Expériences réussies - Histoires du terrain
La partie suivante rassemble des récits sur les Champs-Écoles des Producteurs. Des participants, des facilitateurs et des experts racontent leurs expériences sur le terrain. Si vous souhaitez y contribuer, merci de nous faire parvenir votre ou vos expériences à l’adresse électronique suivante : [email protected]. Elle sera examinée et sans doute publiée.
"Beaucoup partageaient une vision négative de l’agriculture, mais au fil du temps, les membres du CEP ont été conquis. L’agriculture est devenue notre nouvelle passion et un espoir pour notre vie"

Patricio Francisco Mamiaga Avomo
Bata, Guinée Équatoriale
Francisco Mamiaga Avomo est un jeune Guinéen de 23 ans, membre de l'école de champ pour améliorer le développement de la production agricole en Guinée équatoriale, dans la ville de Bata, financée par la FAO et soutenue par le Ministère de l'Agriculture, de l'Élevage, des Forêts et de l'Environnement (MAGBOMA).
Mamiaga Avomo est orphelin de père et aîné de trois enfants de parents divorcés. Lorsque son père est décédé, il a dû devenir indépendant et trouver des moyens de survivre. Lorsqu'il a eu l'opportunité de rejoindre l'école de champ "AMOR", il n'a pas hésité.
Mamiaga a d'abord rejoint l'école de champ afin d'acquérir des compétences et de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille. Cependant, ce qui avait commencé comme une activité de subsistance est rapidement devenu pour Mamiaga une passion.
Depuis son jeune âge, Mamiaga voulait étudier le droit. Cependant, depuis qu'il a commencé à étudier et à expérimenter avec le groupe de l'école de champ et à comprendre la valeur de la terre, il est tombé amoureux du travail agricole. Francisco a appris, à travers des expériences et des observations, des pratiques alternatives qui ont amélioré sa production de légumes. "Grâce à cette opportunité de la FAO, en particulier Don Walter, nous avons appris beaucoup de choses. Je n'avais jamais travaillé avec l'engrais biologique Bocachi, mais maintenant je peux défendre et partager tout ce que j'ai appris." Ainsi, l'école de champ offre un environnement sans risque où l'on peut discuter, approfondir, modifier et expérimenter de nouvelles idées de gestion agricole. "Nous produisons des légumes tels que la tomate, le concombre, l'aubergine locale, l'aubergine violette, le poivron, la pastèque, la courgette, le persil, l'oignon et le chou. Nous avons déjà des acheteurs fixes dans la région."
"Je suis très fier de travailler dans l'agriculture, je suis passionné par la terre. Je pense qu'un agriculteur doit être amoureux du soleil, de la pluie et de tout ce qui vient de la terre. J'invite tous les jeunes à changer leur état d'esprit, car l'agriculture vient résoudre les problèmes de santé et de nourriture des gens. Il est vrai que cela demande beaucoup d'efforts physiques, mais au final, il y a de bons et grands bénéfices." "Le meilleur pour moi, c'est le travail sur le terrain. Si vous n'avez pas d'amour pour la campagne ou la terre, vous ne pourrez pas travailler et, par conséquent, vous ne connaîtrez pas les merveilles qui y sont associées. Il faut avoir de la passion et de la dédication. Relevez des défis et, au quotidien, allez à leur rencontre."
"Quand j'ai entendu parler pour la première fois de l'opportunité de travailler et d'expérimenter en agriculture, honnêtement, je n'avais pas d'espoir, je pensais que ce serait une autre illusion ratée, mais aujourd'hui je remercie profondément la FAO et le Gouvernement de la Guinée Équatoriale pour cette expérience. Nous sommes de jeunes Guinéens équatoriens et nous avons besoin de plus d'opportunités comme celle-ci."
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Le mouvement agroécologique populaire révolutionne les exploitations agricoles indiennes

Kakani Sivannarayana
Programme d'agriculture naturelle communautaire de l’Andhra Pradesh (APCNF)
Kakani Sivannarayana ne cultivait que des bananes sur son lopin. Cette culture étant la plus rentable, son choix s’imposait car elle était la seule à lui permettre de faire usage d’engrais et de pesticides chimiques.
Mais paradoxalement, ces produits chimiques coûteux endommageaient les sols, dont ils épuisaient les réserves en éléments nutritifs et appauvrissaient la diversité microbiologique, qui recèle des bactéries et des champignons utiles. Au fil du temps, la terre devenait moins productive, ce qui se traduisait par une baisse de rendement pour Kakani.
