La dimension humanitaire de l’agronomie


L’agronome de la FAO, Jehad Al Meqdad reste dans son pays, la Syrie, pour aider les agriculteurs

Dès son plus jeune âge, Jehad al Meqdad voulait être agronome et aider les agriculteurs à produire des denrées alimentaires. Depuis le début de la crise en Syrie, ce rêve est devenu plus important que jamais. ©FAO/Hasan Bilal

19/08/2022

Des millions de Syriens ont fui leur pays après le déclenchement de la crise en 2011. Jehad Al Meqdad était tenté de faire de même.

«Pendant un temps, j’ai pensé quitter la Syrie en raison des difficultés de la crise, mais je n’ai pas pu m’y résoudre», raconte Jehad, agronome aujourd’hui âgé de 52 ans qui travaille pour la FAO. «J’ai donc pris la décision de rester en Syrie et d’œuvrer sans relâche à construire la résilience qui doit permettre aux agriculteurs de rester sur leurs terres et de continuer d’y produire. C’est un choix très important dans ma vie».

Originaire du gouvernorat de Daraa, dans le sud du pays, Jehad est agronome depuis près de trois décennies, ayant d’abord travaillé pour le Ministère de l’agriculture, puis pour la FAO durant ces cinq dernières années. Il est spécialiste de la formation des petits exploitants agricoles et des ménages dirigés par des femmes, leur apprenant à utiliser de meilleures techniques agricoles et leur transmettant de nombreux savoir-faire, qu’il s’agisse de la sélection des semences ou du choix des dates des moissons.

«Les réactions positives des agriculteurs me vont droit au cœur. Fiya est l’une des agricultrices que nous avons rencontrées dans le gouvernorat de Daraa. J’ai perçu sa gratitude envers nous pour l’appui que nous lui avons fourni», affirme Jehad. «J’éprouve un véritable contentement à continuer d’aider un nombre croissant de personnes à assurer leur alimentation, avec des résultats encourageants».

Une véritable vocation

«Quand j’étais enfant, je rêvais d’être agronome», déclare Jehad dont la famille possède une exploitation dans son village natal. Enfant, il était fasciné par le paysage qui verdit avec la croissance des végétaux.

«J’étais très heureux quand j’étudiais à la faculté d’agriculture. J’étais un étudiant assidu, passionné par ce domaine. J’ai obtenu mes diplômes et j’ai fait de mon rêve une réalité.»

La Syrie connaissant des déplacements massifs de populations, l’activité de Jehad à la FAO, qui consiste à former de nouveaux agriculteurs, est décisive pour ce secteur et pour la sécurité alimentaire du pays. En haut, à gauche: ©FAO/Jafar Almerei. En bas à droite: ©FAO/Jafaar Merie

Une Syrie différente

Onze ans après son déclenchement, la crise en cours a bouleversé presque tous les aspects de la vie, y compris l’activité agricole, qui est la première source de nourriture et le premier moyen de subsistance des populations. Douze millions de Syriens sont confrontés à des degrés élevés d’insécurité alimentaire aigüe.

En Syrie, Jehad et ses collègues de la FAO consacrent une part importante de leur travail à traiter la situation d’après-crise.

«Il est particulièrement nécessaire de venir en aide aux petits exploitants agricoles qui ont perdu leurs moyens de production et leur source de revenu. Ils travaillaient dans l’agriculture mais il leur manque à présent l’eau servant à l’irrigation des cultures, et ils n’ont pas non plus les intrants nécessaires à l’établissement de plantations, ils ont donc besoin d’une aide importante», précise-t-il.

C’est là le type d’aide qu’apporte Jehad en tant qu’agronome.

Son travail quotidien consiste à conseiller les agriculteurs sur la conduite des cultures, à dispenser des formations aux techniques de plantation, à diffuser les pratiques optimales en matière de gestion des sols et d’implantation d’unités de transformation des aliments.

L’un des objectifs centraux de la FAO dans le pays est de fournir un accompagnement aux petits exploitants locaux à l’aide de divers types d’outils de production servant aux cultures et à l’élevage. Aider les communautés à faire un usage meilleur et plus durable des ressources naturelles, telle l’eau, en est un autre.

