CFS:2003/5-Sup.1


 

COMITÉ DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE MONDIALE

Vingt-neuvième session

Rome, 12-16 mai 2003

LE PROGRAMME DE LUTTE CONTRE LA FAIM


1. Le présent document a pour but de faciliter l’examen du Programme de lutte contre la faim par le Comité. La première ébauche du Programme de lutte contre la faim a été présentée en juin 2002 lors d’un événement collatéral du Sommet mondial de l’alimentation: cinq ans après, invitant toutes observations et suggestions. La deuxième ébauche tient compte de certains de ces commentaires et suggestions. Elle accorde une attention particulière au plan directeur pour la mise en oeuvre d’une action sur deux fronts et montre de quelle façon la lutte contre la faim est liée aux objectifs de développement du Millénaire.

2. Le Comité pourrait souhaiter approuver le Programme de lutte contre la faim afin d’accélérer la mise en oeuvre du Plan d’action du Sommet mondial de l’alimentation et d’atteindre ainsi l’objectif fixé, qui est de réduire de moitié, d’ici 2015, le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde.

3. Le Programme de lutte contre la faim est l’émanation du consensus international sur certaines des actions clés devant être engagées par la communauté internationale et les pays pris séparément. Ces actions sont tout à fait conformes au Plan d’action du Sommet mondial de l’alimentation de 1996. Le Programme se fonde sur la conviction que l’objectif peut être atteint dans un cadre de développement durable. Le Secrétariat de la FAO propose également le Programme comme un volet de la stratégie visant à atteindre les objectifs de développement du Millénaire. Le Programme de lutte contre la faim veut être une invitation programmatique à l’action, adressée à toutes les parties prenantes et acteurs s’occupant de ce problème, qui se garde bien de suggérer des mécanismes centralisés de gestion ou de coordination et ne recherche pas à mobiliser un complément de ressources pour un organisme ou programme particulier.

4. Le Programme prévoit une action sur deux fronts pour réduire la faim qui conjugue i) le développement agricole et rural durable visant à soutenir et à améliorer les moyens d’existence des catégories les plus démunies et les plus vulnérables et ii) des programmes ciblés destinés à renforcer l’accès direct à l’alimentation et à la nutrition des plus nécessiteux. Les deux lignes d’action se renforcent mutuellement: l’une crée des opportunités pour les groupes défavorisés afin qu’ils puissent échapper à la pauvreté et à la faim; l’autre leur offre une nutrition suffisante afin qu’ils puissent tirer parti de ces opportunités. Pour être pleinement efficace, cet investissement doit être accompagné de politiques qui encouragent des flux d’investissements privés complémentaires et permettent aux pauvres et aux affamés d’atteindre leur plein potentiel de développement tout en favorisant l’utilisation durable des ressources.

5. Une telle approche est justifiée par le fait que dans la plupart des pays en développement, plus de 70 pour cent des pauvres et des affamés vivent en milieu rural et dépendent, de façon directe ou indirecte, de l’agriculture pour leur subsistance. Cette approche est le moyen le plus efficace de réduire la faim de façon durable en créant des possibilités pour les ruraux. En outre, elle allège la pression exercée sur les villes par l’exode rural et peut ainsi atténuer la pauvreté et la faim dans les centres urbains.

6. Dans le cadre de cette action sur deux fronts, le Programme énonce cinq domaines prioritaires où une action urgente s’impose si l’on veut atteindre le but du Sommet mondial de l’alimentation (SMA), en précisant les estimations de coûts pour chacun d’entre eux. Le Programme estime qu’il faut des investissements publics supplémentaires de quelque 24 milliards de dollars EU par an pour relancer l’action visant à réduire la faim et atteindre le but du SMA d’ici 2015, alors que les bénéfices estimés se chiffreraient à au moins 120 milliards de dollars EU par an. Ces investissements publics sont répartis comme suit:

7. Il est à noter que ces estimations entendent fournir uniquement des ordres de grandeur et seront soumis à des recherches plus approfondies. En outre, il faut souligner que pour être pleinement efficaces, les investissements publics doivent être accompagnés de politiques qui stimulent des flux d’investissements privés complémentaires et permettent aux pauvres et aux affamés d’atteindre leur plein potentiel de développement tout en encourageant l’utilisation durable de la base de ressources.

8. De toutes les options envisageables pour partager les coûts d’investissements publics du Programme de lutte contre la faim, celle suggérée dans le document prévoit un partage à parts égales entre la communauté internationale des donateurs et les pays en développement bénéficiaires.