Lorsqu’il a entendu parler de l’agriculture agroécologique par des exploitants voisins, il a estimé que la transition vers un système agricole plus naturel valait la peine d’être tentée.
«L’utilisation de sept ou huit sacs d’engrais revenait cher. À présent que j’utilise des méthodes agricoles naturelles, seuls sont nécessaires le drava jiwamrut et le ghana jiwamrut [deux biostimulants naturels élaborés à partir d’ingrédients disponibles sur place, soit la bouse et l’urine de vache, la canne à sucre, la farine de légumes secs et une poignée de terreau], qui sont très bon marché. C’est pourquoi je pratique une agriculture naturelle: des coûts réduits et de meilleurs revenus», explique Kakani.
«Lorsque nous utilisions des engrais chimiques, nos sols étaient tassés comme la surface d’une route en ciment. Ils n’absorbaient plus l’eau, et les dépenses ne cessaient de s’accumuler. Cependant, après avoir adopté des pratiques agricoles naturelles, les sols s’ameublissent et les bananes deviennent plus savoureuses. Les produits restent frais plus longtemps aussi», dit Kakani.
Outre la réduction de ses coûts, l’agriculture naturelle a aussi augmenté ses revenus et la santé de ses sols grâce aux cultures intercalaires, méthode qui consiste à faire pousser plusieurs cultures compatibles sur une même parcelle. Le but est d’utiliser efficacement les synergies naturelles des végétaux pour améliorer le rendement. C’est ainsi qu’une culture peut naturellement fournir au sol les nutriments dont une autre a besoin pour croître, ou encore repousser ou piéger les organismes nuisibles susceptibles de s’attaquer aux plantes voisines.
«Avec l’agriculture chimique, nous ne pouvions pratiquer qu’une seule culture sur un lopin. En agriculture naturelle, quatre ou cinq cultures intercalaires sont pratiquées en parallèle, qui peuvent être la tomate, l’aubergine, le piment ou des légumes secs, ce qui dégage un revenu d’appoint et améliore la nutrition».
La réussite des pratiques agroécologiques dans ses cultures a conduit Kakani à encourager les autres habitants de son village à lui emboîter le pas.
«Je les ai invités à sonder mes sols pour savoir combien de vers de terre ils contenaient par rapport aux champs où sont utilisés des engrais chimiques», explique Kakani.
Les vers de terre se développent dans des sols sains et concourent à la bonne santé de ceux-ci en augmentant leur teneur en éléments nutritifs, en stimulant leur drainage et en stabilisant leur structure, ce qui contribue à améliorer la productivité agricole. Comme on devait s’y attendre, «nous avons constaté que les vers de terre étaient beaucoup plus nombreux dans les champs cultivés selon des méthodes naturelles», déclare Kakani.
Des méthodes naturelles pour un avenir meilleur
Le succès de Kakani grâce à ses méthodes d’agriculture naturelle lui ont valu d’être reconnu et soutenu par la FAO et le gouvernement de l’ Andhra Pradesh, ce qui l’a conduit à devenir formateur, en mettant en place, dans son village, une école pratique d’agriculture destinée à aider d’autres exploitants à utiliser ces méthodes et à tirer les enseignements de leurs propres pratiques. Aujourd’hui, Kakani tient aussi un magasin proposant des produits de gestion sans pesticides, qui fournit aux agriculteurs locaux des solutions naturelles et locales de lutte contre les organismes nuisibles et de gestion des sols.
De nombreuses pratiques agricoles qui ont cours aujourd’hui dans le monde, telles que la monoculture et la dépendance excessive à l’égard des produits chimiques, ne sont pas durables. Elles dégradent les sols, exercent une pression énorme sur les ressources hydriques et entament les bénéfices des agriculteurs, sont nocives pour leur santé et dommageables à leurs moyens d’existence. Les méthodes d’agriculture naturelle témoignent de l’existence d’une autre voie.
Grâce à Kakani et à d’autres pionniers comme lui qui ont fait connaître cette solution naturelle, les petits exploitants agricoles dépensent moins en intrants, obtiennent des rendements plus élevés et des conditions d’exploitation plus durables, sans parler du fait que les consommateurs disposent ainsi d’aliments exempts de produits chimiques. La promotion du recours à ces pratiques simples et naturelles ouvre la voie à l’avènement d’un secteur agricole plus durable, meilleur pour l’avenir de notre planète.
