COMITÉ DES PRODUITS

GROUPE INTERGOUVERNEMENTAL SUR LA BANANE ET LES FRUITS TROPICAUX

Première session

Gold Coast (Australie), 4-8 mai 1999

INCIDENCE DES MODIFICATIONS DE L'OFFRE ET DE LA DEMANDE DE BANANE SUR LE REVENU, L'EMPLOI ET LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

Table of Contents


I. INTRODUCTION

1. Le Sommet mondial de l'alimentation de 1996 a étudié les rapports entre le commerce et la sécurité alimentaire. La soixante et unième session du Comité des produits, tenue en février 1997, a souligné l'importance des recettes d'exportation des pays en développement pour l'amélioration de leur sécurité alimentaire, en signalant que la question du commerce et de la sécurité alimentaire figurait parmi les thèmes abordés par le Sommet mondial de l'alimentation. La soixante-deuxième session du Comité des produits a décidé d'examiner à sa prochaine session le fonctionnement de ses groupes intergouvernementaux, notamment en ce qui concerne l'adaptation de leurs programmes de travail au Plan d'action du Sommet mondial de l'alimentation. La soixante-deuxième session du Comité des produits a proposé également de mettre prochainement à l'étude les rapports entre commerce et sécurité alimentaire; il est envisagé d'entreprendre un examen approfondi de cette même question dans le cadre du Programme de travail et budget pour la période biennale 2000-2001.

2. Lors de sa quinzième session en mai 1997, le Groupe intergouvernemental sur la banane a reconnu l'importance de la production et de l'exportation de banane en tant que source de revenu et d'emplois ruraux et leurs rapports avec l'amélioration des infrastructures dans les pays en développement concernés. Il a donc demandé au Secrétariat d'entreprendre des études approfondies des répercussions que les modifications de l'offre et de la demande de banane pourraient avoir sur le revenu, l'emploi et la sécurité alimentaire.

3. Pour amorcer une réponse à la demande du Groupe et compte tenu de la complexité des problèmes en cause, le présent document vise essentiellement à attirer l'attention sur les principales difficultés en présence et sur les liens entre d'une part, les exportations de bananes et d'autre part, le revenu, la création d'emplois et la sécurité alimentaire. Il s'appuie sur des études de cas relatives à certains pays exportateurs de banane de différentes régions et dont les secteurs de la banane présentent des caractéristiques variées. Le présent document n'a pas l'intention d'évaluer ou d'apprécier les avantages et/ou les inconvénients des différents systèmes de production et d'exportation, mais plutôt de montrer comment les modifications de l'offre et de la demande peuvent affecter l'économie d'un pays, son secteur bananier et les moyens d'existence de la population qui en dépend.

II. SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

4. La sécurité alimentaire est définie comme une "situation dans laquelle tous les ménages ont accès matériellement et économiquement à une alimentation adéquate pour tous leurs membres et ne risquent pas de perdre cet accès".1 Le concept de sécurité alimentaire comporte des aspects de disponibilité, de stabilité et d'accès. L'existence de disponibilités alimentaires adéquates signifie que, en moyenne, des approvisionnements alimentaires suffisants doivent être disponibles pour répondre aux besoins nutritionnels minimaux. La stabilité a pour effet de réduire au minimum la probabilité d'une chute de la consommation alimentaire en deçà des besoins lors de mauvaises campagnes ou saisons agricoles. La notion d'accès attire l'attention sur le fait que, même en présence de disponibilités surabondantes, de nombreuses personnes souffrent encore de la faim, puisqu'elles n'ont pas les moyens de produire ou d'acheter les produits alimentaires dont elles ont besoin. En outre, si la satisfaction des besoins alimentaires comporte l'exploitation de ressources naturelles non renouvelables ou une détérioration de l'environnement, la sécurité alimentaire n'est alors pas garantie à long terme.

5. La sécurité alimentaire peut être définie soit au niveau mondial, soit au niveau d'une nation, d'une région ou d'un ménage; elle concerne en définitive l'individu ou la cellule familiale et dans la plupart des cas, dépend essentiellement du pouvoir d'achat ou du revenu compte tenu du coût des produits auxquels ce revenu donne accès. De manière analogue, le pouvoir d'achat au niveau national, la quantité de devises disponibles pour payer les importations alimentaires requises, est un élément de la sécurité alimentaire d'un pays; les résultats à l'exportation représentent par conséquent un atout fondamental.

