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1 Les responsabilités des Collectivités locales dans les SADA


1.1 L'intervention des pouvoirs publics dans les SADA: de l'Etat aux Collectivités locales
1.2 L'émergence du pouvoir local
1.3 Les compétences des communes

Dans les trois pays étudiés, les responsabilités des Collectivités locales dans les SADA sont fixées par les textes réglementaires portant organisation et fonctionnement des communes. Celles-ci prennent ainsi le relais d'un Etat entrepreneur ayant marqué de ses actions le monde du commerce.

1.1 L'intervention des pouvoirs publics dans les SADA: de l'Etat aux Collectivités locales


1.1.1 L'exemple du Sénégal
1.1.2 L'exemple de la Côte d'Ivoire

Dans tous les pays de l'Afrique de l'Ouest, le contexte du développement après les indépendances était celui d'une économie administrée. Tous les Etats avaient opté pour l'interventionnisme et, en conséquence, avaient la haute main sur la production de nombreux biens et services.

Les systèmes de commercialisation n'étaient pas en dehors des domaines régis par les Etats. Les Ministères du commerce étaient la structure gouvernementale chargée de l'encadrement des activités commerciales. A travers eux, l'Autorité publique a cherché à organiser la commercialisation, y compris en créant des organismes d'Etat performants et en reconnaissant l'existence d'un secteur privé qu'elle a voulu soutenir et encadrer.

1.1.1 L'exemple du Sénégal

Le Sénégal a adopté des lois pour permettre à l'Etat de maîtriser les prix et les circuits de distribution de certains produits, de contrôler la qualité des produits alimentaires et de pratiquer la répression des fraudes. Des établissements publics ont constitué les instruments essentiels de cette politique: l'Office de commercialisation agricole du Sénégal (OCAS), l'Office national de la coopération et de l'assistance au développement (ONCAD), la Société nouvelle pour l'approvisionnement et la distribution au Sénégal (SONADIS), et la Caisse de péréquation et de soutien des prix. Avec l'expérience des magasins-témoins, l'Etat s'est engagé dans l'encadrement et la promotion du commerce privé.

1.1.2 L'exemple de la Côte d'Ivoire

En Côte d'Ivoire, on peut rappeler la création et l'activité de sociétés d'Etat comme la Société de gestion pour l'organisation de la distribution des produits agricoles et alimentaires (AGRIPAC), la Société pour le développement des fruits et légumes (SODEFEL), la Compagnie ivoirienne de développement des produits vivriers (CIDV), l'Office de commercialisation des produits agricoles (OCPA), puis l'Office d'aide à la commercialisation des produits vivriers (OCPV). On peut encore signaler l'action publique en direction des marchés de détail et de la Caisse générale de péréquation et des prix (CGPP).

Ces organismes publics étaient la marque d'une économie en réalité étatisée sous une apparence libérale. Aujourd'hui, la quasi-totalité de ces structures ont été dissoutes. On peut penser que les Etats ont ainsi exprimé la volonté de réduire leur engagement dans les secteurs économiques. La libéralisation, qui caractérise désormais les politiques, s'est faite en application des recommandations des programmes d'ajustement structurel.

Les Etats ont manifesté leur désengagement à un second niveau, celui de la décentralisation des services publics. Ainsi le rôle des Administrations centrales a-t-il été réduit au profit des régions, des communes et des communautés rurales, les trois entités qui constituent les Collectivités locales. Dotées de la personnalité morale et de l'autonomie financière, les CL sont administrées librement par des conseils élus au suffrage universel.

1.2 L'émergence du pouvoir local


1.2.1 Au Ghana
1.2.2 Au Sénégal
1.2.3 En Côte d'Ivoire

Les communes sont les entités chargées de l'administration de l'espace urbain. C'est progressivement qu'elles ont vu leurs pouvoirs s'étendre. Dans tous les pays, les réformes administratives qui marquent véritablement pour elles la rupture avec un pouvoir central omniprésent datent des années 80. Depuis, des améliorations continuent d'être apportées à l'institution communale. Celles-ci ont pour objet de répartir plus judicieusement les Autorités entre les différents niveaux territoriaux, d'améliorer l'organisation et le fonctionnement des municipalités, de préciser le rôle de la tutelle exercée par le Ministère de l'intérieur.

1.2.1 Au Ghana

Au Ghana, la dernière réforme d'envergure a été faite en 1988. Le pouvoir de gestion des affaires locales est réparti en trois ou quatre niveaux, selon la taille de la localité. Contrairement à ce que l'on observe en zone francophone, le pouvoir exécutif appartient plus aux assemblées élues qu'à leurs Présidents ou aux Maires. Ces assemblées ont des pouvoirs étendus et, à la différence de la période précédant la réforme, peuvent disposer de moyens pour mener à bien leur tâche.