Autonomiser les femmes grâce aux Champs écoles agropastoraux (CEAP)

Monica
Karamoja, Ouganda
Monica vit avec sa famille élargie et ses trois enfants dans la région semi-aride de Karamoja, au nord-est de l’Ouganda, près de la frontière avec le Kenya. Elle a rejoint son groupe CEAP en 2012.
Elle est l'une des trois épouses de son mari, et chacune d'elles dispose de son propre champ à cultiver, bien que la terre appartienne à leur mari.
« Chacune peut décider assez librement de ce qu’elle veut faire dans son champ, mais nous discutons généralement avec notre mari des cultures à planter. » Monica explique qu’elle cultivait déjà avant de rejoindre le CEAP, mais grâce aux connaissances et compétences acquises, elle et son groupe ont décidé d’élargir leurs activités.
« Nous cultivons des tournesols, des graines de sésame, des arachides et des niébés. Une partie de ce que nous produisons est destinée à la consommation familiale, mais la majorité est vendue. Mon revenu a augmenté, et j’ai le droit d’épargner dans le VSLS (Système de Crédit Épargne Villageoise). »
Elle ajoute que le VSLS a représenté un changement majeur, car il a permis d’accéder à des montants plus importants de crédit grâce à une épargne structurée et à des prêts : « J’ai même démarré ma propre petite entreprise », raconte-t-elle.
En outre, Monica explique que grâce à sa participation au groupe CEAP et à l’amélioration de ses connaissances et compétences agricoles, son succès et sa situation économique renforcée n’ont pas laissé les autres membres de la communauté indifférents :
« Mes voisins ont changé leur attitude à mon égard. Ils avaient tendance à me sous-estimer, je n’étais pas perçue comme importante. Cela a changé. Ils voient que je suis capable de subvenir à mes besoins, d’épargner de l’argent et, si nécessaire, de couvrir des dépenses médicales. Ils voient que je peux prendre des engagements. Ils me respectent maintenant. Par exemple, ils viennent me demander des conseils ou comment rejoindre un CEAP », dit Monica, visiblement très fière d’elle.
Sur le plan des dynamiques familiales, elle explique :
« Ma relation avec mon mari a toujours été assez bonne. Nous n’avons jamais eu de problèmes graves, mais ce qui a changé après le CEAP, c’est que je me sens égale. J’ai mes propres ressources financières, et c’est moi qui décide quoi en faire. Cela me donne l’impression d’être sur un pied d’égalité avec mon mari. De manière générale, je me sens davantage maître de ma vie. Je peux mieux planifier, et je m’appuie sur mon propre travail et sur ce que je produis. J’ai aussi décidé d’avoir plus d’enfants, mais seulement quand les trois que j’ai déjà auront grandi un peu plus. J’ai donc commencé à planifier mes grossesses. Cela me donne plus de contrôle. »
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Une histoire incroyable d'une Femme Incroyable.

Chedlia
Tunisie, Monastir, Cherahil
Septembre 2015
Chedlia est une femme incroyable, souriante et forte, avec un regard profond où l'on peut lire toute une vie d'expériences. Elle vit avec sa famille composée de ses deux petites filles, de sa sœur et de leur vieille mère à Cherahil, dans le gouvernorat de Monastir, à un peu moins de 300 km de la capitale, Tunis. Le mari de Chedlia a quitté le pays il y a longtemps, et ils n’ont plus beaucoup de contacts. Aujourd’hui, ce sont donc Chedlia et sa sœur qui prennent en charge toutes les responsabilités.
Leur ferme est un peu isolée, avec peu de contacts avec les voisins. Lorsque l’idée de rejoindre un groupe de Champs écoles des producteurs (CEP) leur a été proposée pour la première fois en 2012, Chedlia a refusé. C’était quelque chose de nouveau dont elle n’avait jamais entendu parler. Cependant, elle est restée curieuse à propos de l’initiative. Quand elle a eu l’occasion de constater les résultats du premier cycle CEP, elle et sa sœur Nejiha ont décidé de rejoindre le programme l’année suivante. Et c’est à ce moment-là que tout a changé.
