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Le programme forestier national du Guatemala – intégrer les agendas des diverses régions forestières du pays

E. Oliva Hurtarte, E. Sales Hernández et I. Bustos García

Edwin Oliva Hurtarte est Coordonnateur et Ebal Sales Hernández est Assistant de coordination du Programme forestier national du Guatemala, Institut national des forêts (Instituto Nacional de Bosques, INAB), Guatemala City (Guatemala).
Ignacio Bustos García est Conseiller régional pour les Programmes forestiers nationaux, Bureau régional de la FAO pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Santiago (Chili).

L’une des priorités du dialogue infranational sur les politiques est de braquer les
projecteurs sur le programme forestier national du Guatemala dans des tables
rondes sur la politique forestière organisées dans les neuf régions forestières du pays.

Le Programme forestier national (PFN) du Guatemala se déroule sans interruption depuis 17 ans. Initialement formulé en 1989 sous le titre de «Plan d’action forestier pour le Guatemala», il se poursuit, depuis 2003, sous le titre de «Programme forestier national». Le présent article décrit l’avancement de sa mise en œuvre, en s’arrêtant en particulier sur:

La création et le fonctionnement des Tables rondes de politique forestière sont particulièrement importants dans un pays où la diversité culturelle est si grande. Le processus d’organisation de ces tables rondes et leur progression – par exemple dans la définition d’agendas forestiers régionaux – offrent une base solide pour le développement forestier durable.

LE CONTEXTE

L’emplacement du Guatemala en Amérique centrale, sur le pont reliant deux grandes masses continentales (figure 1), et sa diversité en termes de sols, de topographie, de précipitations, de température, d’altitude, etc., expliquent la présence d’écosystèmes et d’espèces très divers.
Le Guatemala possède 3,9 millions d’hectares de forêts, représentant 36 pour cent de son territoire (FAO, 2006).

Près de 70 pour cent de la superficie forestière est concentrée dans trois départements: Petén (52 pour cent), Alta Verapaz (10 pour cent) et Izabal (7 pour cent) et 54,6 pour cent des forêts du pays se trouvent dans des zones protégées. Quelque 37,8 pour cent des terres forestières appartiennent à l’État, 38 pour cent sont des propriétés privées et 23,1 pour cent des propriétés municipales ou communales. Depuis 1990, la déforestation est de l’ordre de 54 000 ha
par an, pour des boisements annuels moyens de 10 000 ha.

L’existence de quatre grands groupes ethniques dans le pays (groupes indigènes Mayas et Xincas, mestizos ou ladinos, Garifunas afro-américains et blancs) est une caractéristique socio­démographique majeure. Les Mayas sont divisés en 20 groupes ethniques, avec des langues et des coutumes différentes. En effet, on parle au moins 23 langues dans le pays et on dénombre au moins autant de cultures. La richesse multiculturelle du pays est très importante pour la conception et la mise en œuvre des politiques forestières et environnementales, qui doivent découler d’un consensus de la population.

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Localisation géographique du Guatemala

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Les domaines d’activité de l’Agenda forestier national

GÉNÉRALITÉS: LE PLAN D’ACTION FORESTIER POUR LE GUATEMALA

En 1986, le Gouvernement du Guatemala a sollicité un appui de la FAO pour éla­borer un plan qui régirait l’utilisation, la gestion et la conservation des ressources forestières, en définissant des objectifs, buts et stratégies à court, moyen et long termes. En 1989, l’élaboration du Plan d’action forestier pour le Guatemala a donc débuté avec un appui de la FAO, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de l’Institut interaméricain de coopération pour l’agriculture (IICA), de la Banque interaméricaine de développement (BID), de l’Allemagne, des Pays-Bas et des États-Unis. En 1991, le document de base et le schéma de projet ont été soumis à l’examen des différents secteurs natio­naux. En mars 1992, le plan a été présenté à la communauté internationale.

Le Plan d’action forestier pour le Guatemala avait un horizon de 10 ans et est resté en vigueur jusqu’en mars 2003. Ce plan identifiait 29 actions et 17 projets couvrant cinq domaines d’action principaux: la foresterie dans l’utilisation des terres, le bois de feu et d’énergie, la conservation de l’écosystème, les industries forestières et le renforcement des institutions (MAGA [Ministère de l’agriculture du Guatemala] et FAO, 2003).

ÉVOLUTION DU PROGRAMME FORESTIER NATIONAL

Le Plan d’action forestier pour le Guatemala a été révisé entre la fin 2002 et le début 2003. Un processus analytique auquel participaient 450 personnes venues de tout le pays et de divers secteurs a permis de dégager une vision consensuelle du secteur forestier du pays. Le processus était géré par diverses institutions telles que le Ministère de l’agriculture, de l’élevage et de l’alimentation, le Ministère de l’environnement et des ressources naturelles, le Conseil national pour les aires protégées et l’Institut national des forêts (Instituto Nacional de Bosques, INAB). Des conseillers indépendants ou appartenant à des institutions, des experts et des organes consultatifs régionaux, ainsi qu’un Office de mise en œuvre du Plan d’action forestier ont contribué au processus.

