Reconnaissable par sa couleur verte caractéristique et son goût fort et piquant, le wasabi (Eutrema japonicum) est, depuis des siècles, très prisé au Japon. Selon certains ouvrages, les moines bouddhistes consommaient déjà de la «soupe froide au wasabi» au XIIe siècle. Au XIVe siècle, ils ont commencé à manger du sashimi agrémenté de vinaigre de wasabi et, depuis lors, le wasabi s’est peu à peu fait une place dans les assiettes de tous les Japonais. Aujourd’hui, il est consommé partout dans le monde.
Le wasabi est une plante originaire de la région de Shizuoka (Japon), dont la culture a commencé il y a 400 ans. Depuis, les agriculteurs n’ont cessé de peaufiner leurs méthodes de production, au point de parvenir à un système incroyable qui tire le meilleur parti des ressources naturelles de la région et qui a permis de créer le mode de production efficace et durable que l’on connaît aujourd’hui. En 2018, la FAO a classé les exploitations de wasabi dans la région de Shizuoka parmi les Systèmes ingénieux du patrimoine agricole mondial (SIPAM), reconnaissant ainsi les traditions agricoles et l’importance culturelle de la région.
Une affaire de famille
Kichie Shioya cultive le wasabi à Shizuoka, tout comme son père, son grand-père et son arrière‑grand-père l’ont fait avant lui. C’est, en quelque sorte, une affaire de famille. Aujourd’hui, il dirige la Fédération des syndicats du wasabi à Shizuoka et connaît bien les particularités du système qui rend la culture du wasabi si singulière.
«Le wasabi est une plante particulière», affirme l’agriculteur. «Si l’eau devient boueuse, les racines risquent de pourrir. Elle doit donc toujours être riche en oxygène.»
C’est pourquoi la régulation de l’eau est un élément si essentiel du système agricole mis en place à Shizuoka. Les terres sont cultivées selon le mode de culture Tatamiishi, qui a été mis au point à la fin du XIXe siècle. Dans le cadre de ce mode de culture, les terrains en pente sont aménagés en une série de terrasses, recouvertes de grosses pierres, de cailloux et de sable, qui servent de filtres naturels pour les quantités considérables d’eau de source qui se déversent sur les champs de wasabi. La méthode Tatamiishi permet à l’eau de pénétrer dans le sol sans stagner, ce qui contribue à réguler l’afflux d’eau de manière naturelle et à évacuer l’excédent. Par ailleurs, l’eau de source qui coule en abondance dans la région se maintient à une température avoisinant les 13 °C toute l’année, ce qui permet de réchauffer ou de rafraîchir le wasabi et ainsi de conserver une température idéale pour sa croissance.
«L’eau ruisselle et s’infiltre dans les sols où le wasabi est planté, ce qui favorise l’absorption d’une eau claire», explique Kichie Shioya. «Progressivement, l’eau devient de plus en plus claire. Notre région possède de grandes quantités de pierres ponces constituées de cendres volcaniques, très poreuses, qui font que les eaux souterraines sont disponibles en abondance.»