés, conduisant à de sévères pénuries pour tous les biens importés. En lespace de deux ans, les importations de pétrole ont été réduites de moitié par rapport à la période davant 1990, celles des fertilisants ont été réduites au quart, celles des pesticides au tiers et les importations alimentaires furent réduites à moins de la moitié. La réponse du gouvernement fut une politique officielle privilégiant la mise en place dun modèle alternatif dagriculture. Celle-ci sappuie sur des technologies conservatoires des ressources, en remplaçant les importations dintrants par les connaissances, les compétences et les ressources locales. Cuba met également laccent sur la diversification de lagriculture, lélevage et la sélection de bovins pour permettre à la traction animale de remplacer les tracteurs, lutilisation de la gestion intégrée des ravageurs (IPM) en substitution aux pesticides, la mise en uvre de nouvelles pratiques scientifiques, une formation renforcée pour répondre aux besoins, la promotion dune meilleure coopération entre les agriculteurs, à la fois au sein des communautés et entre celles-ci, et linversion de lexode rural en encourageant la population à rester dans les campagnes.
La nouvelle politique a déjà donné de très bons résultats. 220 centres artisanaux villageois ont été ouverts pour la production des bio-pesticides par la reproduction des entomophages et des entomopathogènes. Ils produisent chaque année 1 300 tonnes de bio-pesticides Bacillus Thuriengiensis (utilisés pour le contrôle des lépidoptères), 780 tonnes de bio-pesticides Beaveria (pour contrôler les scarabées), 200 tonnes de bio-pesticides Verticillium (pour le contrôle des mouches blanches) et 2 800 tonnes de Trichoderma (utilisé pour le contrôle biologique). De nombreuses méthodes de contrôle biologique savèrent plus efficaces que les pesticides. Des morceaux de troncs de bananiers macérés avec du miel attirent les fourmis, celles-ci sont ensuite transportées vers des champs de patates douces pour contrôler le charançon de cette espèce.
Il y a 173 centres de compostage par les lombrics et leur production annuelle est passée de 3 000 à 93 000 tonnes. La rotation des cultures, lutilisation dengrais verts et de cultures intercalaires et la conservation des sols sont devenues des composantes de lagriculture. Les systèmes de culture à base de manioc-haricots, de manioc-tomate-maïs et de patate douce-maïs se sont tous avérés de 1,5 à 2,8 fois plus productifs que la somme de toutes les monocultures prises séparément.
Deux caractéristiques importantes de lagriculture durable cubaine sont:
® dans les zones urbaines, trois types de jardins potagers intensifs cultivés en biologique: des jardins pour assurer lautosuffisance des écoles et des lieux de travail («autoconsumos»), des jardins à plates-bandes en billons («organopónicos») et des jardins communautaires intensifs (huertos intensivos),
® dans les zones rurales, une agriculture durable développée à la fois aux niveaux des petites et des grandes exploitations agricoles.
Ces deux traductions de lagriculture durable ont contribué de façon significative à la production alimentaire totale (les cultures en zones urbaines sont celles pratiquées dans les limites de la municipalité ainsi que dans un rayon de trois kilomètres autour des foyers de peuplement supérieurs à 2 000 personnes). En 1994 par exemple, des jardins en billons, des jardins communautaires à usage intensif et des jardins destinés à assurer lautosuffisance des écoles et des lieux de travail produisaient 4 200 tonnes de nourriture par an. Vers 1999, leur production a atteint 727 000 tonnes. Le nombre de jardins potagers a augmenté ainsi que et leur productivité par unité de surface . Il existe à présent 7 080 jardins potagers (soit 2 500 de plus quen 1987) et la productivité est passée de 1,6 kg/m2 (1994) à 19,6 kg/m2. Il est difficile destimer le nombre dexploitations qui ont adopté des pratiques dagriculture durable. Les estimations suggèrent 200 000 exploitations sur environ 150 000 ha. En ce qui concerne les jardins à plates-bandes en billons («organopónicos»), environ 2 600 personnes sont impliquées dans la production directe daliments.
Les données de la consommation calorique permettent dévaluer lefficacité de lagriculture durable pour produire la nourriture nécessaire à la population. Cette consommation a été de 2 600 kilocalories par jour en 1990, chutant à 1 000-1 500 kilocalories par jour juste après le processus de transition (avec une forte insécurité alimentaire), et elle a augmenté pour atteindre une moyenne de 2 700 kilocalories par jour à la fin des années 90.
Au premier plan des acteurs assurant la transition vers lagriculture durable se trouve le GAO, Groupe d'agriculture organique biologique (initialement connu comme lAssociation cubaine d'agriculture organique biologique, qui fut créée en 1993). Le GAO rassemble des agriculteurs, des gérants de fermes, des experts, des chercheurs et des fonctionnaires du gouvernement. Son but est daider à convaincre les agriculteurs que les alternatives dagriculture biologique sont en mesure de fournir suffisamment de nourriture pour les Cubains. Néanmoins, des difficultés subsistent et maintenant, il sagit de: i) prouver le succès dun système alternatif aux agriculteurs sceptiques, aux chercheurs et aux décideurs; ii) développer de nouvelles technologies de manière assez rapide pour résoudre de nouveaux problèmes; iii) assurer une coordination entre les différents acteurs afin de leur permettre de travailler ensemble; iv) poursuivre la décentralisation de la production alimentaire en faveur des agriculteurs et mettre en place une réforme agraire adéquate pour encourager linvestissement local dans le nécessaire développement institutionnel; et v) encourager les grands producteurs de riz, de pommes de terre, de canne à sucre et dagrumes à réduire lemploi des pesticides et des fertilisants inorganiques.
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Source: |
Dr. Fernando Funes, Groupe dagriculture organique (GAO), Cuba - Apartado
4029, C.P. 10400, La Havane, Cuba |
En Suisse, des réformes très avancées des politiques du secteur agricole ont été mises en place à la fin des années 90. Un ensemble radical de mesures politiques a bénéficié du soutien de 70 pour cent des électeurs lors du référendum de 1996 (Agence suisse pour lenvironnement, la forêt et le paysage, 1999). La loi Agricole fédérale a été révisée en 1952 pour que les subventions favorisent des pratiques écologiques, puis amendée en 1996 sous le nom d«Acte agricole 2002», à la suite dun référendum national. La politique identifie trois niveaux du soutien public selon le degré de durabilité de lagriculture. Le premier niveau concerne les soutiens pour des biotopes spécifiques tels que les pâturages et les prés dexploitation extensive, les plantations fruitières à tiges hautes et les haies. Le deuxième niveau de soutien concerne la production agricole intégrée limitant lutilisation dintrants en application de normes écologiques plus exigeantes que celles utilisées pour lagriculture conventionnelle. Le troisième niveau concerne le soutien à lagriculture biologique.
