Le rapport coût-efficacité de l'approche participative est, pour l'heure, difficile à déterminer, car les paramètres économiques et sociaux n'en mesurent que partiellement les coûts et les avantages. L'évaluation des avantages est, toutefois, très importante: elle signale la viabilité économique et financière du projet aux décideurs et aux planificateurs gouvernementaux qui envisagent le développement essentiellement d'un point de vue économique.
Il convient de toujours tenir compte que l'essence même de l'approche participative est de promouvoir l'autonomie des ruraux pauvres. Ce principe a pour corollaire des coûts renouvelables à la fois faibles et décroissants, et une rentabilisation croissante de ces coûts par les participants au projet. Quoique le processus participatif ait besoin, pour démarrer, d'une aide extérieure, l'objectif fondamental en est que le processus devienne dès que possible «automoteur».
Coût des projets participatifs
Le projet PPP caractéristique s'étend sur une durée de trois ans, avec une contribution de donateurs s'établissant en moyenne à 210 000 dollars. Cette contribution couvre la majeure partie des coûts totaux du projet. Depuis les débuts du PPP en 1982, chaque projet participatif a formé, en moyenne, 90 groupes, soit au total 1 098 personnes. Si l'on compte les familles des membres des groupes, le nombre total des bénéficiaires par projet s'établit à 6 588 personnes.
Le coût total de l'aide extérieure au projet PPP est d'environ 63 dollars par an et par membre du groupe, et de moins de 11 dollars par bénéficiaire (personne à la charge du membre). Bien qu'élevé au début du projet, le coût moyen diminue à mesure que le personnel reçoit une formation et que les groupes acquièrent une plus grande autonomie. Grâce aux économies d'échelle, le coût marginal par bénéficiaire de l'incorporation d'une composante de participation dans un projet de grande envergure serait encore plus bas.
L'adjonction d'éléments participatifs entraîne des coûts supplémentaires faibles en proportion de ceux des autres éléments techniques. Grâce aux économies d'administration et de coordination, le coût supplémentaire par bénéficiaire résultant de l'inclusion d'un élément participatif serait plus faible que dans les projets PPP de petite envergure. L'adjonction d'éléments participatifs entraîne les coûts supplémentaires suivants:
Financement d'un petit nombre d'agents de terrain, recrutés localement, pour remplir provisoirement les fonctions de promoteurs de groupe (s'ils sont choisis parmi les agents de vulgarisation, ils ne devront être spécialement formés qu'à la constitution de groupes et à l'activité en commun).
Ateliers de mise en train et de formation sur les approches et les procédures axées sur la participation, et ateliers annuels de suivi et d'évaluation.
Formation des participants et du personnel de projet à la dynamique des groupes et autres disciplines directement liées à la constitution de groupes et à l'action en commun.
Recherche socio-économique participative, et suivi et évaluation participatifs sur la constitution de groupes, l'action en commun, les résultats et les contraintes.
Le coût de ces éléments additionnels serait compensé par une meilleure conception du projet et, à long terme, par un accroissement de ses résultats économiques et sociaux.
Avantages
Les avantages de la participation sont difficiles à évaluer, surtout parce qu'ils sont multiformes, souvent difficiles à quantifier ou à apprécier, et aussi parce qu'ils peuvent mettre plusieurs années à se manifester. Quoique les données restent encore fragmentaires, on dispose de suffisamment d'indices pour avancer que les avantages du PPP sont appréciables. Ces avantages peuvent se mesurer selon deux optiques: celle des participants pris séparément et celle de la société en général. Les avantages pour les participants sont les suivants:
Accroissement de la production alimentaire. Les groupes PPP ont obtenu des accroissements notables de la production vivrière et de la production de viande. Au Ghana, par exemple, la production de maïs des groupes est supérieure de 20 pour cent à celle des agriculteurs ne participant pas au projet. Des résultats équivalents ont été enregistrés au Kenya, en Sierra Leone et à Sri Lanka.
Accroissement des revenus nets des familles. Cet accroissement est révélé par des indicateurs indirects, tels que les taux élevés de remboursement des prêts, une intensification de l'épargne collective et de nettes améliorations dans les conditions de logement des participants, qui manifestent un accroissement du revenu familial.
Emploi accru. Les techniques de production utilisées par les groupes PPP ont tendance à avoir un cœfficient élevé de main-d'œuvre et à être bon marché. L'indicateur le plus généralisé d'accroissement des emplois ruraux est l'accroissement du rendement à l'hectare chez les participants, qui donne lieu à une augmentation de la demande de main-d'œuvre agricole.