6. Le commerce international a donc une incidence déterminante sur l'accès à l'alimentation, par ses effets sur le revenu et l'emploi. Les exportations agricoles en général, et en l'occurrence les exportations de banane, peuvent contribuer notablement au développement économique et à la réalisation de la sécurité alimentaire au niveau régional comme au niveau des ménages. Par exemple, en ce qui concerne les grands pays exportateurs, les recettes d'exportation de banane en 1997 ont constitué près du quart de la valeur totale des exportations de marchandises de l'Equateur et environ 16 pour cent de celles du Costa Rica. Au cours de la même année, Sainte-Lucie et la Dominique ont assuré seulement 0,5 pour cent et 0,25 pour cent des exportations mondiales de banane respectivement, mais la valeur de ces échanges représentaient approximativement 60 pour cent des recettes totales d'exportation de Sainte-Lucie et quelque 30 pour cent de celles de la Dominique.

7. Dans le cas d'un pays exportateur de produits de base, la disponibilité de ressources économiques adéquates pour pouvoir acheter les denrées alimentaires qui ne sont pas produites localement est un facteur décisif. Dans nombre de pays exportateurs de banane, les agriculteurs ont opté pour la production de banane à l'exportation en tant que culture de rente, au lieu de cultures vivrières de base destinées à leur propre consommation, ou au marché intérieur. De ce fait, aux niveaux national et régional, comme au niveau des ménages, les revenus tirés de la vente des bananes par les petits exploitants ou les salaires perçus par les ouvriers agricoles des plantations de bananes, peuvent constituer un élément clé de leur sécurité alimentaire.

8. Des facteurs extérieurs, tels que les changements de politiques ou les dévaluations survenues dans les pays importateurs de banane, les baisses de prix saisonnières sur les marchés où l'offre est excédentaire, ou les contractions de l'offre liées aux aléas climatiques, risquent d'avoir de sérieuses répercussions sur la sécurité alimentaire d'une partie notable de la population rurale dans certains pays exportateurs de banane: la principale source de revenu en espèces de nombreux ménages étant étroitement dépendante de ce secteur d'exportation, la sécurité alimentaire des familles en question risque de connaître des fluctuations notables lors de modifications majeures de l'offre et de la demande. Les événements récents en rapport avec le passage de l'ouragan "Mitch" en Amérique centrale montrent clairement comment des facteurs extérieurs au marché de la banane, affectant l'offre en l'occurrence, peuvent avoir des répercussions gravement préjudiciables sur la sécurité alimentaire aux niveaux national et régional, comme au niveau des ménages. 2

III. LE MARCHÉ MONDIAL DE LA BANANE ET SES INTERACTIONS AVEC LES ÉCONOMIES LOCALES

9. Dans le cas des pays où les économies sont étroitement dépendantes de quelques produits d'exportation, un facteur extérieur qui affecte l'offre ou la demande et qui provoque une modification notable de leur position concurrentielle, aura des répercussions économiques majeures sur le plan intérieur. L'incidence globale potentielle de tels changements en termes de revenu et d'emploi, est la résultante de plusieurs types d'effets.

10. Les effets primaires (ou directs) sont les effets directement imputables au produit de base en question, par exemple, la perte de revenus et d'emplois consécutive à la chute de la production, non compensée par un relèvement des prix. Les effets secondaires sont ceux qui affectent d'autres secteurs dont les activités sont imbriquées avec celles du secteur étudié (essentiellement par le biais des échanges de biens et de services). En ce qui concerne la banane, il s'agit des secteurs des engrais, des pesticides, des cartonnages et des matériaux d'emballage, du matériel agricole, des transports, etc. Les effets tertiaires sont les effets subis par les secteurs qui fournissent des biens et des services aux travailleurs des bananeraies. Les secteurs en question couvrent la plus grande partie de l'économie nationale, mais comprennent essentiellement le logement, l'habillement, l'alimentation, les services médicaux, l'éducation, etc.