Leurs revenus proviennent exclusivement de l’agriculture, de la culture et, en partie, de la transformation des produits. Actuellement, elles cultivent principalement des tomates, des piments, des aubergines, des pommes de terre, des légumes à feuilles, des carottes et d’autres légumes destinés à leur consommation familiale. Elles possèdent également quelques oliviers. C’est l’aubergine qui a vraiment fait la différence. Ce n’était pas une culture typique de la région, mais Chedlia a décidé de prendre le risque de s’y lancer. Aujourd’hui, elle dispose de quatre serres et emploie occasionnellement deux ou trois autres femmes.
Chedlia applique activement la Gestion Intégrée des Ravageurs (GIR) sur sa ferme. Elle utilise des méthodes alternatives pour contrôler les ravageurs et se réjouit que l’utilisation de pesticides ait diminué de moitié, réduisant ainsi les dépenses liées à leur achat.
Le moyen de transport de la famille est une charrette tirée par un âne. Chedlia a réussi à établir une collaboration régulière avec un acheteur local qui vient directement à la ferme pour acheter les produits. Les dépenses de la ferme ont diminué et les rendements ont augmenté. Grâce à ces revenus accrus, elles ont décidé de démarrer un petit élevage de moutons, d’augmenter le nombre de volailles et d’agrandir leur maison.
L’expérience et le rôle du CEP vont bien au-delà de l’activité agricole.
« Cette année, il n’y a pas de CEP, et cela nous manque énormément. C’était devenu une habitude, une belle routine, un contact régulier avec les autres. »
Chedlia est devenue une source d’inspiration pour les autres femmes de la région grâce à ses connaissances et son courage. Elle les encourage activement à suivre son exemple.
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Champs écoles des producteurs (CEP) pour l’adaptation au changement climatique

Mali
Mars 2016
Lancé en 2012, le projet Intégration de la résilience climatique dans le secteur agricole pour la sécurité alimentaire en milieu rural s’appuie sur 15 années d’expérience du programme régional de Production intégrée et gestion des ravageurs (IPPM) dans le travail avec les Champs écoles des producteurs (CEP) et l’agriculture durable. Ce projet aborde les questions climatiques, environnementales, sociales et économiques liées au réchauffement climatique en intégrant des thématiques, stratégies et outils pour l’adaptation au changement climatique (ACC) dans deux domaines principaux : le renforcement des capacités des agriculteurs à travers les CEP et le plaidoyer institutionnel, notamment pour promouvoir une meilleure prise en compte du changement climatique.
Les CEP constituent une approche éducative communautaire basée sur l’expérience (apprendre en faisant) et la coopération. Ces sessions de formation hebdomadaires permettent à des groupes de 20 à 25 producteurs – hommes et femmes – issus d’un même village de tester des innovations dans un environnement sûr et de développer leurs capacités d’adaptation au changement climatique (ACC) pendant une saison agricole. La formation est dispensée par un facilitateur qui a suivi personnellement la même formation pendant une saison, acquérant ainsi une bonne compréhension des principes de l’éducation informelle et des pratiques existantes en matière d’ACC. Le CEP devient ainsi une plateforme d’apprentissage pour les agriculteurs, leur permettant d’adapter les pratiques existantes en matière d’ACC à leurs besoins et contextes, en s’appuyant sur la recherche, la diffusion et les technologies traditionnelles.
Après trois ans de mise en œuvre, les résultats sont éloquents :
- Mise à l’échelle de l’approche ACC/CEP dans 134 municipalités, grâce à l’engagement total des autorités locales et nationales.
- Adoption de semences améliorées dans 242 villages.
- Diffusion de 13 variétés améliorées/adaptées.
- Création de 4 zones agroforestières et de barrières constituées d’arbres et d’arbustes, gérées par des organisations de producteurs composées à 75 % de femmes.
- Renforcement des capacités d’environ 16 000 producteurs, dont plus de 5 000 femmes.
- Publication d’un guide de formation pour les facilitateurs sur les pratiques ACC dans les CEP.
- Inclusion de l’ACC dans les politiques nationales et création d’un fonds national pour le climat visant à soutenir les principaux acteurs du développement.
Le chemin de l'indépendance et de la reconnaissance

Hasan
Jordanie, Karak, South Ghor, Safi
Octobre 2015
Hasan vit avec sa famille dans le South Ghor, au sud de la mer Morte, dans le gouvernorat de Karak, non loin du site de production de potasse. Il nous a partagé son histoire inspirante qui a commencé en 2005 lorsqu’il a rejoint le groupe des Champs Écoles des Producteurs (CEP) organisé en collaboration avec le programme régional de gestion intégrée des ravageurs (IPM) de la FAO et la direction de l’agriculture de Ghor al Safi.
