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IV. Gestion des ravageurs et maladies transfrontières et leurs impacts économiques

OPTIONS DE CONTRÔLE

Lorsqu'elles sont appelées à prendre des décisions concernant la lutte contre les ravageurs et les maladies transfrontières, plusieurs options de gestion s'offrent aux autorités locales, nationales, régionales ou internationales. Les sections ci-après exposent les procédures à suivre pour choisir le type d'intervention le plus approprié à mettre en œuvre.

Il est fréquent que les agriculteurs trouvent des ravageurs autour de leurs récoltes et réussissent à guérir leurs animaux lorsqu'ils sont malades. Les méthodes modernes de gestion des ravageurs ne cherchent pas à les éliminer tous, mais essaient plutôt de créer un environnement qui limite leurs concentrations. La protection à l'exploitation est différente du contrôle des déplacements des ravageurs et maladies transfrontières qui a pour objectif d'empêcher l'entrée d'une population qui peut se reproduire et survivre dans le lieu d'introduction. Les migrateurs nuisibles sont habituellement absents dans l'environnement agricole, mais arrivent soudainement en grand nombre et détruisent fréquemment les récoltes avant qu'une intervention puisse être mise sur pied. De même, la plupart des maladies animales sont trop virulentes ou menacent trop la santé humaine et les échanges pour qu'elles puissent être tolérées, même à un degré d'incidence peu élevé. La prévention demeure, par conséquent, un élément clé de la gestion des migrateurs nuisibles et des maladies animales.

Le tableau 46 montre la gamme des mesures phytosanitaires utilisées pour gérer les ravageurs et les maladies transfrontières des animaux et des plantes. Ces mesures sont classées selon le stade auquel le risque survient: les mesures d'exclusion tendent à éliminer le risque avant qu'il n'arrive dans le pays; les mesures de précaution sont imposées pour réduire le risque dans le pays qui les prend (souvent à la frontière ou aux points d'entrée); et les mesures de maîtrise d'un ravageur ou d'adaptation en cas d'introduction (entrée et établissement) ou les mesures d'éradication de la maladie sont adoptées après coup.

Réduction de la probabilité d'entrée

La quarantaine constitue le premier bastion contre les ravageurs et les maladies transfrontières des animaux et des plantes, et les pays, pour éviter leur introduction, consacrent des ressources considérables aux politiques et programmes de contrôle et de mise en quarantaine des importations à la frontière. La quarantaine est considérée un bien public relevant de la responsabilité de l'État, étant donné que les exploitants et les services vétérinaires privés sont relativement impuissants quant à éviter l'introduction de ravageurs et de maladies ou y faire face. Les pays font connaître leur politique en matière de quarantaine en publiant des listes d'organismes ou d'articles réglementés ou autorisés.

Tableau 46

MESURES PHYTOSANITAIRES DE GESTION DES RAVAGEURS DES PLANTES ET DES MALADIES ANIMALES

Fréquence
des mesures
de contrôle

Réduction du risque d'entrée

Vérification du respect du traitement1

Mesures de lutte
ou mesures
palliatives

Adaptation ou Acceptation

I. Moment auquel les mesures doivent être adoptées

  • Demande d'importation d'un nouveau produit, ou en provenance d'un nouveau pays
  • Les programmes de surveillance montrent que le cheminement ou l'épidémiologie a changé
  • Révision des politiques applicables aux cheminements existants ou au statut des ravageurs
  • Points d'entrée et de distribution des produits, des semences et des animaux vivants
  • Dépistage d'un foyer de maladie ou d'une incursion alors qu'il existe des possibilités d'intervention
  • Le cheminement naturel s'est traduit par l'introduction de ravageurs et l'intervention est jugée appropriée
  • L'impact se révèle moins sérieux que prévu
  • Meilleure capacité d'adaptation des agriculteurs
  • Élimination des mesures inefficaces
  • Les technologies existantes ne permettent pas de contenir la maladie ou le ravageur
  • Le coût de l'inter-vention dépasse les avantages

2. Exemples de mesures visant à prévenir l'introduction de ravageurs et de maladies

  • Formation, assistance technique, enquêtes et recherches dans le pays d'origine
  • Création de réseaux avec les responsables et experts dans les régions d'origine du risque
  • Révision des listes d'interception
  • Élaboration de listes restreintes2
  • Inspections dans le pays d'origine
  • Limitation des importations aux produits provenant d'une zone exempte de ravageur d'un pays où celui-ci est présent
  • Exigence d'un traitement préalable des produits à haut risque
  • Analyses visant à déterminer le cheminement en vue d'une action préventive
  • Établissement de modèles pour prédire l'incidence potentielle et les paramètres de survie de l'organisme dont il s'agit
  • Inspections: visuelles; par échantillonnage; ciblées en fonction du risque; aux rayons X, sonores ou autres; chiens dressés
  • Examen des permis, certificats phytosanitaires, connaissements
  • Isolement pour une période d'observation
  • Traitement, réexportation ou destruction en cas d'interception
  • Spécifications des ports d'entrée selon le type de cargaison et/ou de risque
  • Limitation des marchés de destination
  • Mise en conteneurs en cas de transit par une zone vulnérable
  • Éducation du public et dépotoirs d'«amnestie» aux points d'entrée
  • Recensement et démarcation des zones infestées
  • Surveillance de la zone avoisinante
  • Mesures visant à combattre, contenir ou éliminer les ravageurs au moyen d'applications de pesticides; d'appâts et de substances attractives; de libération d'insectes stériles; de stations de quarantaine; de vaccins; d'agents de lutte biologique
  • Approches systémiques fondées sur une combinaison de mesures
  • Traitement des récoltes ou des animaux qui quittent la zone infectée pour éviter toute propagation
  • Systèmes de déclaration d'urgence en cas de propagation dans de nouvelles zones (ce qui ramène aux mesures d'atténuation des risques)
  • Mise au point de nouvelles formules d'intervention pour les producteurs
  • Enregistrement des nouveaux pesticides ou vaccins ayant fait la preuve de leur efficacité
  • Création, certification et distribution de jeunes plants sains
  • L'intervention contient les ravageurs ou maladies dans des limites tolérables
  • Modification des pratiques de culture
  • Traitement des eaux en vue d'éliminer les maladies transmises par l'eau