L’enseignement de formations est au cœur de toutes ces interventions et Jehad, comme les autres experts de la FAO, font en sorte que les populations rurales rentrées au pays puissent continuer de pratiquer les cultures vivrières qui permettent aux familles de se nourrir.

«Durant les années de crise, le nombre de techniciens expérimentés et celui des agriculteurs se sont réduits. Nombreux sont ceux qui ont choisi d’émigrer. Les formations et l’accompagnement technique sont particulièrement nécessaires pour la nouvelle génération d’agriculteurs en Syrie», ajoute-t-il.

Jehad aide des écoliers à apprendre à connaître les semences et à prendre soin des végétaux par la création de potagers scolaires dans l’ensemble du pays ©FAO/Hasan Bilal

Un travail riche de sens

La vocation que s’est choisie Jehad est riche de sens à ses yeux, lorsqu’il constate les changements que son travail introduit dans la vie des gens.

Il tire une satisfaction particulière du projet Éducation pour tous dont la FAO a eu l’initiative, qui consiste à créer des jardins potagers grâce auxquels des élèves des écoles primaires apprennent à s’occuper des plantes. Les élèves consomment ce qu’ils produisent, même si le but premier du projet est à caractère éducatif. Jehad a été particulièrement impressionné par les élèves qui participaient à ce programme en ayant des besoins spécifiques, et il a travaillé auprès d’eux en leur accordant une attention particulière afin qu’ils profitent au mieux de cette activité.

Dans un autre projet, il s’agissait de travailler avec des femmes devenues veuves durant la crise, en vue de relever le niveau de revenu de leur ménage. Cela a consisté à mettre en place des unités de transformation pour leurs fruits, leurs légumes et leur production laitière. La FAO a fourni les équipements, dont des fourneaux, des réfrigérateurs, et des machines à emballer, et a aidé créer des échoppes où les femmes peuvent mettre en vente ce qu’elles fabriquent: de la mélasse de grenade, des confitures de figue et d’abricot, des jus de fruits et des produits laitiers. La motivation indéfectible de ces femmes lui a été une source d’inspiration.

Faire plus, mais mieux

Ce travail est important pour les agriculteurs mais pas seulement: comme le souligne Jehad, un secteur agricole qui fonctionne bien est un atout déterminant pour la sécurité alimentaire de toute la population.

«Nous jouons un rôle décisif en les aidant à maintenir leur production vivrière qui leur permet d’assurer l’alimentation de leurs enfants et celle d’autres collectivités voisines.» Selon lui, c’est là «un volet très important du travail de la FAO».

Pour ce qui est de l’avenir, ses plans sont simples: faire la même chose mais en mieux.

«Je continuerai de chercher le moyen le plus rapide et le plus efficace d’aider les agriculteurs des zones rurales à reconstituer leurs capacités de produire des denrées alimentaires pour eux-mêmes et leurs voisins», affirme Jehad.

Jehad a foi en ce pays et en son aptitude à opérer un redressement. «Mes enfants voulaient quitter le pays. Je leur ai dit que nous gagnerions en résilience si nous restions sur place et travaillions à la reconstruction», explique-t-il. «Je suis convaincu que mes enfants peuvent eux aussi réussir dans ce pays. Je les aide à se maintenir ici. Il y a toujours de l’espoir».

Lors de la Journée mondiale de l’aide humanitaire, nous manifestons notre appui aux personnes directement affectées, qui sont toujours les premières à réagir lorsqu’une catastrophe survient, et à la communauté mondiale qui les soutient dans leur relèvement. Ce sont des bénévoles, des professionnels et des personnes frappées par une crise qui fournissent en urgence de la nourriture, de l’eau, des soins de santé, des abris, une protection et bien plus encore. #ToutUnVillage pour aider ceux qu’une crise vient à frapper.


En savoir plus

2. Zero hunger, 10. Reduced inequalities, 16. Peace justice and strong institutions