Les vaches à l’heure du numérique en Géorgie


Les travailleuses du secteur vétérinaire contribuent à la traçabilité et à la sécurité sanitaire des aliments en Géorgie.

Shorena Jambazishvili, technicienne vétérinaire, charge les données relatives aux animaux vaccinés dans le Système national d’identification et de traçabilité des animaux, mis en place en Géorgie avec l’assistance technique de la FAO. ©FAO/David Khelashvili

28/04/2023

En février, quand les rues de Sachkhere (Géorgie) sont blanches de neige et qu’il fait -2 °C dehors, Shorena Jambazishvili, 39 ans, rassemble ses gants en plastique, des seringues neuves, quelques médicaments et un smartphone avant de se rendre dans un élevage.

Il est tôt le matin et c’est l’heure de la première session de vaccination. En tant que technicienne vétérinaire, Shorena travaille avec un vétérinaire pour vacciner toutes les vaches de la municipalité, puis archiver électroniquement les informations.

Dans le binôme, elle est chargée de consigner toutes les données dans le Système national d’identification et de traçabilité des animaux (NAITS), un outil en ligne qui a révolutionné la traçabilité animale en Géorgie au cours des cinq dernières années. Mis en place par le Gouvernement géorgien avec l’assistance technique de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le système contient les données relatives à tout le bétail dont la loi demande l’enregistrement, ainsi que les données concernant les éleveurs et les lieux d’élevage.

Assurer la traçabilité des animaux et des produits d’origine animale au fur et à mesure et de manière rapide grâce au NAITS fait partie intégrante de la sécurité sanitaire des aliments. En permettant d’enregistrer et de contrôler l’origine et la santé des animaux à chaque étape de la chaîne de valeur, le NAITS permet la production d’aliments salubres d’un bout à l’autre de la filière. 

Naissance, origine, statut vaccinal, état de santé et même couleur de l’animal sont désormais facilement consultables via l’outil en ligne. Ces informations aident les acheteurs à prendre des décisions éclairées et judicieuses à l’heure de choisir de la viande et d’autres produits d’origine animale. Par exemple, les codes QR présents sur les produits permettent aux consommateurs de consulter l’origine, l’âge et d’autres informations de base concernant le produit qu’ils s’apprêtent à acheter.

Actuellement, le NAITS contient des informations relatives à plus d’un million de bovins, en grande partie grâce aux vétérinaires et aux techniciens, qui sont la clé de voûte du système car ils recueillent et enregistrent les données sur le terrain.  

«En période de vaccination, il n’y a pas une minute à perdre, c’est pourquoi nous nous rendons quotidiennement dans les élevages, tôt le matin et tard le soir», explique Shorena.

Une seringue dans une main et un smartphone dans l’autre, elle remonte une rangée d’une centaine de vaches, dont certaines la saluent en meuglant, tandis que d’autres frottent maladroitement leur front contre la barrière en bois pour gratter leur énorme tête.

Elle choisit une vache à vacciner puis dit en souriant: «Ma famille trouve difficile que je sois si souvent absente de la maison [...] car ils ne sont pas habitués.»

Les techniciennes vétérinaires vaccinent les animaux, puis archivent électroniquement les informations dans le NAITS, le système de traçabilité mis en place par la Géorgie avec l’aide de la FAO. ©FAO/David Khelashvili

Un nouveau travail

Il y a trois ans, Shorena a décidé de quitter son quotidien de femme au foyer et d’apprendre un nouveau travail. Elle a choisi de suivre des cours pour devenir une technicienne vétérinaire diplômée.

Shorena et son mari, Arsen, qui travaille aussi dans le secteur vétérinaire, ont deux enfants: Otar, 15 ans et Mariam, 13 ans. Shorena dit qu’Otar et Mariam ont eu du mal à s’habituer à certains changements car ils étaient habitués à ce que leur mère soit toujours disponible. Cependant, son nouveau travail offre d’autres avantages.

«Bien évidemment, ma situation financière s’est améliorée», explique Shorena. Elle ajoute: «Mais, ce qui est encore plus important, c’est ce que j’apprends. Chaque jour, je découvre quelque chose de nouveau. J’en apprends plus sur la médecine vétérinaire, les maladies animales, et cela me fait grandir.»

«Plus une femme est instruite, plus elle est indépendante [...]. Et c’est capital», déclare-t-elle.

Pour ne rien gâcher, cette formation s’est aussi révélée amusante. Shorena et ses collègues ont particulièrement aimé utiliser des outils, tels que des ordinateurs, des tablettes et des smartphones.

«Nous recueillons les informations et les archivons électroniquement: numéro d’identification des propriétaires des animaux, nom de l’élevage, etc. Les données sont associées au numéro d’identification inscrit sur l’étiquette que porte chaque vache. Ensuite, nous ajoutons les informations concernant les vaccins», explique Shorena avec enthousiasme en soulignant que la dimension technologique de son travail l’intéresse particulièrement.

Cela a également été une révélation pour Tea Kvatadze, une collègue de Shorena, également technicienne vétérinaire à Sachkhere.

«Utiliser des nouvelles technologies s’est révélé facile et [...] utile sur le plan professionnel. Notre travail est désormais tourné vers l’avenir, alors qu’avant nous faisions tout sur papier», assure Tea avant d’ajouter: «Cela a changé ma vie. J’adore ce que je fais et je prends plus de plaisir à travailler.»

En 2022, 10 798 bêtes ont été enregistrées dans la municipalité de Sachkhere grâce à Shorena, Tea et leurs collègues. Marina Macharashvili, inspectrice principale régionale de l’Agence nationale des aliments en Iméréthie (Géorgie occidentale) assure: «Ils travaillent très énergiquement. Il y a beaucoup à faire. Je ne veux pas paraître biaisée mais les femmes ont appris particulièrement rapidement à se servir de l’ordinateur et à naviguer sur le NAITS avec un smartphone.»

Il y a trois ans que Shorena Jambazishvili s’est orientée vers le métier de technicien vétérinaire. Elle est convaincue que plus une femme est instruite, plus elle est indépendante. ©FAO/David Khelashvili

Le Système national de traçabilité

Ramaz Mghebrishvili, un producteur local qui gère un grand élevage de plus d’une centaine de vaches, souligne à quel point les vétérinaires et les techniciens derrière le NAITS facilitent la vie des éleveurs. 

«Je suis heureux que les vétérinaires et les techniciens soient à nos côtés quand nous en avons besoin [...]. Désormais, grâce aux étiquettes d’identification, ce n’est plus un problème si vous perdez une vache dans les montagnes», explique Ramaz.

Avec l’aide de la Direction du développement et de la coopération de la Suisse et son homologue autrichien, la FAO et l’Agence nationale géorgienne des aliments ont mis en place ce projet, faisant ainsi de la Géorgie, le premier pays de la région à disposer d’un système national d’identification et d’enregistrement des animaux.

Plusieurs États, dont la Macédoine du Nord, l’Albanie, l’Ouzbékistan, le Kirghizistan et des pays des Caraïbes, ont exprimé le souhait de bénéficier de l’expérience de la Géorgie. Diffuser les pratiques optimales et partager l’expérience acquise profiteront à la fois à la Géorgie et aux pays travaillant sur ces systèmes.

Pendant ce temps, les femmes du secteur vétérinaire travaillent consciencieusement et avec enthousiasme afin que les consommateurs puissent prendre des décisions éclairées et que les produits d’origine animale soient plus sûrs pour tous.


Pour en savoir plus

3. Good health and well-being, 5. Gender equality, 8. Decent work and economic growth