En 2022, l'Association internationale des forêts méditerranéennes (AIFM) et des partenaires clés locaux ont coordonné des visites d’échange entre le Maroc et l’Italie, dans le cadre de la composante régionale méditerranéenne du projet financé par l’IKI, « L’Accord de Paris en action ».

Le but de cet échange était de permettre aux experts italiens et marocains travaillant sur la restauration des terres dégradées d’observer et de discuter des meilleures pratiques dans le domaine avec d’autres membres de la communauté forestière méditerranéenne. Les visites ont été l’occasion de voir les activités de restauration sur le terrain, mise en œuvre à travers des approches du paysage multidisciplinaires et participatives.

Lors de la première partie de l’échange, trois experts italiens en restauration du Réseau méditerranéen des forêts modèles sont allés au Maroc du 23 au 27 mai 2022 afin de visiter les parcs nationaux de Talassemtane et d’Ifrane.

Le parc national de Talassemtane (PNTLS) s’étend sur 58 950 hectares (ha) de terres caractérisées par une diversité biologique unique, des paysages remarquables et un héritage culturel riche. Grâce à une flore très diversifiée qui se développe sur des socles rocheux variés dans un climat pluvieux et tempéré, c’est l’une des régions les plus originales de la chaîne du Rif, voire de tout le Maroc. Les experts ont tiré des leçons de l’expérience de leurs collègues marocains dans la gestion sylvicole d’Abies marocana, se concentrant sur la conservation des peuplements forestiers dans le cadre des projets de RESTOR’MED FORESTS.  Le projet a établi un site pilote pour la restauration post-incendie en 2015, quand un peuplement hétérogène de sapins d’Espagne et de pins maritimes a été détruit par un incendie.  La zone pilote a été restaurée en enlevant les résidus de bois et en préparant le sol en y creusant des trous pour y planter ensuite des pins maritimes. Les experts italiens ont ensuite visité le site du Parc National de Talassemtane où les changements dans l’utilisation des sols et la déforestation constituent un problème de plus en plus important. Grâce à l'approche participative mise en œuvre dans le cadre du projet « RESTOR'MED FORESTS », la population locale est sensibilisée à l'importance des forêts pour son bien-être et pour la région dans son ensemble. Des associations locales ont été impliquées dans le reboisement et la gestion des forêts, et les participants ont reçu une compensation pour leurs activités.

Le parc national d'Ifrane se trouve dans la chaîne de montagnes du Moyen Atlas et fait partie de la réserve de la biosphère du Cèdre de l'Atlas, où opère également l'association AREBICA. Il a été créé en 2004, a été étendu en 2008, et couvre désormais environ 125 000 ha. Les principales espèces présentes sont le cèdre de l'Atlas, le chêne vert, le pin maritime et le genévrier thurifère. La zone est soumise à une forte pression anthropique, notamment en raison du pâturage excessif et de la surexploitation de la forêt. L'une des principales activités du parc est donc de coopérer avec l'Association de gestion sylvopastorale (SPMA) pour élaborer un plan pastoral en collaboration avec la population locale. Une autre activité importante est l'éducation environnementale et l'écotourisme, avec des activités telles que l’observation de singes. Les experts italiens et marocains ont visité une forêt de cèdres, située dans la forêt modèle d'Ifrane, en bordure d'une zone de pâturage clôturée. La Forêt Modèle d'Ifrane couvre une superficie d'environ 116 000 ha. Les principales essences forestières sont le cèdre, le chêne vert, le pin maritime, le genévrier thurifère et le chêne zéen. Il y a environ 15 à 20 ans, des semis de cèdre de l'Atlas ont été replantés. Ces derniers ont généralement bien pris racine. Cet exemple montre comment, dans des contextes où le cèdre est présent naturellement, la suspension du pâturage peut conduire à une régénération naturelle. Les experts ont rendu visite à la SPMA qui gère des troupeaux d'environ 20 000 moutons sur une zone de pâturage d'environ 15 000 ha, dont la moitié est constituée de forêts. Le cycle de pâturage traditionnel ne peut plus être maintenu, et l'activité de pâturage est désormais permanente. Avec le soutien des femmes membres, la SPMA a consacré 30 ha de pâturages à la culture de la lavande (Lavandula angustifolia) afin de fournir une source de revenus alternative aux femmes et à leurs familles. Une autre activité mise en œuvre est le semis d'espèces herbacées. La collection de semences a été effectuée directement par un groupe de femmes membres de la SPMA, dans une zone proche de la forêt de cèdres.

La seconde partie de l’échange a eu lieu du 24 au 28 octobre 2022. Des experts marocains ont visité la Forêt modèle Montagne Fiorentine en Italie, qui fait également partie du réseau méditerranéen de forêts modèles. La Forêt modèle Montagne Fiorentine vise à améliorer l'intégration et la durabilité de la gestion des forêts et des terres. Elle permet de prendre conscience des composantes sociales et économiques qui façonnent directement ou indirectement le paysage environnant. Elle vise à développer les produits locaux, la distribution commerciale et la commercialisation des produits, les ressources naturelles, le tourisme et le patrimoine culturel local, tout en assurant la durabilité environnementale, sociale et économique.

Les experts ont eu l’occasion de visiter la Toscane, tout particulièrement les sites et les projets suivants:

• le programme LIFE « Granatha », qui promeut la restauration au moyen de brûlage dirigé des landes à bruyères envahies par les arbustes et la gestion d’Erica Scuparia pour la production locale et artisanale de balais, améliorant ainsi les moyens de subsistance locaux ainsi que les paysages locaux et les ressources naturelles avec la participation des citoyens, des artisans et des fermiers;
• la restauration d'une forêt détruite par une tempête de vent en 2015 avec des plants d'Abies alba par greffage;
• le centre de formation à la prévention des incendies de forêt, « La Pineta », et les sites de démonstration de brûlage dirigé en tant que méthode locale traditionnelle de gestion des forêts et des terres, ainsi que d'autres mesures de prévention;
• les activités de restauration post-incendie à Calci, près de Florence;
• la centrale thermique du district de Cafaggio, dont le fonctionnement est strictement lié à la gestion durable des ressources forestières;
• les chaînes de valeur des forêts de châtaigniers et des vignobles au niveau du paysage, dont la gestion durable et intégrée est une source de revenus essentielle pour la région; et 
• des activités de diffusion et de vulgarisation à l'arboretum de Vallombrosa et le partage des résultats techniques et scientifiques avec le grand public.

Valentina Garavaglia