COMITÉ DES PRODUITS

Soixante-deuxième session

Rome, 12 - 15 janvier 1999

ÉVALUATION DE L'INCIDENCE DU CYCLE D'URUGUAY
SUR LES MARCHÉS AGRICOLES


Table of Contents

I. INTRODUCTION

II. ANALYSE PRODUIT PAR PRODUIT

III. QUESTIONS SPÉCIALES

IV. CONCLUSIONS


I. INTRODUCTION

1. A sa dernière session, le Comité des produits (CP) a recommandé qu'il soit procédé à une "évaluation de l'incidence des dispositions du Cycle d'Uruguay telles qu'elles sont appliquées dans la pratique" et il a souligné que ces études devraient "notamment examiner les implications au niveau de la sécurité alimentaire des pays en développement".

2. Lorsqu'il a entrepris cette étude, le Secrétariat a eu présentes à l'esprit les difficultés inhérentes aux évaluations de ce type, ainsi que noté par le Comité des produits à sa soixantième session, en avril 1995 (paragraphe 28 de son rapport). Fondamentalement, il s'agit de savoir quoi comparer avec les faits nouveaux présents. S'il n'y avait eu aucun accord, quel aurait été le cours de l'agriculture mondiale? S'il n'y avait eu aucun accord, les pays auraient-ils adopté des politiques analogues à celles qu'ils ont effectivement mises en application après 1994? Dans l'étude précédente du Secrétariat - examinée à la soixantième session du CP - une comparaison était faite entre les projections jusqu'en l'an 2000 qui avaient été entreprises avant les accords au titre du Cycle d'Uruguay et les projections qui tenaient compte des accords de Marrakesh. La demande du CP a maintenant trait à l'incidence des dispositions du grand Cycle d'Uruguay "telles qu'elles sont appliquées dans la pratique". La comparaison ne peut donc être faite en se fondant sur quelques dates à venir (l'an 2000 ou 2005), mais doit se reposer sur ce qui s'est passé entre 1995 et maintenant. L'Accord du Cycle d'Uruguay relatif à l'agriculture a commencé d'être appliqué en 1995 et au milieu de l'année 1998, alors que la présente étude était en cours de préparation, il s'était passé à peine plus de trois ans. Les notifications quant à l'application des engagements pris ont trait à diverses années, mais elles ne couvrent pas l'ensemble de la période allant jusqu'au milieu de l'année 1998 et, dans de nombreux cas, elles concernent 1995 et 1996 seulement. La notification des dispositions prises ainsi qu'il en a été fait état à l'OMC est relative à l'action passée en ce qui concerne, par exemple, l'utilisation des contingents tarifaires, l'observation des engagements concernant les subventions à l'exportation et les estimations de la Mesure globale du soutien totale.

3. La méthodologie adoptée pour entreprendre cette évaluation est basée sur une comparaison des faits nouveaux intervenus pendant la période 1995-1997 (et, dans certains cas, la première partie de l'année 1998) avec la tendance à plus long terme (définie sur la base des données pour les dix années précédant l'entrée en vigueur des accords des négociations d'Uruguay, c'est-à-dire 1985-94). Les différences entre ce qui s'est effectivement passé et les tendances au cours de la période 1995-97 ont ensuite été examinées pour déterminer: a) si les études existantes projetaient des résultats semblables à la suite des négociations d'Uruguay; et b) si, du point de vue des spécialistes des produits, les différences étaient attribuables à des facteurs spéciaux (par exemple météorologiques) ou à des modifications apportées aux politiques liées à l'Accord du Cycle d'Uruguay relatif à l'agriculture. L'analyse est organisée produit par produit en couvrant la production, le commerce, les stocks et les prix. Elle est suivie d'une analyse des factures d'importations de produits alimentaires et des fluctuations des prix, spécialement dans le secteur des céréales. La dernière section dégage quelques conclusions provisoires.

II. ANALYSE PRODUIT PAR PRODUIT

Blé

4. Au cours de la période 1995-97, la production mondiale de blé a été légèrement supérieure à la tendance, mais les échanges mondiaux et les stocks lui sont restés nettement inférieurs (tableau 1 et figure 1). Les cours internationaux réels (HRW N2 corrigé) se sont situés entre 20 et 23 pour cent au-dessus de la tendance, selon la manière dont elle était mesurée. Pour tous les produits, la tendance inférieure a été calculée compte tenu de l'état des cultures, le chiffre supérieur représentant l'extrapolation directe de la tendance.

5. L'étude antérieure de la FAO (1995) projetait que l'effet du Cycle d'Uruguay serait faible aussi bien sur la production mondiale (augmentation de 2-3 millions de tonnes) que sur le commerce (réduction de 3 millions de tonnes). L'évaluation indiquait que l'effet sur les cours mondiaux serait positif mais peu important. Des conclusions analogues étaient dégagées dans d'autres études. Quoique les stocks n'aient pas été quantifiés dans l'étude de 1995, ils s'annonçaient moindres qu'on n'aurait pu s'y attendre à la suite des négociations d'Uruguay.

6. De fait, les écarts par rapport à la tendance en 1995-97 semblent se produire dans le sens escompté. Mais il y a eu au cours de cette période de nets changements de direction. En 1995/96, les cours mondiaux ont fortement monté à la suite de deux mauvaises récoltes successives en 1994 et 1995, et en raison du faible niveau des stocks dans les principaux pays exportateurs, lequel tenait largement à une politique délibérée de réduction des stocks de report, associée à l'adoption par un certain nombre de pays pendant les quelques années précédentes de politiques conformes au Cycle d'Uruguay. En outre, les subventions à l'exportation ont été nettement inférieures aux engagements pris au titre du Cycle d'Uruguay (en 1995, 6 pour cent seulement du total autorisé ont été utilisés). La flambée des prix a entraîné une forte expansion de la production en 1996 et 1997, laquelle a elle-même entraîné une reconstitution des stocks avec une chute des prix. Au milieu de 1998, les prix en termes réels étaient inférieurs à la tendance à long terme, ce qui tenait en partie au fait que l'on escomptait à nouveau une bonne récolte en 1998 et à une faible demande d'importation en Chine et en Inde - entre autres pays. L'aide alimentaire en blé a diminué de quelque 30 pour cent entre 1995/96 et 1997/98, mais donne des signes de redressement en 1998/99.