Au début, il cultivait sur 3 ha tout en travaillant pour une grande ferme en tant que superviseur d’un groupe de travailleurs. « Grâce au travail et à l’expérience que nous avons acquis dans les CEP, nous sommes devenus plus indépendants, plus confiants en nous-mêmes. Maintenant, nous sommes capables de prendre des décisions raisonnées sans dépendre des autres. » L’année suivante, l’épouse, le fils et la nièce de Hasan ont également rejoint le groupe CEP. Après cela, ils ont décidé de louer 3 ha de terre supplémentaires. « D’abord, nous avons senti que nous pouvions gérer cela, que nous avions suffisamment de connaissances et de compétences. Ensuite, nous disposions de ressources financières suffisantes pour le faire. » Actuellement, ils cultivent principalement des tomates, des aubergines, des courges, des poivrons, du brocoli, du chou et d’autres légumes pour la consommation domestique. La gestion intégrée des ravageurs (IPM) a permis d’améliorer la qualité de la production et de réduire les coûts. Les revenus plus élevés ont permis à la famille d’investir dans quelques appartements en ville.
« La communication avec ma famille s’est tellement améliorée. Aux CEP, nous avons appris à écouter les autres. J’utilise maintenant le dialogue et la discussion pour résoudre tout. »
Une autre chose qui a changé dans la communauté grâce à l’expérience des CEP « c’est la manière de penser et de communiquer avec les autres. Nous écoutons l’opinion des autres, nous la respectons. Avant, nous n’écoutions pas vraiment. »
Il y a des agriculteurs non membres des CEP qui viennent lui demander des conseils. « Les gens me font beaucoup confiance. Grâce aux CEP, je suis devenu reconnu dans ma communauté. Je représente souvent la communauté, je communique avec les autorités. Cela me permet de transmettre les messages des gens, des agriculteurs, aux ministères. J’ai demandé plus de CEP dans notre région. J’ai dit, c’est ce dont nous avons besoin ici. » Hasan est désormais membre de la communauté locale du district.
Entre 2007 et 2009, il a été élu président de l’Association locale de la Coopérative agricole de Ghor Safi. Nous avons trouvé des ressources grâce auxquelles nous avons pu initier un fonds de microcrédit rotatif pour les petits agriculteurs. Vingt agriculteurs ont bénéficié de ce programme.
En tant que premier petit agriculteur, il a été récompensé par la société de potasse en tant que « bon agriculteur ». Avant cela, seuls les grands agriculteurs étaient récompensés.
Hasan a utilisé à plusieurs reprises au cours de l’interview des termes comme « reconnaissance » et « indépendance » et a ajouté finalement : « Ma famille est fière de moi. »
[1] La communauté locale du district est un groupe de personnes actives, représentantes de la communauté locale. Elles sont identifiées et sélectionnées par le gouverneur, en collaboration avec la communauté locale, pour la représenter lors des réunions administratives où les problèmes et leurs solutions sont discutés ensemble. Ces représentants sont généralement appréciés et reconnus par la communauté pour leur sagesse et leur crédibilité. Les groupes de la communauté locale du district sont constitués en moyenne de 10 membres.
Libérer et développer son propre potentiel

Asma
Jordanie, Karak, South Ghor, Safi
Le foyer d'Asma se situe à Safi, au sud de la mer Morte, dans le gouvernorat de Karak, où elle vit avec sa famille.
Asma avait 24 ans lorsqu'en 2007, elle a été proposée, avec son frère, de rejoindre le groupe des Champs Écoles des Producteurs (CEP) sur la production de tomates dans cette région. Elle était l’une des deux femmes de ce groupe. Ses compétences se sont améliorées rapidement, tout comme sa capacité à exprimer clairement son opinion et à communiquer ouvertement avec les autres membres du groupe, principalement des hommes. « Ma voix a changé, j’ai commencé à parler plus fort et avec plus de confiance. »
Nayel, le facilitateur des CEP et aujourd’hui responsable du département de projet à l’office local d’extension, a expliqué pourquoi il a contacté Asma : « Je connais bien les gens d'ici ; je travaille ici depuis longtemps. Asma était extrêmement timide, mais elle travaillait très dur. J’ai réalisé qu’elle avait besoin de soutien pour libérer son potentiel. La situation était facilitée par la présence de son frère dans le même groupe CEP. »
Plus tard, lors de sa troisième année de participation aux CEP, Asma est devenue facilitatrice pour un groupe de femmes. À ce moment-là, ses sœurs, Zeinab et Wisal, ont également rejoint le groupe. Même aujourd'hui, lorsqu'il n'y a plus de programme CEP actif, l'ancien groupe de femmes se réunit toujours pour discuter des problèmes techniques rencontrés dans leurs activités agricoles et pour échanger des informations. L'une des femmes du groupe d'Asma a déclaré : « Avant, chacun travaillait de son côté. Le CEP nous a beaucoup changé, nous avons renforcé nos relations et nous travaillons très souvent ensemble aujourd’hui. Nous nous faisons confiance. » Ce groupe de femmes ex-CEP pratique le système de tontine, appelé en Jordanie « jameiyah », qui est généralement utilisé pour éduquer les enfants des membres.
