APRC/04/4


VINGT-SEPTIÈME CONFÉRENCE RÉGIONALE DE LA FAO POUR L’ASIE ET LE PACIFIQUE

Beijing (Chine), 17 - 21 mai 2004

SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL DE L’ALIMENTATION ET AU SOMMET MONDIAL DE L’ALIMENTATION: CINQ ANS APRÈS: DIMENSIONS RÉGIONALES

Table des matières



I. INTRODUCTION

1. La Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale et le Plan d'action adopté lors du Sommet mondial de l'alimentation (SMA) en 1996 ont mis en évidence l'engagement de la communauté internationale d'éradiquer la faim et la sous-alimentation, et d'assurer à tous les humains une sécurité alimentaire durable. Cette volonté a été réaffirmée dans les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) issus du Sommet du Millénaire, en 2000, dont le premier de appelle à l'élimination de l'extrême pauvreté et de la faim.

2. Une évaluation a révélé qu'au rythme où vont les choses, le but que s'est fixé le SMA – réduire de moitié dans le monde, d'ici à 2015, le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation chronique, notamment dans la région de l'Asie et du Pacifique – ne sera pas atteint. Des études récentes indiquent également que le taux de réduction de la pauvreté diminue depuis la fin des années 90, et donc que la situation exige une intervention urgente et concertée, à l'échelle mondiale, régionale et nationale. Il convient entre autres d'exploiter pleinement les ressources de la coopération internationale pour faire face aux problèmes communs, en particulier ceux qu'il est plus facile de résoudre au niveau des régions ou des sous-régions.

3. Au cours du Sommet mondial de l'alimentation: cinq ans après, qui s'est tenu à Rome en juin 2002, la communauté internationale a réitéré son engagement à réduire la pauvreté, et a promis de s'attaquer aux grands problèmes qui entravent les progrès: le manque de volonté politique et la pénurie de ressources. Dans la Déclaration clôturant cette rencontre, elle renouvelle les engagements pris dans le cadre du SMA de 1996 et prône l'accélération de la mise en œuvre du Plan d'action.

4. Selon les dernières estimations à l'échelle mondiale, durant la période 1999-2001, 798 millions de personnes souffraient de sous-alimentation dans les pays en développement, soit à peine 19 millions de moins qu'en 1990-92, la période de référence retenue par le SMA. En d'autres termes, la baisse annuelle moyenne depuis le Sommet est de seulement 2,1 millions, bien en deçà des 20 millions requis pour atteindre l'objectif fixé. De même, dans la région de l'Asie et du Pacifique, la réduction annuelle n'atteint que la moitié des 13 millions espérés.

5. Quelques pays ont toutefois réussi à faire reculer la sous-alimentation sur leur territoire. Depuis 1990-92 , le nombre de personnes sous-alimentées a baissé de 58 millions en Chine, le meilleur résultat à l'échelle mondiale. En Indonésie, au Viet Nam, en Thaïlande, au Brésil, au Ghana et au Pérou, la diminution est de 3 millions ou davantage, ce qui compense en partie l'augmentation totale de 76 millions observée dans les 47 pays où la situation ne s'est pas améliorée. En excluant la Chine et les six pays susmentionnés, cependant, l'on constate que le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde en développement a augmenté de près de 60 millions sur la période à l'étude.

6. Dans les pages qui suivent, on trouvera un aperçu des perspectives mondiales de la sécurité alimentaire et des dernières initiatives lancées par la FAO et la communauté internationale pour combattre la faim et la sous-alimentation dans la région de l'Asie et du Pacifique, une description des causes probables des écarts qu'on observe dans les résultats, et une série de mesures destinées à renforcer l'action qui permettra d'atteindre les objectifs énoncés pour la région dans le Plan d'action du Sommet.

II. PERSPECTIVES MONDIALES DE LA SéCURITé ALIMENTAIRE

7. La consommation alimentaire1, exprimée en kilocalories par personne et par jour (kcal/personne/jour), est la variable de base servant à suivre l'évolution de la situation alimentaire dans le monde. À l'échelle de la planète, la quantité de nourriture consommée par personne a augmenté considérablement. La consommation alimentaire nationale devrait d'ailleurs passer de 2 680 kcal en moyenne pour 1997-99 à 2 850 kcal en 2015 et à près de 3000 kcal en 2030. Cela signifie que le nombre de personnes sous-alimentées dans l'ensemble des pays en développement pourrait tomber de 776 millions (1997-99) à 610 millions en 2015 et 440 millions en 2030.

8. Selon les dernières estimations démographiques réalisées par les Nations Unies, le nombre d'habitants de la planète, qui s'établissait à 5,9 milliards en moyenne sur la période 1997 à 1999, devrait atteindre 7,2 milliards en 2015 et 8,3 milliards en 2030. La population mondiale est en hausse mais à un rythme plus lent. Le taux annuel de croissance démographique qui avait atteint 2,04 pour cent dans la seconde moitié des années 60 était retombé 1,35 pour cent trente ans plus tard. Poursuivant son déclin, il se situera à 1,1 pour cent en 2010-15, et à 0,8 pour cent en 2025-30. Or, les quelque 70 millions de personnes qui s'ajouteront à la population mondiale chaque année d'ici à 2015 naîtront dans les pays en développement.