Céréales secondaires

7. En 1995/97, la production mondiale s'est située 3 pour cent au-dessus de la tendance, le commerce lui restant de 2 pour cent inférieur et les stocks de report de plus de 13 pour cent supérieurs. Les prix réels à l'exportation du maïs des Etats-Unis ont été nettement supérieurs à la tendance à long terme qui est à la baisse; il en a été de même pour le maïs d'origine argentine.

8. L'évaluation des négociations d'Uruguay faite en 1995 par la FAO indiquait un effet positif sur la production mondiale (plus de 3 millions de tonnes, soit moins de 1 pour cent), également positif sur le commerce (environ 2 pour cent), mais, bien qu'il n'y ait pas eu de quantification des stocks, on estimait qu'ils diminueraient, de même que ceux de blé. Comme pour ce dernier et en commun avec d'autres études, l'évaluation faite par la FAO a indiqué un faible effet positif des négociations sur les cours mondiaux des céréales secondaires.

9. L'évolution des prix en 1995-97 semblerait variée, compte tenu de ce à quoi on s'attendait, mais il importe d'examiner de plus près ce qui s'est passé au cours de cette période. Les cours mondiaux des céréales secondaires ont très fortement monté en 1995/96, en raison d'une baisse de 10 pour cent de la production, elle-même imputable à la combinaison de mauvaises conditions météorologiques et de mesures politiques à un moment où l'on avait beaucoup puisé dans les stocks et où la demande était ferme. En 1995, les contingents tarifaires ont été dépassés par le Japon, la République de Corée et la Thaïlande. En outre, les pays membres de l'OMC n'ont utilisé cette même année que 27 pour cent des plafonds qui leur avaient été consentis pour leurs exportations. Suite à la forte augmentation des prix en 1995/96, la production de céréales secondaires s'est redressée en 1996 et 1997. En conséquence, les prix ont baissé, mais ils étaient encore au-dessus de la tendance au début de 1998. La baisse récente des prix peut être attribuée dans certains cas à la demande relativement faible de produits de l'élevage, tenant en partie à la crise financière asiatique.

Tableau 1 Production, commerce, stocks et cours mondiaux des céréales et du sucre - Chiffres effectifs et tendances, 1995-97

  Production Commerce Stocks Prix ($ E.-U. la tonne, réels1)
  ...........(millions de tonnes) 1995-97 .......... 1995-97 Janv-août 1998
Blé Chiffres effectifs 584 94 112 158 -
  Tendance 574 101 132 122-26 -
Céréales secondaires Chiffres effectifs 880 91 121 119 -
  Tendance 857 93 109 87-88 -
Riz Chiffres effectifs 565 20 55 294 311
  Tendance 562 19 65 264-68 -
Sucre Chiffres effectifs 120 31 43 237 202
  Tendance 118 28 36 262-63 -

1 Prix corrigés par la valeur unitaire d'exportation des produits manufacturés en provenance de pays développés; blé HRW No 2; céréales secondaires, maïs US jaune No2; riz usiné thaï 100 %; sucre brut ISA (Association internationale pour les édulcorants). Les prix pour le blé et les céréales secondaires concernent les campagnes juillet/juin.

Riz

10. On n'escomptait pas des négociations d'Uruguay de modifications notables de la production mondiale, mais on s'attendait à ce que le volume du commerce augmente de 5 pour cent, en grande partie à cause des engagements d'accès au marché pris par le Japon et la République de Corée. On escomptait que les prix se raffermiraient en conséquence du Cycle d'Uruguay.

11. Si l'on fait la comparaison avec la tendance, il apparaît que la production effective de paddy en 1995/97 a été de 3 millions de tonnes supérieure (moins de 1 pour cent), les échanges mondiaux de 6 pour cent supérieurs et les stocks de 16 pour cent inférieurs. Les prix du riz thaï à grain long lui ont été nettement supérieurs et le sont restés pendant la première moitié de 1998. Il en a été de même pour le riz à grain long des Etats-Unis et les brisures de riz thaï.

12. Quoique le resserrement des marchés mondiaux du riz en 1995-98 en comparaison avec la tendance historique soit conforme aux projections effectuées dans les études évaluant l'incidence du Cycle d'Uruguay, on aurait tort d'attribuer uniquement cet effet aux négociations car d'autres facteurs ont aussi joué un rôle. Par exemple, la forte augmentation des prix observée en 1994 et durant certaines parties de 1995 était principalement liée à la sécheresse au Japon. En 1996 et 1997, une certaine retombée des prix qui avaient atteint des niveaux élevés en 1994 a reflété une amélioration générale de la production dans tous les principaux pays importateurs. L'évolution la plus récente des prix en 1998 reflète aussi les récoltes médiocres dans les principaux pays importateurs de riz de l'Asie du Sud-Est, spécialement l'Indonésie et les Philippines, ainsi qu'en Amérique du Sud, spécialement le Brésil, en raison des mauvaises conditions météorologiques dues au phénomène El Niño; cette évolution a pour effet de compenser les effets négatifs sur les prix de la crise financière africaine.

13. Pour l'ensemble des céréales, la production au cours de la période 1995-97 a été supérieure à la tendance, tandis que la valeur des échanges commerciaux a été moindre. Sous l'effet de la situation précaire des stocks en 1995/96, les prix ont été supérieurs à la tendance pendant la plus grande partie de la période, mais ils ont fortement baissé à nouveau en 1998, à tel point que les prix du blé ont été effectivement inférieurs à la tendance à la fin de 1998.

Sucre

14. Au cours de la période 1995-97, la production mondiale du sucre, le commerce et les stocks ont tous été nettement supérieurs à la tendance et les prix sont restés d'autant moindres à la forte tendance à la hausse tout en restant considérablement plus élevés que pendant la plus grande partie de la période 1985-94. Avec les récoltes records envisagées à nouveau cette année, les prix sont à nouveau inférieurs à la tendance pendant le premier semestre de 1998.