La révision du Plan d’action forestier pour le Guatemala a été centrée sur l’analyse et l’élaboration d’objectifs stratégiques pour quatre domaines d’action principaux du secteur forestier (conservation et protection des forêts, production et gestion durable, commerce et industrie et services environnementaux) et pour un domaine d’appui intersectoriel (renforcement des capacités). Les solutions proposées pour remédier aux problèmes du secteur ont été adoptées sous le titre d’Agenda forestier national pour 2003-2012 (figure 2).

Le Plan d’action forestier s’étant révélé efficace pour sensibiliser à l’importance et aux problèmes des ressources forestières, promouvoir et mettre en œuvre l’action et renforcer les liens entre les institutions forestières, l’INAB a décidé d’appuyer sa poursuite, en tant que PFN, à partir de 2003. Le PFN du Guatemala repose sur le concept défini d’un commun accord en 1997 dans le Dialogue international sur les forêts, en particulier le Groupe intergouvernemental sur les forêts (GIF) et le Forum intergouvernemental sur les forêts (FIF). Un projet permanent a été établi au sein de la structure de l’INAB pour coordonner la mise en œuvre du PFN. Ce projet est exécuté en liaison étroite avec les autorités forestières et diverses organisations locales, en particulier avec les Tables rondes de politique forestière organisées au niveau sous-national.

Agriculture et terres forestières: l’aménagement du territoire est un objectif clé du Programme forestier national du Guatemala
FAO/FO-0670/S. Braatz

OBJECTIFS DU PFN

Au Guatemala, le PFN est considéré comme un processus visant à définir et arrêter un nouveau concept du dévelop­pement forestier et environnemental dont la réalisation repose sur l’analyse, la conception et la mise en œuvre participatives de la politique, de la stratégie et des mécanismes et actions proposés dans l’Agenda forestier national. Il a pour but de parvenir à une gestion durable des forêts et de l’environnement, grâce à des activités forestières durables à visée de production et de protection, de façon à ce que d’ici à 2012, le développement du secteur forestier guatémaltèque soit basé sur les principes de durabilité, et contribue ainsi au bien-être humain et au développement économique, social et environnemental; à l’aménagement du territoire; et à la configuration d’une culture forestière au sein du pays – grâce à la gestion participative de toutes les parties prenantes (Programa Forestal Nacional de Guatemala, 2003). Dans le cadre du PFN, la législation nationale favorise le développement forestier et est pleinement conforme à l’Agenda forestier national.

Les objectifs spécifiques du PFN sont les suivants:

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Organigramme de la mise en œuvre du PFN

MISE EN ŒUVRE

La stratégie de mise en œuvre du PFN prévoit trois organes distincts responsables de la gestion, des services consultatifs et du suivi (voir figure 3). Le Projet d’appui à la mise en œuvre du PFN relevant de l’INAB, coordonne et soutient les divers acteurs qui mettent en œuvre le PFN. Il appuie par exemple:

En décembre 2003, l’INAB a adhéré à un accord de coopération triennal avec les Pays-Bas en vue de mettre en œuvre une stratégie de renforcement des capacités, avec une composante d’appui à la mise en œuvre du PFN mettant au premier plan les mécanismes de dialogue entre institutions. L’Accord visait à permettre une participation accrue des groupes d’intérêts, tant thématiques que géographiques, pour surmonter les contraintes liées au cadre juridique et à la gestion forestière publique. Les principales contraintes identifiées étaient les suivantes:

Des groupes d’intérêt publics et privés du secteur forestier ont donc été identifiés dans chaque région et des relations ont été établies entre ces groupes et les autorités nationales et régionales, avec notamment l’établissement d’accords formels, la définition de règlements intérieurs et de mesures pour l’obtention d’un statut juridique. Cela a conduit à la création et au renforcement des Tables rondes de politique forestière régionales et de forums thématiques sur l’organisation des activités forestières, tels que le Conseil national pour les normes de gestion durable des forêts et le Groupe des services environnementaux.

Dès le départ, des plans à moyen et long termes englobant des activités de formation du personnel des organisations locales à la planification stratégique, à l’évaluation participative pour identifier le potentiel et les problèmes du secteur, et à la formulation d’un agenda de développement forestier pour chaque région, y compris la préparation de plans stratégiques et opérationnels, ont été élaborés et progressivement appliqués.

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Emplacement des régions forestières du Guatemala

TABLES RONDES DE POLITIQUE FORESTIÈRE

Les Tables rondes de politique forestière (Mesas de concertación y política fores­tal) sont des mécanismes de dialogue infranational autonomes, rassemblant une trentaine d’organisations ou de groupes, dont le gouvernement central, les autorités locales, des ONG, des organismes de la société civile et des compagnies privées intervenant dans la production, la conservation, la protection et l’utilisation des ressources forestières. Elles ont pour but de promouvoir le développement socioéconomique par des activités s’inscrivant dans la politique forestière nationale, et de tenter de résoudre les problèmes du secteur dans le cadre des agendas forestiers nationaux.