11. Dans les pays dont les économies ne sont pas très diversifiées, lorsqu'un secteur important connaît un ralentissement majeur, il est peu probable que les autres secteurs soient en mesure d'absorber la main-d'œvre et les autres facteurs libérés par le repli enregistré. Nombre des principaux exportateurs de banane se classent dans cette catégorie et sont donc vulnérables aux fortes fluctuations de l'offre et de la demande de banane.

12. Tel qu'indiqué précédemment, un élément clé de la sécurité alimentaire tient à la durabilité du système dont elle dépend. Les activités de production et d'exportation de banane, comme en fait de n'importe quelle autre culture, doivent impérativement préserver l'intégrité de l'environnement, pour que les gains économiques réalisés aujourd'hui ne se fassent pas au prix d'une détérioration de l'environnement, risquant d'avoir un effet préjudiciable sur la capacité de cette activité ou d'autres activités créatrices de revenu de continuer à assurer la sécurité alimentaire à plus long terme. Bien qu'il s'agisse d'un aspect important, les études de cas présentées ci-après sont axées principalement sur les relations entre les exportations de banane, l'emploi et la sécurité alimentaire.

IV. ÉTUDE DE CAS DU COSTA RICA

13. En 1997, le produit intérieur brut du Costa Rica (PIB) a été d'environ 9,76 milliards de dollars E.-U. provenant essentiellement des industries manufacturières légères, des industries extractives (24,4 pour cent), de l'agriculture (22,4 pour cent), du tourisme et des activités connexes (18,3 pour cent).

14. L'agriculture a été traditionnellement et reste un secteur particulièrement important de l'économie du Costa Rica. Tout au long des années 1990, le secteur agricole a contribué pour une part comprise approximativement entre 15 et 22 pour cent du PIB du Costa Rica et les exportations agricoles ont représenté en moyenne près de 59 pour cent des exportations totales de marchandises du pays. Les exportations de banane constituent à l'heure actuelle le deuxième poste d'exportation, après les exportations agrégées de textile et ont constitué 16 à 28 pour cent des exportations de marchandises au cours des années 1990 (tableau 1).

15. En 1997, les recettes totales d'exportation de produits agricoles du Costa Rica se sont élevées au total à 1,64 milliard de dollars E.-U., tandis que le montant des importations agricoles atteignait 337 millions de dollars E.-U., soit moins du quart de la valeur des exportations agricoles.

Tableau 1. Costa Rica - Exportations totales de marchandises - exportations agricoles et exportations de bananes - 1992 à 1997

 

Exportations totales des marchandises

Exportations agricoles

Exportations de banane

Part de la banane dans les exportations locales (%)

Année

---------------------------------- Millions de $E.-U. ------------------------------

1992

1 714,3

941,7

485,3

28,3

1993

2 094,7

819,1

375,6

17,9

1994

1 941,7

1 361,5

535,9

27,6

1995

2 570,1

1 717,9

680,4

26,5

1996

2 743,6

1 789,1

631,9

23,0

1997

2 953,8

1 636,0

463,0

15,7

Source: FAOSTAT

16. Les sous-secteurs correspondant aux produits de base que sont la banane et le café jouent un rôle de premier plan dans le secteur agricole. L'essor de l'industrie de la banane observé vers la fin des années 1980 et les baisses des cours mondiaux du café ont eu pour effet depuis 1990 de placer tous les ans les exportations de banane au premier rang des produits de base agricoles en tant que principale source de devises étrangères du Costa Rica.

17. En 1997, la population active totale du Costa Rica était estimée à 1 227 333 personnes et dans le secteur agricole à 252 718 personnes, soit plus de 20 pour cent du total (tableau 2). L'industrie de la banane emploie davantage de main-d'œvre que toute autre industrie ou sous-secteur de production d'un produit agricole de base au Costa Rica. Environ 33 000 personnes étaient employées directement (c'est-à-dire dans des exploitations et dans des stations de conditionnement) par l'industrie de la banane au Costa Rica en 1997. La main-d'œvre directement employée dans cette industrie a augmenté de plus de 250 pour cent de 1987 à 1994, puis a diminué de 1994 à 1996 et semble à présent stabilisée; en 1997 elle représentait plus de 13% de la main-d'œvre totale dans le secteur agricole (contre 7 pour cent en 1990).