9. Malgré la lenteur du recul de la sous-alimentation que ces prévisions supposent en nombres absolus, on aurait tort de minimiser l'importance des progrès accomplis à l'échelle mondiale. Une proportion de plus en plus forte de la population habitera dans des pays à consommation alimentaire moyenne, sinon élevée. En 2015, par exemple, 81 pour cent de la population mondiale vivra dans des pays où la consommation alimentaire moyenne dépassera les 2 700 kcal/personne/jour, comparativement à 61 pour cent actuellement et 33 pour cent au milieu des années 70. En 2015, 48 pour cent des êtres humains consommeront 3 000 kcal par jour (contre 42 pour cent aujourd'hui) et cette proportion atteindra 53 pour cent en 2030.

10. Le nombre de pays fortement touchés par la sous-alimentation (au moins le quart de la population) et qui dépendent le plus des politiques internationales d'aide diminuera fortement, passant de 35 en 1997-99 à 22 en 2015 et 5 seulement en 2030. Aucun de ces pays ne comptera alors parmi les plus peuplés, c'est-à-dire ceux de plus de 100 millions d'habitants en 1997-99. Ceux-là abriteront d'ailleurs une proportion de plus en plus faible de personnes sous-alimentées, soit 72 millions sur 440 millions en 2030, contre 250 millions sur 776 en 1997-99.

11. Croissance économique et réduction de l'incidence de la faim sont fortement corrélées. La première n'entraîne pas automatiquement la seconde, mais il est arrivé que des pays à croissance zéro ou, pire, à croissance négative, ne soient pas en mesure de réduire le nombre de leurs habitants sous-alimentés, et même le voient grimper. On peut dès lors s'attendre à ce que les taux de croissance affichés par de nombreux pays à faible consommation alimentaire où la sous-alimentation est répandue, restent jusqu'en 2015 en deçà des niveau requis pour faire baisser appréciablement la pauvreté.

12. Les plus récentes évaluations émanant de la Banque mondiale pour la période 2000 à 2015 indiquent que le rythme de croissance s'annonce lent pour les cinq premières années et plus rapide de 2005-2015. Le taux de croissance annuel du PIB par habitant devrait se situer à 1,9 pour cent en moyenne. Toutes les régions et tous les groupes de pays à l'exception de l'Asie orientale enregistreront des taux plus élevés, particulièrement les économies en transition, où le déclin sera renversé.

13. Ces hypothèses exogènes de croissance économique sont, avec la hausse démographique, les variables les plus déterminantes des estimations de la consommation alimentaire et, partant, de l'incidence de la sous-alimentation.

III. LA VOIE À SUIVRE

14. Quels sont les instruments et mécanismes les plus susceptibles de permettre la réalisation des objectifs du SMA et l'OMD en matière de réduction de la pauvreté? À l'ensemble des actions et programmes de la FAO, qui tous y contribuent directement ou indirectement, se sont ajoutés au cours des dernières années plusieurs projets d'envergure mondiale. Voici un court aperçu des plus récents, mis sur pied dans la foulée du SMA et du Sommet mondial de l'alimentation: cinq ans après. Certains sont reliés aux Objectifs du Millénaire pour le développement.

15. Le SMA a contribué à stimuler la réflexion sur les moyens d'affronter le problème de la faim chronique d'une manière inclusive et à répercuter ce point de vue sur les programmes, qu'ils soient d'envergure mondiale, régionale ou nationale. Les décideurs commencent d'ailleurs à se montrer plus réceptifs aux quatre idées de base qui suivent:

16. Les analyses conduites par la FAO montrent clairement que si la sous-alimentation ne régresse que lentement, c'est en partie à cause du niveau faible – ou déclinant – des ressources affectées à l'agriculture et au développement rural par les gouvernements nationaux et l'ensemble de la communauté internationale. Le plus urgent est de mettre en oeuvre un plan concret de soulagement de la faim qui soit à la mesure du problème. Cela revient à s'assurer, en premier lieu, que les pays ayant pris l'engagement politique ferme d'atteindre les buts du SMA et les Objectifs du Millénaire pour le développement sont capables de mobiliser les ressources requises tant à l'intérieur de leurs frontières qu'auprès des donateurs. La communauté internationale doit, de son côté, s'engager à soutenir ces pays dans leurs efforts.

IV. DIMENSIONS REGIONALES

Tendances et perspectives

17. La région de l'Asie et du Pacifique a réalisé des progrès économiques considérables au cours des trois dernières décennies. Au premier rang pour la croissance économique dans les années 80 et 90, (7,5 pour cent en Asie orientale et dans le Pacifique, 5,5 pour cent en Asie du Sud), son taux d'expansion agricole de 3 pour cent a été le plus rapide au monde. Sous l'impulsion de la Révolution verte engagée au milieu des années 60, la région a connu une transformation sans précédent dans les domaines de la production agricole et de la sécurité alimentaire. Bien que le nombre de ses habitants ait augmenté de 1,4 milliard entre 1965-66 et 1999-2000, la disponibilité alimentaire moyenne est passée d'environ 2 000 à 2 600 kcal/personne/jour sur la même période.