3. Raisons de l'échec des mesures de protection

  • Les informations sont inexistantes ou trompeuses
  • Les options de traitement sont limitées
  • Le cheminement n'est pas encore découvert
  • L'hôte n'est pas encore découvert
  • Les modèles sont insuffisants
  • L'inspection échoue en raison du volume des importations, de la médiocrité des méthodes d'échantillonnage, etc.
  • Le ravageur est à l'état latent au moment de son introduction ou est difficile à identifier ou à diagnostiquer
  • Le cheminement naturel n'est pas réglementé
  • Introduction clandestine de produits à haut risque
  • Les techniques de détection n'aboutissent pas
  • Le nombre de pièges est insuffisant ou les superficies surveillées sont insuffisantes Les méthodes d'épandage de pesticides ou l'utilisation d'appâts ne sont pas réalisables, rentables ou disponibles Les vaccins ne sont pas disponibles
  • Les méthodes de précaution ne sont pas utilisées par tous les producteurs
  • Le ravageur ou la maladie peut acquérir une résistance aux méthodes d'élimination
  • De nouvelles populations ou variantes causent des foyers de maladie allogènes

4. Problèmes liés à l'application des mesures susmentionnées

  • L'obligation de réduire les risques devient onéreuse
  • Des différends commerciaux résultent du manque de correspondance entre la réduction des risques et le libreéchange
  • Les consommateurs dans le pays importateur ne peuvent pas profiter de nouveaux approvisionnements
  • Un transbordement dissimule le pays d'origine
  • Retards dans le dédouanement des cargaisons et l'admission des passagers
  • Risque de violation des droits civils
  • Risque d'aggravation du transport clandestin
  • L'intervention a un impact plus sérieux sur l'environnement que la prévention
  • Des introductions répétées entraînent des coûts élevés lorsque le cheminement originel n'est pas bloqué
  • Dans un premier temps, l'impact secondaire du ravageur risque de ne pas être pris en considération
  • L'existence du ravageur ou de la maladie est acceptée, ce qui met fin aux efforts de prévention

1 Non applicable aux migrateurs nuisibles.
2 Toutes les mesures sont vouées à l'échec si l'on dispose pas de financement ou de volonté politique appropriés pour les appliquer.
Source: Adapté de M.M. Quinlan. 2000. Phytosanitary measures for managing regulated plant pests. Dans N.S. Price et L. Seewooruthun, éds. Proceedings of the Indian Ocean Commission Regional Fruit Fly Symposium, 5-9 juin 2000, Maurice.

La prévention, la maîtrise et l'élimination des ravageurs et des maladies transfrontières est plus qu'un bien public national. Comme les uns et les autres peuvent se propager à travers les frontières, la protection ne peut être efficace que si les pays voisins déploient des efforts concertés et coordonnés. Les programmes de maîtrise des ravageurs et maladies, établis par les différents pays, risquent de demeurer vains si les pays voisins n'agissent pas dans le même sens. En outre, une approche internationale permet de mieux exploiter les barrières géographiques naturelles et, d'une manière plus générale, les facteurs biologiques et épidémiologiques. Les programmes d'exclusion et de précaution ne peuvent être efficaces que si les risques sont évalués avec précision. À cette fin, on peut utiliser des méthodes comme l'établissement de modèles pour prédire la capacité d'un organisme de survivre dans les conditions qui prévalent dans une région non encore affectée. D'autres méthodes, comme les systèmes d'information géographique (SIG), permettent, en les combinant, de faire une analyse croisée d'un grand nombre d'informations visuelles et de données numériques, comme des photographies par satellite de la surface terrestre, des informations climatologiques ou des données concernant l'incidence des maladies et l'importance des troupeaux et d'établir des prédictions de la propagation des maladies. Un exemple d'utilisation du SIG à cette fin est le Système d'information du Programme de lutte contre la trypanosomiase africaine (PLTA), conçu de manière à évaluer l'impact de la mouche tsé-tsé et de la trypanosomiase sur l'agriculture, de déterminer les domaines dans lesquels des campagnes de prévention sont techniquement réalisables et de recenser les zones dans lesquelles coïncident les trypanosomiases animales et humaines.

Les données satellite provenant de la télédétection peuvent permettre de prédire les maladies animales transfrontières transmises par les insectes, en particulier la fièvre de la Vallée du Rift. Cette maladie cause d'importantes épizooties dans différentes régions d'Afrique à intervalles irréguliers de 15 ans, voire plus, lorsque les conditions environnementales dans les régions à risque (notamment précipitations inhabituelles qui causent des mares, un temps chaud et humide et une augmentation du couvert végétal) favorisent l'apparition et la multiplication en masse de l'espèce de moustique porteur de la maladie. À l'avenir, la prédiction des phénomènes El Niño et la détermination d'indices normalisés des différences de couvert végétal (qui sont un indicateur du volume des pluies tombées dans une région déterminée) grâce à la techniques de télédétection, pourraient être un moyen à la fois efficace et économique de prédire plusieurs mois à l'avance les risques de foyers de fièvre de la Vallée du Rift, mais ces méthodes n'ont pas encore été utilisées dans la pratique.

