La détermination d’une jeune fille devenue personnalité influente dans sa communauté en Papouasie-Nouvelle-Guinée


Hallilah convertit les connaissances qu’on lui a transmises et l’aide qu’elle a reçue de la FAO en moyens de subsistance renforcés pour ses concitoyens dans son pays insulaire.

Pour la famille d’Hallilah Nakumai, dans le pays insulaire de Papouasie-Nouvelle-Guinée, l’éducation doit primer sur le reste. Hallilah, qui a obtenu un diplôme universitaire en agriculture tropicale, est rentrée au village en apportant son expertise pour faire équipe avec la FAO et le programme STREIT de l’Union européenne afin de renforcer les moyens de subsistance dans sa communauté. ©FAO

07/03/2022

«Douce-amère» est le terme qu’emploie Hallilah Nakumai pour qualifier la vie au village de Dandan où elle a grandi, sur la côte orientale de l’île principale de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Ce fut une enfance passée à naviguer en pirogue, à pêcher, à tresser des jupes en raphia et des paniers bigarrés, à jardiner, à débroussailler des lopins et à apprendre les cérémonies de sa culture.

Mais les réalités du monde rural où elle se trouvait, dans cet arrière-pays qui subit les crues fréquentes du grand fleuve Sepik, étaient austères. Et c’est ce qui l’a motivée à travailler à l’amélioration des moyens d’existence des gens de son village.

De nombreuses communautés rurales de Petits États insulaires en développement (PEID) sont de plus en plus fréquemment touchées par des phénomènes météorologiques extrêmes imputables au changement climatique. Ces États insulaires sont aussi confrontés à des contraintes d’ordre géographique qui limitent leur accès aux marchandises et aux produits alimentaires et le commerce qu’ils pourraient en faire, et sont en général tributaires de leurs importations à un degré excessif.

La FAO et l’Union européenne s’attachent tout particulièrement à aider les PEID qui se trouvent confrontés à ces défis complexes. L’appui apporté à Hallilah et à sa communauté, au retour de la jeune fille au village, illustre concrètement les modalités de cette aide conçue pour répondre à leurs besoins.

Le parcours d’Hallilah vers la prise d’initiatives

Le village natal d’Hallilah se situe à six kilomètres de la route la plus proche. Si bien que le cacao, le poisson et la vanille produits au village ne peuvent être acheminés au marché qu’au terme d’un long trajet à pied. «Les familles ne peuvent assurer d’autres dépenses que celles de leurs premiers besoins et il leur est difficile de subvenir à l’éducation de leurs enfants», explique Hallilah.

L’école primaire la plus proche est elle aussi située à une distance considérable, nécessitant deux heures et demie de marche, ce qui explique qu’un grand nombre d’enfants du village abandonnent l’école. Mais les parents d’Hallilah prenaient sa scolarité très au sérieux, l’aidant à s’engager sur la voie d’études universitaires destinées à lui donner un rôle de premier plan dans la communauté.

«Mes parents, qui avaient le souci de mon éducation et de celle de mes frères et sœurs, ont agi pour rendre celle-ci possible», en cultivant des jardins et en lavant du sagou (un féculent, aliment de base de cette région) afin de pouvoir acquitter les frais de scolarité. «Ils nous aidaient aussi à notre retour de l’école pour les devoirs et les évaluations, en nous donnant de bonnes idées pour les traiter.» 

Les sacrifices consentis par cette famille et sa détermination ont été récompensés. Se voyant offrir la possibilité exceptionnelle, pour une jeune fille issue de ce village, de poursuivre des études, Hallilah a quitté sa famille pour entrer en internat, avant d’entamer un cursus universitaire de quatre ans, sanctionné par un diplôme de licence en agriculture tropicale de l’Université des ressource naturelles de Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Elle a acquis des connaissances précieuses en agronomie, approfondissant les techniques de sélection végétale et animale, en biotechnologie et dans les domaines de l’agroalimentaire et de l’entrepreneuriat.

