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Comment la Somalie a vaincu les criquets pèlerins grâce aux biopesticides


Contribuer à l’avènement d’une nouvelle ère de lutte antiacridienne fondée sur des remèdes naturels

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Pendant la crise du criquet pèlerin, survenue de 2019 à 2022, la FAO et le Gouvernement somalien ont œuvré conjointement pour lutter contre celle-ci, en ayant exclusivement recours aux biopesticides, aux régulateurs de croissance des insectes et à une technologie d’action précoce, devenant ainsi un exemple en matière de gestion antiacridienne dans le monde entier. ©FAO/Ismail Taxta/Arete

11/11/2022

La première vague d’essaims de criquets pèlerins a frappé la Somalie en 2019. Des tapis de bandes larvaires et des nuées de criquets en essaim, semblables à une tempête, se sont mis à surgir dans tout le pays. Alors que les criquets s’abattaient sur toute la végétation qui se présentait à eux, les cultures n’ont pas survécu à leur appétit; les champs sont devenus stériles, ne laissant rien à brouter aux animaux, et les agropasteurs et les petits exploitants agricoles ont vu leurs moyens de subsistance anéantis en l’espace de quelques heures.

Pendant des décennies, les pesticides chimiques ont été le seul moyen de lutter contre les nombreux criquets pèlerins. Si les pesticides chimiques ont démontré une grande efficacité dans la lutte antiacridienne, ils peuvent avoir des conséquences plus lourdes que ces insectes nuisibles, créant ainsi des risques pour l’environnement et la santé humaine. Ces dernières années, le développement de biopesticides fondés sur la nature a offert une solution plus sûre pour lutter contre les criquets pèlerins.

Pendant la crise acridienne de 2019 à 2022, le Gouvernement somalien, en collaboration avec la FAO, a eu exclusivement recours à des biopesticides et à des régulateurs de croissance des insectes pour lutter contre ces ravageurs, ce qui représente une grande première dans ce type d’intervention et constitue un exemple pour la gestion antiacridienne dans le monde entier.

Dans les biopesticides, des bactéries, des champignons ou des virus naturels sont utilisés pour attaquer les insectes ravageurs. Un champignon, Metarhizium acridum, utilisé en Somalie s’est révélé particulièrement efficace dans la lutte antiacridienne, puisqu’il se nourrit de l’insecte ciblé, le tuant en une ou deux semaines.

Les régulateurs de croissance des insectes, qui servent aussi dans la lutte, sont un remède chimique plus inoffensif et plus ciblé. Ils empêchent les criquets pèlerins de muer pour passer d’un stade à l’autre, interrompant ainsi la reproduction et l’éclosion des œufs. Étant donné qu’ils ont une action très ciblée sur les nuisibles et qu’ils sont peu toxiques, leur impact environnemental est aussi nettement plus faible que les pesticides traditionnels.

Les biopesticides fondés sur la nature offrent désormais une alternative plus sûre dans la lutte antiacridienne. ©FAO/Ismail Taxta/Arete

Promouvoir une alternative plus sûre

Les biopesticides ont toujours été la solution privilégiée. Cependant, en raison de leur action lente, ils requièrent l’utilisation d’autres technologies d’appui. Par exemple, la détection précoce est essentielle si l’on veut laisser suffisamment de temps aux biopesticides pour agir avant que les criquets ne causent des dégâts importants dans la région. La FAO dispose de nombreux outils technologiques (l’ensemble d’outils eLocust3, par exemple), qui exploitent l’analyse d’images satellitaires, utilisent des modèles prédictifs et facilitent l’établissement de rapports, favorisant ainsi une intervention rapide.

«Le Gouvernement somalien a obtenu de la FAO des équipements, notamment des tablettes eLocust3 et des modules GPS eLocust3g, pour réaliser des enquêtes sur le criquet pèlerin. Le personnel technique du ministère local de la région du Puntland a mené des opérations de surveillance acridienne deux fois par semaine, grâce aux outils eLocust3 et eLocust3g», a indiqué Abdihamid Salad Hassan, un fonctionnaire chargé de la lutte antiacridienne au sein du Gouvernement somalien.

Dans le nord de la Somalie, les pâturages sont indispensables pour assurer la subsistance de la population pastorale. Mais les pesticides chimiques peuvent rendre les zones pulvérisées impropres à l’élevage pendant un certain temps. Ce n’est pas le cas des biopesticides, qui permettent de maintenir les moyens de subsistance des pasteurs.