Tableau 2. Costa Rica - Emploi total, emploi agricole et emploi direct dans l'industrie de la banane, 1990 à 1997

Année

Emploi total (milliers de travailleurs)

Emploi agricole (milliers de travailleurs)

Emploi direct dans l'industrie de la banane (milliers de travailleurs)

1990

1 017,1

263,7

18,8

1991

1 006,6

256,4

22,4

1992

1 043,0

251,2

25,5

1993

1 096,4

247,9

33,1

1994

1 137,6

243,6

35,3

1995

1 168,1

252,4

34,9

1996

1 145,0

247,9

33,0

1997

1 227,3

252,7

33,0

Source: Banco Central de Costa Rica, Indicadores Económicos, Producción y Empleo, 1998 and Ministerio de Economía, Industria y Comercio, y Ministerio de Trabajo y Seguridad Social, Encuesta de Hogares de Propositos Multiples Modulo de Empleo, 1996. CORBANA, Costa Rica: Estadísticas de Exportación Bananera 1997

18. On estime à près de 63 000 le nombre de personnes employées indirectement par l'industrie de la banane (travailleurs des installations portuaires, fournisseurs d'intrants agricoles et de services etc.,) portant ainsi le chiffre de l'emploi total relatif à ce secteur à presque 100 000 emplois, soit huit pour cent de l'emploi total du pays.

19. La plupart des travailleurs agricoles sont classés dans la catégorie de la main-d'œvre non qualifiée, celle dont le salaire minimum est le plus bas. En 1997, le salaire moyen des travailleurs des plantations de banane (c'est-à-dire la main-d'œvre directement employée, sans tenir compte de l'encadrement), aurait atteint le double du salaire minimum national ( fixé à 41 059 colons ou environ 177 dollars E.-U. par mois) de la main-d'œvre non qualifiée. Cette affirmation repose sur des informations statistiques limitées, mais l'on ne dispose pas d'une étude complète des salaires des travailleurs de l'industrie de la banane. Dans certaines exploitations, les travailleurs bénéficient de certains avantages qui s'ajoutent à leur salaire, par exemple, le logement, l'eau courante et l'électricité, dans le cadre de leur contrat de travail.

20. Il convient de signaler que le pourcentage de femmes parmi les travailleurs de l'industrie de la banane serait supérieur à la moyenne nationale de 29,4 pour cent, la plupart d'entre elles travaillant dans les stations de conditionnement. Dans de nombreux cas, sinon dans la quasi-totalité, les femmes qui travaillent dans l'industrie de la banane apportent un second revenu aux ménages de travailleurs des exploitations bananières. Il s'agit là d'une particularité importante puisqu'en raison de la situation rurale relativement isolée de nombreuses exploitations bananières et du développement limité des transports locaux, les autres possibilités d'emploi sont d'autant plus rares, ce qui limite considérablement les sources potentielles de revenus secondaires.

A. QUESTIONS DE SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

21. Puisque 95 pour cent de la superficie consacrée à la production de banane est concentrée dans la zone Atlantique, et compte tenu de la relation entre l'emploi direct et la surface de production bananière, on a pu estimer à environ 31 000 personnes le nombre de travailleurs directement employés par l'industrie de la banane dans la zone Atlantique en 1997. Comme cette industrie crée environ 1,9 emploi indirect par emploi direct, elle devrait générer au total quelque 90 000 emplois (directs et indirects) dans la zone Atlantique. Cela représente en principe près de 97 pour cent de l'emploi total et 89 pour cent de la population active totale (possédant ou non un emploi) dans cette région.

22. Du fait qu'elle emploie les neuf dixièmes de la population active de la région, l'industrie de la banane est manifestement un secteur d'une importance décisive pour l'économie de la zone Atlantique. En outre, le revenu mensuel moyen dans cette zone est le plus élevé de tous le pays, à l'exception de la région centrale où se situe la capitale San José. De plus, d'après une enquête des Ministères du travail et de la sécurité sociale et de l'économie, de l'industrie et du commerce,3 la part des ménages au-dessous du seuil de pauvreté extrême4 et la part des ménages dont les besoins5 "élémentaires" ne sont pas satisfaits dans la zone Atlantique étaient en 1996 les plus faibles de toutes les régions du pays, à l'exception de la région centrale et de la zone Pacifique centre (l'une et l'autre davantage urbanisées).