Asma a commencé à travailler à la ferme familiale à l’âge de 17 ans. Aujourd’hui, c’est elle, avec son père âgé, qui gère principalement la ferme et prend les décisions. Ses grandes sœurs, Zeinab et Wisal, sont les co-travailleuses et co-gestionnaires : « Chacun a son rôle important. » Leur famille est capable de réaliser tout le travail agricole par elle-même, de sorte qu'ils n'embauchent que 4 à 5 travailleurs saisonniers (des voisins) à des moments spécifiques de l'année, surtout pendant la récolte.
Ils cultivaient essentiellement des tomates à des fins commerciales. Après leur expérience dans le CEP, ils ont introduit une nouvelle variété de tomates (grâce au programme CEP) ainsi que de nouvelles cultures comme l'okra, les haricots, la courge, le brocoli ou le chou-fleur. Ils produisent pour le marché local et pour leur consommation domestique en utilisant activement l'approche de la gestion intégrée des ravageurs (IPM). La quantité de pesticides utilisée a été réduite de plus de moitié. Parmi les compétences techniques, les connaissances et les outils qu’ils ont appris dans les CEP, ils considèrent comme les plus significatifs l’observation, la solarisation du sol, et l’utilisation de pièges à ravageurs.
Lorsque nous avons demandé à Asma quel était l'effet le plus positif de son expérience CEP, elle a répondu : « J’ai beaucoup plus de confiance en moi et d’estime de moi. Mes connaissances se sont améliorées, nous partageons régulièrement des informations avec d’autres agriculteurs, nous discutons. Et ma famille me respecte. » Les femmes de son groupe ont ajouté : « Même si les hommes sont encore plus critiques envers les femmes qu’envers les autres hommes, nous sommes maintenant beaucoup plus reconnues par eux grâce à nos connaissances et capacités dans le travail agricole. Donc, fondamentalement, c’est nous qui décidons de ce que nous faisons. »
« Mes voisins me contactent dès qu’ils ont un problème dans leur champ, et je suis capable de leur donner un conseil. » Il y a sept autres femmes agricultrices qui ont commencé leur activité agricole grâce à l’aide d'Asma, elle est devenue un modèle pour elles.
Le revenu familial a considérablement augmenté grâce à la baisse des coûts de production et à l'augmentation des revenus. Ils sont également capables de vendre leurs produits à un prix supérieur de 5 à 10 % en raison de la qualité obtenue grâce à l’IPM. Cela leur a permis de faire beaucoup de choses qui étaient impossibles auparavant : « Avant de commencer à appliquer les connaissances du CEP, nous n’avions pas de ressources disponibles. » « Maintenant, nous envoyons deux de nos enfants et notre plus jeune sœur à l'université, et nous avons même pu voyager trois fois à La Mecque pour le pèlerinage (Omra) », a déclaré Asma en souriant, les yeux grands ouverts.
Asma nous a dit que lorsqu'il y a un conflit dans la communauté (généralement à cause de l'eau), elles agissent en groupe et deviennent médiatrices entre les deux parties. Elles sont capables de jouer ce rôle grâce au respect qu’elles ont gagné dans la communauté grâce à leur travail régulier au sein des CEP.
Et Nayel ajoute : « Asma est une autre personne aujourd’hui. Elle est devenue forte et confiante, capable d’exprimer et de défendre son opinion. Elle guide et inspire maintenant les autres. »
Le groupe d'Asma a été initié dans le cadre du programme régional de gestion intégrée des ravageurs au Proche-Orient (GTFS/REM/070/ITA).