Les agriculteurs doivent satisfaire au minimum cinq conditions pour pouvoir bénéficier de primes pour une production intégrée, qui constitue ce que lon appelle le «standard écologique» des pratiques:
1. Fournir la preuve dune utilisation raisonnée des nutriments, avec des doses de fertilisants définies en fonction des exigences de la culture. Les éleveurs sont dans lobligation de vendre le surplus de fumier ou de réduire leffectif de leur cheptel.
2. Les sols doivent être protégés de lérosion. Les cultures érosives (par exemple le maïs) ne peuvent être mises en place quen rotation avec de la prairie et des engrais verts.
3. Au mois sept pour cent de la surface de lexploitation doit être réservé à la protection de la diversité des espèces, sous la forme de prairies, de haies vives ou de vergers et ne pas recevoir de fertilisants.
4. Pratiquer des rotations de cultures diversifiées.
5. Réduction de lutilisation des pesticides pour respecter les niveaux de risques définis.
Un élément vital de ce processus politique est que la responsabilité de définir, dadministrer et de superviser sa mise en uvre est déléguée aux cantons, aux syndicats dagriculteurs, aux conseillers agricoles, aux organismes locaux et aux organisations non gouvernementales. En 1999, 90 pour cent des exploitations agricoles ont été en mesure de se conformer au standard écologique de base (lequel permet de recevoir des subventions publiques). 5 000 exploitations agricoles (soit 8 pour cent) sont à présent biologiques (elles étaient un peu plus de 2 pour cent en 1991) et on sattend à ce que la plupart des agriculteurs atteignent le «standard écologique» pour lannée 2 000. Lapplication des pesticides a baissé de 23 pour cent depuis 1990, et lutilisation des phosphates a baissé de 83 à 75 kg/ha.
Source: Agence Suisse pour lEnvironnement, la Forêt et les Paysages (1990)
Le Service gouvernemental de recherche et de vulgarisation EPAGRI travaille avec les agriculteurs de Santa Catarina, un Etat au Sud du Brésil sétendant des plaines côtières à lest, aux hautes terres vallonnées et aux montagnes au centre et à louest. Le service intervient avec les agriculteurs locaux dans les micro-bassins versants afin de développer des systèmes agricoles productifs économes en intrants. Chaque membre dEPAGRI travaille pendant une période de deux ans sur environ quatre micro-bassins comprenant 150 familles et il joue un rôle social aussi bien que technique important. Lexpérimentation par les agriculteurs est encouragée, et un grand nombre de décisions sont prises par ces vulgarisateurs locaux.
Les actions techniques de conservation des sols et de leau au niveau des micro-bassins utilisent des cordons de végétation en courbes de niveau, le labour en courbes de niveau et des engrais verts. Les agriculteurs utilisent certains engrais chimiques et désherbants, mais les engrais verts et les cultures de couverture ont donné des résultats particulièrement satisfaisants. Soixante espèces ont été testées avec les agriculteurs; elles comprennent à la fois des légumineuses telles que la macuna, les pois sabre, les lablabs, les pois à vache, plusieurs petits pois et crotalaires, etc., et des espèces non-légumineuses comme lavoine et les navets. Pour les agriculteurs, ces introductions nimpliquent aucune dépense en espèces, sauf pour lachat de semences. Ces cultures sont cultivées de manière intercalaire ou implantées pendant les périodes de jachère; elles sont utilisées dans un système de production qui inclut le maïs, loignon, le manioc, le blé, le raisin, les tomates, le soja, le tabac et les arbres fruitiers. Les agriculteurs utilisent des outils à traction animale pour étendre et couper les engrais verts ou la culture de couverture afin de létaler à la surface du sol. Avec un autre outil à traction animale conçu par les agriculteurs, ils creusent ensuite un sillon dans le paillis ainsi obtenu, sillon qui recevra la semence de la récolte suivante. Le résultat est que la plupart des agriculteurs ne labourent plus.
L'adoption de la pratique du labour zéro à Santa Caterina est significative, parce que les structures foncières sont considérablement plus petites que dans les Etats voisins du Parana et du Rio Grande do Sol (où la croissance du nombre d'hectares sous labour zéro a été extraordinaire pendant la dernière décennie). On estime que 100 000 agriculteurs ont adopté le labour zéro sur environ 880 000 ha dans le cadre du programme Microbacias. Les améliorations des rendements ont été substantielles: celui du maïs a augmenté de 47 pour cent sur une période de 8 ans (jusqu'en 1999) pour atteindre 3 750 kg/ha; celui du soja a augmenté de 83 pour cent (2 730 kg/ha) et celui du blé a augmenté de 82 pour cent pour passer à 2 125 kg/ha.
De la même façon que dautres programmes de labour zéro, EPAGRI a entraîné des améliorations de la qualité de leau, de létat sanitaire du sol et de sa capacité de rétention en eau. Les sols sont de couleur plus foncée, souples sous le pied, humides et pleins de lombrics. Les besoin réduits en désherbages et en labours ont conduit à une forte économie de main-duvre pour les petits agriculteurs. Il est devenu évident que lentretien de la couverture du sol est bien plus efficace pour empêcher lérosion que la construction de terrasses et de structures anti-érosives. Cette technique est également moins coûteuse pour les agriculteurs.
Des éléments importants du programme microbacias ont été la transformation de bassins versants entiers et lattention accordée à la formation du capital social. A Santa Caterina, environ 7 700 groupes dagriculteurs ont été formés sur 559 microbacias; ces groupes ont été impliqués dans une large gamme dactivités. EPAGRI a également cherché à impliquer totalement les municipalités dans le développement participatif de technologies et dans la vulgarisation agricole. A présent, un grand nombre de municipalités ont recruté des ingénieurs agronomes pour collaborer à ce processus.
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Source: |
Dr. Gilmar Jacobowski, Directeur tecnique, EPAGRI <[email protected]> |
Le conseil de politique alimentaire (FPC) de Toronto est un réseau très large dorganisations impliquées dans la sécurité alimentaire, dans lagriculture durable, la santé publique et le développement communautaire. Son but est daméliorer laccès des familles à faibles revenus à un régime alimentaire abordable et sain et de promouvoir les micro-entreprises alimentaires faisant travailler des personnes à faibles revenus. Il a été mis en place en 1990 et réunit les professionnels et les militants dun grand nombre de secteurs: celui de la santé publique, les secteurs agricole et rurale, le secteur alimentaire, celui de lemploi, de léducation, des communautés et celui de la lutte contre la faim.
