MISSION FAO/PAM D'ÉVALUATION DES RÉCOLTES ET DES DISPONIBILITÉS ALIMENTAIRES

ALERTE  SPÉCIALE

AU ZIMBABWE

18 juin 2008

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Faits saillants

  • Pour la deuxième année consécutive, les effets conjugués des mauvaises conditions météorologiques, des retards dans la fourniture d'intrants et des graves difficultés économiques que connaît le Zimbabwe ont entraîné une situation pénible et une insécurité alimentaire pour la population, tant dans les villes que dans les campagnes.
  • La production nationale de maïs de la campagne principale de 2008 est estimée à 575 000 tonnes, soit 28 pour cent de moins que le volume produit en 2007 (800 000 tonnes, selon la Mission d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires), qui est aussi inférieur d'environ 44 pour cent aux chiffres annoncés par le gouvernement en 2006. La Mission estime à 848 000 tonnes les disponibilités céréalières intérieures totales pour la campagne de commercialisation de 2008/09, soit 40 pour cent de moins que durant la dernière campagne. Ce chiffre englobe la production escomptée de blé d'hiver, plus la production de maïs (cultures d'hiver précoces, cultures péri-urbaines/urbaines, semences).
  • Les principaux facteurs à l'origine du recul de cette année, outre les mauvaises conditions météorologiques, ont été les retards dans les livraisons de semences et les pénuries d'engrais, la dégradation des infrastructures et, surtout, les prix insuffisants de la plupart des cultures contrôlées par l'Office de commercialisation des céréales. Le recul de la production agricole nationale enregistré depuis 7 ou 8 années est également dû à des changements structuraux. Les agriculteurs nouvellement installés ne cultivent qu'environ la moitié des bonnes terres qui leur sont allouées en raison de pénuries de tracteurs ou d'animaux de trait et de carburant, des investissements insuffisants dans les infrastructures/améliorations, et de l'absentéisme de quelques bénéficiaires de la redistribution des terres. Le secteur commercial à grande échelle produit désormais moins d'un dixième du maïs qu'il produisait dans les années 1990.
  • Les rendements en maïs des agriculteurs exploitant les terres communales qui produisaient l'essentiel de la récolte du pays, sont aussi tombés à un quart de leur niveau en une décennie, du fait de la perte de la relation symbiotique de ces agriculteurs avec l'ancien secteur de l'agriculture commerciale à grande échelle, et d'une crise des industries d'intrants agricoles.
  • Avec une utilisation céréalière totale de l'ordre de 2,080 millions de tonnes, dont 1,875 million de tonnes destinées à la consommation humaine directe, pour une population que les projections établissent à 11,865 millions d'habitants, les besoins d'importations céréalières sont estimés à 1,232 million de tonnes, la part du déficit en maïs étant d'environ un million de tonnes.
  • L'inflation annuelle estimée à 355 000 pour cent pour mars 2008, niveau le plus élevé du monde, réduit de jour en jour de façon dramatique le pouvoir d'achat des ménages et limite considérablement leur accès aux maigres disponibilités alimentaires.
  • Compte tenu de la grave pénurie de devises, de la diminution de la gamme des exportations et des prix élevés du maïs dans la région et dans le monde, la Mission estime à 850 000 tonnes le volume total de céréales qui pourraient être importées par des voies commerciales, ce qui laisserait un déficit non couvert d'environ 380 000 tonnes de maïs.
  • La Mission estime à 2,04 millions, le nombre de personnes qui seront en situation d'insécurité alimentaire, dans les zones rurales et urbaines, entre juillet et septembre 2008; ce nombre passera à 3,8 millions en octobre et atteindra jusqu'à 5,1 millions au plus fort de la période de soudure, entre janvier et mars 2009. Une aide alimentaire d'environ 395 000 tonnes de céréales devra leur être fournie en 2008/09. D'autres denrées, telles que huile et légumineuses, ainsi que des aliments complémentaires seront également nécessaires pour les groupes les plus vulnérables, dont les besoins sont plus importants.
  • Il est crucial que des céréales soient disponibles sur les marchés pour les ménages qui ont un pouvoir d'achat, afin d'éviter qu'un plus grand nombre de personnes se trouve en situation d'insécurité alimentaire du fait des pénuries et de l'augmentation des prix alimentaires qui pourrait en découler. Compte tenu des capacités limitées de l'Office de commercialisation des céréales, la Mission recommande en outre que le commerce soit ouvert à des opérateurs privés afin que des céréales puissent être importées et transportées rapidement là où il le faut.
  • La Mission recommande aussi que le gouvernement et la communauté internationale apportent une aide d'urgence pour fournir en temps voulu des semences de bonne qualité et des engrais, ainsi que des produits chimiques pour lutter contre les maladies du bétail transmises par les tiques. Des sources de variétés adéquates de maïs et de petites céréales doivent en outre être identifiées de toute urgence, pour livraison en septembre 2008. La promotion de semences de variétés locales à pollinisation libre et de l'utilisation de fumier plutôt que d'engrais chimiques importés devra également être envisagée.
  • Pour faire face au déficit vivrier structurel et aux pénuries chroniques, il est recommandé que la communauté internationale et le gouvernement se concertent pour mobiliser l'assistance économique et autre requise, de manière à promouvoir une production vivrière durable et une sécurité alimentaire globale au moyen de l'aide au développement. Celle-ci devrait viser à investir dans la mécanisation du secteur agricole et dans l'infrastructure au niveau des exploitations (achat de tracteurs, remise en état des ouvrages d'irrigation, etc.); la productivité s'en trouvera améliorée et les agriculteurs nouvellement installés pourront exploiter plus pleinement les terres. Conformément à l'objectif de libéralisation de l'économie annoncé par le Gouverneur de la Banque de réserve du Zimbabwe en avril 2007, la Mission appuie aussi les réformes du système de commercialisation des céréales visant à protéger les agriculteurs en fixant des prix planchers et à permettre la participation du secteur privé.