15. De manière générale, on n'escomptait pas que les négociations d'Uruguay auraient un effet notable sur l'économie mondiale du sucre, les principaux pays développés consommateurs n'accordant aucune concession majeure en ce qui concerne l'accès au marché. On s'attendait toutefois à une augmentation aussi bien de la production que du commerce et des prix, même si, dans la plupart des cas, il devait s'agir seulement de deux points de pourcentage. Le principal effet stimulant pour le sucre était attendu de la réduction des tarifs douaniers dans les pays en développement. La réduction des exportations subventionnées ne devait pas avoir une incidence importante, car elles ne représentaient que 5 pour cent des échanges mondiaux. D'autres études prévoyaient des effets analogues plutôt peu importants. Au cours de la décennie 1985-94, une certaine tendance à la stabilisation des prix devait s'améliorer, exception faite de la fin des années 80 où ont été pleinement ressentis les effets de l'abrogation des dispositions économiques de l'Accord international relatif au sucre. L'augmentation de la production et des stocks a été due aux prix à la production relativement favorables, tandis que la croissance économique et les prix quelquefois subventionnés à la consommation ont stimulé la demande et le commerce. En 1998, du fait de la moindre demande d'importation en Fédération russe, en Chine et dans quelques autres pays d'Asie affectés par la crise financière et parce qu'ils escomptaient des récoltes importantes en 1998/99, les prix sont tombés pendant le premier semestre.

Graisses et huiles

16. Le volume de la production et des échanges mondiaux de graisses et d'huiles a été très nettement supérieur à la tendance en 1995-97, tandis que les prix sont restés généralement inférieurs (soja, tournesol et colza inférieurs, et huile de palme supérieur) aux tendances à la hausse qui avaient commencé en 1993 (tableau 2 et figure 1).

17. On escomptait que le Cycle d'Uruguay stimulerait légèrement la production et le commerce, et qu'il aurait pour effet d'inverser une baisse projetée des prix (pour la deuxième moitié des années 90). Le principal effet, dû principalement à l'accroissement des revenus, était un accroissement escompté de la production et des exportations d'huile de palme et de palmiste en Asie du Sud-Est et, dans une moindre mesure, l'huile de soja en Amérique du Sud.

18. L'évolution en 1995-1997 doit être étudiée en prenant pour point de départ le marché précaire de 1994 tel que, même si les prix avaient diminué après avoir atteint un maximum en 1994, ils étaient encore supérieurs à ceux des années précédentes, en partie à cause de la réduction des subventions à l'exportation et en partie à cause des effets des revenus plus élevés. La perspective à court terme en 1998-99 indique le maintien de prix raisonnablement fermes.

Farines d'oléagineux

19. En 1995-97, la production, le commerce et les cours mondiaux ont été nettement supérieurs à la tendance. On n'escomptait pas que le Cycle d'Uruguay aurait un effet direct important sur les volumes ou sur les prix, fondamentalement parce que les farines d'oléagineux ont été généralement commercialisées sans distorsions majeures; il y a eu toutefois quelques effets relativement peu importants de changements prévus en ce qui concerne les produits de l'élevage et d'autres aliments pour animaux. Dans l'ensemble, ces effets ont été assez réduits. La production, les prix et le commerce supérieurs à la tendance en 1995-97 ont été en grande partie dus à l'expansion ininterrompue de la demande du secteur de l'élevage ainsi qu'à la stimulation de la demande par la flambée des prix des céréales fourragères en 1995/96. La perspective à court terme indique un fléchissement des prix qui devraient retomber à des niveaux antérieurs à ceux de 1995, même si la demande devrait se maintenir relativement forte tout en étant tempérée par les effets de la crise financière asiatique sur le secteur de l'élevage en Asie du Sud et du Sud-Est, en raison de la production plus élevée escomptée en 1998.

Viande

20. Au cours des trois dernières années, la production, le commerce et les prix de la viande bovine ont tous été inférieurs à la tendance. On prévoyait que le Cycle d'Uruguay stimulerait le commerce du fait de l'abaissement des droits de douane au Japon, de l'ouverture progressive des marchés asiatiques et de la réduction des subventions à l'exportation. On escomptait que les cours mondiaux seraient plus fermes.

21. Le net contraste entre les résultats récents et ce que l'on attendait a peu à faire avec le Cycle d'Uruguay. Le déficit de production a été principalement dû à la contraction du secteur de la viande dans de nombreux pays en transition. Le fléchissement du commerce et des prix a été essentiellement imputable à des facteurs tels que la crise de l'ESB et quelques autres réductions de la demande pour des raisons sanitaires. On a toutefois largement reconnu que des faits nouveaux tels que l'ouverture du marché japonais de la viande bovine aux importations ont stimulé les échanges. Toutefois, ce pays ayant entrepris son processus de libéralisation en 1991, ces modifications des politiques ont produit leur effet avant que l'accord au titre du Cycle d'Uruguay soit mis en _uvre, même si les deux événements n'étaient pas indépendants.

Tableau 2. Production, commerce, Stocks et cours mondiaux effectifs et projetés et autres produits agricoles, 1995-97

  Production Commerce Prix en $E.-U par tonne, réel1
  ...... 1995-97 millions de tonnes........ 1995-97 Jan.-Mai 1998
Graisses et huiles a/ Chiffres effectifs 97.9 33.6 509 612
  Tendance 93.1 28.9 508-87 -
Tourteaux d'oléagineuxb/ Chiffres effectifs 150.0 70.1 218 169
  Tendance 139.8 66.4 156-61 -
Viande bovine Chiffres effectifs 56.2 6.5 1631 1732
  Tendance 56.4 7.4 2032 -
Viande porcine Chiffres effectifs 79.8 5.7 2504 2154
  Tendance 81.1 5.3 1609 -
Volaille Chiffres effectifs 57.0 6.6 805 737
  Tendance 53.4 4.9 678 -
Viande ovine Chiffres effectifs 7.3 0.88 3134 2743
  Tendance 7.6 0.89 2844 -
Lait c/ Chiffres effectifs 542 62.1 1667 1445
  Tendance 541 59.6 1828-70 -
Café Chiffres effectifs 5.8 4.5 2462 2432
  Tendance 5.9 4.9 500-753 -
Cacao Chiffres effectifs 5.8 2.1 1324 1642
  Tendance 5.9 2.2 260 -
Thé Chiffres effectifs 2.7 1.2 1640 2245
  Tendance 2.7 1.2 1417-47 -
Bananes Chiffres effectifs -- 11.0 831 n.a.
  Tendance -- 11.1 753-789 -
Jute Chiffres effectifs 3.1 0.4 330 244
  Tendance 2.3 0.3 150-252 -
Coton Chiffres effectifs 20.0 5.9 1668 1442
  Tendance 19.4 6.0 1345-1404 -
Caoutchouc Chiffres effectifs 6.3 4.4 1228 763
  Tendance 6.0 4.4 854-55 -