Le FPC reçoit le soutien du conseil municipal et il est administré par le département de la santé publique. Cela lui donne une crédibilité officielle tout en lui permettant de travailler avec plusieurs groupes communautaires. Il a deux rôles-clés: lélimination dobstacles constitués par des politiques publiques limitant laccès à des niveaux dalimentation décents et la création de politiques avancées qui assurent la promotion dactions communautaires sur les thèmes alimentaires. A lépoque de lapparition du FPC, Toronto connaissait un déclin économique et un passage rapide du plein-emploi à lemploi à temps partiel. La dépendance par rapport aux services sociaux devenait croissante, la pauvreté de certains groupes saggravait et, par ailleurs, la pauvreté concernait de plus en plus les classes moyennes et inférieures. Un nombre croissant de gens souffraient de la faim. Durant les années 80, les banques alimentaires voient le jour en réponse au démantèlement des réseaux de sécurité sociale et leur nombre atteint plus de 400 dans les années 90. Au total, 150 000 citadins utilisent les banques alimentaires chaque année et reçoivent en moyenne 10 dollars EU de produits alimentaires chaque mois. Mais on a pris conscience que ces banques alimentaires nétaient que des mesures palliatives agissant uniquement au niveau des symptômes de la faim plutôt que sur ses causes réelles. Le FPC a pris la décision de faire évoluer les systèmes alimentaires, sociaux et de santé publique relevant dune logique de lurgence pour leur donner un rôle plus important, celui daméliorer lautonomie de la communauté ainsi que son capital social. Un exemple de ce programme du FPC est dénommé «De la ferme à la table». Il résulte dun partenariat entre les groupes communautaires et les agriculteurs de lOntario. Il existe trois modes de livraison de la nourriture: sous le label «Good Food Box», les familles peuvent acheter un carton de fruits et de légumes frais chaque mois, ou on peut acheter, à titre individuel, des fruits et des légumes sur les marchés communautaires et les vendre au niveau local ou encore, les membres de la communauté peuvent commander des fruits et des légumes dans les clubs dachats et se les faire livrer.
Le label «Good Food Box» (GFB) a été particulièrement efficient. Il a été finalisé pour des personnes qui désirent acheter des aliments frais, celles à faibles revenus, handicapées ou qui souffrent de problèmes de santé et/ou les personnes âgées. Entre 1 500 et 2 500 cartons ont été livrés en 1997, principalement aux clients à faibles revenus, incluant une proportion considérable de mères célibataires. Il y a eu des retombées sur divers aspects du système alimentaire. Environ 70 pour cent de ceux qui achètent les cartons de nourriture mangent plus de légumes, 21 pour cent en mangent une plus grande variété et 16 pour cent essaient, à présent, de nouveaux aliments. De même, plus de personnes ont pris en compte le précepte recommandant de manger cinq sortes ou plus de fruits et de légumes par jour. Au départ, un quart des aliments des banques alimentaires provenait des agriculteurs de lOntario; en 1996, cette part sest élevée à 95 pour cent. Plus intéressant encore, un nombre substantiel de bénéficiaires du GFB ont déclaré que le projet avait influencé leurs relations sociales. Plus dun cinquième ont affirmé que le projet avait développé leur sens communautaire. Dautres effets moins visibles du projet «Du champ à la table» ont été observés, notamment dans les écoles, où lon note une meilleure assiduité, moins de retards et une meilleure socialisation dans les salles de classe. Le programme «du champ à la table» concerne 10 000 personnes. Dautres bénéfices obtenus grâce au FPC sont une augmentation rapide du nombre de jardins communautaires, le soutien massif que le gouvernement provincial accorde à présent aux programmes dalimentation scolaire, et, à une échelle plus large, les effets bénéfiques sur les processus politiques. Ce programme a également conduit à un renouvellement de léconomie locale et dune large gamme dinstitutions et de secteurs, ce qui se traduit par une taxation plus écologique, la réforme du système de santé et celle de la politique agricole.
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Source: |
Rod MacRae, Conseil politique alimentaire <[email protected]> - <www.realfoodhome.net> |
En Allemagne, des schémas régionaux développés par les Länder (gouvernements régionaux) subventionnent les agriculteurs afin qu'ils ne dégradent pas l'environnement. En 1997, 200 000 agriculteurs ont adhéré à des projets qui couvrent 17 millions d'hectares, soit environ un dixième des terres agricoles. A ce jour, le meilleur accueil a été réservé à la gestion de pâturages extensifs, qui représentent environ 80 pour cent de l'ensemble des surfaces. Cependant, certains Etats ont réalisé d'importants progrès en direction d'une gestion positive de l'environnement.
Le schéma MEKA (Markentlastungs und Kulturlandschaftausgleich) dans le Baden-Würtemberg propose aux agriculteurs un menu technologique à la carte, qui leur rapporte des éco-points selon leur choix, chaque point leur rapportant 20 DM par hectare. Par exemple, la non-utilisation de régulateurs de la croissance végétale leur rapporte 10 points. Planter un engrais vert en automne rapporte six points, la non application de désherbants et lutilisation du désherbage mécanique rapporte cinq points, ramener le cheptel de 1,8 à 1,2 unités adultes par hectare rapporte trois points et le semis direct sur des sols sensibles à lérosion rapporte six points. Des mesures de protection directe de lenvironnement permettent dobtenir jusquà quinze points pour la réduction du cheptel dans des zones spéciales dintérêt scientifique et des points peuvent également être gagnés grâce à lélevage de races rares.
Le coût national du projet est partagé entre le gouvernement fédéral et le gouvernement régional, la Politique agricole commune (PAC) prenant en charge le reste dans le cadre de la réglementation agri-environnementale. En 1997, 102 000 agriculteurs ont souscrit au projet, pour une surface de 220 000 hectares dherbages, qui sont maintenant gérés de manière extensive, de 225 000 hectares de terres arables, également gérés de manière extensive, avec une proportion considérable sans utilisation de pesticides et de fertilisants, de 97 000 hectares de vignobles et de vergers protégés. Néanmoins, seulement 2 300 hectares font partie du projet ayant pour objectif la mise en place de mesures de conservation de la nature tels que de nouvelles plantations de haies ou la gestion des berges des cours deau. 14 000 hectares ont cependant été classés en agriculture biologique.
Dans la région de Hesse, 82 000 hectares sont concernés par le programme HEKUL (Hessisches Kulturlandschaftsprogramm ou programme du paysage culturel de la Hesse) qui recherche lextensification de lagriculture et encourage ladoption des technologies de lagriculture biologique. Dans la région de Rhénanie-Palatinat, le programme FUL (Förderprogramm Umweltschonende Landbewirtschaftung ou programme régional de gestion de lenvironnement) accorde des subventions pour la production biologique, pour les pratiques intégrées à faibles doses dintrants et pour la gestion extensive des herbages.