VUE D'ENSEMBLE

Au Zimbabwe, les pluies tombées sans arrêt pendant la première moitié de la campagne agricole de 2007/08, en décembre et en janvier, ont causé un grave engorgement des terres et ont été suivies de vagues de sécheresses prolongées dans une grande partie du pays, qui ont aggravé les effets dévastateurs du déclin économique des dix dernières années. Dans ce contexte, le gouvernement a demandé une Mission d'évaluation FAO/PAM des récoltes et des disponibilités alimentaires, qui s'est rendue dans le pays du 29 avril au 23 mai 2008, pour effectuer une évaluation indépendante de la production des principales céréales pour 2008, estimer la situation de sécurité alimentaire globale, et déterminer les besoins d'importations vivrières, y compris sous forme d'aide alimentaire, pour la campagne de commercialisation de 2008/09 (avril/mars) en cours. L'objectif principal de cette Mission est de dresser un tableau précis de l'étendue et de la gravité de l'insécurité alimentaire existante ou prévue, générée par la crise, dans le pays (ou dans des zones spécifiques), pour permettre au gouvernement et à la communauté internationale de prendre des mesures appropriées en temps voulu pour minimiser l'impact de la crise sur les populations touchées.

À Harare, la Mission a tenu des consultations avec le Ministère de l'agriculture et du développement rural, le Coordonnateur résident du PNUD, le représentant de la FAO et le personnel technique de la FAO, le Directeur du bureau du PAM dans le pays et d'autres agents du PAM, la Banque mondiale, l'UNICEF, l'ONUSIDA, le FUNAP, l'OIM, le Département de l'aide sociale (Ministère de la planification et de la protection sociale), l'Office de commercialisation des céréales (GMB), le Département météorologique du Zimbabwe, le Bureau central de statistiques, le Ministère de la santé, le Conseil du Zimbabwe pour l'alimentation et la nutrition, le Commercial Farmers Union (CFU), le Zimbabwe Farmers Union (ZFU) ainsi que certaines ONG internationales et nationales. La Mission a retiré des informations précieuses de ces consultations.