Les maladies animales transfrontières qui se transmettent directement se prêtent moins à l'utilisation de méthodes de télédétection. Pour prédire l'apparition de maladies qui se propagent surtout par des mouvements d'animaux (comme la fièvre aphteuse, la péripneumonie bovine ou la peste bovine), il faut surtout bien comprendre les déplacements usuels de bétail et rassembler sur place des informations sur les localités où se trouvent les foyers de maladie, bien qu'il soit possible de prédire les risques en prévoyant les mouvements causés par des événements climatiques. Les SIG et les modèles de prévision ont été très utiles pour prédire la propagation de la fièvre aphteuse par le vent en Europe, et de donner ainsi un avertissement. Plusieurs pays à climat tempéré ont donc incorporé ces modèles à leurs plans d'intervention en cas d'apparition de la fièvre aphteuse. De tels systèmes exigent de solides moyens de surveillance clinique et sérologique et des moyens permettant de diagnostiquer les cas confirmés, ainsi qu'un mécanisme plus efficace de communication, de collaboration et d'échange d'informations entre les pays. Les nouveaux moyens d'information ont également permis de prédire plus facilement les invasions de migrateurs nuisibles. Comme les infestations se produisent habituellement à la suite de précipitations, lorsque la végétation reprend dans des environnements arides inhabités, on sait déjà que la télédétection peut utilement compléter les moyens de surveillance sur le terrain. Nombre de pays affectés et d'organisations régionales et internationales disposent actuellement d'indices de la végétation calculés grâce aux données provenant de la télédétection qui peuvent aider à surveiller sur le terrain les éclosions des migrateurs nuisibles.

Intervention en cas d'introduction, d'infestation ou de foyer de maladie

Les mesures de précaution contre les ravageurs et maladies pouvant pénétrer dans un pays ont pour objectif immédiat la protection zoosanitaire et phytosanitaire. Les exploitants ont un rôle clé à jouer dans la mise en œuvre des opérations de prévention, mais ils ont besoin de l'appui de services de protection zoosanitaire ou phytosanitaire ou d'organisations régionales pour recevoir les avis techniques, le matériel et les fournitures nécessaires. Cet appui peut comporter des activités de surveillance, l'établissement de rapports et la mise en route d'interventions en cas d'urgence, autant de mesures qui doivent continuer d'être appliquées jusqu'à ce que l'on puisse décider s'il y a lieu de se rendre à l'évidence et de renoncer aux activités de prévention.

Il y a différents moyens de lutter contre les maladies animales: vaccinations, contrôle des mouvements des animaux - parfois par la seule construction de barrières - chimioprophylaxie et thérapie, abattage des animaux infectés ou des animaux ayant pu être en contact avec des animaux malades, désinfection et élimination des vecteurs. Dans ce dernier cas, on peut avoir recours à l'épandage de produits chimiques, à des moyens biologiques et à une modification de l'habitat naturel.

Des vaccinations préventives peuvent être organisées systématiquement à l'échelle nationale, comme cela a été le cas pour la fièvre aphteuse dans la CE avant 1991 et en Uruguay avant que cette maladie n'ait été éliminée, ou dans certaines régions très exposées à l'introduction de la maladie, souvent appelées «zones tampons». Les vaccinations préventives peuvent réduire les possibilités d'exportation. Les pays dont la maladie est absente répugnent généralement à importer des animaux et des produits dérivés des pays qui utilisent des vaccins. Les programmes de vaccination prolongent considérablement le délai nécessaire avant qu'un pays puisse être déclaré officiellement exempt de maladie ou puisse récupérer ce statut après une épidémie.

Les systèmes interrégionaux et internationaux de déclaration permettent d'informer les organes compétents de l'apparition et de la propagation de ravageurs et de maladies. Tel est l'objet, au plan international, du Système de prévention et de réponse rapide contre les ravageurs et les maladies transfrontières des animaux et des plantes (EMPRES) mis en place par la FAO et décrit à l'encadré 7.

Encadré 7

EMPRES

En 1994, le Directeur général de la FAO a été autorisé à établir un Système de prévention et de réponse rapide contre les ravageurs et les maladies transfron-tières des animaux et des plantes en tant que programme prioritaire.

Le volet maladies du bétail vise à renforcer le rôle de la FAO dans les activités de prévention et de réponse rapide lorsque d'importantes maladies épizootiques transfrontières causent une situation d'urgence. Le volet ennemis des végétaux vise à organiser des mesures de prévention contre le criquet pèlerin afin d'atténuer le risque d'infestations catastrophiques.

En ce qui concerne les maladies animales, EMPRES a tendu principalement à éliminer la peste bovine. Les progrès réalisés sur la voie de cet objectif ont été à la fois rapides et notables. L'accent est mis sur l'adoption de mesures délibérées de prévention des situations d'urgence en développant les systèmes d'alerte avancée et les recherches et en encourageant l'application de leurs résultats. EMPRES tend également à favoriser la coopération entre les pays dans les efforts qu'ils déploient pour combattre les ravageurs et les maladies trans-frontières.

Le volet criquet pèlerin a visé principalement à renforcer les capacités nationales de dépistage précoce des infestations par une surveillance efficace suivie d'une réaction rapide. On s'est employé aussi à réduire les quantités de pesticides utilisées et à mettre au point des technologies moins nocives pour l'environnement.