18. Parmi les cinq pays comptant plus de 100 millions d'habitants (Bangladesh, Chine, Inde, Indonésie, Pakistan), un seul continue d'enregistrer des niveaux de consommation alimentaire très faibles. Dans la région, seulement 5 des 19 pays en développement membres de la FAO affichent moins de 2 200 kcal/personne/jour de consommation moyenne. Entre 1979 et 1999, l'indice d'autosuffisance alimentaire est monté à 102 pour cent en Asie du Sud et à 95 pour cent en Asie orientale. Aussi, contrairement à la situation qui prévalait il y a trente ans, la famine généralisée n'est-elle plus considérée comme une menace réelle. L'Asie orientale et le Pacifique ont été les champions de la croissance économique et du recul de la pauvreté durant les années 90, avec un PIB par habitant en hausse de 75 pour cent et un taux de pauvreté extrême dégringolant de 31 à 16 pour cent. Le ralentissement de la croissance démographique dans les deux pays les plus peuplés du monde, la Chine et l'Inde, a également contribué à améliorer les disponibilités alimentaires par habitant de la région.

19. Selon les prévisions, la population des pays de la région Asie et Pacifique devrait passer de 3 192 millions en 1997-99 à 3 890 millions en 2015 et à 4 380 millions en 2030. Pendant ce temps, le taux de croissance démographique tomberait de 2,1 à 1,1 pour cent en Asie du Sud, et de 1,5 à 0,5 pour cent en Asie orientale. Il n'empêche qu'en nombres absolus, les augmentations annuelles demeurent fortes en dépit d'une chute très prononcée de la courbe démographique.

20. La Banque mondiale prévoit un déclin du nombre et de la proportion des Asiatiques gagnant moins d'un dollar EU par jour (seuil de pauvreté). En Asie du Sud, le nombre de pauvres chutera de 488 millions en 1999 à 264 millions en 2015, ce qui correspond à des taux respectifs de 36,6 et 15,7 pour cent. Durant la même période, l'Asie orientale et le Pacifique inscriront également des baisses (respectivement, 279 à 80 millions et 15,6 à 3,9 pour cent).

21. Les dernières prévisions de la FAO annoncent, parallèlement, une augmentation de la consommation alimentaire en Asie du Sud (de 2 403 kcal/personne/jour en 1997-99, à 2 700 en 2015 et 2 900 en 2030) de même qu'en Asie orientale (2 921 kcal/personne/jour en 1997-99, 3 060 en 2015, 3 190 en 2030). Les gains devraient s'avérer plus solides en Asie du Sud (20 pour cent) qu'en Asie orientale (9 pour cent) du fait d'une consommation alimentaire inférieure de 20 pour cent pour l'année de référence, et d'une progression plus lente de la consommation, à mesure qu'augmentent les revenus. En incorporant ces données aux estimations démographiques, on a évalué la consommation alimentaire dans les pays asiatiques en développement à 2 902 kcal/personne/jour pour 2015 et 3056 kcal/personne/jour pour 2030, comparativement à 2 708 kcal/personne/jour en 1997-99.

22. Les progrès au chapitre de la réduction de la pauvreté et de la consommation alimentaire devraient normalement se traduire par une incidence plus faible de la sous-alimentation dans les pays asiatiques en développement. En Asie du Sud, la proportion des personnes sous-alimentées dans la population déclinera progressivement de 24 pour cent (303 millions de personnes) en 1997-99 à 12 pour cent (195 millions) en 2015 et à 6 pour cent (119 millions) en 2030. En Asie orientale, les baisses équivalentes sont de 11 pour cent (193 millions), 6 pour cent (135 millions) et 4 pour cent (82 millions).

23. En 1990-92, le nombre des personnes sous-alimentées en Asie du Sud et en Asie orientale s'établissait respectivement à 289 et 275 millions. Selon les prévisions et dans l'hypothèse du maintien de conditions normales, l'objectif d'une réduction de moitié d'ici 2015 ne sera pas réalisé en Asie du Sud et le sera tout juste en Asie orientale. Pour que soient atteints les buts du SMA et les Objectifs du Millénaire pour le développement, les gouvernements nationaux devront commencer par multiplier leurs efforts concertés; le soutien de la communauté internationale sous forme de stratégies générales de développement demeurera cependant indispensable pour accélérer la croissance globale et atténuer la pauvreté dans les pays concernés.

L'après-Sommet mondial de l'alimentation

24. Les progrès accomplis à ce jour depuis le SMA confirment les prévisions ci-dessus. Selon les données les plus récentes publiées par la FAO, le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation dans les pays en développement d'Asie et du Pacifique est passé de 566,8 millions en 1990-92 (20 pour cent) à 505,2 millions en 1999-2001 (16 pour cent). Cette amélioration n'est pas négligeable mais le fait est qu'un habitant sur six dans la région n'a pas assez à manger aujourd'hui. En outre, l'Asie-Pacifique compte près des deux tiers des personnes sous-alimentées du monde en développement.

25. En nombres absolus, la baisse annuelle moyenne du nombre de sous-alimentés durant la période 1990-92 à 1999-2001 a été de 6,8 millions, la moitié seulement de l'objectif initial. Cela signifie que l'engagement pris pour 2015 ne pourra être respecté que si la baisse annuelle atteint les 15 millions de personnes dès maintenant; il faudra donc plus que doubler la cadence.