Taux de rémunération de l'épargne plus élevés. L'épargne mobilisée par les membres des groupes PPP peut sembler insignifiante aux personnes extérieures. Mais l'épargne par habitant enregistrée dans les projets PPP — par exemple 21 dollars au Kenya, 39 dollars au Swaziland et 40 dollars au Zimbabwe — est une grande réussite pour des ruraux qui, auparavant, n'en avaient aucune.
Acquisition de nouvelles compétences. L'un des avantages incontestables que font apparaître les évaluations du PPP est l'acquisition, par les participants, de compétences en matière d'organisation et d'initiatives. Les groupes se sont révélés constituer un milieu idéal pour l'apprentissage, et offrir d'excellentes possibilités de discussion, de résolution des problèmes et d'échange d'idées nouvelles.
Les avantages pour la société, dans son ensemble, sont les suivants:
Création de systèmes de réception à coût nul. L'avantage le plus important, peut-être, du PPP est la création de nouveaux types de systèmes ruraux de réception de services qui deviennent automoteurs et n'ont besoin d'être appuyés par des subventions extérieures que marginalement, quand ce besoin n'est pas nul. En ce qui concerne les systèmes de prestations de services, les services fournis aux petits agriculteurs organisés en groupes sont plus rentables que les méthodes traditionnelles. Par exemple, les arrangements concernant le crédit et l'épargne de groupe réduisent fortement le coût des opérations financières pour les banques, tandis que les taux élevés de remboursement des prêts permettent aux gouvernements de faire des économies appréciables.
Mise en place d'infrastructures collectives rurales à moindre coût. Les groupes de tous les projets du PPP se sont lancés dans des activités d'amélioration de la communauté, de la construction d'écoles primaires à l'électrification des villages. Comme la main-d'œuvre et la majeure partie des matériaux mis en œuvre sont apportés par les membres du groupe, ces ouvrages d'infrastructure sont mis en place et entretenus moyennant une dépense minime pour le gouvernement.
Renforcement des organismes ruraux. De nombreux organismes ruraux, les coopératives par exemple, ne fonctionnent pas bien parce que leurs membres ont peu d'occasions de prendre part aux décisions. En établissant des liens avec ces institutions, les groupes PPP incitent à une plus grande participation et à une meilleure organisation, d'où une réduction du soutien gouvernemental.
Les coûts d'exécution des projets PPP
Le graphique ci-dessus indique comment se ventilent, en pourcentage, les dépenses d'un projet PPP caractéristique. Le poste principal est celui des fournitures et du matériel, qui comprend le fonds de garantie du crédit par la FAO.
Baisse des coûts des projets PPP
La figure ci-dessus fait apparaître la baisse des coûts annuels par participant durant l'exécution du projet PPP en Zambie. En 1985, lorsque les groupes comprenaient 354 personnes, le coût moyen par participant était d'environ 120 dollars. En 1989, avec un total de 1 595 participants, les coûts étaient tombés à 28 dollars par tête.
Davantage de maïs — et davantage d'éducation
Les progrès effectués par le projet PPP au Kenya se sont manifestés par l'amélioration de la production de maïs — une moyenne de 20 à 40 sacs par hectare — et par un fort accroissement de l'épargne: de 12 300 dollars en 1984 à 60 000 dollars en 1987. Mais l'indicateur statistique le plus parlant est sans doute l'école locale: en 1984, 40 enfants seulement étaient régulièrement scolarisés en raison du coût élevé des redevances; en 1987, l'effectif était passé à presque 190 élèves, soit plus que la capacité d'accueil de l'école.
Un message des ruraux pauvres
En octobre 1989, plus de 1 200 membres de groupes PPP du Sri Lanka et de Zambie ont écrit au Directeur général de la FAO pour le remercier du concours qu'ils avaient reçu du Programme de participation populaire.
«Il est impossible de mesurer tous les avantages que nous avons retirés du PPP», disait la lettre du Sri Lanka, signée par 1 100 petits agriculteurs. «Il y a désormais une unité entre les membres de nos groupes. Nous travaillons ensemble à préparer la terre, à pratiquer nos cultures, à désherber et à réparer maisons et puits. Grâce à nos programmes de formation, à l'achat et à l'utilisation en commun des intrants et à l'accès collectif aux crédits, notre revenu s'est accru. L'alcoolisme a reculé, ainsi que le jeu et autres mauvaises habitudes. Nous conduisons des programmes de santé et nous nous efforçons de régler les problèmes de commercialisation, ainsi que nos problèmes fonciers.»
«Nous sommes fermement persuadés que l'action organisée fondée sur les principes du PPP permettra de vaincre la pauvreté et l'injustice sociale.»
Les groupes zambiens évoquaient des avantages analogues: accès aux engrais, aux semences, aux charrues et aux bœufs, amélioration des méthodes culturales, renforcement de l'épargne et meilleure nutrition pour les familles.