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Timor-Leste: quand une graine de discorde devient graine d’abondance


L’agriculture intelligente face au climat permet à un collectif de femmes de fournir des repas nutritifs à des cantines scolaires

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Suivant les conseils de la FAO, un groupement de femmes de Betano (Timor-Leste) a commencé à appliquer sur leurs terres des techniques d’agriculture de conservation en obtenant des résultats remarquables ©FAO/ Blue milk studio

29/08/2024

Dans le petit village de Betano, niché dans le paysage verdoyant du centre du Timor-Leste, une révolution tranquille a pris racine à partir d’un simple différend au sujet d’une humble légumineuse.

Tout a commencé en 2019, lorsque les femmes du village ont fait connaître leur souhait de mettre à l’essai des techniques d’agriculture intelligente face au climat, en particulier l’agriculture de conservation, dont l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) faisait la promotion dans cette région.

En application des conseils de la FAO, ces femmes souhaitaient effectuer un paillage des champs à l’aide de «lehe», ou «haricot velours vert», dont la plante rampante est connue pour reconstituer la teneur en nutriments des sols. Les hommes se sont montrés sceptiques mais les femmes mesuraient l’importance d’enrichir les sols.

Avec l’aide financière de l’Union européenne, la FAO a aidé ces femmes à créer leur propre groupement d’agricultrices, qu’elles ont appelé Fehama («sororité», en langue Tetum parlée dans cette région). La FAO leur a fourni des motoculteurs, des remorques, des silos de stockage et de l’outillage agricole. Aux côtés d’autres groupements d’agriculteurs, elles ont commencé à cultiver du maïs, des légumes-feuilles, des papayes, du manioc et des bananes sur leurs terres où des paillis venaient d’être épandus pour la première fois.

Leur but était de produire suffisamment pour subvenir aux besoins alimentaires de leur foyer et améliorer leurs moyens de subsistance.

«Nous nous sommes aperçues qu’en respectant les consignes de la FAO, notre productivité pouvait progresser», a déclaré Prisca da Costa, membre fondatrice de Fehama.

Ces femmes étant désormais résolument engagées sur la voie de l’agriculture intelligente face au climat, la FAO, avec l’aide financière de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), a poursuivi son assistance à Fehama sous forme d’appui-conseil technique et de formations aux techniques de l’agriculture de conservation. Il s’agit de méthodes importantes qui consistent notamment à s’abstenir autant que possible de perturber les sols (cultures sans travail du sol) et à diversifier les espèces végétales par l’introduction de soja vert, en plus de l’entretien d’une couverture permanente des sols.

Les femmes de Fehama se sont engagées collectivement dans un itinéraire qui doit aboutir à couvrir leurs champs de cultures variées, ajoutant à leurs récoltes des légumes verts appétissants.

C’est ainsi qu’une simple graine de discorde a germé pour donner des champs cultivés aux récoltes abondantes et diversifiées, et faire naître un groupement agricole féminin prospère.

Avec l’aide financière de l’Union européenne, la FAO a aidé les femmes à mettre sur pied des groupements d’agricultrices et leur a fourni des motoculteurs, des remorques et de l’outillage agricole. ©FAO/ Blue milk studio

Des aliments du cru dans les cantines scolaires: un double avantage

Les volumes des récoltes récentes dépassant les espérances, un défi nouveau est apparu: Où écouler les produits?

«À nos débuts, lorsque nous nous sommes lancés dans l’agriculture de conservation avec l’équipe de la FAO, nous n’étions pas du tout sûrs que nous trouverions à vendre nos produits sur le marché», se rappelle Joaquina Branco, de la coopérative Hakmoton, qui elle aussi a bénéficié de l’aide de la FAO.

À cette époque, les producteurs locaux commercialisaient leurs produits au marché municipal central, où l’offre excédentaire tiraient les prix vers le bas.

La FAO a fait alors le choix d’aider Fehama et d’autres groupements agricoles à trouver d’autres débouchés pour leurs produits.

Parmi ces débouchés, le programme national de protection sociale Merenda Eskolar, mis en place par les pouvoirs publics pour fournir des repas gratuits aux enfants des écoles élémentaires, s’imposait comme une évidence. La FAO a mis en relation les groupements agricoles avec le programme Merenda Eskolar, en vue de faire de ce dernier un client régulier des groupements à travers la fourniture aux écoliers d’une alimentation de bonne qualité nutritive.