1 Corrigé par la valeur unitaire à l'exportation des produits manufacturés de pays développés.

a/ Huile de soja b/ Farine de soja c/ SMP

Figure 1: Prix réels des produits effectivement enregistrés représentés en fonction de la tendance linéaire 1985-94 projetée jusqu'en 1997 (tous les prix sont donnés en $E.-U. par tonne)

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22. Pour ce qui est de la viande porcine, la situation est tout à fait différente. La production en 1995-97 a été inférieure à la tendance, tandis que le commerce mondial et les prix lui ont été nettement supérieurs. Selon l'évaluation effectuée, le Cycle d'Uruguay a stimulé une croissance du commerce qui avait un privilège de pavillon et fait monter les cours internationaux, aidé par de moindres subventions à l'exportation. L'expansion des échanges commerciaux depuis quelques années semble être en partie liée à la mise en _uvre des engagements au titre du Cycle d'Uruguay. En 1995 et spécialement en 1996, les échanges ont été stimulés par une réduction des prix minimaux à l'importation _"prix d'accès"_ et des droits de douane au Japon, et par des achats substantiels de la Fédération russe. Par la suite, la croissance soudaine des importations japonaises a déclenché la clause spéciale de protection des négociations d'Uruguay, d'où, de novembre 1996 à novembre 1997, des prix d'accès beaucoup plus élevés qui ont réduit les importations. Alors que les exportations d'autres pays ont augmenté, celles de l'Union européenne ont diminué, en raison d'une demande active de viande porcine suite à la crise sanitaire causée par l'encéphalopathie spongiforme bovine en 1996. Mais, en 1997, les échanges mondiaux ont fléchi par suite à la fois d'une moindre demande d'importation imputable en partie à la crise financière asiatique, ainsi qu'à de moindres disponibilités, les exportations étant très affectées par l'apparition de foyers de fièvre porcine dans la province chinoise de Taïwan et en Union européenne.

23. L'évolution dans le secteur de la volaille en 1995-97 a été encore plus dynamique, la production, les échanges et les cours mondiaux étant tous nettement supérieurs à la tendance. On escomptait que le principal effet du Cycle d'Uruguay serait un certain raffermissement des prix, reflétant une hausse des revenus, une augmentation des prix des aliments pour animaux par suite des négociations et une réduction des subventions à l'exportation. L'accroissement des échanges mondiaux en 1995-97 n'a pas été lié au Cycle d'Uruguay; il était en grande partie le résultat d'une forte croissance des importations de la communauté des Etats indépendants _CEI_ et des pays de l'Extrême-Orient, les deux effets s'atténuant en 1998 à la suite de crises financières dans la région asiatique et dans la Fédération russe.

24. Pour ce qui est de la viande ovine, la production et le commerce mondiaux ont été marginalement inférieurs à la tendance, les prix se situant presque 10 pour cent au-dessus de celle-ci. On n'escomptait pas que le Cycle d'Uruguay aurait beaucoup d'effet sur les quantités produites et commercialisées, même si l'on s'attendait à des prix plus fermes. L'important contingent tarifaire de l'Union européenne pour la viande ovine était principalement une reconduction d'accords d'accès antérieurs. Le marché est assez cyclique, ce qui explique le niveau inférieur à la tendance accusé par les prix en 1995-97. Il semble qu'aux Etats-Unis le Cycle d'Uruguay ait donné une certaine impulsion au commerce suite à l'abolition de la Loi sur les importations de viande, mais cette expansion a été compensée par des faits nouveaux négatifs indépendants des négociations intervenus dans d'autres pays.

Lait

25. Pour le lait et les produits laitiers, on ne s'attendait pas à ce que le Cycle d'Uruguay ait une incidence marquée, on ne prévoyait guère de modification du volume de la production et des échanges mondiaux, mais il semblait que les prix monteraient un peu par suite d'une réduction des subventions à l'exportation - auxquelles il avait été considérablement recouru avant la signature de l'Accord à Marrakesh - et des engagements d'accès minimums. La période 1995-97 a connu une production presque exactement conforme à la tendance, tandis que les échanges se situaient au-dessus. les prix ont considérablement varié: ceux du lait écrémé en poudre ont été de plus de 10 pour cent inférieurs à la tendance, tandis que ceux du lait entier en poudre et du fromage lui ont été conformes, et ceux du beurre ont été de 8 pour cent supérieurs.

26. L'évolution en 1995-97 a largement reflété, d'une part le fléchissement continu de la production de la CEI et, de l'autre, son augmentation en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans plusieurs pays en développement d'Asie et d'Amérique latine. Les prix du fromage sur les marchés mondiaux ont bénéficié jusqu'à un certain point de la réduction des subventions à l'exportation, et ceux du beurre de la forte réduction des excédents en stock pendant les dernières années en comparaison avec les niveaux enregistrés au début de l'année 90 et de la forte demande d'importation de la Fédération russe.

Bananes

27. Le volume des exportations de bananes en 1995-97 a été conforme à la tendance et, si l'on suit l'évolution des prix dans les principales régions importatrices, les cours réels moyens lui ont été légèrement supérieurs. Les statistiques de la production de bananes sont difficiles à vérifier car elles englobent les bananes plantains qui sont presque totalement consommées dans les pays où elles sont cultivées et les bananes cultivées aux fins de la consommation locale qui sont fondamentalement un produit différent de celles destinées à l'exportation. Pour ces raisons, les chiffres de production ne sont pas de bons indicateurs aux fins de la comparaison des effets du Cycle d'Uruguay. On s'intéresse plutôt aux échanges commerciaux. Les estimations préliminaires de l'incidence du Cycle d'Uruguay sur le marché de la banane ont été faites en grande partie en rapport avec l'Accord cadre de la Communauté européenne, y compris ses contingents tarifaires.