M. Hassan explique: «Au départ, nous utilisions des pesticides chimiques traditionnels, mais ceux-ci étaient lourds de conséquences pour les zones pastorales. Sur les orientations de la FAO, les autorités ont opté pour l’utilisation de biopesticides afin de protéger ces zones vulnérables. Après les premiers essais, nous avons cessé d’utiliser les pesticides chimiques.»

Formation et appui continus

Les résultats remarquables obtenus par la Somalie avec l’aide de la FAO sont analysés et diffusés dans les pays touchés par le criquet pèlerin. Depuis la fin de la crise, l’Organisation a organisé plusieurs formations et ateliers, auxquels ont participé des fonctionnaires acridologues et des représentants de ministères, afin d’améliorer les pratiques relatives à la gestion antiacridienne et de diffuser les résultats.

L’une de ces formations a été dispensée au Maroc par la FAO, en collaboration avec la Commission de lutte contre le criquet pèlerin dans la région centrale, la Commission de lutte contre le criquet pèlerin dans la région occidentale et l’Organisation pour la protection des végétaux au Proche-Orient. La formation visait tout particulièrement à renforcer l’utilisation de biopesticides dans les pays touchés.

Ces manifestations ont également permis de plaider en faveur des homologations nationales des biopesticides, une première étape nécessaire à l’utilisation de ces types de composés dans une opération de lutte. «J’ai présenté à Agadir les résultats obtenus grâce aux biopesticides, ce qui a aidé à mettre en place des plateformes stratégiques destinées aux pays africains touchés par le criquet pèlerin et à échanger des données d’expérience», explique M. Hassan, évoquant sa participation à la formation visant à mettre en avant le grand succès de la Somalie.

Plusieurs experts de pays exposés au risque acridien ont pu tirer parti de l’expérience concrète d’experts de la FAO et de différents pays. Ces événements sont essentiels à la promotion des meilleures pratiques et à l’élaboration de recommandations futures en vue de continuer à réduire la menace mondiale que représentent les criquets pèlerins.

Si la récente crise du criquet pèlerin est terminée, la FAO continue de collaborer avec les pays pour renforcer les mesures de prévention grâce aux technologies et aux informations relatives à la surveillance du criquet pèlerin. ©FAO/Ismail Taxta/Arete

Situation acridienne actuelle

La situation du criquet pèlerin dans la Grande Corne de l’Afrique et au Yémen est désormais maîtrisée et aucune résurgence importante n’est attendue dans les mois à venir, mais la région demeure aux prises avec de multiples problèmes: sécheresse sans précédent, hausse des prix des denrées alimentaires, conflit et répercussions de la pandémie de covid-19. En septembre 2022, on annonçait que la famine risquait de frapper la Somalie dans les mois à venir. Si le criquet pèlerin était venu s’ajouter à l’équation, la situation aurait été bien pire.

La récente crise acridienne a également conduit à l’amélioration et à l’adoption généralisée des technologies de surveillance, ce qui a contribué à créer un environnement propice à la prévention. 

«Les programmes de prospection et de surveillance se poursuivent en Somalie», confirme Hassan.

Bien que la crise du criquet pèlerin soit passée, la FAO travaille toujours avec les pays pour promouvoir davantage les mesures de prévention. À l’aide de la cartographie satellitaire, de modèles prédictifs, d’applications adaptées et de drones, la FAO fournit des rapports et des alertes précoces aux pays pour prévenir les futures recrudescences acridiennes.

«L’adoption de nouvelles technologies et d’alternatives aux pesticides chimiques conventionnels bouleverse la façon dont le monde gère le criquet pèlerin. La FAO a pour objectif de promouvoir les meilleures solutions selon les cas, en apportant son expérience et ses moyens technologiques et en mettant en avant des solutions éprouvées qui permettent de limiter les dégâts causés par les criquets dans le monde», indique Shoki Al-Dobai, Fonctionnaire agricole principal à la FAO.

M. Hassan conclut: «Les biopesticides continueront d’être la méthode privilégiée dans le traitement acridien en Somalie.» 

La toute dernière infestation a démontré à quel point les technologies de lutte antiacridienne ont énormément progressé et contribueront à réduire et à contrôler les nouvelles crises à l’avenir, tout en protégeant mieux l’environnement.

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