À Timor-Leste, 75 pour cent de la population ne jouit pas d’une alimentation suffisante, et près de la moitié des enfants de moins de cinq ans souffrent de retards de croissance, ce qui fait du programme Merenda Eskolar un élément vital du train de mesures déployé par les pouvoirs publics pour améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition, rehausser la protection sociale des enfants et accompagner l’intégration économique des agriculteurs.

La FAO, en partenariat avec l’organisation locale Hamutuk Ita Ajuda Malu Health et la collectivité locale, a aidé à la rédaction des contrats conclus entre les agriculteurs et les petites entreprises qui gèrent le programme d’alimentation scolaire dans la municipalité de Manufahi. La FAO a également préconisé des régimes alimentaires adaptés, riches en protéines, vitamines et sels minéraux, ainsi que des modes de cuisson plus efficaces.

«Le programme Merenda Eskolar a changé notre manière de produire», déclare Joaquina. «Auparavant, les produits de nos cultures étaient plus riches en glucides. À présent, nous privilégions l’horticulture maraîchère, qui est porteuse d’avantages nutritionnels supérieurs et dont les produits ont plus de valeur que les autres denrées cultivées, de par la demande quotidienne dont ils sont l’objet sur les marchés.»

Cette mise en relation représentait une source de nutrition stable pour les enfants des écoles et faisait entrevoir un revenu régulier pour le groupement agricole féminin.

«Nous entreposons les produits ici. Les agents du Programme viennent nous les acheter et les acheminent aux établissements scolaires. Ils nous règlent leurs achats et nos gains nous servent à aider à la scolarisation de nos enfants. L’argent qui reste nous sert à acheter des produits alimentaires et des semences pour replanter», explique Prisca.

La FAO et ses partenaires ont également enseigné des formations à un total de plus de 70 préparateurs de repas, enseignants et parents à l’élaboration de repas équilibrés et nutritifs pour les enfants, ainsi qu’à l’hygiène et à la sécurité sanitaire des aliments.

Enfin, la FAO s’est attachée à mieux équiper les cantines scolaires, en fournissant des ustensiles de cuisine, des plateaux en métal pour servir les aliments, des silos de stockage des céréales, des filtres à eau potable, des réfrigérateurs, des caisses, des boîtes pour l’entreposage des aliments et des tables en acier inoxydable pour la transformation des aliments. 

La FAO a mis en relation les groupements d’agricultrices avec le Programme Merenda Eskola qui fournit des repas gratuits aux enfants des écoles élémentaires. Une clientèle régulière s’est ainsi constituée pour ces agricultrices tout en offrant une alimentation nutritive aux enfants. ©FAO/ Blue milk studio

Autonomisation et communauté

Le projet n’a pas fait qu’aider ces femmes à s’assurer un revenu et une alimentation nutritive, il a aussi concouru à leur autosuffisance et à leur autonomisation. Les femmes de Fehama n’en sont plus à tenter de faire valoir auprès des hommes leur façon de cultiver leurs champs. Elles apportent la preuve de leur réussite et possèdent les connaissances utiles que leur a enseignées la FAO.

Parallèlement, les aliments nutritifs fournis aux écoles aident à garantir que les enfants du village soient bien nourris et mieux à même de suivre une scolarité. Cela crée des effets en cascade, qui concourent à l’amélioration de l’état de santé et de l’éducation des membres de la collectivité.

Dans la seule année 2023, le Programme a touché 18 écoles de la municipalité de Manufahi, mettant à la disposition de 10 d’entre elles une offre alimentaire directe destinées à 2 400 écoliers.

La FAO prévoit un renforcement du programme Merenda Eskolar et la transposition de son modèle à d’autres régions du pays.

Le droit à l’alimentation est un droit humain universel. Cette année, nous défendons ce droit, entre autres. Les aliments dont on se nourrit doivent répondre à des critères de diversité, de nutrition, d’abordabilité, d’accessibilité mais aussi de sécurité sanitaire et de durabilité. Plus de 2,8 milliards de personnes n’ont toujours pas les moyens d’une alimentation saine. Alors que nous approchons du 16 octobre, date de la Journée mondiale de l’alimentation, la FAO insiste sur le fait que le droit à ces aliments, qui répondent à tous ces critères, est indispensable pour assurer à tous de meilleures conditions de vie et un avenir meilleur.

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