9. Toutefois, le Programme ne prévoit pas les considérables investissements complémentaires nécessaires, par exemple, pour créer des conditions de sécurité et de paix ou mettre en place des systèmes de gouvernement assumant des responsabilités à l’égard des membres les plus pauvres de la société, qui pourraient être tous deux déterminants pour garantir un meilleur accès à une nourriture suffisante. Il réaffirme néanmoins que, outre leur justification morale et humanitaire, les investissements axés sur la réduction de la faim créent des avantages intéressants au niveau économique, mais aussi sur le plan de la sécurité, et sont dans l’intérêt des pays riches comme des pays pauvres. Le Programme vise à garantir l’accès à la nourriture des populations les plus nécessiteuses, qu’elles vivent en ville ou à la campagne, mais l’investissement dans les capacités productives est limité aux communautés rurales.

10. Le Programme de lutte contre la faim constitue un élément central de la contribution de la FAO au Projet de développement du Millénaire et à la stratégie visant à atteindre les objectifs de développement du Millénaire. Il a également largement servi à la conceptualisation du volet agricole “EESAB” (eau, énergie, santé, agriculture et biodiversité), les cinq priorités avancées au Sommet mondial sur le développement durable. À mesure que le débat international et le Projet de développement du Millénaire prennent pied et que les liens avec les mesures nécessaires pour atteindre les autres objectifs de développement du Millénaire se précisent, l’orientation du Programme de lutte contre la faim et les estimations des coûts et des avantages seront affinées.

11. Pour réussir à éliminer la faim, il faudra des efforts résolus et concertés et des fonds suffisants de la part de toutes les parties désireuses et capables de contribuer à la réduction de la faim et de la pauvreté par le biais d’un développement agricole et rural durable. Ce document conclut par un appel à la création d’une Alliance internationale volontaire contre la faim, qui unirait les gouvernements, la communauté internationale, les organisations non gouvernementales et les organisations de la société civile ainsi que le secteur privé dans la lutte contre la faim.

12. Le Programme de lutte contre la faim sert de cadre de référence à l’assistance offerte par la FAO aux pays désireux d’élaborer des stratégies nationales de sécurité alimentaire particulièrement adaptées à leurs besoins et à leurs ressources. En même temps, la version finale du Programme de lutte contre la faim tirera profit des initiatives prises dans les pays, telles que le Programme brésilien “Faim zéro”, soutenu par la FAO (voir encadré ci-dessous).


Le Programme “Faim zéro” du Brésil

Lors de son élection à la présidence du Brésil, Luis Ignácio Lula da Silva a annoncé que son gouvernement accorderait la priorité absolue à l’éradication de la faim par la mise en oeuvre du Programme “Faim zéro”, Projecto Fome Zero (PFZ), un programme intégré ciblé sur les ménages les plus vulnérables. L’objectif du PFZ est d’éliminer la faim au Brésil en quatre ans. En adoptant une telle démarche de lutte contre la faim et la malnutrition, le Brésil montre l’exemple et inspirera beaucoup d’autres nations. Comme le Président Lula da Silva a déclaré récemment, “la lutte contre la faim dans le monde entier ne peut avoir véritablement lieu que lorsque la faim devient un problème politique, lorsque les décideurs commencent à s’inquiéter des gens affamés”.
 

13. Un certain nombre d’observations et de suggestions sur les première et deuxième ébauches du Programme ont été reçues, faisant ressortir certains thèmes récurrents. L’un d’entre eux était que le Programme de lutte contre la faim devrait être axé sur la réduction de la pauvreté en général, dont le développement agricole et rural ne représente qu’un volet. D’autres, toutefois, ont loué l’accent mis sur le développement agricole et rural. Selon un autre commentaire, on sait assez clairement ce qu’il faut faire pour combattre la faim, mais beaucoup moins comment le faire. On a aussi fait remarquer que les politiques et institutions n’étaient peut-être pas assez solides pour veiller à une utilisation rationnelle des fonds. D’aucuns se sont aussi inquiétés de l’impact des subventions à l’agriculture accordées par les pays développés sur la rentabilité des investissements agricoles dans les pays en développement. La question de donner aux pauvres, aux femmes en particulier, les moyens voulus pour qu’ils fassent valoir leurs droits a été un autre thème marquant. D’autres remarques ont souligné l’importance de conditions de travail saines et sans danger et de la lutte contre le Sida pour garantir la sécurité alimentaire. On a insisté sur l’urgence de communiquer plus d’informations sur les modalités de l’Alliance internationale contre la faim. Il a été aussi suggéré de changer le titre en: Programme de lutte contre la faim à l’appui des objectifs de développement du Millénaire.

14. Comme on ne peut présenter un examen exhaustif de tous les commentaires utiles reçus, le Secrétariat souhaite remercier toutes les personnes et organisations qui les ont adressés. Lorsque le débat du CSA sur ce document sera achevé, une version finale et officielle du document sur le Programme de lutte contre la faim tenant compte de ces commentaires et suggestions, ainsi que des conclusions de l’examen du CSA, sera publiée et comportera une modification du titre, conformément à la suggestion ci-dessus.