Source: Pretty (1998). La terre vivante
Le département de développement des bassins versants et de la conservation des sols de lEtat du Rajasthan a été créé en 1991 pour mettre en uvre une approche participative pour le développement intégré des bassins. Depuis les années 40, les niveaux des nappes deau souterraines avaient baissé de manière inquiétante, les forêts sétaient dégradées et les institutions communautaires sétaient affaiblies. Mais, malgré des dépenses considérables pour la conservation des sols, les résultats obtenus restaient insignifiants, ainsi que le soulignait Krishna: «les observations sur le terrain confirment un entretien quasi nul de la part des bénéficiaires». Le gouvernement du Rajasthan a reconnu la nécessité dimpliquer la population locale et il a facilité la mise en place de 15 000 groupes dutilisateurs de bassins. Ainsi des pratiques dagriculture durable sont utilisées sur trois millions dhectares (et plus probablement de 10 à 15 millions dhectares). Ces technologies à faibles coûts sont basées sur des connaissances autochtones et biologiques. Elles comprennent des bandes de vétiver et dautres graminées plantées en courbes de niveau, des bourrelets et des cultures en courbes de niveau, des bourrelets autour des parcelles, des chenaux de drainage aménagés et la régénération des terres communales avec des arbustes et des arbres. Les rendements de sorgho et de millet ont plus que doublé, passant de 400 à 875 kg/ha (sans utilisation de fertilisants) et les bandes enherbées ont amélioré les rendements de 50 à 200 pour cent, les faisant passer de 450 à 925 kg/ha.
Source: FAO
LAdministration nationale de lirrigation du gouvernement philippin (NIA) cherche à constituer des associations dusagers de lirrigation (IAs) pour assurer le bon fonctionnement et lentretien des systèmes dirrigation à petite échelle dont la construction a bénéficié de laide du gouvernement. Ces petits périmètres couvrent en général moins de 1 000 hectares, mais représentent environ la moitié des terres irriguées du pays. Le reste appartient au gouvernement et fonctionne sous son autorité.
Dans les années 60 et 70, lapproche de la NIA fut clairement non participative. Des ingénieurs ont planifié les infrastructures et les systèmes ont été construits avec seulement quelques consultations locales et formelles. Les systèmes se sont souvent dégradés du fait que les agriculteurs étaient peu motivés pour prendre des responsabilités en matière de gestion. Durant les années 80, la NIA a finalement adopté une approche participative de lirrigation.
Des changements fondamentaux ont été opérés par la NIA pour développer cette nouvelle approche participative. Il sagit de limplication dans les projets danimateurs communautaires motivés, majoritairement des femmes, de la réorientation des procédures dévaluation afin de prendre en compte la diversité des conditions locales et de la responsabilisation des ingénieurs en charge de lirrigation au niveau régional afin de les charger de la coordination générale des programmes dirrigation dans leurs provinces respectives, ainsi que du renforcement de la responsabilité de lagence vis-à-vis des usagers.
Lapproche concernant le renforcement institutionnel a également subi un changement radical. Dans lapproche non participative, on attendait des agriculteurs quils se regroupent en associations dusagers (IAs) peu de temps avant que la construction du système dirrigation ne commence, au moment où la NIA réunissait les agriculteurs pour lélection de leurs représentants. Lapproche participative, au contraire, met laccent sur limplication des agriculteurs plusieurs mois avant que la construction ne commence. Des animateurs communautaires à plein temps résident sur le site du projet et préparent la population locale à travailler avec les ingénieurs. Les animateurs continuent également à travailler avec lassociation pendant au moins deux cycles de culture après la mise en place du système dirrigation amélioré. Les agriculteurs sont à présent impliqués dès le début du projet, depuis la conception du système dirrigation proposé jusquà la construction des barrages, des canaux, et des autres infrastructures. Une fois la construction terminée, la NIA transfère lentière autorité concernant la gestion du système aux IAs.
La NIA a développé ses approches participatives grâce à une expérimentation qui a demandé du temps. Cela signifie que des actions participatives et non-participatives ont eu lieu simultanément, ce qui a permis dévaluer limpact du facteur « participation » seul. Les effets immédiats comprennent une augmentation des rendements en riz de 19 pour cent pendant les saisons des pluies et de 16 pour cent durant les saisons sèches, un accroissement des contributions des agriculteurs aux coûts qui passent de 54 à 357 pesos/ha, une augmentation de 27 à 83 pour cent de lefficience des systèmes dirrigation là où les suggestions des agriculteurs ont été prises en compte lors de la conception, une diminution de moitié du nombre de canaux construits par la NIA et ensuite abandonnés ou déviés, une augmentation du nombre de membres de lassociation présents à la cérémonie de passation de lautorité, une augmentation en lespace dun an de 50 à 82 pour cent des paiements annuels de lamortissement, une augmentation du temps consacré par les agriculteurs à lentretien communautaire des systèmes et une capacité améliorée des IAs à gérer leurs propres affaires.
Source: Administration nationale de lirrigation des Philippines
Les îles Salomon constituent un archipel denviron 900 îles, dont la plupart sont difficiles daccès, et elles disposent de services et de ressources limités. Le mode de vie des communautés rurales a longtemps été basé sur lagriculture vivrière, la pêche artisanale, lexploitation forestière et le commerce intercommunautaire. Lexpansion de léconomie de marché et lexploitation croissante des ressources naturelles (les cultures commerciales, le bois, le thon) par des entrepreneurs étrangers ont favorisé lexode vers les zones urbaines, un état de sous-développement pour les habitants des zones rurales et des conflits sociaux. Un accès difficile au crédit, le manque déquipements et de matériel et une capacité technique déficiente ont limité le développement dinitiatives de la part des petits agriculteurs et de celui dentreprises rurales. Au début des années 90, trente associations rurales nommées «Centres de formation ruraux» ou RTC se sont formées spontanément. Elles sont basées sur des relations communautaires, culturelles et/ou religieuses. Leur principal rôle a été de fournir du conseil, de lassistance technique, dassurer une formation professionnelle et de faciliter laccès au crédit.
Les trente RTC (dautres ont rejoint lassociation pendant la mise en uvre du projet) ont soutenu 10 à 30 initiatives dans leur domaine dintérêt. Certains stagiaires sont eux-mêmes devenus des formateurs et ont trouvé des emplois à temps partiel dans les RTC. De nouveaux équipements et circuits commerciaux ont été mis en place dans les zones de production, en créant ainsi de nouvelles opportunités demplois. En conséquence de quoi, de nouvelles succursales de la Banque du développement ont été créées par la suite dans certaines provinces particulièrement dynamiques.