28. Une forte tendance à l'augmentation du commerce a été enregistrée au cours de la période 1985-94, particulièrement parce que les expéditions vers la Communauté européenne ont alors été exceptionnellement élevées, avant l'entrée en vigueur au milieu de 1993 du régime du marché commun pour les bananes, les pays s'efforçant d'établir des positions contingentaires avant l'entrée en vigueur des contingents tarifaires de la CE. Par la suite, le commerce mondial a continué de progresser suivant la tendance. La décélération de la croissance des importations dans la CE a coïncidé avec une croissance plus rapide des exportations vers d'autres régions et pays, notamment l'Europe de l'Est, l'ancienne URSS et la Chine. En raison des effets du régime de la CE pour la banane sur les importations dans la Communauté, une partie du supplément de production initialement destiné au marché de la CE a été exportée vers les marchés qui n'avaient commencé à s'ouvrir qu'à la fin des années 80. Ainsi, on n'escomptait pas que le Cycle d'Uruguay en général ait beaucoup d'effet sur le volume global du commerce. Toutefois, pour ce qui est des prix, des cours représentatifs dans la CE démontrent que le Cycle d'Uruguay, en acceptant le régime d'importation des bananes dans celle-ci, a déterminé une hausse des prix sur les marchés où l'accès avait été précédemment plus libre et une certaine baisse des prix dans les pays où les modifications ont entraîné une certaine libéralisation. Ailleurs, les prix ont subi une pression en baisse car d'amples disponibilités exportables ont été mises à la disposition de ces marchés.

Boissons tropicales

29. En 1995-97, le volume de la production et du commerce de café ont été légèrement inférieurs à la tendance, mais les prix réels ont été nettement supérieurs. Les prix du café avaient enregistré une nette tendance à la baisse du milieu des années 80 à 1993, année où les dommages causés aux cultures par les conditions météorologiques avaient été cause de graves pénuries. Malgré le redressement des prix en 1995-97, associé à nouveau à de moindres récoltes, les prix réels sont restés très inférieurs à leurs niveaux de dix ans auparavant. On n'escomptait pas que le Cycle d'Uruguay aurait beaucoup d'effets, car le commerce du café est pratiquement exempt d'obstacles non tarifaires et les droits de douane sont généralement peu élevés. L'évolution des prix en 1995-97 reflète donc principalement le caractère cyclique de la récolte, l'incidence des gelées au Brésil ainsi que, dans une certaine mesure, le fonctionnement du système de non-rétrocession des recettes d'exportation.

30. Pour ce qui est du cacao, la situation reflète de près celle observée pour le café, avec une production et des échanges mondiaux légèrement inférieurs à la tendance en 1995-97, les prix étant quant à eux nettement supérieurs. Là aussi, les prix avaient accusé une forte tendance à la baisse au cours de la décennie précédant la signature de l'Accord international sur le cacao en 1993. On pensait que le Cycle d'Uruguay n'aurait qu'un léger effet positif sur le commerce et les prix, et cela de par l'effet des revenus plus élevés. Par suite, les prix assez élevés enregistrés en 1995-97 ont été principalement le résultat d'une remontée cyclique des prix suivant le nouvel accord sur le cacao et des préoccupations suscitées par les restrictions de la production dans quelques-uns des principaux pays fournisseurs.

31. Pour le thé, la production et les échanges mondiaux ont été conformes à la tendance en 1995-97, mais les prix, de même que ceux d'autres boissons, lui ont été nettement supérieurs. On escomptait que le Cycle d'Uruguay entraînerait une certaine intensification du commerce, en raison fondamentalement d'une réduction des tarifs douaniers dans quelques grands pays importateurs en développement. Toutefois, la tendance à long terme à la baisse des prix réels du thé semble non seulement avoir atteint son minimum en 1995-97 mais même s'être inversée, stimulée par une augmentation de la demande d'importation de la CEI et des districts de l'offre en 1997 associés à des conditions météorologiques anormales dans quelques grands pays producteurs de thé; à cela s'ajoutait une augmentation de la proportion des exportations de paquets de vente au détail ayant une valeur ajoutée.

Matières premières agricoles

32. Au cours de la période 1995-97, la production et les échanges mondiaux de coton sont restés voisins de la tendance, mais les prix ont été nettement supérieurs. Le Cycle d'Uruguay devait, pensait-on, avoir une certaine incidence sur le marché du coton, non pas de la même manière que pour d'autres produits agricoles mais plutôt en raison des effets indirects du retrait progressif de l'Arrangement multifibres _AMF_ devant durer jusqu'en l'an 2005. Cela devait par la suite stimuler la demande de fibres textiles, la part du coton dépendant toutefois de la concurrence avec d'autres fibres, particulièrement les synthétiques. Selon le modèle établi par la FAO/ICAC, la demande de coton devrait augmenter de 5 pour cent par suite du retrait progressif de l'AMF, l'essentiel de cet effet devant être retardé jusque vers l'an 2005. Le faible niveau récent des prix du coton en 1997 et 1998 a tenu davantage à la concurrence de fibres artificielles en Chine et en Inde, à l'accroissement des disponibilités de coton et à la crise financière africaine qu'il a eu à faire avec le retrait progressif de l'Arrangement multifibres en particulier.

33. Si les volumes et les prix du jute en 1995-97 ont été nettement supérieurs à la tendance au fléchissement à long terme, cela tient à un redressement cyclique du marché à une période où une amélioration des prix a été cause d'un accroissement de la production et où le commerce s'est intensifié en vue de regarnir les stocks. Le jute n'était pas inclus dans l'Accord sur l'agriculture et les modifications attendues du Cycle d'Uruguay étaient pour l'essentiel celles associées à une amélioration de l'accès aux fibres synthétiques en conséquence du retrait progressif de l'Accord multifibres. Aux prix supérieurs à la tendance enregistrés en 1995-96 ont suivi des prix extrêmement bas en 1997 et 1998.

34. La production et le commerce du caoutchouc ont été plus ou moins supérieurs à la tendance en 1995-97, mais les prix ont été très au-dessus des niveaux projetés. La cause n'en a pas été le Cycle d'Uruguay, car le caoutchouc était déjà commercialisé assez librement et les effets positifs sur les prix des revenus plus élevés attribuables au Cycle d'Uruguay qui ont stimulé la demande de véhicules à moteur, et donc de caoutchouc, ont été jugés limités. La solidité relative des prix en 1995 et 1996 a été attribuée au renforcement de la demande d'importation de caoutchouc dans les principaux pays exportateurs de véhicules à moteur, quoique les prix soient retombés en 1998 en raison de l'accroissement des disponibilités et des effets de la crise financière africaine.