Après la convocation de la première Table ronde de politique forestière (Table ronde de Las Verapaces) en 2002, l’INAB s’est employé à en promouvoir d’autres du même type en organisant des campagnes d’information et en fournissant un appui organisationnel et technique et des ressources financières. Des tables rondes ont depuis été organisées dans chacune des neuf régions forestières définies par l’INAB (figure 4). Des directives conceptuelles, méthodologiques et opérationnelles ont été rédigées et des exposés régionaux sur le processus du PFN et l’Agenda forestier national ont été présentés aux diverses parties prenantes. Les Tables rondes ont été programmées et mises en place avec la contribution de parties prenantes locales.

Les tables rondes de politique forestière examinent les caractéristiques géographiques, culturelles et productives de chacune des régions du pays. Elles font aussi office d’organes consultatifs sur les réactions au PFN en général et à l’Agenda forestier national en particulier, en contribuant non seulement à la gestion durable des forêts et des terres forestières, mais aussi à la durabilité environnementale en général et à la bonne gouvernance.

Les Tables rondes de politique forestière:

Les Tables rondes de politique forestière au travail dans les Régions I et III
E. Oliva

Résultats des Tables rondes de politique forestière

La mise en place de tables rondes – qui est en soi une réalisation majeure compte tenu de l’importance et de l’influence progressive de ces mécanismes participatifs – a permis de faire avancer le dialogue aux niveaux régional et national pour le centrer sur l’amélioration et la durabilité des processus de gestion forestière et le développement forestier du Guatemala en général. Les autres réalisations sont les suivantes:

APPUI DU MÉCANISME POUR LES PROGRAMMES FORESTIERS NATIONAUX

Le Mécanisme pour les Programmes forestiers nationaux soutient le PFN du Guatemala dans le cadre d’un partenariat triennal mis en place avec l’INAB en février 2004. Par le biais de cet arrangement, 10 organisations d’agriculteurs et de populations autochtones, des ONG et des institutions universitaires ont exécuté des activités participatives pour renforcer les Tables rondes de politique forestière, formuler et lancer des plans et des agendas à l’échelon départemental et local pour la gestion durable des forêts, améliorer l’enseignement forestier et stimuler la certification forestière en facilitant la définition de normes nationales pour la gestion durable des forêts. Des préparatifs sont en cours pour lancer de nouvelles activités pour six autres organisations. On notera qu’au Guatemala, les fonds du Mécanisme n’ont jamais été utilisés par l’institution gouvernementale (l’INAB), mais que celle-ci les a alloués à ces organisations partenaires pour élargir et accroître la participation des diverses parties prenantes nationales et locales au PFN.

LES DÉFIS ET LES PERSPECTIVES POUR LA MISE EN ŒUVRE DU PFN

Les parties prenantes forestières natio­nales et régionales ont soulevé une série de questions liées à la mise en œuvre du PFN, telles que le maintien de l’Agenda forestier national et l’amélioration des conditions du développement social, économique et environnemental grâce au renforcement du rôle de la foresterie aux niveaux régional et local. Elles ont mis l’accent sur les défis suivants:

Femmes mayas faisant la corvée du bois de feu: le PFN du Guatemala tient compte de la diversité des parties prenantes forestières pour lutter contre les causes profondes de la dégradation des ressources, et les associer à une gestion et à une utilisation rationnelles et durables des forêts
FAO/FO-0662/S.BRAATZ

CONCLUSION

Dix-sept années continues de formulation et de mise en œuvre participatives du Plan d’action forestier pour le Guatemala et le PFN démontrent que les gouvernements nationaux successifs et les diverses parties prenantes se sont employés sans relâche à faire avancer ce processus. Les principales réalisations du PFN sont les suivantes:

Il est particulièrement intéressant de noter que les différents acteurs ont adopté les principes et les objectifs du PFN, ce qui a favorisé la création de Tables rondes de politique forestière dans toutes les régions concernées du pays. Ces tables rondes ont déjà commencé à contribuer à un développement forestier bien planifié, et leur succès est appelé à grandir étant donné qu’elles prennent leur source dans les racines mêmes de la grande diversité culturelle du pays.

Bibliographie

FAO. 2006. Évaluation des ressources forestières mondiales 2005 – Progrès vers la gestion forestière durable – Étude FAO Forêts 147. Rome.

Ministerio de Agricultura, Ganaderia y Alimentacion (MAGA) et FAO.
2003. Plan de Acción Forestal para Guatemala. Memoria a 10 años. Guatemala City.

Programa Forestal Nacional de Guatemala.
2003. Agenda Nacional Forestal de Guatemala. INAB/MAGA. Guatemala City.

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