FORMULES DE GESTION DE L'IMPACT ÉCONOMIQUE

Les mesures biologiques visant à combattre, contenir et éradiquer les ravageurs et les maladies, ansi que les mesures de désinfestation, permettent d'atténuer l'impact socioéconomique des ravageurs et des maladies transfrontières. L'impact économique peut aussi être réduit grâce à des méthodes de gestion des risques qui comprendraient des programmes d'assurance, une augmentation de la production agricole ou l'amélioration de l'infrastructure. La création d'autres sources de revenus grâce à des programmes de développement ruraux ou d'assistance financière peuvent aussi être utiles. Ces mesures, ensemble, pourront garantir aux agriculteurs des revenus plus stables et/ou plus élevés qu'une utilisation exclusive de méthodes biologiques.

Programmes d'assurance. L'assurance permet de répartir les risques entre un grand nombre de personnes. Lorsque les risques auxquels sont exposés les membres du groupe ne sont pas uniformes, on peut, en les compensant, réduire le risque global auquel le groupe est exposé et approuver des méthodes de gestion des risques. Il a été envisagé de mettre sur pied des programmes privés d'assurance des récoltes exposées à des ravageurs spécifiques, mais les compagnies d'assurance privées n'ont pas encore accepté cette approche, essentiellement parce que les agriculteurs sont exposés à des risques communs comme le mauvais temps, les ravageurs et la conjoncture économique. Différents organismes gouvernementaux ont néanmoins mis en place dans de nombreux pays des programmes subventionnés d'assurance pour protéger les agriculteurs contre des récoltes catastrophiques.

Très peu d'études ont été consacrées à la possibilité de mettre sur pied des programmes d'assurance pour indemniser les agriculteurs ou les communautés agricoles lorsque les migrateurs nuisibles déciment les cultures. Belhaj43 a constaté que le coût des indemnités à verser aux agriculteurs en cas d'infestation par le criquet pèlerin devrait être à peu près égal au coût des mesures de prévention, s'il y avait une infestation chaque année. Il est parvenu à la conclusion que comme les infestations de criquet pèlerin sont moins fréquentes, un programme d'assurance, sur la base d'une analyse des coûts-avantages, est plus rentable.

Augmentation ou adaptation de la production agricole. Les agriculteurs n'ignorent nullement à quel point les ravageurs et les maladies peuvent contrecarrer leurs efforts. De différentes façons, ils sélectionnent les stratégies pour pallier leurs effets. Parmi la gamme d'adoptions qui s'offrent à eux se trouve le choix de l'implantation, spécialement dans le cas des pasteurs. Les exploitants peuvent également opter pour des méthodes de production et des récoltes plus résistantes aux infestations et à d'autres risques. Telle est l'une des raisons pour lesquelles le mil chandelle est l'une des principales récoltes cultivées au Sahel, où des sols de piètre qualité, la variabilité des précipitations et la forte évapotranspiration rendent la culture d'autres céréales trop risquée44. Une autre approche consiste à diversifier la production de sorte que les dommages périodiquement causés à une récolte puissent être atténués par la culture d'autres produits qui ne sont pas touchés par les mêmes problèmes. C'est ainsi que, dans certaines régions, les agriculteurs pratiquent une exploitation mixte combinant récoltes et élevage.

Pour atténuer l'impact des ravageurs et des maladies transfrontières, les exploitants doivent également accroître leur production de manière à constituer des stocks et réduire l'impact des pertes avant la récolte. En fait, la plupart des stratégies d'exploitation sont appelées à incorporer un élément d'accroissement de la production, lorsque cela est possible, pour se prévenir contre les pertes éventuelles.

Encadré 8

ÉLIMINATION DE LA MOUCHE ORIENTALE DES FRUITS À MAURICE

En 1991, le Ministère de l'agriculture mauricien a mis en place un réseau de pièges de surveillance phytosanitaire pour dépister l'apparition de mouches exotiques des fruits. En juin 1996, une mouche orientale des fruits (Bactrocera dorsalis) a été trouvée dans un piège proche de l'aéroport de Maurice. Ce piège ne faisait pas partie du réseau de surveillance phytosanitaire mais avait été installé pour un projet de recherche en rapport avec les programmes de quarantaine. Étant donné les liens étroits qui existaient entre les services de recherche et de quarantaine dans le pays, l'apparition de la mouche a été immédiatement déclarée et un vaste programme de protection phytosanitaire et d'élimination a été entrepris.

Les considérations qui sont intervenues dans le choix de la méthode d'intervention ont été à la fois économiques et politiques. Il existait déjà à Maurice plusieurs autres espèces importantes de mouches des fruits (par exemple Ceratitis capita, C. rosa et Bactrocera zonata) et le pays n'exportait à l'époque que très peu de fruits. Il était peu probable que les pertes causées par la mouche orientale des fruits aggravent beaucoup les dégâts causés aux récoltes ou les coûts des mesures de prévention dans le pays.

Le seul impact économique immédiat était l'interruption des exportations de poivrons frais vers la Réunion, qui ne représentaient que quelques centaines de kilogrammes par an. Toutefois, il était politiquement important pour Maurice de prendre l'initiative de prévenir la propagation de la mouche orientale des fruits dans d'autres îles de l'océan Indien et sur le continent africain, où elle pouvait causer des pertes énormes et compromettre les 200 millions de dollars EU de fruits exportés par l'Afrique du Sud vers l'Europe et les États-Unis. Les pouvoirs publics, conscients de ce que Maurice bénéficiait des mesures de quarantaine adoptées par d'autres pays de la région, ont par conséquent décidé d'intervenir.