Les impacts les plus significatifs ont été les suivants:
® une lutte renforcée contre la pauvreté grâce à lauto-emploi et la création dentreprises, en limitant lexode vers les zones urbaines;
® une gestion durable des terres, grâce à laide à la conception et à la mise en uvre dinitiatives sinspirant du savoir-faire traditionnel autochtone, grâce à ladoption de techniques préservant lenvironnement et prenant en compte les ressources disponibles localement et les besoins sociaux des communautés concernées;
® une agriculture durable grâce à une utilisation plus intensive et plus diversifiée des terres communautaires, avec de meilleurs profits pour les communautés locales. Ainsi, lon observe le renforcement du rôle des responsables locaux, une valeur ajoutée aux produits locaux due à une participation aux processus de transformation et de commercialisation, un développement social grâce à de nouvelles facilités pour le commerce et les services;
® des retombées positives du développement rural pour les femmes grâce à ladoption de nombreuses initiatives en leur faveur, les interventions les plus fréquentes en faveur des femmes concernant la couture, la préparation des aliments et lélevage de volailles;
® le partenariat avec les organismes non-gouvernementaux (ONG). Les RTC sont des ONG basées sur la communauté, elles participent directement à la définition de leur propre rôle et de leurs activités et interviennent dans les processus de prise de décision;
® le financement du développement durable. Le schéma de crédit enregistre un taux de réussite satisfaisant, avec des modalités de remboursement des prêts généralement adaptées au type dinvestissement.
Aux Etats-Unis, ces dernières années ont vu lapparition à grande échelle de marchés dagriculteurs. Depuis la loi fédérale sur la commercialisation directe agriculteurs-consommateurs de 1976, les services dEtat de la vulgarisation agricole ont pour mission de promouvoir le développement et lexpansion de la commercialisation directe. Pour accroître la vente directe au public, les groupes dagriculteurs et de consommateurs ont mis en place de nouveaux marchés qui se tiennent une à deux fois par semaine. Aux Etats-Unis se tiennent au moins 2 400 marchés dagriculteurs, impliquant comme vendeurs plus de 20 000 agriculteurs dont le tiers ne possèdent pas dautre point de vente. Chacun de ces marchés est unique, proposant une gamme étendue de légumes frais et biologiques, de fruits et dherbes aromatiques, ainsi que des fleurs, du fromage, des produits cuits au four et parfois des fruits de mer. Chaque semaine, environ un million de personnes, dont 90 pour cent vivent dans un rayon de 11 kilomètres autour du marché, fréquentent ces marchés dagriculteurs. Le chiffre daffaires annuel avoisine le milliard de dollars EU.
Les bénéfices générés par ces marchés dagriculteurs sont considérables. Ils améliorent laccès aux produits alimentaires locaux; ils augmentent les bénéfices des agriculteurs et ils contribuent également à la dynamique de la vie communautaire et à la formation du capital social, en rassemblant régulièrement la population. Les consommateurs se rendent également compte de la meilleure qualité des produits et de leurs prix moins élevés que dans les supermarchés. Une recherche conduite sur quinze marchés de ce genre en Californie a montré que les produits étaient de 34 pour cent moins chers que dans les supermarchés. Les contributions à léconomie locale sont considérables. Un marché dagriculteurs à Madison, dans lEtat du Wisconsin, rapporte 5 millions de dollars EU à léconomie locale chaque année; un autre à Santa Fé, dans lEtat du Nouveau Mexique, rapporte un supplément de 750 000 dollars EU aux systèmes agricoles et alimentaires environnants.
Il apparaît également évident que les marchés dagriculteurs ont un impact très positif sur les autres entreprises et commerces locaux, dans la mesure où ils augmentent le flux des piétons et la fréquentation des commerces. Il ny a aucune preuve dun impact négatif sur le chiffre daffaires de ces autres négoces. Les marchés dagriculteurs mobilisent des ressources pour stimuler dautres fonctions importantes de la communauté et ils en contribuent, notamment, à la formation du capital social. A Los Angeles, par exemple, le marché Encino est sponsorisé par une organisation daide aux personnes âgées et une partie de ses bénéfices revient aux services de santé. Les marchés tenus par la Coalition Contre la Faim de Géorgie (Georgie Hunger Coalition) permettent aux fermiers noirs de la Géorgie du Sud de vendre leurs produits à 300 ménages des quartiers noirs dAtlanta. A la Nouvelle Orléans, les marchés vietnamiens proposent une large gamme de légumes asiatiques et de canards élevés sur 16 hectares de terres incultes qui ont été réhabilitées.
Source: <http://www.usda.gov> - <http://attra.ncat.org/attra-pub/farmmrkt.html>
Comme un grand nombre d'autres pays d'Asie, le programme national IPM de l'Inde utilise des «écoles de terrain pour agriculteurs» (ETA), pour former ces derniers aux connaissances et à la pratique de l'agroécologie. 77 000 agriculteurs ont été formés dans 2 600 ETA sur le riz, le coton, la canne à sucre et les oléagineux. Après les stages en ETA, plus de 12 400 démonstrations ont été mises en place pour diffuser les concepts et les pratiques de l'IPM. Les ETA servent également à diffuser des connaissances sur les gestions du sol, de l'eau et des nutriments. Au Tamil Nadu, par exemple, les agriculteurs font des essais sur les plantations en ligne, l'espacement des semis, les bio-fertilisants (Azospirillum, Azolla), l'emploi du fumier organique et celui des fertilisants de base. L'adoption par les agriculteurs d'agents de contrôle biologique des ravageurs (par exemple, le Trichogramme, le neem) entraîne une baisse de l'utilisation de pesticides conventionnels de 50 pour cent en moyenne. Les revenus ont augmenté de 1 000 à 1 500 roupies en moyenne par hectare et les rendements du riz ont augmenté de 250 kg/ha.
Source: Kenmore (1999)
En 1986, un décret présidentiel a interdit 56 marques de pesticides jusque là utilisés pour le riz et a créé un programme national IPM ayant pour objectif de transformer les agriculteurs en experts dans leurs propres champs par le biais de la mise en place des «Ecoles de terrain pour agriculteurs» (ETA). A ce jour, un million dagriculteurs ont assisté à près de 50 000 stages de formation, ce qui représente la plus forte participation de tous les pays asiatiques. Le programme est financé par la FAO, la Banque mondiale et les services de coopération des Etats-Unis. Il fonctionne dans 12 des 26 provinces du pays, y compris les six provinces où la production de riz est la plus importante. Les impacts ont été considérables; une étude réalisée sur 2 000 agriculteurs a révélé que les rendements du riz ont augmenté de 0,5 tonne à lhectare en moyenne et que leur variabilité interannuelle a diminué. Dans le même temps, le nombre dapplications de pesticides a chuté de 2,9 à 1,1 par saison et lemploi des pesticides interdits a notoirement diminué. En moyenne, un quart des agriculteurs nemploie plus de pesticides, cette proportion passant à la moitié dans certains villages. Plusieurs ETA ont continué à être actives sous la forme de groupes IPM, organisant des réunions pour discuter des problèmes des agriculteurs, pour surveiller les populations de ravageurs et de prédateurs sur les terres de leurs villages, pour mener de larges campagnes afin de contrôler la population des rats, pour diffuser lIPM dans les villages voisins et pour faire fonctionner des programmes dépargne et de crédit.