Parmi les autres choses importantes que l’université lui a enseignées, il y a «la manière de prendre en main son apprentissage et, à force de discipline, devenir un as de la gestion du temps, savoir maîtriser des discussions difficiles, demander de l’aide, renforcer son intégrité et gagner en persévérance».

Hallilah est devenue trésorière et coordonnatrice de la coopérative de la communauté, offrant des conseils techniques aux producteurs de cacao, de poisson et de vanille et aux éleveurs. ©FAO

Tout ceci s’est avéré précieux à son retour au village en 2020. Hallilah est devenue trésorière et coordonnatrice de la coopérative SISIDA, un groupement rural à vocation commerciale réunissant trois collectivités locales. (SISIDA est un terme composé des premières syllabes des trois noms de ces villages Sir, Sikan et Dandan.)

Elle a aussitôt sollicité et obtenu l’aide du Programme d’appui à l’entrepreneuriat, à l’investissement et au commerce en milieu rural en Papouasie-Nouvelle-Guinée (EU-STREIT PNG); ce programme, financé par l’Union européenne et mis en œuvre par la FAO, a pour vocation de rationaliser et d’améliorer la production agroalimentaire des populations villageoises.

La participation d’Hallilah au programme a permis à celle-ci, ainsi qu’à d’autres villageois, de suivre des formations, d’obtenir des intrants agricoles indispensables à une meilleure protection de leurs cacaoyers contre les organismes nuisibles et de les aider à pratiquer la pisciculture du tilapia. Le programme a également facilité l’accès des agriculteurs aux services bancaires.

Hallilah s’emploie au quotidien à encadrer le travail des producteurs de cacao, de poisson et de vanille et celui des éleveurs, en leur prodiguant des conseils techniques, à quoi s’ajoutent la rédaction de rapports et des tâches de sensibilisation. Malgré un manque de liquidités pour couvrir les dépenses de fonctionnement, et la nécessité d’expliquer aux villageois le principe d’une coopérative, qui ne leur était pas familier, elle a conservé sa détermination.

Hallilah oriente et encadre des étudiants stagiaires venus travailler dans la communauté. Elle a pour ambition de faire de sa communauté un exemple à suivre dans le pays. ©FAO

Redéfinir les rôles des femmes

On ne s’étonnera pas que ce rôle amène son lot de frustrations. Parmi les problèmes auxquels elle se heurte, il y a le manque de confiance que lui manifestent certains agriculteurs. «Ils disent “c’est une femme, elle se mariera bientôt, partira et le projet s’effondrera”. Je fais aussi l’objet de remarques désobligeantes sur le fait que je suis une femme à la tête de ce projet et sur le savoir représenté par mes diplômes», confie Hallilah. Son père Denny, qui est président de la coopérative SISIDA, lui a été d’un grand soutien, l’exhortant à ne pas abandonner.

Hallilah assure aussi la supervision d’étudiants stagiaires que son ancienne université envoie travailler dans cette communauté. Elle dispense ses conseils à ces jeunes et leur fait part de son expérience.

Selon elle, il est essentiel de réfléchir à l’avance aux «avantages décisifs qu’apporteront des études supérieures à sa famille et à la collectivité», et, ajoute-t-elle à l’intention de ces jeunes, «lorsque vous aurez obtenu vos diplômes et serez retournés dans votre communauté, n’attendez pas pour mettre vos acquis en pratique.»

Agir en chef de file, reconnaît Hallilah, «n’a décidément rien de simple» et suppose des sacrifices. «Ce rôle oblige à apprendre à se montrer patient, à pratiquer l’humilité, et à se servir en dernier», en se gardant de toute agressivité ou expression de vanité. Mais surtout, elle enjoint à chacun d’apprendre à toujours agir de manière positive et de ne jamais abandonner la partie. 

Mettant ce conseil en pratique, Hallilah s’emploie à donner corps à ses ambitions: voir davantage de jeunes se mobiliser et la coopérative SISIDA être érigée en modèle dans le développement de l’agriculture et des zones rurales en Papouasie-Nouvelle-Guinée.


Pour en savoir plus

5. Gender equality, 8. Decent work and economic growth, 14. Life below water