Retour de l’eau d’irrigation


Après le passage de El Niño, les agriculteurs du Pérou apprennent à rebondir à la suite d’un désastre

Une brigade d’agriculteurs travaille d’arrache pied pour nettoyer les canaux d'irrigation après les violentes inondations provoquées par El Niño. ©Soluciones Prácticas

07/05/2018

Après des jours et des jours de fortes précipitations, Hernan Espinoza observait ses champs. Ils étaient inondés, certains même complètement détruits. Il s’est retrouvé dans la même situation que bon nombre des membres de sa petite communauté de Tambogrande sur la Côte nord du Pérou: aux prises avec la dévastation, leurs exploitations et leurs champs ont été gravement endommagés par les inondations, les orages et les glissements de terrain, provoqués par le phénomène El Niño Costero (côtier) qui s’est abattu sur la région de janvier à mars 2017.

Hernan a vu son village, situé au fin fond de la vallée de San Lorenzo, perdre 60 pour cent de ses champs. «Après les inondations provoquées par El Niño, nos cultures ont été anéanties et presque toute la capacité de production a été perdue,» se souvient-il. Il n’avait jamais vu rien de semblable auparavant. 

La destruction des terres agricoles qui étaient, jusqu’à alors source de nourriture et de  subsistance, a plongé Tambogrande dans une grave crise. Mais avant de pouvoir s’occuper de leurs terres, ils devaient résoudre d’autres problèmes: les orages avaient rempli les canaux d’irrigation de pierres et de boue. Hernan souligne que, «les orages ont provoqué des glissements de terrain qui à leur tour ont obstrué nos canaux d’irrigation. C’était une triste contradiction.»

Plus de 60 kilomètres de canaux d’irrigation qui alimentent les exploitations agricoles de 1000 familles étaient bouchés. Nettoyer ces canaux s’est avéré une entreprise monumentale. Hernan et ses voisins ont formé 25 commissions d’irrigation spéciales, et en travaillant de concert ils sont parvenus à déblayer les canaux et ainsi à libérer l’eau pour l’acheminer jusqu’à leurs champs. «Avec le soutien de la FAO, outre le matériel reçu et la formation dont nous avons bénéficié pour nettoyer les canaux et relancer l’acheminement de l’eau, chacun de nous a reçu un salaire journalier de 10 USD.»

« Le travail avec les brigades et la formation concernant la remise en état des canaux ont fait que notre communauté de Tambogrande est aujourd’hui prête pour intervenir rapidement en cas d'urgence… Cela nous permettra de mieux faire face aux futures inondations.» - Hernan Espinoza

La FAO utilise les programmes «espèces contre travail» lors des situations d’urgence de ce type car ils fournissent des emplois à court terme aux populations vulnérables sur le plan économique. Ils mettent également l’accent sur la réhabilitation des ressources communautaires communes, telles que les canaux d’irrigation. Grâce à ce programme, les agriculteurs ont gagné un revenu, leur permettant de conserver leur autonomie et de répondre à leurs besoins les plus pressants. Ces programmes réduisent considérablement la probabilité que les agriculteurs abandonnent leurs champs pour partir ailleurs à la recherche de revenus.

 

Après avoir débloqué les canaux d’irrigation, les agriculteurs de Tambogrande ont axé leur attention sur les champs qui avaient été ravagés par les orages. De nombreux agriculteurs ne savaient pas comment restaurer la santé et la productivité de leurs terres. Hernan et ses pairs se sont portés volontaires pour apprendre ces techniques et divulguer ces connaissances auprès de leur communauté.

Environ 1000 familles ont participé au nettoyage des canaux d’irrigation et à la plantation de jardins potagers familiaux, grâce à la formation dispensée et aux matériels fournis par la FAO; ©Soluciones Prácticas

«Il ne suffit pas uniquement de semer pour que les terres soient productives. J’ai bénéficié, ainsi que 30 autres principaux producteurs dans la vallée, d’une formation axée sur la gestion agronomique, la gestion des semences, de l’irrigation et enfin des risques. Nous avons dû suivre une formation d’une semaine et ceux d’entre nous qui ont réussi le cours ont eu par la suite la responsabilité de transmettre ces connaissances aux membres de nos Commissions d’irrigation,» dit Hernan.

Grâce à l’aide de la FAO, ils ont ensemencé de petits jardins potagers familiaux avec des cultures à croissance rapide et ayant une valeur commerciale. Ces produits n’étaient pas seulement consommés par ceux qui les cultivaient, mais également échangés et vendus pour compléter les revenus et les réserves alimentaires des familles. Ils ont, au total, remis en état 700 hectares de terres avec environ 30 kilos de semences de maïs et de niébé.

«Le maïs et le niébé constituent d’excellentes cultures car vous les plantez aujourd’hui et seulement après quelques semaines vous pouvez déjà les récolter,» explique Hernan.

Les canaux d'irrigation permettaient d’acheminer l’eau jusqu’à 1 000 exploitations familiales. Une fois les canaux nettoyés, les agriculteurs étaient en mesure de cultiver de précieuses cultures commerciales telles que le niébé en vue de subvenir aux besoins de leurs familles. ©Soluciones Prácticas

Hernan et ses pairs n'oublieront pas de sitôt la formation dont ils ont bénéficié: Ils sont tout à fait conscients qu'avec les changements climatiques, un autre phénomène dangereux comme El Niño pourrait survenir d’un jour à l’autre. Cependant, la prochaine fois, ils sauront comment réagir pour gérer la situation.

 

«Le travail avec les brigades et la formation concernant la remise en état des équipements nécessaires à la production ont fait que notre communauté de Tambogrande est aujourd’hui prête pour intervenir rapidement en cas d'urgence; Nous savons désormais comment rapidement libérer l’eau de nos canaux et nous savons également quoi et comment planter pour garantir notre approvisionnement alimentaire dans le cas d’un évènement futur du type El Niño. Cela nous permettra de mieux répondre aux futures inondations», dit Hernan, pleinement convaincu.


Pour en savoir plus:

2. Zero hunger, 8. Decent work and economic growth, 9. Industry innovation and infrastructure, 13. Climate action