35. En conclusion par conséquent, l'expérience montre que, pour plusieurs produits, il y a eu une période raisonnablement florissante pour le commerce et pour les prix en 1995-97. Les prix de la plupart des produits de base sont montés au-dessus de la tendance en 1995-97, souvent parce que les stocks avaient été épuisés, et cela en partie en raison de la moindre intervention progressive des gouvernements sur les marchés des produits agricoles. Dans un certain nombre de cas, le marché soutenu a été imputable en partie à la mise en application des engagements au titre du Cycle d'Uruguay. Il en a été principalement ainsi pour les céréales et pour la viande, produits pour lesquels la réduction des subventions à l'exportation, l'ouverture de l'accès minimum et l'effet sur les revenus ont eu une certaine incidence. Toutefois, pour la majorité des grands produits agricoles, les faits nouveaux en 1995-97 ont eu plus à voir avec des facteurs spéciaux tels que les conditions météorologiques, la phase du cycle du produit ou l'évolution d'autres marchés, par exemple celui des synthétiques ou ceux de produits concurrents.

36. La faiblesse des prix de nombreux produits agricoles enregistrée ensuite en 1998 fait ressortir le rôle important d'autres facteurs, notamment les crises financières qui ont affecté de nombreux pays. Néanmoins, la tendance à la libéralisation, la réduction du rôle joué par les gouvernements sur les marchés des produits de base - qu'elles soient dues ou non au Cycle d'Uruguay - ont également joué leur rôle dans l'évolution récente. De fait, une partie des changements intervenus sur les marchés des produits de base depuis 1995 pourrait bien tenir aux modifications de l'ampleur des fluctuations enregistrées sur ces marchés depuis quelques années, question qui est examinée à la section III b_ ci-dessous.

III. QUESTIONS SPÉCIALES

Factures d'importation de céréales

37. Un résultat important du Cycle d'Uruguay a été la Décision sur les mesures concernant les effets négatifs possibles du programme de réforme sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires. Cette décision reconnaît qu'au cours du programme de réforme conduisant à une libéralisation du commerce agricole, les pays les moins développés et les pays importateurs nets de produits alimentaires pourraient ressentir des effets négatifs en ce qui concerne l'accessibilité à des termes et conditions raisonnables de quantités suffisantes de produits alimentaires de base provenant de sources extérieures, notamment des difficultés à court terme dans le financement de volumes normaux d'importations commerciales de tels produits.

38. Les deux groupes de pays sont distincts. les 48 pays les moins avancés avaient une population de 588 millions d'habitants en 1995 et celle-ci augmentait à raison de 2,9 pour cent par an. Leur revenu moyen par habitant était de 235 dollars E.-U. en 1995. Au cours de la période 1985-1995, le PIB par habitant était en diminution dans la moitié des pays les moins avancés pour lesquels les données étaient disponibles. Les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires étaient au nombre de 18 en 1995, avec une population totale de 368 millions d'habitants, augmentant à raison de 2,6 pour cent par an. Le revenu moyen par habitant était de 290 dollars E.-U. et il était en voie d'augmentation pour 16 d'entre eux pendant la période 1985-1995. Le pourcentage d'habitants sous-alimentés n'a guère changé depuis le début des années 70 - environ 40 pour cent pour les pays les moins avancés et 20 pour cent pour les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires. Etant donné par conséquent, la grave étendue de la malnutrition, même de petites variations de l'offre d'une année à l'autre peuvent avoir des conséquences considérables pour la situation nutritionnelle dans ces pays. La situation n'est donc pas encourageante. Dans le cas des céréales, qui représentent 52 pour cent de l'apport énergétique alimentaire total dans les pays les moins avancés et 45 pour cent dans les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires, la production par habitant a accusé une tendance à la baisse au cours de la période 1980-1996 : elle a diminué dans 29 des 42 pays les moins avancés producteurs de céréales et dans 13 des 18 pays en développement importateurs nets. En outre, le coefficient de variation de la production de céréales a dépassé 10 pour cent dans 26 des pays du premier groupe et dans 11 de ceux du second. Beaucoup de ces pays sont donc vulnérables aux modifications des marchés mondiaux des produits alimentaires, particulièrement des marchés céréaliers.

39. La facture totale d'importation de produits alimentaires (y compris les produits non céréaliers) des pays les moins avancés est passée de 3,9 milliards de dollars E.-U. en 1980 à quelque 6 milliards en 1995, soit une augmentation de plus de 50 pour cent. Pour les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires, la facture d'importation correspondante a été de 8,5 milliards de dollars E.-U. en 1980, passant à 12 milliards en 1995, soit une augmentation de plus de 40 pour cent. Les céréales sont l'article le plus important sur la facture d'importation de produits alimentaires de ces pays puisqu'elles en représentent plus de 40 pour cent; une part de 20 pour cent revient aux huiles végétales et aux graines oléagineuses. Le revers de la médaille est, bien sûr, l'aptitude de ces pays à payer leur facture d'importation de produits alimentaires. On ne dispose pas d'informations à jour sur les indicateurs avancés de l'aptitude à payer. Les recettes d'exportation de ces pays progressent depuis le milieu des années 80, quoique les recettes d'exportation de marchandises par habitant en 1995 aient été effectivement moindres qu'au début des années 80. La balance des paiements des pays les moins avancés était négative. La même constatation vaut pour presque tous les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires. Le coefficient du service de la dette était de 16,7 pour cent pour les pays les moins avancés en 1991-93 et de 20 pour cent pour les pays importateurs nets de produits alimentaires.