26. Ce but paraît très distant, surtout lorsqu'on sait que les avancées et les reculs enregistrés par un petit nombre de grands pays infléchissent les données et tendances décrites ci-dessus. À elle seule, la Chine a diminué de 58 millions le nombre de ses habitants sous-alimentés depuis la période de référence 1990-92. Durant ces neuf années, l'apport net de tous les autres pays de la région à cette réduction n'a pas dépassé 3,9 millions.

27. En 1990-92 et 1999-2001, la population sous-alimentée de l'Asie orientale et de l'Asie du Sud-Est a décru de 27 et 13 pour cent respectivement. En Asie du Sud en revanche, loin de décliner elle a augmenté quelque peu en nombres absolus; en pourcentage, la zone a progressé de quatre points, de 26 à 22, mais elle demeure la plus éprouvée de la planète, après l'Afrique sub-saharienne. Dans le plus grand pays en développement de la région du Pacifique, les deux valeurs, nombre et proportion, affichent une baisse.

28. Le tableau est encore plus sombre lorsqu'on prend en compte les tendances plus récentes. S'il est vrai qu'il y avait en 1995-97 quelque 70,4 millions de sous-alimentés de moins qu'en 1990-92, leur nombre s'est accru de 8,8 millions entre 1995-97 et 1999-2001. Ce renversement est attribuable au ralentissement des progrès en Chine, en Thaïlande et au Viet Nam et aux reculs enregistrés en Inde, en Indonésie et au Pakistan. Même en République de Corée et en Malaisie, le nombre des personnes souffrant de sous-alimentation a stagné ou augmenté.

Des expériences nationales probantes

29. Les progrès en matière de réduction de la faim à l'échelle des sous-régions ou des pays varient en fonction de nombreux facteurs et conjonctures interdépendants dont les principaux, au niveau national, sont la performance économique, la croissance et la qualité de la distribution dans le secteur agricole, les résultats de la lutte contre la pauvreté, la croissance démographique, les mesures destinées à faciliter l'accès à la nourriture, améliorer les soins de santé et la situation sanitaire et favoriser un contexte politique et institutionnel propice, et, enfin, le calme et l'ordre public. Dans bien des cas, les conjonctures politiques ou économiques extérieures, aussi bien que les catastrophes naturelles, ont fortement influé sur les résultats.

30. Trois des cinq pays où a baissé le nombre des habitants sous-alimentés durant les années 90 ont profité d'un taux de croissance économique dépassant 7 pour cent presque chaque année, de niveaux d'inflation et de chômage faibles, et de taux de change stables. Trois pays asiatiques, la Chine, la Thaïlande et le Viet Nam, s'étaient en outre dotés de programmes d'aide aux collectivités démunies; dans un de ces cas, les statistiques de pauvreté se sont temporairement détériorées par suite des difficultés économiques engendrées par la crise financière qui a frappé la région en 1997. On trouvera ci-dessous la description de quelques politiques fructueuses adoptées par ces pays.

31. La Chine enregistre depuis deux décennies un taux de croissance économique annuel sans précédent d'environ 10 pour cent. Son secteur agricole a progressé chaque année de 5 pour cent en moyenne entre 1982 et 1992, et de 3,7 pour cent de 1992 à 2002. Pour le rendre plus concurrentiel en vue de l'adhésion du pays à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), les autorités ont mis en œuvre de vastes réformes agricoles et commerciales. En 1999, on a lancé un nouveau cycle de restructurations visant à améliorer l'efficacité de la production céréalière, animale et piscicole et la qualité des produits, et à promouvoir la spécialisation régionale en fonction des potentiels géographiques. Le gouvernement a poursuivi l'implantation du Programme Huit-sept de réduction de la pauvreté et d'une série de mesures destinées à assurer une sécurité alimentaire aux groupes à faible revenu. D'après les rapports, l'incidence de la pauvreté serait passée de plus de 30 pour cent en 1978 à 2,5 pour cent en 2000. En outre, la Chine a renforcé ses dispositifs de préparation aux catastrophes naturelles et de secours d'urgence.

32. Le Viet Nam a de même fait de remarquables progrès sur le plan de la réduction de la pauvreté depuis une vingtaine d'années. Entre 1991 et 2001, son économie a progressé à un rythme rapide de 7 pour cent par année et la proportion de sa population sous-alimentée a baissé de 27 à 19 pour cent. La politique agricole et les réformes institutionnelles instaurées au cours de la même période ont donné aux cultivateurs la maîtrise des terres et leur a permis d'accroître leurs ventes sur les marchés tout en payant moins d'impôts agricoles. Conjugué aux investissements dans l'infrastructure et le développement en milieu rural, ce coup de barre a conduit à un taux de croissance agricole annuel de 6 pour cent, ce qui s'est traduit par une hausse encore plus rapide du taux d'autosuffisance céréalière: de 88 pour cent qu'il était en 1979-81, celui-ci a grimpé à 108 pour cent en 1989-91 et à 120 pour cent en 1997-99. Jusqu'à la fin des années 80, le Viet Nam a grosso modo équilibré ses exportations et importations agricoles; quelques années plus tard, il enregistrait déjà un fort excédent commercial. Sur le marché mondial, le pays s'est taillé une place parmi les plus grands exportateurs de riz et de café. Son bilan agricole a joué un important rôle de soutien dans la réduction la pauvreté et de l'insécurité alimentaire.