23. En résumé, il est clair que l'industrie de la banane est un élément majeur de l'économie du Costa Rica. En outre, en raison de la forte dépendance de la zone Atlantique vis-à-vis des emplois directs et indirects liés à l'industrie exportatrice de banane, tout ralentissement notable de cette activité aurait des répercussions régionales graves. Par ailleurs, les emplois et les revenus créés par l'industrie de la banane contribuent pour une part notable à la sécurité alimentaire des ménages dans un vaste secteur de la population. Bien que cette étroite relation spécifique ne fasse pas encore l'objet de données détaillées au niveau des salariés ou des ménages, des travaux de recherche seront vraisemblablement consacrés à cette question primordiale de façon à pouvoir en rendre compte au Sous-groupe lors de sa prochaine réunion

V. ÉTUDE DE CAS DE SAINTE-LUCIE

24. L'agriculture et le tourisme sont les principaux secteurs de l'économie de Sainte-Lucie. En 1997, l'île a reçu environ 600 000 visiteurs dont les dépenses ont été estimées à 766,2 millions6 de dollars EC. Avec un PIB de 1,55 milliard de dollars EC, le tourisme est manifestement le secteur le plus important pour sa contribution à l'économie nationale.

25. Le tableau 3 présente les données concernant les exportations de Sainte-Lucie. Une large part de la baisse des recettes d'exportation observée de 1992 à 1997 peut être expliquée par la diminution en valeur des exportations de banane, qui sont tombées de 185 millions de dollars EC en 1992 à 86 millions de dollars EC en 1997. Toutefois, en 1997, les bananes représentaient encore 59 pour cent des exportations totales de marchandises: la part des exportations de banane dans le PIB total a culminé à 34 pour cent au milieu des années 1980 avant de tomber à 20 pour cent en 1990, puis à respectivement 13 et 8,7 pour cent en 1996 et en 19977.

Tableau 3. Exportations totales, exportations agricoles et exportations de bananes en pourcentage des exportations totales - Sainte-Lucie, 1992 à 1997

Année

Exportations totales de marchandises

Exportations agricoles

Exportations de banane

Part de la banane dans les exportations totales

 

--------------------------Millions de $EC -----------------------

%

1992

310,9

199,5

184,8

59

1993

285,8

162,0

137,9

48

1994

221,5

133,2

115,7

51

1995

253,2

156,0

128,1

51

1996

208,3

145,7

125,8

60

1997

145,4

92,8

85,9

59

Source: Government of St. Lucia, National Statistics Department.

26. La production de banane à Sainte-Lucie se caractérise par un grand nombre de petits producteurs exploitant des parcelles peu étendues sur un terrain fortement incliné. Les principaux facteurs de production de l'industrie de la banane sont la main-d'œvre, les intrants tels que les engrais et les pesticides, et la terre. En raison de la forte déclivité du terrain, les possibilités de mécanisation sont très limitées. La part de la main-d'œvre dans le coût total de production des bananes est estimée à 50 pour cent.

27. La création de possibilités d'emplois et la constitution de revenus pour les petits exploitants sont les effets majeurs du secteur bananier sur le marché des facteurs de production de Sainte-Lucie. Toutefois, l'estimation du nombre total d'emplois salariés est d'autant plus délicate que certains exploitants font appel à la main-d'oeuvre familiale; en effet, la plupart des travailleurs familiaux, contrairement à leurs homologues employés, ne perçoivent pas de salaire.

28. Sur les 55 700 personnes employées à Sainte-Lucie en 1997, 11 050 (soit 19,8 pour cent) travaillaient dans les industries agricoles et forestières. Puisque la banane est de loin la principale culture de l'île, on peut supposer à coup sûr que la grande majorité des emplois agricoles sont liés directement ou indirectement à la production de banane.