40. L'expérience acquise au cours des dernières années, spécialement pendant les années de prix élevés de 1995/96, a été particulièrement importante. De 1993/94 à 1995/96, les deux groupes de pays ont enregistré un accroissement substantiel de leur facture d'importation de céréales, qui a été de 83 pour cent pour les pays les moins avancés et 61 pour cent pour les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires. Il fallait s'attendre à cette augmentation en raison de la forte hausse des cours mondiaux des céréales en 1995/96. Ce qu'il vaut également la peine de noter, cependant, est que la facture d'importation de céréales s'est maintenue à un niveau relativement élevé pour les deux groupes de pays en 1996/97 et 1997/98, malgré le fléchissement de leurs prix après la flambée de 1995/961. L'explication doit être recherchée non pas dans le prix nominal des céréales seulement, mais aussi dans le volume des importations et deux autres éléments de la facture d'importation qui ont été relativement importants dans le passé, à savoir l'aide alimentaire et les subventions à l'exportation.
41. Les rapports de l'aide alimentaire au volume total (volume commercial et aide) des importations montrent dans quelle mesure l'aide alimentaire a contribué à alléger la charge des importations. En 1997/98, l'aide alimentaire en céréales a représenté 23 pour cent des importations céréalières des pays les moins avancés, contre 36 pour cent en 1993/94 et 64 pour cent au milieu des années 80. La diminution de la contribution relative de l'aide alimentaire aux importations céréalières des pays en développement importateurs nets de produits alimentaires est encore plus marquée, puisqu'elle est passée de 22 pour cent au milieu des années 80 à 7,6 pour cent en 1993/94, pour tomber à 2 pour cent en 1997/98. Ces modifications radicales de la contribution de l'aide alimentaire à la charge d'importation que représentent les céréales pour ces pays, reflètent la réduction substantielle du volume global de l'aide alimentaire en céréales qui est tombée à seulement 5,5 millions de tonnes par an au cours des deux dernières années, soit le niveau le plus bas qui ait été enregistré depuis le début des programmes d'aide alimentaire au milieu des années 50. En outre, une plus large part de l'aide alimentaire est maintenant utilisée de plus en plus pour faire face à des besoins d'urgence, dans les pays en développement comme dans les pays développés, et elle est moins souvent réservée à des pays qui se heurtent à des déficits alimentaires structurels. Une réduction spectaculaire analogue a été observée pour l'autre composante de l'aide alimentaire aux pays en développement importateurs, à savoir les subventions à l'exportation. La valeur des importations effectuées au titre de subventions, qui a atteint 26 pour cent de la facture d'importation de céréales des pays les moins avancés et 46 pour cent de la facture d'importation des pays importateurs nets de produits alimentaires en 1994/95, est tombée à pratiquement zéro depuis 1995/96.
42. Ce que ces deux tendances impliquent et cela bien qu'on ait pu en grande partie le prévoir dans le nouveau contexte politique résultant du Cycle d'Uruguay, est qu'un volume beaucoup plus important de céréales a été importé à des conditions commerciales au cours de la période allant jusqu'en 1997/98. Certains signes indiquent qu'il pourrait diminuer en 1998/99 après avoir atteint un maximum en 1997/98, quoique le volume des importations commerciales ait encore beaucoup de chances d'être supérieur à celui de 1993/94.

Tableau 3. Factures d'importations de céréales - Pays les moins avancés et pays en développement importateurs nets de produits alimentaires

  1993/94 1994/95 1995/96 1996/97 1997/98
Volume (millions de tonnes)
Pays les moins avancés 11,1 13,3 12,2 10,3 13,5
Pays en développement importateurs nets de produits alimentaires 25,5 26,0 26,1 27,7 31,7
Total 36,6 39,3 38,3 38,0 45,2
Valeur en milliards de dollars E.-U.
Pays les moins avancés 1,2 2,0 2,2 1,7 2,0
Pays en développement importateurs nets de produits alimentaires 3,6 4,0 5,8 5,5 5,3
Total 4,8 6,0 8,0 7,2 7,3

43. En conclusion, il apparaît que ces deux groupes de pays ont eu des déficits d'importations alimentaires importants et croissants. Le faible apport calorique dont bénéficie leur population et le fait qu'ils sont sujets à des fluctuations de la production les rendent vulnérables aux changements intervenant sur le marché mondial. La combinaison de prix quelque peu supérieurs à la tendance, une moindre aide alimentaire et un moindre volume des exportations subventionnées, avec parallèlement une augmentation de déficits céréaliers sous-jacents, ont fait que ces pays ont été confrontés à des factures d'importation de céréales nettement plus élevées qu'auparavant durant la période 1995/96 à 1997/98; une partie de cet effet est associée au processus du Cycle d'Uruguay, tandis que le reste reflète les changements structurels sous-jacents et des contingences telles que les conditions météorologiques.

Instabilité des prix

44. L'un des bénéfices attendus du Cycle d'Uruguay était que les cours internationaux des produits alimentaires se stabiliseraient. On pensait que des politiques d'importation plus ouvertes et une réduction des subventions à l'exportation amélioreraient la réponse aussi bien des importateurs que des exportateurs aux signaux adressés par les prix sur le marché international. La principale difficulté avec une telle idée était que le rôle fondamental des stocks était souvent insuffisamment apprécié, voire ignoré. De fait, la réforme des politiques, souvent associée au Cycle d'Uruguay, entreprise à la fin des années 80 ou au début des années 90 a entraîné une forte réduction des stocks de report qui a pu elle-même servir à intensifier les fluctuations des prix. Il était donc nécessaire d'évaluer l'incidence globale de ces divers facteurs.

45. Pour examiner l'effet que le Cycle d'Uruguay a pu avoir sur la stabilité des prix, on a regroupé deux types de données. En premier lieu, sur la base d'une instabilité des prix dans le courant d'une année, une comparaison a été faite entre les 36 mois de données disponibles pour 1995-97 avec des périodes antérieures. En deuxième lieu, on s'est également reposé sur une nouvelle étude2 de la stabilité des prix des céréales dans laquelle une évaluation plus détaillée a été faite.
46. En premier lieu, pour ce qui concerne les variations des cours internationaux mensuels (tableau 4), on peut voir qu'à l'intérieur d'une année les coefficients de variation ont été assez également répartis - quelques-uns (12) ont été plus élevés en 1995-97 qu'en 1990-94, d'autres (13) ont été moindres. Il n'y a pas eu de tendance globale et quoique certains des changements puissent sembler statistiquement significatifs, il est difficile de croire que le Cycle d'Uruguay ait eu un effet important. C'est ce que l'on peut voir en comparant les produits pour lesquels ont escomptait que les négociations auraient le plus d'effets - à savoir les produits alimentaires de base - avec ceux pour lesquels on prévoyait des effets moindres. Le coefficient moyen de variation des céréales, des huiles et des produits de l'élevage est tombé de 7,6 pour cent à 7,2 pour cent d'une période à l'autre, tandis que, pour les autres produits, le fléchissement a été légèrement supérieur - de 10,1 pour cent à 9,1 pour cent. Autrement dit, l'amélioration en ce qui concerne l'instabilité des prix dans l'année a été plus grande pour les produits agricoles moins affectés par le Cycle d'Uruguay que pour les produits pour lesquels on escomptait une plus grande incidence des négociations.
Tableau 4. Coefficients de variation des prix nominaux mensuels (pourcentage)