33. Les bénéfices liés à la croissance économique ne sont pas les seuls facteurs qui aient stimulé la production agricole et fait reculer la faim au Viet Nam. Une vigoureuse campagne d'éradication de la pauvreté axée sur l'amélioration de l'infrastructure rurale y a également contribué. Un programme de lutte contre la faim, mis en œuvre au niveau provincial en 1992 puis élargi à tout le pays en 1996, a par ailleurs engendré des progrès rapides vers les cibles nationales de sécurité alimentaire pour les ménages. Dans ce cadre, on a misé avec succès sur des projets de nutrition communautaire alliant la petite culture potagère et la formation nutritionnelle pour les familles avec enfants sous-alimentés.

34. S'agissant de la Thaïlande, pays qui a réussi, en moins d'une décennie (1982-91), à éradiquer la sous-alimentation de niveau moyen ou grave qui sévissait sur son territoire, la réussite est attribuable tant à des niveaux de croissance économique et agricole élevés qu'à l'efficacité des programmes gouvernementaux. Depuis la fin des années 70 jusqu'à la crise financière de 1997, la Thaïlande a connu un des plus forts taux de croissance économique au monde. Tandis que les secteurs non agricoles faisaient des pas de géant, créant des millions d'emplois pour des ruraux pauvres qui autrement auraient continué à dépendre de l'agriculture, le secteur agricole relevait ses propres défis en s'ouvrant à des technologies génératrices d'économies de main-d'œuvre, à la commercialisation et une diversification favorisant les produits à forte valeur ajoutée. La Thaïlande a le meilleur taux d'autosuffisance céréalière de toute l'Asie; à 142 pour cent (1997-99), il constitue un grand atout dans la lutte contre l'insécurité alimentaire.

35. Les effets positifs de la croissance économique sur la réduction de la faim sont renforcés en Thaïlande par la décision des pouvoirs publics d'inscrire la nutrition dans le programme de développement national. Dans ce cadre, la malnutrition est combattue par le biais d'un programme de développement rural communautaire comprenant des interventions multisectorielles intégrées afin d'améliorer la situation nutritionnelle tout en créant des occasions de gagner un revenu. Ces activités ne concernaient au début que le tiers le plus pauvre de la population mais se sont bientôt élargies à tout le pays.

36. Globalement en revanche, la sous-région de l'Asie du Sud n'a pas de telles réussites à rapporter. Elle comptait même en 1999-2001, en dépit d'une hausse de 5 pour cent de sa DEA par habitant, une population sous-alimentée plus nombreuse (293 millions) qu'en 1990-92 (291 millions). L'augmentation des disponibilités n'a manifestement pas profité également à toute la sous-région. Ce piètre résultat pourrait être imputable à la croissance plus lente du PIB, à une performance agricole irrégulière, à une forte incidence de pauvreté et aux difficultés d'accès aux denrées alimentaires liées à la petite taille des propriétés foncières, au manque d'eau, de crédit, d'engrais et d'autres ressources essentielles aux petits agriculteurs, à une répartition très déséquilibrée des actifs et des revenus et, finalement, à la pénurie d'emplois non agricoles dans les régions rurales. À tout cela il faut ajouter que le mandat du système public de distribution alimentaire, à savoir procurer des denrées de base à un prix raisonnable, se rétrécit depuis quelques années.

37. La population des pays de l'Asie et du Pacifique étant à 56 pour cent agricole, la situation alimentaire continue de dépendre en grande parties des aléas de la nature. La région est particulièrement sujette aux catastrophes naturelles. Leur incidence et leur impact ont d'ailleurs augmenté ces dernières années, menaçant gravement la sécurité alimentaire des populations et entravant les efforts de réduction de la sous-alimentation. Dans les années 90, on a signalé entre 150 à 263 désastres naturels par année: sécheresses, tempêtes, inondations, coulées de boue, tsunamis, tremblements de terre, incendies de forêt, éruptions volcaniques et autres ont dévasté la région à un rythme jamais vu dans le passé. En outre, les effets néfastes des changements climatiques sur les systèmes agricoles ne prennent pas nécessairement source dans la région; celle-ci subit aussi l'impact des phénomènes El Niño/La Niña qui naissent dans les mers lointaines.

38. Plusieurs pays asiatiques font face également à des problèmes climatiques et à des catastrophes naturelles. En Mongolie, la sécheresse et les hivers rigoureux qui se succèdent depuis plusieurs années ont dévasté le secteur de l'élevage. En 2003, des chutes de neige exceptionnellement abondantes ont tué 2,5 millions de bêtes, menaçant les moyens d'existence de près d'un quart de la population. Or, quelque 80 pour cent des habitants du pays, dont un grand nombre de pasteurs nomades, élèvent du bétail. Leurs activités représentent 90 pour cent de la production agricole. La crise alimentaire qui sévit actuellement en Mongolie souligne la vulnérabilité des régimes traditionnels de production pastorale, en particulier ceux de la population nomade qui sont la principale source de nourriture et de revenu dans les grands pâturages semi-arides peu propices à la culture céréalière. De même, la RPD de Corée connaît des pénuries alimentaires depuis plusieurs années en raison du mauvais temps.

