Préserver les saveurs du Monténégro


Les montagnards profitent de l’agrotourisme et de leurs traditions culinaires

Le paysage et les traditions culinaires du Monténégro sont un trésor pour les montagnards et une occasion d’améliorer leurs moyens de subsistance grâce à l’agrotourisme. ©EBRD-FAO/Dermot Doorly

10/12/2019

Danka Sekularac originaire du nord du Monténégro vit une vie hors réseau. Sa maison fonctionne à l’énergie solaire. L’eau est puisée dans un ruisseau voisin. Sa nourriture est faite maison.

Son environnement - les crêtes montagneuses du parc national de Biogradska Gora avec ses vastes forêts de pins, ses prairies vallonnées, ses ruisseaux vierges et ses lacs glaciaires - dégage l’impression d’un monde intact.

Mais la vie là-bas, peut être dure.

Les petits exploitants agricoles comme Danka dépendaient beaucoup de l’agriculture. À tel point qu’une mauvaise récolte de bleuets ou une mauvaise saison de miel pourrait suffire à mettre leur gagne-pain en péril. Les possibilités étaient rares et les jeunes déménageaient ou étaient tentés de déménager ailleurs.

Mais avec l’aide de la FAO et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), les opportunités deviennent possibles.

Une centaine de petits agriculteurs des villages de montagne du nord du Monténégro récoltent aujourd’hui les fruits de l’agrotourisme et/ou sont reconnus pour avoir préservé des traditions culinaires séculaires et un mode de vie qui, ailleurs, a été abandonné depuis longtemps ou s’éteint lentement.

Gauche : Maya Kljajić, l’une des agricultrices qui a bénéficié de l’initiative agrotouristique, préparant la nourriture pour ses invités. Droite : Les touristes dégustent du fromage local, de la viande séchée, du pain maison et de l’eau-de-vie. ©EBRD-FAO/Dermot Doorly

Danka, 30 ans, accueille des touristes, venant principalement d’autres régions d’Europe, dans des « katuns » ou des cabanes en bois séculaires utilisées autrefois par les bergers nomades. Elle leur propose des randonnées pédestres et équestres guidées, des cours de fabrication de fromage, et les ravit avec des aliments frais et biologiques.

« Nous avons de la nourriture biologique, toujours biologique. On a des myrtilles, des champignons, en fait, tout. Nous n’achetons rien au marché. C’est ce qu’il y a de mieux parce que nous faisons la nourriture avec nos mains et nous savons comment elle est faite. Et c’est délicieux pour les touristes », dit Danka.

Elle ajoute : « C’est la première année de la saison touristique, et c’est une très bonne saison. Le mois de juillet a été complètement rempli d’invités. Je ne m’attendais pas à autant d'invités... Ma vie a beaucoup changé. Je dois peut-être travailler davantage et plus fort, mais c’est très agréable parce que je rencontre des gens différents et je peux gagner de l’argent. »

Le personnel du projet FAO-BERD a travaillé avec des ministères, des organisations non gouvernementales, des agences de tourisme, des hôtels et des restaurants de la région de Danka et des municipalités voisines pour promouvoir l’agrotourisme et les aliments locaux de haute qualité.

Grâce à ce projet, les agriculteurs se sont mis en contact avec les propriétaires de restaurants et d’hôtels, et les agriculteurs et les chefs cuisiniers ont été formés à l’entreposage et à la cuisson des produits locaux afin d’améliorer leur qualité unique et de respecter les normes de sécurité alimentaire, le tout dans le but d’encourager les habitants à maintenir leurs traditions et à augmenter leurs revenus.

Produit principalement par des femmes, le Kolasin Lisnati sir (fromage en couches) est l’un des plus récents aliments labellisés IG du nord du Monténégro. ©EBRD-FAO/Dermot Doorly

« Servir des plats traditionnels soutient directement les agriculteurs. Nos pommes de terre, notre veau, nos fruits, nos légumes et nos produits laitiers proviennent tous des agriculteurs locaux », explique Plana Pejović, propriétaire du restaurant, qui a participé à la formation FAO-BERD.

Un déjeuner typique à son restaurant Serdar près de Mojkovac se composait de fromage à la crème frais et d’une soupe crémeuse aux champignons servie avec pommes de terre et fromage. À l’entrée, le restaurant vend également du jus de myrtille, du miel et d’autres produits locaux aux visiteurs.

Ailleurs dans le nord du Monténégro, la FAO et la BERD, avec un financement du Luxembourg, ont aidé les agriculteurs à obtenir une reconnaissance internationale - Statut d’Indication Géographique (IG) - pour certains de leurs aliments grâce à leur processus de production unique et de haute qualité.

Crnogorska Goveđa pršuta (viande bovine séchée du Monténégro) et Crnogorska Stelja (viande ovine séchée et fumée du Monténégro) ont obtenu le statut IG en 2018.

Cinq autres produits ont tiré leur inspiration du project et ont été enregistrés comme IG, dont le Kolasin Lisnati sir (fromage en couches), qui est principalement produit par des femmes.

Pour obtenir la certification IG, le personnel du projet a travaillé avec les agriculteurs, les transformateurs d’aliments et les autorités locales pour les aider à améliorer les normes de qualité et de sécurité alimentaire de leurs produits. Il s’agissait notamment d’aider les producteurs à élaborer et à convenir d’un code de bonnes pratiques qu’ils doivent respecter pour vendre leurs produits sous le label IG - par exemple, les aliments doivent provenir des zones désignées et des normes de qualité et d’hygiène élevées doivent être respectées. Le projet a également soutenu le dialogue politique et l’élaboration de normes de sécurité alimentaire appropriées dans le secteur de la viande au niveau national, et a sensibilisé les producteurs et les consommateurs aux nouvelles normes.


La viande de bœuf séchée portant le label IG, par exemple, doit provenir des meilleures coupes de bœuf frais nourri principalement d’herbe, salé au sel marin, fumé au bois de hêtre et séché à l’air de la montagne. Cela donne à la viande sa couleur prune foncée, sa consistance et sa texture et évite tout goût amer.

« Je suis concerné par la production de viande - prosciutto de bœuf et viande ovine - depuis mon plus jeune âge parce que mes ancêtres, mon grand-père et ma grand-mère le faisaient aussi », dit le producteur de viande, Almir Aldrović

« Je suis très enthousiaste à l’idée de recevoir la certification IG parce que cela nous ouvrira de nouvelles opportunités, de nouveaux marchés et de nouvelles activités », ajoute-t-il.

En soutenant les traditions locales pour améliorer les moyens d’existence et autonomiser les communautés, la FAO et ses partenaires œuvrent pour un monde libéré de la pauvreté et de la faim.

Pour en savoir plus :

2. Zero hunger, 8. Decent work and economic growth, 12. Responsible consumption and production