Sur le terrain, la Mission a été aidée et guidée dans ses travaux par des spécialistes principaux du Département de la recherche et de la vulgarisation agricoles (Agritex) et d'autres fonctionnaires du Ministère de l'agriculture, l'Office de commercialisation des céréales, le Département de météorologie et le Ministère de la planification et de la protection sociale, ainsi que par quatre fonctionnaires de la FAO et deux fonctionnaires du PAM basés dans le pays. Un observateur de FEWSNet a également accompagné la Mission. La Mission, scindée en quatre groupes, a parcouru pendant 8 à 9 jours les huit provinces rurales du pays, visitant au total 28 districts ruraux, sur les 58 que compte le pays. Les districts devant faire l'objet d'une visite ont été sélectionnés avec soin sur la base de divers critères, dont la productivité globale, les zones agro-écologiques, et des considérations liées aux moyens d'existence ou à la vulnérabilité. Dans chaque province et dans chaque district, les équipes ont rencontré des autorités administratives, notamment le Gouverneur de la province et des fonctionnaires de l'Agritex. Après ces réunions, les équipes se sont rendues dans différentes circonscriptions du district sélectionné, couvrant différents secteurs de l'agriculture (communale, A1, A2, anciennes exploitations redistribuées, petite échelle et grande échelle). De brèves inspections de parcelles dans des zones urbaines et périurbaines ont été faites à Harare et à Bulawayo. La Mission s'est aussi rendue sur les marchés et a interrogé de petits négociants. Elle a fait en outre largement appel à l'analyse par télédétection et aux données sur la pluviosité (en particulier, estimation par satellite des pluies sur une décade, pendant la saison actuelle, la saison passée, et moyenne à long terme pour chaque district), aux indices de végétation et à divers rapports intérimaires d'évaluation.

La Mission a eu accès à l'évaluation de la superficie, effectuée par Agritex, après les semis dans la première semaine de février, et à l'évaluation de la production effectuée avant la récolte, durant la deuxième semaine d'avril. Ces renseignements ont servi d'assise à la vérification. L'état du bétail a été observé et examiné en détail en chemin et dans les districts visités. Des évaluations de terrain ont été faites sur la production et la sécurité alimentaire des ménages, leur vulnérabilité, leurs mécanismes de survie et les programmes de protection sociale, suivant la méthode de « triangulation » décrite dans les Directives révisées pour les missions FAO/PAM d'évaluation des récoltes et des disponibilités alimentaires1. La situation concernant la production agricole et la vulnérabilité cette année a été comparée à celle des années précédentes pour avoir un certain recul. Pour parvenir à ces estimations, la Mission a utilisé des données et renseignements émanant de sources secondaires, qu'elle a examinés à la lumière des données, de l'information et des aperçus glanés à l'occasion des visites de terrain.

La Mission a utilisé des données concernant la production au niveau du pays, des provinces et des districts et les a recoupées avec les renseignements obtenus lors de discussions avec les ménages et d'entretiens de groupe. Le revenu potentiel provenant des cultures de rapport et de l'élevage/vente de produits animaux a été utilisé pour tirer des conclusions sur la sécurité alimentaire et les effets correspondants des pertes de production.

Les résultats de la présente Mission sont décrits dans les sections qui suivent et synthétisés dans les Faits saillants, présentés plus haut.

 

Le présent rapport a été établi par Kisan Gunjal, Wondemagagne Shiferaw, Simon Dradri et Veronica Rammala, sous la responsabilité des Secrétariats de la FAO et du PAM à partir d'informations provenant de sources officielles et officieuses. La situation pouvant évoluer rapidement, priè re de s'adresser aux soussignés pour un complément d'informations, le cas échéant.

Henri Josserand
Chef, SMIAR, FAO
Fax:  : 0039-06-5705-4495
E-mail: [email protected]
Mustapha Darboe
Regional Director, OMJ, WFP
Fax: : 0027-11-5171642
E-mail: [email protected]

Veuillez noter qu'il est possible d'obtenir le présent Rapport spécial sur le site Internet de la FAO (www.fao.org) à l'adresse suivante: http://www.fao.org/giews/

Il est également possible de recevoir automatiquement, par messagerie électronique, les Alertes spéciales et les Rapports spéciaux, dè s leur publication, en souscrivant à la liste de distribution du SMIAR. À cette fin, veuillez envoyer un message électronique à l'adresse suivante: [email protected], sans rien écrire dans la ligne "sujet" et en indiquant le message suivant:

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1.FAO/WFP Crop and Food Security Assessment Mission Guidelines (récemment révisées, qui paraîtront sur les sites Internet FAO/GIEWS et du PAM).