39. Les pénuries alimentaires attribuables aux catastrophes naturelles ont été exacerbées par les calamités d'origine humaine qui ont marqué la période de l'après-Sommet. Les troubles intérieurs se poursuivent dans certaines régions de l'Asie, tandis que, dans d'autres, de nouveaux conflits ou désordres frontaliers ont éclaté, entraînant le détournement d'une partie des ressources limitées de développement vers les services de sécurité et se répercutant négativement sur l'activité économique. Les guerres et conflits internes provoquent en outre d'immenses pertes financières et dérèglent complètement les opérations de distribution et l'accès aux denrées alimentaires. Le redressement du secteur agricole après des affrontements armés peut s'avérer très lent et coûteux.

40. Le déclin séculaire des prix agricoles réels, l'instabilité persistante des cours mondiaux et les barrières commerciales sur les marchés d'exportation ont limité les avantages qu'auraient pu tirer les agriculteurs de l'Asie-Pacifique de la libéralisation des échanges. Parallèlement, la complexité des systèmes d'importation et des contingents tarifaires d'accès, conjuguées aux dépenses liées aux réglementations sanitaires et phytosanitaires, continuent d'entraver l'expansion des marchés. Ce sont les négociations commerciales multilatérales de Doha qui détermineront si les agriculteurs y trouveront leur compte.

41. Dans la Déclaration de Doha, les membres de l'Organisation mondiale du commerce se sont engagés à entamer des négociations visant à apporter « des améliorations substantielles de l'accès aux marchés; des réductions de toutes les formes de subventions à l'exportation, en vue de leur retrait progressif; et des réductions substantielles du soutien interne ayant des effets de distorsion des échanges”. Ils n'ont cependant pas réussi à s'entendre sur les modalités d'engagements futurs devant servir de base à l'établissement de leurs projets de listes détaillées par la Cinquième Conférence ministérielle de l'OMC tenue à Cancún en septembre 2003. En dépit de cette échéance ratée, l'appel des ministres à « continuer à travailler sur les questions en suspens avec un sens de l'urgence et une motivation renouvelés » laisse planer l'espoir que les obstacles qui ont empêché un accord à Cancún ne seront pas insurmontables.

Mesures essentielles pour atteindre l'objectif du Sommet

42. Les gens qui ont faim ne le font pas exprès. Ils ont faim parce qu'ils sont piégés par les contraintes économiques, sociales et politiques, ou encore parce qu'ils sont handicapés ou qu'il leur est arrivé malheur. Il faut mettre sur pied pour eux des politiques publiques multi-dimensionnelles qui les aideront à se libérer du cercle vicieux de la faim. Ces politiques doivent créer des possibilités pour les pauvres et les affamés, puis leur fournir les outils requis pour exploiter ces possibilités, et les protéger si l'infortune les a privés des moyens de se nourrir.

43. La sécurité alimentaire, c'est-à-dire l'accès de tous à tout moment à une nourriture saine et nutritive, en quantité suffisante, sans risque injustifié de restriction de cet accès, comporte quatre dimensions qu'il importe de ne pas perdre de vue dans toute stratégie d'aide:

44. Ces quatre éléments sont essentiels à la sécurité alimentaire. Il s'ensuit – et cette distinction est critique – que même si elle résulte d'une combinaison de facteurs individuels, familiaux, locaux, nationaux et même internationaux, la sécurité alimentaire se mesure à l'échelle de l'individu.

45. Les considérations qui précèdent montrent la nécessité, pour réduire la faim de manière durable, de mener une action sur deux fronts intégrant tous les aspects de la sécurité alimentaire et alliant la création de possibilités nouvelles au renforcement de l'autonomie personnelle et à la protection de l'individu. En ce sens, il convient de promouvoir la croissance rurale et agricole au bénéfice notamment des ménages ruraux pauvres, par le biais de programmes ciblés permettant de nourrir de façon adéquate les personnes qui ont faim et sont incapables de produire leurs propres aliments ou de se les procurer. Étant donné que 75 pour cent des gens qui souffrent de sous-alimentation dans le monde en développement sont des ruraux dépendant directement ou indirectement de l'agriculture pour assurer leurs moyens d'existence, les investissements dans le développement agricole et rural doivent être au premier plan des stratégies de réduction de la faim.

46. L'action sur le premier front consiste à mettre en œuvre des réformes et à investir dans le développement de manière à procurer aux pauvres des occasions d'améliorer leur sort; sur le deuxième front, il s'agit de mettre immédiatement de la nourriture à leur disposition pour qu'ils puissent au mieux tirer parti de ces possibilités et, partant, accroître leur potentiel de production. Ces deux domaines d'action se renforcent mutuellement du fait que les programmes améliorant l'accès à la nourriture favorisent en même temps l'accroissement de la production.

47. Les programmes d'investissement fondés sur l'action sur deux fronts ne sauraient conduire à une réduction de la faim que si le contexte général est porteur et favorable aux pauvres. Les mesures qui ont pour objet d'accroître la productivité – par exemple dans le domaine de la recherche et de la vulgarisation, de la promotion des variétés à haut rendement ou de la gestion de l'eau et de l'irrigation – devraient être conjuguées à des programmes de réduction des coûts d'accès aux marchés et de formation des producteurs en techniques de commercialisation et de gestion. Ces interventions améliorent les disponibilités alimentaires et l'état nutritionnel des agriculteurs et de leurs proches, tout en augmentant les approvisionnements sur les marchés locaux. Il importe aussi d'améliorer la situation alimentaire en milieu urbain en investissant dans les infrastructures de communication, dans les phases suivant la production, ainsi que dans la manutention des aliments et les mesures de sécurité sanitaire.