Source: Kenmore (1999)
Le projet intégré constitue un programme vulgarisant le IPM qui fonctionne dans une grande variété de zones agro-écologiques du Sri Lanka. Il est mise en uvre par Care International avec la participation financière de la Communauté européenne et du DFID. Le projet sappuie sur les «Ecoles de terrain pour agriculteurs» (ETA) pour promouvoir la gestion intégrée de ravageurs (IPM) et a formé 4 300 agriculteurs aux méthodes de production du riz et des légumes. Environ 55 000 foyers agricoles ont jusquici adopté lagriculture durable sur 33 000 hectares, entraînant dimportantes réductions dans lusage des pesticides, celles-ci passant de 2,9 à 0,5 applications par saison pour le riz. Les rendements ont augmenté de 12 à 44 pour cent pour le riz et de 7 à 44 pour cent pour les légumes, selon les régions du pays.
Source: Jones (1999)
Pendant les huit dernières années, des chercheurs travaillant avec lInstitut international de recherche sur le Riz, le Ministère de lagriculture et du développement rural vietnamien et le Collège dagriculture de lEtat de Visayas aux Philippines ont été engagés pour participer à une initiative unique (et qui fut couronnée de succès) visant à rendre la production de riz plus durable dans le Delta du Mékong au Vietnam. Au début des années 90, des enquêtes avaient révélé une utilisation élevée dinsecticides par les agriculteurs, particulièrement contre les larves des insectes phyllophages qui provoquaient une défoliation très visible des plantes. Les agriculteurs pensaient que ces dommages apparents entraînaient des pertes de rendement, mais les chercheurs ont découvert que la défoliation durant le stade de la croissance végétative du riz réduit rarement les rendements. En fait, lutilisation dinsecticides contribuait probablement davantage à tuer les insectes utiles et à provoquer lapparition de ravageurs secondaires.
Grâce à une campagne médiatique innovatrice sappuyant sur les «Ecoles de terrain dagriculteurs» (ETA), les agriculteurs de la province de Long Am ont été encouragés à tester le slogan didactique qui dit que «lépandage pour le contrôle dinsectes plieurs de feuilles pendant les quarante premiers jours suivant lensemencement nest pas nécessaire». La campagne a distribué 300 000 prospectus et 35 000 posters, organisé 1 390 démonstrations et diffusé 1 550 fois une fiction radiophonique; 97 pour cent des 20 000 agriculteurs de la zone en question et 82 pour cent de ceux de lensemble de la province ont reçu le message, soit un total de 172 000 agriculteurs. Deux ans et demi après la campagne, le nombre dépandages dinsecticides est passé de 3,35 à 1,56 épandages par agriculteur et par saison. La perception de la question par les agriculteurs a considérablement changé. 77 pour cent ont arrêté les épandages au début de la saison et 20 à 30 pour cent ont intégralement arrêté lapplication dinsecticides.
Dautres provinces du Delta du Mékong ont adopté cette approche et leurs campagnes ont sensibilisé 92 pour cent des 2,3 millions dagriculteurs qui ont maintenant réduit la fréquence dépandage à un seul par saison (soit une réduction de 70 pour cent). Les rendements de riz nont pas varié durant cette période, se maintenant aux environs de 4 tonnes/ha. Les chercheurs ont conclu que ces deux interventions, les «écoles de terrain dagriculteurs» (ETA) conduisant à une meilleure compréhension de la question de la part des agriculteurs et la campagne médiatique vulgarisant les nouvelles pratiques, jouent un rôle complémentaire dans le changement des perceptions et des pratiques des agriculteurs. Les chercheurs explorent à présent la possibilité de développer des conseils techniques ciblés pour les autres phases du cycle végétatif du riz, car le public potentiel constitué par les producteurs de riz en Asie dépasse 200 millions dagriculteurs.
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Source: |
K.L. Heong, Institut international de recherche sur le riz, MCPO Box 3127, Makati City 1271, Philippines <[email protected]> |
Le labour zéro (semis direct) a connu une diffusion considérable chez 200 000 agriculteurs dans les deux Etats méridionaux du Paranà et du Rio Grande do Sul. Cette technique a été diffusée dans le cadre de 2 000 micro-bassins hydrographiques (microbacias) dans l'Etat de Paraná et de 455 dans l'Etat de Rio Grande do Sul. En 1999, la superficie totale sous labour zéro était de 10,5 millions d'hectares. Cette superficie était de 700 000 hectares en 1990. Ces agriculteurs sont organisés en 8 000 clubs des «amis de la terre», qui sont eux-mêmes organisés aux niveaux local, communal, intercommunal et national.
Le modèle du labour zéro est différent de celui adopté dans les pays industrialisés, en particulier aux Etats-Unis, du fait que lengrais vert, les cultures de couverture et les légumineuses ont été intégrés dans les rotations, réduisant ainsi le besoin davoir recours aux désherbants pour contrôler les mauvaises herbes. Les principaux impacts au niveau de la ferme concernent les rendements des cultures, la qualité du sol et sa capacité de rétention en eau, la demande de main-duvre et lutilisation réduite de produits dérivés du pétrole (qui diminue de 40 à 70 pour cent). Le rendement du maïs a augmenté de 67 pour cent, passant de 3 à 5 tonnes/ha en dix ans, et celui du soja de 68 pour cent, passant de 2,8 à 4,7 tonnes/ha. Récemment, cette technique a retenu lattention du fait de ses effets remarquables sur la séquestration du carbone dans la matière organique des sols. Ce nouveau puits à carbone contribue à compenser les processus qui produisent le changement climatique actuel. Le changement conceptuel clé dans ce programme de labour zéro a été le passage dune approche en termes de conservation du sol (basée sur la mise en place de structures physiques) à une approche en termes de restauration et damélioration du sol (basée sur des interventions biologiques). Le maintien en place de la couverture du sol a des effets bien plus importants que la simple prévention de lérosion des sols par la construction de terrasses ou de structures interceptant le ruissellement. Il se traduit par des bénéfices pour les agriculteurs comme pour lenvironnement. Et comme John Landers (1999) la souligné: «Le labour zéro a été un facteur déterminant de la transformation dune approche descendante et dirigiste des services fournis aux agriculteurs en une approche participative et ascendante basée sur lexploitation agricole».
Source: John Landers <[email protected]>
Le projet de vulgarisation participative (MAFE) travaille avec environ 70 000 agriculteurs et sur 4 200 ha pour promouvoir ladoption de différentes pratiques agro-forestières dans les exploitations agricoles. Ces pratiques comprennent i) le semis de Tephrosia vogelii, de pois cajan et de Sesbania sesban dans la culture du maïs afin daméliorer la fertilité du sol; ii) la culture intercalaire darbres (ex: Faidherbia, Acacia polycantha, A. galpinii); et des pratiques de conservation du sol et de leau, particulièrement des cordons enherbés en courbes de niveau.