Le réseau de pièges de surveillance phytosanitaire a immédiatement été étendu dans la région entourant l'aéroport, et les fruits qui y étaient cultivés ont été analysés pour dépister toute infestation de larves. Des larves ont effectivement été trouvées dans les fruits infectés cultivés à proximité de l'aéroport, et il est apparu clairement que la mouche orientale des fruits s'était établie à Maurice. À la suite d'examens morphologiques, on a constaté que les mouches provenaient du sud de l'Inde.

On a commencé à utiliser des appâts empoisonnés et, sur une période de 18 mois, près de 500 000 blocs d'annihilation des mâles (insecticides et appâts pour mâles) ont été placés à proximité des foyers d'infestation potentielle sur une superficie de 300 km2 située dans la partie méridionale de l'île. Entre juin 1996 et mai 1997, 144 mouches, dont 141 au cours des trois premiers mois de la campagne d'intervention ont été découvertes dans les pièges de surveillance. En juin 1998, juste un an après la découverte de la dernière mouche dans les pièges de surveillance, le Ministère de l'agriculture a déclaré Maurice exempte de mouches orientales des fruits. Le coût total de l'opération a atteint environ 1 million de dollars EU, chiffre imputable principalement aux dépenses de main-d'œuvre.

Depuis lors, le réseau de pièges est demeuré en place de sorte que toute nouvelle introduction puisse être détectée. À la fin de l'an 2000, le programme qui était initialement une initiative régionale appuyée par l'Union européenne, deviendra un programme national financé au moyen de ressources locales.

Amélioration de l'infrastructure. Les pertes causées aux cultures et les autres surcoûts de production sont souvent imputables à l'insuffisance d'infrastructures et de services d'appui. Dans certains pays, la détérioration ou l'inexistence de l'infrastructure des transports peut, après la récolte, entraîner la perte jusqu'à 30 pour cent des produits en route vers les marchés. L'absence de services de vulgarisation réduit également la productivité de multiples façons, notamment en empêchant les agriculteurs de faire face aux problèmes de ravageurs et de maladies lorsqu'ils se posent.

Il est normal que la fourniture des services d'infrastructure relève de l'État étant donné que les services d'infrastructure tels que routes, informations sur les marchés, systèmes de crédit, services de vulgarisation et d'éducation et systèmes d'irrigation constituent un bien public. Les investissements dans l'infrastructure ont toujours eu un rendement élevé, et ils sont presque essentiels si les pays veulent accroître leur production agricole. L'amélioration de l'infrastructure peut réduire les coûts au niveau de l'exploitation, ce qui peut aider à compenser les pertes causées par les ravageurs et les maladies.

Développement rural. Les programmes visant à créer des possibilités nouvelles en milieu rural, qu'ils soient entrepris par le secteur privé ou par le secteur public, peuvent aider à faire face aux pertes causées par les ravageurs et les maladies. Le secteur public peut s'employer à développer des zones rurales en encourageant la création d'activités nouvelles, en implantant des services publics dans les régions rurales vulnérables et en élargissant les services d'éducation pour adultes, tels les services de formation professionnelle et de perfectionnement des compétences. Les agriculteurs peuvent également adopter des stratégies de diversification de leurs revenus pour réduire l'impact sur le revenu familial des infestations de ravageurs ou des épidémies. Reardon45 a démontré que, quelles que soient les régions, l'emploi et les revenus non agricoles ont augmenté en milieu rural. Parmi les facteurs qui, selon Reardon, encouragent les ménages à se livrer à des activités non agricoles, se trouve le bas niveau de la production vivrière dû à des problèmes temporaires ou chroniques, y compris les pertes causées par les infestations périodiques de ravageurs et épizooties.

Alimentation et aide financière. Les gouvernements nationaux et les organisations internationales ont mis au point des filets de sécurité lorsque des communautés sont frappées par une catastrophe. Il s'agit surtout de dons d'aide alimentaire ou d'une assistance financière pour aider les victimes à faire face à des pénuries temporaires. Une telle intervention en cas d'urgence peut, en théorie, être le moyen le plus direct et le plus économique d'empêcher qu'une infestation de ravageurs ou un foyer de maladie causent une famine localisée mais, dans la pratique, elle est moins efficace vu que les filets de sécurité sont souvent mal financés, voire inexistants, là où ils sont les plus nécessaires.

ÉVOLUTION DE LA SITUATION ET PROBLÈMES NOUVEAUX

L'évolution des structures économiques mondiales et les changements environnementaux suscitent des problèmes qui vont compliquer la prévention de la propagation des ravageurs et des maladies transfrontières. De plus en plus, on se tourne vers les technologies nouvelles pour relever les défis.

Le changement le plus frappant tient au développement des échanges et des mouvements de personnes et aux nouveaux itinéraires commerciaux qui sont apparus. La mondialisation du commerce de produits est compréhensible si l'on considère que le coût unitaire du fret maritime a diminué de près de 70 pour cent en termes réels au cours des 10 à 15 dernières années, alors que celui du fret aérien a diminué de 3 à 4 pour cent pendant la même période46. Les transformations biologiques et écologiques ont accru la virulence de certains ravageurs et maladies existants et ont exposé les animaux et les êtres humains à des maladies nouvelles, jadis contenues. Les consommateurs s'inquiètent de plus en plus au sujet de l'innocuité des produits alimentaires et exigent plus d'informations et une réglementation plus rigoureuse quant aux aliments. Les pouvoirs publics sont à cet égard de plus en plus sollicités, sans que leurs ressources augmentent pour autant.

Simultanément, de nouvelles technologies, de nouvelles attitudes à l'égard des risques et de nouveaux principes commerciaux pourront avoir pour effet d'orienter les pays vers un système mondial plus rationnel et plus complet de protection zoosanitaire et phytosanitaire.

