Un nouveau rapport de la FAO met l’accent sur l’insécurité alimentaire et les problèmes nutritionnels en Europe et en Asie centrale
Près de 14,3 millions d’adultes peinent toujours à se nourrir, tandis que la malnutrition est en hausse
4 décembre 2017, Budapest/Rome - Selon un rapport publié aujourd'hui par la FAO, la plupart des pays situés en Europe et en Asie centrale ont fait des progrès remarquables en matière de réduction de la prévalence de la sous-alimentation. Néanmoins, près de 14,3 millions de femmes et d'hommes dans la région peinent toujours à se nourrir, tandis que les problèmes liés à la malnutrition sont en hausse.
L'Etat de la sécurité alimentaire et de la nutrition en Europe et en Asie centrale en 2017 analyse plusieurs indicateurs liés à la sécurité alimentaire et à la nutrition afin d'évaluer les progrès des pays en vue de réaliser l'Objectif de développement durable numéro 2 (éradiquer la faim, instaurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l'agriculture durable) d'ici 2030. La publication passe en revue plusieurs indicateurs nutritionnels ou en lien avec l'apport énergétique alimentaire, tels que les retards de croissance, les pertes musculaires, l'anémie, le surpoids et l'obésité, ainsi que l'évolution des habitudes alimentaires et leur impact sur les différents groupes de population.
Suite à d'énormes progrès, la situation dans la région semble s'être stabilisée. Selon le rapport présenté lors du Symposium régional sur les systèmes alimentaires durables au service de régimes alimentaires sains, la prévalence des cas de sous-alimentation reste la même dans les régions du Caucase et d'Asie centrale.
«La pauvreté reste l'obstacle le plus important face à la sécurité alimentaire», a déclaré M. Vladimir Rakhmanin, Sous-Directeur général de la FAO et Représentant régional pour l'Europe et l'Asie centrale. «Il existe cependant une voie toute tracée à suivre. Les Objectifs de développement durable, ou ODD, fournissent un excellent cadre de travail pour relever les défis auxquels sont confrontés les pays d'Europe et d'Asie centrale».
Pour mieux comprendre les facteurs et caractéristiques de l'insécurité alimentaire dans la région, le rapport de la FAO a eu recours à la nouvelle échelle de mesure de l'insécurité alimentaire vécue (FIES), qui aide à analyser les progrès réalisés en vue d'atteindre l'Objectif de développement durable numéro 2 (ODD2) par le biais des indicateurs sur la sécurité alimentaire et la nutrition. Fournissant une analyse plus complète et actualisée, la nouvelle méthodologie a permis de se rendre compte que 14,3 millions d'adultes dans la région avaient souffert de grave insécurité alimentaire de 2014 à 2016.
Le rapport souligne que, pour avoir une évaluation complète de la situation, les données collectées par l'Organisation mondiale de la santé sont essentielles. La malnutrition, dans une ou plus de ses trois formes - que ce soit la sous-alimentation, la suralimentation et les déficiences en micronutriments - est présente à des degrés variés dans tous les pays de la région.
«Souvent les trois coexistent dans ce que l'on appelle «le triple fardeau de la malnutrition», a déclaré Mme Ariella Glini, spécialiste en politiques à la FAO et principal auteur du rapport. «Il n'est pas inhabituel pour les pays de connaître des taux élevés de sous-alimentation infantile et d'obésité. Les déficiences en micronutriments et la suralimentation des enfants, des femmes et des hommes sont devenus deux enjeux majeurs liés à la sécurité alimentaire et à la nutrition dans la région».
«Il n'est pas inhabituel pour les pays de connaître des taux élevés de sous-alimentation infantile et d'obésité. Les déficiences en micronutriments et la suralimentation des enfants, des femmes et des hommes sont devenus deux enjeux majeurs liés à la sécurité alimentaire et à la nutrition dans la région».
Ariella Glinni-Spécialiste en politiques à la FAO
La suralimentation, également un problème
Selon le rapport, la suralimentation chez les populations adultes constitue un autre problème important. Une personne est considérée comme obèse lorsque son indice de masse corporelle - le ratio entre le poids mesuré en kilogrammes et le carré de la taille mesurée en mètres - dépasse 30. Citant les données de l'OMS, le rapport souligne une hausse de 30 pour cent du nombre d'adultes obèses entre 2000 et 2014. La prévalence la plus élevée d'obésité a été signalée dans les pays situés au Sud-Est de l'Europe où 26,9 pour cent des adultes étaient considérés comme obèses.