Le projet utilise des approches participatives pour mettre en rapport un grand nombre dorganisations gouvernementales et non-gouvernementales avec les agriculteurs, afin que ces technologies soient bien adaptées aux conditions locales. Les agriculteurs sont formés dans des associations dagriculteurs qui peuvent ensuite bénéficier de lassistance dorganismes extérieures pour tel ou tel service. Le projet a formé les formateurs dagriculteurs, qui transmettent leur savoir-faire à leurs confrères. Comme résultat des dynamiques sociales et grâce aux nouvelles technologies, les rendements du maïs sont passés de 700 kg/ha à 1 500-2 000 kg/ha. Les agriculteurs sont devenus moins dépendants des fertilisants (dont la plupart sont trop chers pour les petits agriculteurs) et le projet indique que davantage de ménages bénéficient dune meilleure sécurité à la fois en matière dalimentation et de bois de chauffe. Environ 6,98 millions darbres ont été plantés en 1999 par 1 155 913 ménages et le projet a pour objectif de réduire la pression sur la forêt naturelle au fur et à mesure que les arbres plantés grandissent.
Source: Zwide Jere, projet MAFE
Les écotaxes ou taxes environnementales visent à transférer le poids des charges fiscales qui pèsent sur les «biens» économiques, tels que le travail, vers des «maux» affectant lenvironnement, tels que les déchets et la pollution. Actuellement, les prix du marché pour les intrants agricoles et les produits ne reflètent pas lensemble des coûts de la production agricole. Les taxes environnementales ou la taxation de la pollution cherchent à internaliser certains de ces coûts, en incitant les individus et les entreprises à utiliser les ressources de manière plus efficace. De telles taxes vertes offrent lavantage du «double bénéfice» en réduisant les dommages causés à lenvironnement, plus particulièrement les pollutions diffuses, tout en favorisant le bien-être social. Une idée reçue largement répandue veut que la taxation environnementale étouffe la croissance économique. De plus en plus dobservations empiriques portant sur les coûts de la mise en conformité par rapport aux réglementations environnementales mettent en évidence que celles-ci nont quun impact insignifiant sur la compétitivité globale des entreprises ou des pays; ces observations laissent même supposer que des réglementations environnementales ont amélioré la compétitivité et lemploi.
Bien quil y ait une grande variété de taxes et dimpôts environnementaux dans les pays dEurope et en Amérique du Nord (par exemple, des taxes sur le carbone ou sur lénergie, des taxes sur les CFT, des taxes sur le sulfure et sur le NOx, des taxes différentielles sur les carburants selon quils sont avec ou sans plomb, des taxes sur lenfouissement des déchets, celles portant sur les prélèvements dans les nappes, des taxes sur les eaux usées), les taxes environnementales nont pas été étendues à lagriculture. Une exception notable est constituée par la taxe sur les pesticides au Danemark, en Finlande, en Suède et dans plusieurs Etats des Etats-Unis, la taxe sur les fertilisants en Autriche (1986-94), en Finlande (1976-94), en Suède et de nouveau dans plusieurs Etats des Etats-Unis et des taxes sur les fumiers en Belgique et aux Pays-Bas.
Lidéal pour une taxe sur les pesticides est dimposer les coûts les plus élevés aux produits les plus nuisibles à lenvironnement et à la santé humaine. Cependant, il ny a pas de méthodologie acceptée par tous pour classer les risques potentiels. Il existe plusieurs options, incluant des systèmes de regroupement des pesticides en classes dégal impact, et une taxe correspondant à leur valeur, à leur poids, à leur prix ou imposé sur la base de leur utilisation. Une question importante concerne le comportement des agriculteurs après létablissement dune taxe sur les pesticides. En particulier, lutilisation des pesticides baissera-t-elle si leur prix augmente? Il est important de connaître lélasticité de la demande selon la variation du prix pour préciser les effets environnementaux. Des estimations venant des Pays-Bas, de la Grèce, de la France, de lAllemagne, du Danemark et du Royaume-Uni, situent cette élasticité à des valeurs comprises entre -0,2 et -0,4, valeurs et pouvant aller dans quelques cas jusquà -0,7 à -1,0. Ceci semble signifier quun grand changement de prix est nécessaire pour que les agriculteurs changent leurs pratiques agricoles, une demande rigide réduit lefficacité environnementale, bien quelle soit bonne pour générer les revenus.
Mais plusieurs raisons permettent de croire que lélasticité est probablement plus élevée. En premier lieu, la demande est rigide lorsque lon suppose que laugmentation des prix sera rapidement annulée. Mais si les agriculteurs acceptent lidée que des prix plus élevés incluant les taxes environnementales seront maintenus, alors de nouveaux changements de comportements peuvent avoir lieu. En deuxième lieu, un ensemble équilibré de taxes associé à des mesures normatives, des conseils et des mesures incitatives peut améliorer leffet de variations des prix. En dernier lieu, au fur et à mesure que linnovation progresse, de nouvelles options dagriculture durable deviennent accessibles aux agriculteurs, favorisant ainsi des changements supplémentaires.
Là où des taxes ont été instaurées, elles ont été définies en fonction des prix de vente ou du poids de principes actifs utilisés. Ces taxes varient de 0,7 pour cent du prix de vente (Etats-Unis) jusquà 36 pour cent (Danemark) et ont différents effets - au mieux une réduction de 65 pour cent de lutilisation de pesticides en Suède depuis 1985. Les ressources collectées par ces taxes varient de 59 millions de dollars EU par an aux Etats-Unis (dont 24 pour cent pour la seule Californie) à 20 millions de dollars EU en Norvège et 1,5 millions de dollars EU en Suède. Des taxes sur lutilisation des fertilisants ont été mises en place dans de nombreux pays et sont actuellement de lordre de 0,1 à 0,4 dollars EU par kg dazote, de phosphore et de potassium en Autriche, en Norvège et en Suède. Elles sont plus basses aux Etats-Unis, où elles varient de 0,0006 à 0,02 dollars EU par kg dazote dans plusieurs Etats. La plupart des personnes sont daccord pour affirmer que les taxes qui ont le plus deffets sur lenvironnement sont celles qui sont associées avec dautres politiques (conseils, subventions et réglementations) et dont le produit est affecté à des objectifs analogues, les revenus collectés étant investis uniquement dans la promotion dune agriculture plus durable.