Vulnérabilité accrue aux épidémies et aux infestations

Le développement des transports aériens, les produits devant être livrés aux consommateurs toujours plus frais et plus rapidement, a permis aux ravageurs et aux maladies de survivre plus facilement au transit. L'apparition d'itinéraires commerciaux nouveaux est allée de pair avec celle de nouveaux mécanismes d'introduction. L'augmentation du commerce d'animaux sur pied et de produits animaux a aussi exposé à la maladie de plus en plus d'êtres humains et d'animaux. Ces nouveaux itinéraires commerciaux ont accru la susceptibilité des récoltes ou plantes autochtones, ou même des poissons, aux ravageurs allogènes, qui n'ont pas suivi la même évolution ou qui se sont introduits dans un environnement dont leurs parasites et prédateurs sont absents.

Encadré 9

LA PROPAGATION À TRAVERS LES FRONTIÈRES DE L'ESB

La FAO a instamment engagé tous les pays du monde à adopter des précautions pour réduire le risque d'infection par l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB).

C'est au début des années 80 que l'ESB - communément appelée la maladie de la vache folle - a fait son apparition au Royaume-Uni, mais cette nouvelle maladie, causée par un agent infectieux jusqu'alors inconnu appelé prion, n'a été identifiée qu'en 1986. Comme la période d'incubation de cette maladie est longue (plus de trois ans), l'épidémie s'est propagée au Royaume-Uni en dépit des mesures prises par les pouvoirs publics pour la contenir et, depuis lors, s'est propagée à d'autres pays d'Europe. En outre, plusieurs autres pays en dehors de l'Europe, ont signalé la présence de cette maladie parmi des animaux importés.

Ce sont apparemment des suppléments alimentaires contenant des farines animales qui ont transmis la maladie parmi le bétail. On pense actuellement qu'une nouvelle variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, maladie neurologique progressive qui a invariablement une issue fatale chez les humains, est probablement liée à la consommation de tissus infectés par l'ESB. Il n'existe actuellement aucune méthode permettant de diagnostiquer la maladie aux premiers stades de l'infection ni de traitement, que ce soit chez les animaux ou chez l'être humain.

Tous les pays qui ont importé du bétail ou des farines animales d'Europe occidentale, et spécialement du Royaume-Uni, pendant les années 80 et depuis lors, doivent être considérés comme exposés à la maladie. Il ressort des données de la FAO que l'Europe a exporté des farines animales dans de nombreux pays depuis les années 80, période pendant laquelle a été identifiée la maladie de la vache folle. Certains de ces pays ont également réexporté des farines animales vers des pays tiers. La CE a procédé à une première évaluation des risques d'infection par l'ESB dans différents pays extérieurs à la CE. Cette évaluation est fondée sur les importations dans ces pays de farines animales ou d'animaux sur pied pendant la période à risque, c'est-à-dire depuis les années 80, ainsi que sur les mesures adoptées pour gérer les risques dans les secteurs de l'élevage, de la viande et des aliments pour le bétail et sur la nature et la structure de ces secteurs.

Les consommateurs ont peur, et les foyers de maladie qui se sont déclarés dans les pays de la CE auront un impact économique qui durera pendant des années. Au cours des derniers mois de 2000, les prix du bœuf dans les pays de la CE ont diminué de 17 pour cent, et tout porte à penser que cette baisse se poursuivra. À la fin de 2000, l'abattage du bétail, la diminution de l'emploi et la disparition de débouchés avaient coûté au Royaume-Uni plus de 5 milliards d'euros, sans parler du coût, impossible à quantifier, de la perte de confiance du public dans l'industrie de l'élevage.

Bien que la lutte contre cette maladie ait commencé au Royaume-Uni depuis plusieurs années, ce n'est que récemment qu'une intervention multilatérale a été concertée. Après que la maladie se soit propagée du Royaume-Uni à des pays considérés comme dotés de systèmes de prévention adéquats, le public a exigé des gouvernements qu'ils fassent le nécessaire pour protéger la santé humaine. C'est ainsi qu'à la fin de 2000, les ministres de l'agriculture des pays de la CE se sont réunis pour convenir de la mise en place d'un vigoureux système de contrôle comprenant notamment les mesures suivantes:

  • interdiction temporaire de l'utilisation de farines animales pour l'alimentation de tous les animaux d'élevage;
  • contrôle de tous les animaux «à risque»;
  • achat en vue d'abattage, sauf contrôle négatif, de tous les animaux de plus de 30 mois;
  • interdiction de l'utilisation pour l'alimentation humaine de certains tissus et organes de bovins considérés comme présentant des risques spécifiques;
  • augmentation des paiements de soutien aux éleveurs de bovins.

Un règlement communautaire sur les encéphalopathies spongiformes transmissibles, qui prévoira peutêtre l'abattage de cohortes et de troupeaux tout entiers, doit entrer en vigueur en juillet 2001.

L'un des principaux enseignements à tirer de cette épidémie, du point de vue des précautions à prendre contre les ravageurs et maladies transfrontières, est la nécessité de reconnaître, à partir d'un certain seuil, qu'une action collective s'impose. Les mesures prises récemment par la CE, les gouvernements nationaux et les organisations internationales compétentes (FAO, OMS et OIE) tendent à mieux comprendre les caractéristiques de la maladie et les risques qu'elle pose (la maladie ellemême et l'agent infectieux continuent de susciter bien des interrogations) ainsi qu'à aider les pays à protéger la santé animale et la santé publique. On s'attache tout particulièrement à améliorer les méthodes de diagnostic, à identifier les risques auxquels sont exposées d'autres espèces animales, et à comprendre comment ces risques peuvent se transmettre tant en amont qu'en aval dans la chaîne de production et la chaîne alimentaire

Les experts recommandent actuellement que les pays exposés mettent en place un système efficace de dépistage de l'ESB parmi le bétail et de contrôle des industries des aliments pour le bétail et de la viande, c'est-à-dire déclaration de tout symptôme de maladie, analyse en laboratoire des tissus prélevés des animaux abattus, élimination dans des conditions hygiéniques des carcasses et amélioration du traitement des abats et sous-produits.