  Moyenne 1990-94 Moyenne 1995-97
Blé (HRW2) 6,8 7,8
Maïs (USYellow2) 5,3 13,8
Riz (thaï 100) 10,3 9,2
Riz (thaï A1) 7,6 9,3
Sucre raffiné 7,9 7,0
Sucre non raffiné (AIS) 11,0 6,3
Huile de soja 5,5 5,6
Huile de palme 7,8 4,9
Huile de tournesol 6,1 7,8
Huile de colza 6,5 6,5
Lait écrémé en poudre 11,7 4,7
Lait entier en poudre 9,8 5,5
Beurre 9,1 11,6
Fromage 10,6 1,1
Viande bovine 4,8 6,3
Viande d'agneau/mouton 4,7 7,3
Viande de porc 10,9 7,9
Volaille 4,4 5,3
Café 14,4 11,7
Cacao 9,9 5,3
Thé 10,8 6,7
Coton 7,2 6,1
Caoutchouc 7,6 13,1
Jute 14,5 17,5
Cuirs et peaux 7,5 8,4

47. En deuxième lieu, pour les céréales, une analyse plus détaillée indique qu'au cours de la période 1970-1996:

48. Pour ce qui est des perspectives d'instabilité des prix à la suite du Cycle Uruguay, la plus récente analyse disponible est celle de la Consultation d'experts FAO sur l'instabilité des prix tenue en juin 1996, dont les travaux ont été examinés à la dernière session du Comité des produits, et qui, fondamentalement, a conclu qu'au cours des quelques années à venir, pendant que les politiques s'adaptent au nouvel environnement commercial, les prix seront plus instables que par la suite lorsque le système devrait se stabiliser.3

IV. CONCLUSIONS

49. L'invitation du Comité des produits à évaluer l'incidence du Cycle d'Uruguay «dans son application pratique» sur les produits agricoles, y compris sur la sécurité alimentaire des pays en développement, a été suivie tout en ayant bien conscience du fait qu'une telle évaluation est très difficile à effectuer, fondamentalement parce qu'il n'y a pas de base claire pour prévoir un accord clair sur ce que la situation aurait été sans les négociations. L'approche adoptée dans la présente étude a été de comparer les tendances à plus longue échéance avec les faits nouveaux effectifs depuis 1995. On trouvera ci-après les conclusions de cette analyse.

50. En premier lieu, pour un certain nombre de produits agricoles, les conditions raisonnablement dynamiques du marché en 1995-97 peuvent être en partie attribuées au Cycle d'Uruguay. Il en a principalement été ainsi dans le secteur des céréales et de la viande où l'impulsion a été due à des réductions des subventions à l'exportation, à l'ouverture de conditions d'accès minimums, à l'effet de la réduction de l'intervention des gouvernements sur le marché entraînant elle-même une réduction des stocks, et à l'effet des revenus plus élevés. Toutefois, pour la plupart des produits agricoles, l'incidence du Cycle d'Uruguay sur le volume du commerce et le niveau des prix a probablement été négligeable. Les faits nouveaux en 1998 illustrent le degré auquel les marchés agricoles se ressentent des modifications soudaines des conditions météorologiques ou économiques qui peuvent contrebalancer les effets plus lents associés aux changements structurels, tels que ceux dus au Cycle d'Uruguay.

51. En deuxième lieu, la facture d'importation de produits alimentaires des pays les moins développés et des pays en développement importateurs nets de produits alimentaires a augmenté depuis le début des années 90, ce qui tient en partie aux prix généralement plus élevés, mais aussi à la réduction du volume de l'aide alimentaire, la réduction du volume des exportations subventionnées et l'accroissement du volume des importations requises. Une partie de l'augmentation de la facture d'importations alimentaires de ces pays peut être attribuée aux effets du Cycle d'Uruguay ou à des modifications des politiques qui étaient conformes aux négociations (réduction des stocks d'intervention et, par suite, moindres volumes de l'aide alimentaire), et en partie à d'autres facteurs qui ont rendu ces pays de plus en plus dépendants de leurs importations de produits alimentaires, alors que leur capacité de payer s'est trouvée limitée.

52. En troisième lieu, il n'y a guère de signes de modifications importantes en ce qui concerne l'instabilité des cours mondiaux, que ce soit d'une année à l'autre ou dans le courant d'une année. Pour ce qui est des céréales, quoiqu'il n'y ait pas de tendance observable pour ce qui concerne la variabilité des prix à plus longue échéance, les hausses des prix enregistrées en 1995/96 pour le blé et pour le maïs (mais non pour le riz), ont été analogues à celles enregistrées pendant la crise alimentaire mondiale au début des années 70, et leur chute en 1998 est peut-être aussi tout à fait significative.

53. Enfin, quoiqu'il n'y ait pas eu de changement important en ce qui concerne l'instabilité relative des prix dans le courant de l'année, l'instabilité des prix en chiffres absolus est plus grande lorsque le niveau des prix est plus élevé, probablement parce que ces périodes sont associées à un faible niveau des stocks. Dans l'ensemble par conséquent, la flambée des prix en 1995/96 a été cause de préoccupations car la hausse a été exceptionnelle et le marché particulièrement instable.

54. Globalement, étant donné que l'on dispose seulement de trois années complètes de données, il est encore un peu trop tôt pour évaluer l'incidence des négociations. Il pourrait être nécessaire d'entreprendre une autre évaluation pour la prochaine réunion du Comité des produits, lorsque l'on disposera pour cela de plus de cinq années de renseignements.

55. Le Comité des produits est invité à examiner les conclusions du présent document. Il souhaitera peut-être en particulier présenter des observations sur les conclusions formulées aux paragraphes 49 à 54.


1

Certaines données indiquent que la facture pourrait diminuer en 1998/99 si les espérances actuelles (octobre 1998) se réalisent.

2

The Evolving nature of International Price Instability in Cereals Markets (La nature changeante de l'instabilité des cours internationaux sur les marchés des céréales), Alexander Sarris, FAO, 1998.

3

Report of a Meeting of Experts on Agricultural Price Instability (Rapport d'une réunion d'experts sur l'instabilité des prix agricoles), Rome, 10-11 juin 1996, ESCP. N°2.