Les taux croissants d'obésité dans la région sont étroitement liés aux revenus des habitants, qui leur permettent maintenant de consommer des aliments à plus forte teneur calorique, et à des styles de vie de plus en plus sédentaires.
De façon moindre, «en tant que forme de malnutrition, l'obésité peut également être le fruit de changements d'habitudes alimentaires et de faibles revenus qui entraînent la consommation d'aliments à bas prix contenant des niveaux élevés de matières grasses, de sucre et d'autres glucides raffinés», a déclaré Mme Glinni. Un public insuffisamment sensibilisé aux régimes alimentaires sains contribue également à augmenter la prévalence du surpoids et de l'obésité dans les familles appartenant à des groupes de revenus différents.
D'après la FAO, les femmes et les hommes de la région souffrent de différentes formes de malnutrition. Les femmes en âge de procréer sont plus exposées aux risques d'anémie et représentent un problème de santé publique important.
Si les femmes sont principalement responsables de la culture, de l'achat, de la transformation et de la préparation de la plupart de la nourriture consommée, pour changer les choses, des initiatives visant à améliorer la nutrition devraient cibler à la fois les femmes et les hommes.
Le changement climatique et les autres défis
Le thème du rapport cette année est : Assurer la sécurité alimentaire grâce à une meilleure gestion des ressources naturelles rares et fragiles face au changement climatique.
La demande alimentaire régionale est en hausse, les habitudes de consommation évoluent et l'urbanisation s'accélère. Selon le rapport, au même moment, de nombreux systèmes de production de la région sont déjà non durables et vulnérables aux chocs - y compris ceux découlant des événements météorologiques extrêmes - rendant les gains liés à la productivité incertains. Instaurer une certaine sécurité alimentaire dans ces conditions nécessitera une hausse durable de la production agricole, une meilleure résilience et une utilisation plus efficace des ressources naturelles.
Certains pays situés en Europe et en Asie centrale comptent parmi les plus vulnérables face aux changements et à la variabilité du climat et nombre d'entre eux subissent déjà des répercussions négatives sur leurs écosystèmes agricoles. Des dégâts de plus en plus importants au niveau des sous-secteurs de l'élevage, de la foresterie et de la pêche, ainsi que des pertes de récoltes ont également été signalés.
La nécessité de réduire les pertes et le gaspillage alimentaires, qui représentent plus de 30 pour cent de la nourriture produite, devient de plus en plus urgente. En gaspillant moins de nourriture et en réduisant les pertes alimentaires tout au long de la chaîne de valeur, les écosystèmes subissent moins de pressions, les émissions de gaz à effet de serre sont réduites, les systèmes agroalimentaires deviennent plus efficaces et la sécurité alimentaire et la nutrition s'en voient améliorées.
La FAO a également étudié la manière dont chaque pays travaillait à relever les défis liés à la sécurité alimentaire et à la nutrition et a découvert que nombre d'entre eux avaient déjà pris les premières mesures visant à mettre en œuvre le Programme de développement durable à l'horizon 2030 - en s'appuyant sur les mesures adoptées afin de réaliser les Objectifs du Millénaire pour le Développement - seuls quelques-uns avaient en revanche des cadres de travail politiques destinés à instaurer les quatre piliers de la sécurité alimentaire : disponibilité, accès, utilisation et stabilité.
Certains pays manquent toujours de politiques complètes relatives à la sécurité alimentaire. Pour d'autres, la FAO a constaté que le fait d'instaurer une certaine sécurité alimentaire s'axait plus sur l'autosuffisance alimentaire nationale, sans prendre en compte les autres dimensions de la sécurité alimentaire.
Selon la FAO, de nombreux pays de la région reconnaissent l'importance de remédier aux problèmes nutritionnels en vue de pouvoir instaurer une certaine sécurité alimentaire et d'améliorer le bien-être de leurs citoyens. Les programmes et politiques nutritionnels ont pourtant été plus ou moins couronnés de succès jusqu'à présent et doivent être associés à des mesures coordonnées - telles que la protection sociale, le développement rural et des programmes de sensibilisation à la nutrition, tout en se penchant sur les causes sous-jacentes de chaque type de malnutrition.