48. Bien que le secteur public tienne moins de place dans l'activité économique après une décennie de réformes structurelles, il continue de jouer un rôle critique dans le développement agricole. En fait, l'ampleur des investissements agricoles dépend dans une large mesure des apports publics en matière d'infrastructure rurale, de recherche et vulgarisation, d'informations commerciales et d'autres types de soutien. Or, en dépit du fait que les pays pauvres tirent leurs revenus et leur sécurité alimentaire du secteur de l'agriculture, les dépenses publiques qui lui sont consacrées sont en baisse. Selon des données se rapportant à 13 pays de la région de l'Asie et du Pacifique, les crédits publics alloués à l'agriculture, calculés en proportion du PIB, sont passés de 1 pour cent en 1990 à 0,8 pour cent en 2000 dans deux pays d'Asie orientale; en proportion du budget total, ils ont reculé de 8,4 à 3,8 pour cent. Dans quatre pays de l'Asie du Sud-Est, le budget de l'agriculture a décliné plus rapidement, passant de 1,6 à 0,8 pour cent du PIB, et de 8,4 à 3,8 pour cent des dépenses publiques totales. En Asie du Sud, trois pays affichent des baisses correspondantes de 1,9 à 1,2 pour cent pour le PIB, et de 9,2 à 5,2 pour cent pour le budget national. Enfin, dans quatre pays en développement du Pacifique, les dépenses publiques allouées à l'agriculture, exprimées en pourcentage du PIB, se sont maintenues à environ 2 pour cent, ce qui ne représente pas une réduction significative, mais la part de l'agriculture dans les dépenses totales est passée de 4,6 pour cent en 1990 à 3,6 pour cent en 2000.

49. Considérant que le secteur agricole compte pour quelque 15 pour cent du PIB en Asie orientale et dans la région du Pacifique et pour 25 pour cent en Asie du Sud, et qu'en outre 56 pour cent de leur population est fortement tributaire de l'agriculture pour son alimentation et ses revenus, le déclin de l'importance relative de l'agriculture dans les budgets publics n'est pas compatible avec les impératifs du développement dans la région. Qui plus est, les moyennes indiquées pour les sous-régions cachent le fait que les pourcentages les plus faibles de dépenses publiques s'observent dans la catégorie des pays les moins développés, où la sous-alimentation est très répandue. Dans le contexte des objectifs et des engagements du Sommet mondial de l'alimentation, il est évident que ces pays devront revoir et ajuster de toute urgence leurs priorités financières.

Formulation et mise en œuvre d'une Stratégie de lutte contre la faim

50. Lorsque l'on formule une Stratégie nationale de lutte contre la faim, il faut d'abord fixer des objectifs réalistes en fonction des particularités et des besoins du pays. Il importe dans ce cadre de prendre en compte les objectifs déjà convenus à l'échelle internationale, comme ceux du SMA et les Objectifs du Millénaire pour le développement, ainsi que les buts du pays lui-même. Il convient ensuite d'assortir ces objectifs d'échéances et de cibles quantitatives pour assurer le suivi et la responsabilisation et, le cas échéant, exercer des pressions politiques en vue de leur réalisation. Le fait pour un pays de fixer des objectifs contribue puissamment à renforcer les volontés politiques, à créer un consensus national (une « alliance contre la faim ») et à mobiliser les ressources qui favoriseront l'autosuffisance des pauvres – cela tant par la création d'emplois et de programmes générateurs de revenus, que par l'amélioration de l'accès aux moyens de production, tels que les terres et la technologie, qui ensemble permettent d'accroître la productivité et par là de réduire la pauvreté et l'insécurité alimentaire sur une plus grande échelle.

51. Dans ce cadre, on veillera à ce que la Stratégie ne vienne pas concurrencer les autres efforts nationaux ou internationaux de lutte contre la pauvreté et la faim. Il faut plutôt l'harmoniser avec les programmes et politiques déjà en cours ou prévus, en particulier le Document de stratégie par la réduction de la pauvreté (DSRP), de manière que la sécurité alimentaire émerge comme l'impératif premier de toute activité de planification et de mise en œuvre à l'échelle régionale, nationale ou locale. On maximisera l'impact de la Stratégie en insistant sur la nécessité de placer la sécurité alimentaire au cœur du Document de stratégie plutôt que de mener une action en parallèle. L'affectation des ressources nationales de lutte contre la pauvreté étant liée de plus en plus directement aux stratégies conçues pour les DSRP, cela permettra d'aplanir tant qu'il se peut les difficultés financières et de ressources humaines qui font obstacle à l'application de la Stratégie.

52. La Stratégie de lutte contre la faim doit comporter un inventaire détaillé des ressources et préciser quels efforts devront être consentis au niveau institutionnel pour atteindre les objectifs. Il convient par ailleurs d'élargir la coordination entre ministères et organismes publics connexes en vue d'incorporer les questions de sécurité alimentaire dans le grand ensemble intersectoriel concerné (comprenant, notamment, les politiques en matière de macroéconomie, d'éducation et de santé). Il faudra peut-être passer par le cabinet du premier ministre, l'autorité nationale de planification du développement ou un autre organe central pour mobiliser cette coordination et assurer à l'entreprise une vision et une portée globales.