29. En s'appuyant sur un échantillonnage non rigoureux, on a estimé que l'exécution de toutes les tâches non liées à la récolte exigeait un travailleur à plein temps par hectare de plantation de banane; ainsi, une superficie de 5 362 ha exigerait approximativement 5 300 employés à plein temps. Il faudrait en outre 4 000 travailleurs supplémentaires à temps partiel pour la récolte et le transport des fruits. Enfin, 200 personnes travaillent dans les installations portuaires et occupent des emplois dans les bureaux et l'administration. Ce calcul a abouti à plus de 5500 travailleurs à temps complet et 4 000 travailleurs à temps partiel directement employés dans le secteur de la banane à Sainte-Lucie. Pour une population de 150 000 personnes le secteur de la banane représente donc une importante source d'emplois et de revenus salariaux dans les régions rurales de l'île.

30. La baisse de la production et des exportations a eu des répercussions préjudiciables sur la viabilité de la filière de la banane à Sainte-Lucie. Les prix au producteur sont fixés sur la base de la valeur des bananes sur le marché d'importation ( principalement le Royaume-Uni). Les frais de transport et de manutention dans les ports, dans lesquels entre une composante fixe importante, sont retirés de cette valeur. Autrement dit, le coût unitaire du transport varie en fonction inverse du volume des expéditions. Par conséquent, lorsque les exportations diminuent, la marge commerciale entre le producteur et le marché d'importation doit nécessairement s'élargir pour couvrir les coûts du circuit de commercialisation, imposant ainsi une baisse des prix au producteur. Par exemple, les prix payés aux producteurs sont passés de 0,16 dollars EC par kg environ à 0,10 dollars EC par kg de 1995 à 1997, alors que les quantités exportées enregistraient une baisse de 112 800 tonnes à 71 400 tonnes. Or, la chute du prix payé aux producteurs s'accompagne d'une nouvelle baisse des quantités exportées. Autrement dit, la chute de la production et celle des prix se renforcent mutuellement. De plus, compte tenu de la rigueur accrue des exigences de qualité sur les marchés d'importation et de la baisse des prix, le nombre de producteurs en activité est tombé de 7 049 en 1993 à 5 698 en 1996, et à 5270 en 1997.

31. Le salaire agricole quotidien varie de 25 à 40 dollars EC. Sur la base d'un salaire agricole indicatif de 35 dollars EC par jour, et d'une semaine de travail de quatre jours, les gains hebdomadaires moyens des travailleurs d'une exploitation bananière s'élèvent à 140 dollars EC. Si l'on évalue à 5 300 le nombre de travailleurs agricoles à plein temps employés par le secteur de la banane et en supposant 50 semaines ouvrées par an, les salaires cumulés versés aux travailleurs des bananeraies s'élèvent à quelque 37,1 millions de dollars EC (13,74 millions de dollars EU). La valeur indicative du salaire quotidien des 3 975 autres employés au moment de la récolte à raison de deux jours par semaine, est supposée égale à 40 dollars EC. Là encore, en supposant 50 semaines de travail par an, les montants versés aux travailleurs à temps partiel s'élèvent à 15,9 millions de dollars EC (5,88 millions de dollars E.-U.). Globalement ces deux chiffres conduisent à une estimation de 53 millions de dollars EC (19,63 millions de dollars E.-U.) pour les salaires versés aux travailleurs agricoles. Ces chiffres supposent pour le travail indépendant et le travail familial une rémunération au même taux que le travail salarié et ne tiennent pas compte des salaires versés par l'association du producteur et les différentes organisations sectorielles à leurs employés, ni des salaires versés à ceux qui assurent le transport des bananes depuis les exploitations jusqu'aux ports; ils donnent néanmoins une indication préliminaire de la contribution du secteur de la banane.