Néanmoins, tous les pays ont intérêt à adopter des mesures de précaution, notamment en améliorant, d'une manière générale, les systèmes de contrôle de la sécurité des aliments destinés à l'homme ou aux animaux. Il convient d'accorder une attention particulière aux procédures d'équarrissage (en éliminant les pratiques d'abattage ou d'équarrissage risquant de faciliter la contamination des produits et de mettre ainsi en danger la santé de l'homme et des animaux) et au traitement et à l'utilisation des abats et des sous-produits. Les abattoirs devraient être contrôlés de près et des procédures appropriées adoptées partout. En outre, il faudrait entreprendre des analyses des risques liés aux systèmes de production et d'échange.

Il y a lieu de souligner que l'épidémie d'ESB est le résultat d'un recyclage de protéines animales et d'une amplification subséquente du problème dans la chaîne alimentaire. L'interdiction des farines animales et une réglementation de l'industrie des aliments pour animaux devraient permettre de mettre fin à la propagation de la maladie dans tous les pays.

Les 30 dernières années qui viennent de s'écouler ont été caractérisées, en particulier, par l'émergence chez l'homme de maladies infectieuses apparemment nouvelles, comme le SIDA, la fièvre de Lassa et le virus d'Ebola. On peut en dire autant des maladies animales. De nouvelles maladies zoonosiques ont éclaté au rythme d'au moins une par an, dont la grippe aviaire, le virus de Nipah, l'ESB (voir encadré 9,) et la maladie causée par l'anémie infectieuse équine. En outre, il apparaît non seulement de nouvelles infections, mais aussi de nouveaux biotypes ou types d'antigènes de maladies infectieuses existantes. Un exemple notable a été la forme hypervirulente de bursite infectieuse aviaire qui a déferlé sur de vastes régions d'Europe et d'Asie ces dernières années et causé des pertes dévastatrices aux élevages de volaille. Les pathogènes transportés par les vecteurs (par exemple le virus West Nile) se sont propagés au-delà de leurs limites traditionnelles. D'autres exemples sont notamment l'apparition de la fièvre catarrhale du mouton en Europe et la fièvre de la Vallée du Rift en Arabie saoudite.

Dans nombre de pays, l'élevage est de plus en plus intensif et commercial, particulièrement dans les régions périurbaines. Cette concentration accrue d'animaux qui en résulte, souvent dans des conditions qui sont loin d'être optimales, facilite la transmission rapide de maladies animales transfrontières et d'autres infections (par exemple le virus de Nipah) et cause ainsi des pertes économiques.

Simultanément, dans certaines régions du monde, les forêts tropicales humides et d'autres zones d'espèces naturelles sont transformées en zones d'élevage, ce qui met les établissements humains et les animaux domestiques en contact étroit avec une gamme tout à fait nouvelle de maladies infectieuses et de vecteurs qui, souvent, ne circulaient jadis qu'en pleine nature et qui risquent d'être tout à fait inconnues. Certaines de ces maladies peuvent être transmissibles aux êtres humains et/ou au bétail qui constituent des hôtes vulnérables parmi lesquels elles peuvent se propager très rapidement.

Si les ravageurs transfrontières causent de plus en plus de préoccupations, c'est parce que les cultures et les ressources naturelles sont de plus en plus sensibles aux infestations. L'agriculture de plantation a pendant de longues années accru la vulnérabilité des cultures aux ravageurs et aux maladies, les solutions les plus souvent utilisées pour y faire face étant l'application de pesticides et un contrôle vétérinaire. Le matériel génétique étant de plus en plus concentré entre les mains de quelques sociétés privées, la variabilité génétique des principales récoltes cultivées dans le monde diminue peu à peu. L'utilisation croissante de cultures génétiquement modifiées favorise la résistance chez les insectes et les agents pathogènes. La manipulation génétique de ces cultures peut les mettre à l'abri d'infestations pendant un certain temps, mais il peut en résulter des ravageurs plus envahissants ou plus nocifs qui évoluent parallèlement à ces «super végétaux».

Les tendances au réchauffement général de la planète peuvent également modifier le schéma des précipitations et du temps dans différentes régions, et affecter en particulier la répartition dans le monde des insectes vecteurs, par exemple les moustiques et les cécidomyies culicoïdes, ainsi que de sérieuses maladies animales transfrontières qu'ils transmettent (fièvre de la Vallée du Rift, fièvre catarrhale du mouton ou peste équine africaine). Les changements climatiques contribuent également à aggraver la vulnérabilité des végétaux aux ravageurs dans de nombreuses parties du monde.

Évolution des attitudes des consommateurs et du public

L'ensemble intégré de mesures qui peuvent être utilisées pour combattre les ravageurs s'appauvrissent progressivement et les nouvelles technologies sont mises au point et testées plus lentement. De même, les campagnes d'épandage de pesticides pour combattre les migrateurs nuisibles en Afrique ont été critiquées, notamment du fait des préoccupations croissantes que suscite dans le monde la protection de l'environnement. Dans le même temps, les consommateurs exigent une réduction constante des limites acceptables en matière de résidus de pesticides, convaincus que ces derniers affectent la santé humaine. Des méthodes plus économiques d'analyse étant maintenant disponibles pour évaluer les risques liés aux résidus de pesticides, il est probable que ces normes plus rigoureuses seront peu à peu appliquées.