Source: Pretty (1998); Ekins (1999)
L'un des meilleurs exemples de partenariats ruraux vient d'Australie, où une expérimentation sociale remarquable fonctionne depuis les années 80 au niveau national. L'organisation «Sauvegarde des terres» encourage les groupes d'agriculteurs à travailler ensemble avec le gouvernement et avec les communautés locales pour résoudre un grand nombre de problèmes environnementaux et sociaux. Fin 1981, il y avait 4 500 groupes locaux en activité, regroupant plus de la moitié des ménages agricoles australiens. Pour un pays où les agriculteurs individuels sont fiers d'être combatifs et capables de résoudre leurs problèmes par eux-mêmes, ce fait traduit la reconnaissance extraordinaire par l'ensemble de la société de ce que certains problèmes ne peuvent être résolus que par le biais d'une action commune.
Les groupes de «Sauvegarde des terres» ont été créés pour faire face aux différents problèmes qui affectent la communauté dans son ensemble. Ces groupes traitent les problèmes de ravageurs, ceux posés par les mauvaises herbes, par la prolifération de lapins et par le déclin des arbres. Ils interviennent sur les questions de régénération des dunes, d'agriculture conservatrice, de la salinisation du sol, de préservation de la faune, de rentabilité des terres et de la gestion des affaires. Un exemple de ces groupes est celui du bassin hydrologique de Morbinning situé dans la ceinture du blé de l'Australie occidentale. Le bassin de Morbinning comprend vingt familles sur 25 000 hectares de terres arables. Les agriculteurs ont formé ce groupe pour faire face aux problèmes communs, à savoir la forte augmentation de la salinité du sol, un drainage du sol insuffisant et des inondations périodiques. Ces problèmes peuvent seulement être traités dans le cadre d'une planification et d'une coopération avec et pour les exploitations agricoles. En huit ans, le groupe a créé 300 hectares de chenaux enherbés, traité 550 hectares de terres salinisées, planté 440 000 arbres, incluant 91 kilomètres de rideaux coupe-vent et 90 hectares d'arbres fourragers, installé 249 kilomètres de clôtures en fil de fer pour protéger le «bush» naturel; planté 460 hectares de cultures en bandes arborées et 80 hectares de prairies permanentes et il a installé 145 piézomètres pour mesurer la profondeur de la nappe phréatique. Le groupe a également joué un rôle pionnier dans l'amélioration d'exploitation agricoles locales, dans des domaines comme les semences oléagineuses, la réduction du labour, les engrais alternatifs, l'aération du sol, la floriculture, la plantation de bois de santal, les séjours à la ferme et les programmes de visites scolaires à la ferme.
Source: Pretty (1998) <http://www.landcareaustralia.com.au/default.htm>
En juillet 1995, le gouvernement du Gujarat a adopté une résolution annonçant un programme participatif de gestion de l'irrigation (PIM). Ce programme organise le transfert complet aux associations d'usagers de l'eau (WUA) de la responsabilité du fonctionnement et de l'entretien du système de canaux. Les canaux continuent à rester la propriété du gouvernement et les grandes réparations incombent au département de l'irrigation, mais la responsabilité du fonctionnement quotidien du système devient du ressort du WUA. La planification des cultures, la définition du tour d'eau et la fixation de son tarif, l'enregistrement des demandes en eau et le paiement par chaque adhérent du coût de l'eau consommée et l'imposition de sanctions aux payeurs défaillants sont de la responsabilité du WUA sous l'autorité du PIM. Une fois les réparations et la réhabilitation des ouvrages achevées, les réseaux de canaux sont transférés au WUA.
Pendant la phase pilote du programme PIM, treize projets ont été sélectionnés pour expérimenter la nouvelle approche et en tirer des enseignements. Ce programme met laccent sur la formation des membres des coopératives et sur le développement de liens entre les différents acteurs (les agriculteurs qui y participent, les ONG et le gouvernement). Les ONG mobilisent et organisent les agriculteurs pour créer une association dusagers de leau (WUA) et la guider pendant la mise en place et pendant les phases ultérieures. Cependant, lassistance technique et le suivi du Département de lirrigation restent un élément important. Les agriculteurs membres de lassociation en assurent la gestion et ils participent également aux dépenses initiales occasionnées par la réparation et réhabilitation des ouvrages dirrigation. Le fait que les ONG ont été particulièrement efficaces dans le développement dun esprit de coopération parmi les participants est largement reconnu.
Les résultats les plus importants concernent:
® la participation des agriculteurs sest développée graduellement grâce aux associations dusagers de leau (WUA), laccent étant mis sur le principe «apprendre en agissant» (ce concept est apparu lors de la mise en uvre du programme PIM);
® les prix de leau plus élevés pratiqués par les associations dusagers de leau, en comparaison avec ceux pratiqués par le gouvernement, ont déclenché des négociations qui ont apporté la preuve, à la fois la prise en charge de leurs affaires par les agriculteurs eux-mêmes et de la difficulté du processus dynamique et délicat de la fixation du prix de leau;
® limportance de la motivation dans un programme participatif et le rôle des ONG;
® les stratégies de phasage de la mise en uvre du programme ont donné des enseignements précieux pour sa réplication;
® lors de la mise en uvre du programme, limportance de prendre en compte la dynamique des castes et celle des différences de classe au sein de la société et, plus généralement, les différences au sein dun même village et entre villages différents;
® limportance et le rôle crucial du chercheur chargé dassurer le suivi de la mise en uvre du programme. Une recherche se déroulant parallèlement au programme sest avérée utile pour effectuer des corrections à mi-parcours.
Dans les lointaines régions du Nord-Pakistan, le programme d'aide rurale Aga Khan a contribué à mettre en place plus de 2 600 organisations villageoises ou de femmes, celles-ci regroupant 53 000 ménages. Les groupes villageois se sont d'abord organisés pour faciliter la construction d'un canal d'irrigation, d'une route ou d'un pont, ensuite pour aider les adhérents à épargner régulièrement de petites sommes d'argent et à créer ainsi un fonds de réserve. Au bout de quelque temps, ces groupes ont été capables d'épargner des sommes considérables, sous le contrôle et la responsabilité locales.
Dautres succès ont été signalés en Inde méridionale, où des ONG telles que Myrada, SPEECH et Pradan ont là aussi démontré lintérêt de petits groupes. Les pauvres navaient pas été gagnants pendant les nombreuses années où ils comptaient sur les banques et sur les coopératives locales pour obtenir du crédit. Quand ils ont commencé à travailler en petits groupes indépendants dont les membres pouvaient se faire mutuellement confiance, ils ont réalisé que non seulement largent était mieux géré, mais aussi que la responsabilisation des groupes se traduisait par un meilleur remboursement des emprunts, remboursements qui ne les préoccupaient pas outre mesure du temps où ils étaient membres dune coopérative. Ce qui est particulièrement intéressant dans les programmes, cest que 95 à 98 pour cent des emprunts ont été remboursés intégralement, alors que les banques nobtiennent que 20 à 25 pour cent de remboursement des emprunts dans les programmes de développement rural intégré.
Source: Pretty (1995)