A. QUESTIONS DE SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

32. A Sainte-Lucie, les terres cultivables sont consacrées dans une proportion importante à la production de bananes destinées à l'exportation. De ce fait, l'île doit importer un certain nombre de produits alimentaires, aussi bien pour répondre à la demande de l'industrie touristique, que pour couvrir les besoins des résidents permanents. Parmi les principales denrées alimentaires qui ne sont pas produites sur place (ou dont la production est insuffisante), figurent le riz, le blé, la viande et la chair de volaille, et les produits laitiers (tableau 4)

Tableau 4. Importations de certains produits de base (Sainte-Lucie) 1993-1997

 

1993

1994

1995

1996

1997

Millions de $EC

Viande

39,3

43,1

44,2

46,7

41,7

Produits laitiers et oeufs

19,3

21,4

23,0

24,4

23,8

Céréales

19,9

20,0

23,9

23,1

28,1

Farine

12,0

12,3

12,8

10,9

15,6

Source: Government of St. Lucia, Government Statistics Department.

33. Les revenus obtenus par Sainte-Lucie grâce aux exportations de bananes contribuent certes à sa capacité d'importation de produits alimentaires de base, mais on ne saurait en conclure d'emblée qu'ils sont essentiels à la prise en charge du coût des importations nationales de produits alimentaires, si l'on tient compte par ailleurs de l'importance du tourisme et des apports en devises correspondants. La filière de la banane joue néanmoins un rôle primordial par les revenus qu'elle assure à la population rurale. Les salaires payés aux travailleurs agricoles et/ou les revenus des travailleurs indépendants et familiaux des zones rurales de Sainte-Lucie sont déterminants pour assurer aux ménages ruraux la possibilité d'acheter des produits alimentaires.

34. D'après une estimation approximative du personnel de vulgarisation du gouvernement de Sainte-Lucie, les résidents des zones rurales achètent quelque 60 à 80 pour cent des produits d'alimentation qu'ils consomment. Aussi, un déclin significatif du secteur de la banane se traduirait par un chômage important, lequel aurait en retour des répercussions préjudiciables sur la sécurité alimentaire des ménages dont les revenus sont tributaires de cette industrie. Les caractéristiques spécifiques du relief et du marché ont pour effet de limiter le nombre d'alternatives viables à la production de banane.

VI. RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS

35. Tandis que le montant total des exportations mondiales de banane est évalué à plus de 5 milliards de dollars E.-U. par an et représente ainsi de toute évidence une source vitale de revenus pour de nombreux pays, c'est aux niveaux local et régional qu'il existe un lien étroit entre les revenus créés par l'industrie de la banane et la sécurité alimentaire des ménages. Les variations affectant les quantités exportées ou les prix à l'exportation sont à l'origine de fluctuations des revenus des personnes directement employées dans le secteur de la production de banane, qu'il s'agisse de petits exploitants agricoles ou de salariés des plantations. En outre, les industries secondaires et tertiaires, ainsi que leur personnel ressentent également les répercussions de ces variations.

36. Bien que le présent document fasse apparaître, au moyen de deux études de cas, les liens entre le secteur d'exportation de banane et la sécurité alimentaire, d'autres travaux s'avèrent indispensables pour évaluer de façon plus approfondie le rôle des revenus créés par la production de banane au niveau des ménages et celui de l'ensemble du secteur vis-à-vis de différents paramètres de la sécurité alimentaire, notamment la durabilité.

37. La détermination des relations explicites et précises entre les revenus tirés du secteur de la banane et la sécurité alimentaire au niveau familial exige des études approfondies au niveau des ménages, non seulement dans les pays étudiés ci-dessus, mais aussi dans d'autres pays où la production de banane est une activité économique importante. Une étude de la contribution de la banane-plantain à la sécurité alimentaire serait également un autre thème d'étude à envisager.


1 L'alimentation et le commerce international; document d'information technique n°12, Sommet mondial de l'alimentation 1996

2 Voir FAO/ PAM Rapports spéciaux des missions d'évaluation des récoltes et des disparités alimentaires, Honduras 29/1/99; Nicaragua 5/2/99.

3 Encuesta de Hogares de Propositos Multiples Modulo de Empleo- juillet 1996

4 Lorsque le revenu par tête est inférieur au coût d'un panier alimentaire de base.

5 Lorsque le revenu par habitant est supérieur au coût du panier alimentaire de base, mais inférieur à un panier de référence tenant compte de l'alimentation et de différents besoins tels que l'éducation, le logement, l'habillement, etc.

6 2,7 $EC = 1,0 $EU

7 Données provisoires du Government Statistical Department - St Lucia.