53. Vu l'importance de garantir la cohérence de la Stratégie de lutte contre la faim et de l'insérer dans les plans de développement nationaux, la FAO a lancé en mars 2003 un Plan d'examen et de mise à jour des stratégies et politiques nationales en matière d'agriculture, de développement rural et de sécurité alimentaire visant à appuyer l'action déployée par les pays membres en réponse à la Déclaration du Sommet mondial de l'alimentation: cinq ans après et aux Objectifs du Millénaire pour le développement. Ce Plan veut en particulier aider les pays à traiter la question de l'insécurité alimentaire sur un horizon de moyen ou long terme présentant des objectifs, politiques, ressources et résultats cohérents. Parallèlement, ce mécanisme permet de fondre les objectifs de sécurité alimentaire dans les processus nationaux/régionaux documentés par les DSRP et par les accords d'intégration régionale et, partant, de diriger plus de ressources vers la réduction de la faim, en concentrant l'effort sur les besoins et les attentes des agriculteurs pauvres et des autres groupes vulnérables. (Pour de plus amples renseignements à ce sujet, voir le document APRC/04/INF/10.)

V. CONCLUSION

54. Les pays de la région Asie et Pacifique qui ont pris du retard dans la réalisation des objectifs du SMA se doivent d'examiner leur feuille de route à la lumière des engagements nationaux et internationaux pertinents, et de cerner les décalages en matière de politiques, d'affectation de ressources et de capacités de mise en oeuvre. Si ce n'est déjà fait, ils devraient songer à mettre en place une stratégie nationale de sécurité alimentaire assortie d'un calendrier d'action ayant pour objet de lever les contraintes actuelles, d'évaluer les ressources requises et d'établir un mécanisme de suivi permettant d'évaluer les progrès de façon indépendante à partir d'indicateurs chiffrables. La formulation et la mise en oeuvre de ces stratégies devraient déboucher sur des partenariats entre différentes parties prenantes, prévoyant des réformes institutionnelles novatrices et une délimitation claire des responsabilités et des pouvoirs. À cet égard, la FAO serait disposée à fournir, sur demande, une aide directe an niveau des politiques ou un appui technique pour la formulation de stratégies nationales de sécurité alimentaire.

55. Afin que les avantages du commerce international se traduisent par le soulagement de la pauvreté et l'allégement de l'insécurité alimentaire, les pays de la région tâcheront de renforcer leurs capacités à traiter des questions se rapportant à l'OMC dans le contexte de la libéralisation des échanges – plus particulièrement leur capacité à analyser les répercussions éventuelles des dispositions de l'Accord sur l'agriculture et d'autres accords de l'OMC touchant le secteur agricole, ainsi qu'à formuler des politiques et à adapter leur législation en fonction de ces accords. Enfin, ils auraient intérêt à relever leurs capacités techniques de même que les compétences de leurs laboratoires et institutions de manière à améliorer jusqu'à hauteur des normes internationales la qualité et la sécurité sanitaire de leurs produits agricoles, tant intérieurs qu'importés.

56. La FAO a aidé les pays de la région à développer leurs capacités par le biais d'une assistance ciblée directe et d'ateliers sous-régionaux. Ce soutien technique visait d'abord à familiariser les responsables nationaux avec l'Accord sur l'agriculture du cycle d'Uruguay, de même qu'avec des sujets se rapportant aux négociations agricoles et des questions d'intérêt particulier pour la région et les sous-régions. Les pays membres pourront solliciter une nouvelle assistance de la FAO en vue de renforcer leurs capacités, d'analyser les problèmes de mise en oeuvre, de formuler et de mettre à jour la législation nationale et d'accroître la coopération régionale et sous-régionale en matière de partage de l'information et de techniques de mise en valeur des ressources humaines.

57. Pour éviter d'être emportés par le courant de la mondialisation, les pays doivent non seulement jouir d'un environnement commercial équitable mais aussi soutenir la concurrence sur les plans du prix et de la qualité. Au bout du compte, ils n'obtiendront des avantages réels que s'ils arrivent à vendre leurs produits à des prix compétitifs sur un marché libre de distorsions. Aussi les investissements publics et privés à l'appui de méthodes de production et de commercialisation efficaces doivent-ils être fortement stimulés. Une large part des investissements agricoles est mobilisée par les agriculteurs eux-mêmes, mais le secteur public joue néanmoins un rôle déterminant lorsqu'il s'agit de créer un environnement propice à ces investissements et d'assurer la disponibilité de biens publics. Il appartient aux gouvernements de fournir à l'agriculture, de manière continue, cet appui indispensable du secteur public. Ainsi les politiques de dépenses publiques et d'allocations de ressources à l'agriculture et au développement rural doivent être prioritaires, et les politiques macroéconomiques, favorables à l'agriculture. Il faut renverser la tendance actuelle, qui joue contre le secteur alimentaire et agricole, et compenser les pénuries de ressources internes par la mobilisation d'un financement international au titre des programmes prioritaires.

1 Ou, plus précisément, la « consommation alimentaire moyenne apparentée, tous pays confondus ». En effet, les données servant à la calculer proviennent, non pas de sondages sur la consommation, mais des bilans alimentaires nationaux.