L'attitude du grand public a évolué dans le même sens, ce qui s'est traduit par une prise de conscience accrue de l'impact que risque d'avoir sur l'environnement l'introduction de ces organismes nuisibles allogènes. Ces craintes étant motivées par des considérations environnementales, le débat concernant les mesures de protection zoosanitaire et phytosanitaire à adopter font intervenir de plus en plus des mécanismes et des idées tirés des sciences de l'environnement, du droit et des concepts de gouvernance. Les espèces envahissantes allogènes apparaissent comme une des principales menaces aux espèces autochtones, notamment en réduisant leur habitat.

Nouvelles méthodes de surveillance et de contrôle

Il existe déjà une large gamme de biotechnologies moléculaires qui peuvent être appliquées pour améliorer la production et protéger la santé animales, tant au niveau de l'exploitation qu'en dehors de l'exploitation. L'utilisation des méthodes de manipulation de l'ADN peut contribuer de manière significative à améliorer la santé animale et la protection sanitaire. Des méthodes pointues de diagnostic permettent d'identifier les agents pathogènes et de suivre l'impact des programmes de lutte contre les maladies avec précision, pour ce qui est des sous-espèces, souches et biotypes en cause, chose qui paraissait impossible jusqu'à une date toute récente. Par exemple, les méthodes de diagnostic qui ont été mises au point dernièrement permettent de dépister des cas d'ESB qui passaient jusqu'alors inaperçus. Les tests immuno-enzymatiques (EIA) ont l'avantage de pouvoir être automatisés assez facilement et peuvent être utilisés pour le dépistage d'une large gamme de parasites et de microbes. Cependant, ces méthodes demeurent rares dans les pays en développement.

L'épidémiologie moléculaire permet de retracer mieux que jamais auparavant l'origine des pathogènes, ce qui est particulièrement utile dans le cas des épidémies qu'il est plus facile de contenir lorsque leur source peut être immédiatement découverte. La mise au point de techniques génétiques permettant de détecter des ADN/ARN pathogènes (plutôt que des anticorps) chez les animaux est un autre élément qui facilite l'application de mesures zoosanitaires. Enfin, des vaccins recombinants, plus sûrs, plus spécifiques et plus stables, permettant d'établir une distinction entre les animaux vaccinés et été infectés par des voies naturelles, peuvent également offrir la possibilité de mettre au point des vaccins contre des parasites dans le cas desquels les méthodes classiques se sont révélées vaines.

Une innovation facilitant l'analyse des cheminements des ravageurs, et qui pourrait à l'avenir être utilisée pour établir une responsabilité, est l'utilisation des empreintes génétiques qui permettent de déterminer le point d'entrée d'une population d'organismes nuisibles soumis à des régimes de quarantaine, méthode déjà largement utilisée pour le dépistage de la fièvre aphteuse et de la peste bovine par différents laboratoires mondiaux de référence. Une fois le point d'entrée établi, des mesures peuvent être adoptées pour couper le circuit d'introduction ou améliorer l'application des mesures préventives. Cette méthode peut aussi être utilisée pour déterminer si la population dont il est question est nouvellement introduite ou s'il s'agit d'une réapparition d'une population que l'on pensait éliminée.

Un mécanisme opérationnel fort intéressant est l'approche systémique de l'application des normes de protection. Une méthode systémique de quarantaine est beaucoup plus complexe qu'une intervention unique, mais facilite les échanges et réduit l'impact environnemental et social d'opérations de désinfection non nécessaires. Ces systèmes reposent sur des recherches ayant identifié les points critiques par lesquels peuvent s'introduire des organismes nuisibles, et sur l'application de mesures qui ramènent à un niveau acceptable pour le pays importateur le risque qu'un produit importé introduise un organisme nuisible faisant l'objet de mesures de protection phytosanitaires.

Parmi les autres technologies et méthodes qui paraissent prometteuses ou qui ont déjà fait la preuve de leur utilité, il convient de citer:

Les nouvelles technologies peuvent néanmoins poser un certain nombre de défis, par exemple:

Réglementation et recherche: nouveaux problèmes

Les problèmes naissants qui affecteront les politiques de réglementation à l'avenir sont les suivants:

Poussés à tenir davantage compte des considérations environnementales, nombre d'États seront conduits à évaluer les avantages relatifs à l'application d'une politique de préservation de la biosécurité par les différents ministères et organismes publics dans leurs domaines de compétence respectifs, ou du maintien de la séparation usuelle des attributions, les organismes publics ne coopérant à la réalisation de programmes opérationnels que sur une base ad hoc.

Ces dernières années, les recherches sur les infestations acridiennes ont porté surtout sur les applications pratiques, et l'on s'attache actuellement à traduire les résultats prometteurs des recherches en pratiques opérationnelles. Des progrès ont été accomplis en particulier dans les domaines suivants:

D'autre part, les efforts de recherche continuent de présenter d'importantes lacunes. Les essais sur le terrain des méthodes de lutte contre le criquet pèlerin ont été difficiles vu l'imprévisibilité et l'évolution rapide de la nature des infestations. Les recherches sur plusieurs importants migrateurs nuisibles, comme le criquet nomade, ont été négligées. D'une manière générale, il n'a pas été accordé assez d'attention aux recherches sur la dynamique des populations de criquets, ni à l'utilisation de méthodes intégrées de gestion d'autres migrateurs nuisibles. Les instituts de recherche des pays affectés par des infestations acridiennes n'ont pas participé suffisamment aux recherches.


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