1.2.2 Au Sénégal

Au Sénégal, on peut examiner le cas de Dakar. La loi 83-43 du 18 février 1983, crée trois communes à la place de l'ancienne commune de Dakar. La communauté urbaine de Dakar, association des trois communes de Dakar, Pikine et Rufisque-Bargny créées la même année, a commencé à fonctionner en 1984. Depuis 1990, Bargny et Guédiawaye sont devenues des communes à part entière, intégrées à la région de Dakar. En 1996, le code des Collectivités locales (CCL) opère une nouvelle répartition des compétences entre les CL et prévoit la division des grandes communes en communes d'arrondissements. La commune de Dakar, devenue Ville, comprend 19 arrondissements. Les compétences de l'arrondissement, tout comme ses relations avec la ville, sont explicites dans les textes.

1.2.3 En Côte d'Ivoire

En Côte d'Ivoire, la plupart des communes ont été créées en 1981 à la suite d'un vaste mouvement communal. Auparavant, il n'existait que les communes d'Abidjan et de Bouaké. Aujourd'hui Abidjan comprend dix communes autonomes dont les Maires forment le Conseil de la ville d'Abidjan, qui assiste le Maire central. Les obligations et pouvoirs de l'Autorité municipale ont été actualisés par la loi 95-608 du 3 août 1995 portant modification de la loi 80-1180 du 17 octobre 1980. La nouvelle loi a maintenu le contrôle a priori des actes municipaux que la tutelle, en l'occurrence le Ministère de l'intérieur, effectue. En revanche le Sénégal a décidé, en 1996, de pratiquer un contrôle de légalité a posteriori.

La décentralisation donne donc aux communes les moyens d'être une Administration de proximité. Quelles compétences leur sont dévolues, dans les textes, dans le domaine particulier des SADA?

1.3 Les compétences des communes


1.3.1 La définition et la mise en œuvre des politiques de développement
1.3.2 L'administration des travaux communaux
1.3.3 La levée d'une fiscalité locale
1.3.4 L'autorité en matière de Police

Les textes de lois qui régissent les communes n'abordent pas de façon explicite la question de l'approvisionnement alimentaire des villes. C'est l'analyse de certains de leurs articles qui renseigne sur les champs d'intervention possibles des municipalités. Ceux-ci sont la définition des politiques de développement, l'administration des travaux communaux, la levée d'une fiscalité locale, l'exécution de missions de police municipale.

1.3.1 La définition et la mise en œuvre des politiques de développement

La commune a la compétence d'assurer à l'ensemble de la population, sans discrimination, les meilleures conditions de vie. Elle exécute cette responsabilité en mettant en oeuvre des opérations de développement financées par elle-même ou avec sa participation. Les programmes appliqués sont conçus et planifiés par le gouvernement, mais le conseil municipal est également habilité à en élaborer, à condition de les harmoniser avec les orientations régionales et nationales. Par ailleurs, la municipalité est sollicitée pour donner son avis sur la tranche communale du plan national de développement ainsi que sur les projets hors plan concernant des investissements publics à caractère national ou régional à réaliser dans la commune.

Dans le domaine des SADA, la commune doit faire vivre ses administrés en apportant un appui à un certain nombre d'activités urbaines, qui auront pour effet de contribuer au développement de la ville.

Au total, les compétences définies par les textes de loi conduisent la commune à jouer un rôle de cabinet-conseil dans toutes les affaires de la cité. En ce qui concerne les SADA, l'enjeu étant de faire vivre les administrés en améliorant les conditions d'accès à l'alimentation, la commune doit pouvoir disposer d'éléments qualitatifs et quantitatifs sur les consommateurs et les opérateurs économiques, elle doit pouvoir évaluer à la fois les besoins des consommateurs et les capacités des opérateurs économiques, connaître les circuits, déterminer les services à offrir, etc. Ces éléments établissent la nécessité de constituer une base de données qui aidera à déterminer les formes d'intervention les plus adéquates.

1.3.2 L'administration des travaux communaux

Les Autorités locales sont chargées de l'administration des travaux communaux et de la gestion des biens du domaine. Elles ont le pouvoir de faire réaliser des constructions, des reconstructions et des aménagements de toute nature. Les réalisations concernent des infrastructures et des équipements comme les espaces de vente, les gares et la voirie urbaine communale. Les CL peuvent créer, modifier ou supprimer des marchés ou foires. Le domaine privé immobilier de la commune peut être l'objet de lotissement, de location, de concession ou de baux emphytéotiques. L'occupation du domaine public communal est, pour sa part, autorisée à titre précaire, temporaire et révocable. C'est ainsi que, moyennant le paiement de droits fixes, les CL peuvent donner des permis de stationnement ou de dépôt temporaire sur la voie publique, les rivières, ports et quais fluviaux et autres lieux publics. Les expropriations font aussi partie des prérogatives des CL.

En affectant des espaces spécialisés aux activités commerciales et en les équipant, les CL contribuent à créer les infrastructures nécessaires à l'approvisionnement des villes et au transport des produits vers les lieux de vente. Ces initiatives supposent, de leur part, la conception, la construction et la localisation des infrastructures en liaison avec la demande urbaine. Elles supposent encore une vision longue de la structuration urbaine, tenant compte à la fois des possibilités foncières et d'investissement et de l'équilibre entre les quartiers.

1.3.3 La levée d'une fiscalité locale

Les Autorités locales sont dotées de l'autonomie financière. Elles disposent donc de budgets et de ressources propres. Les textes établissent, au demeurant, que ne peuvent être constituées en communes que les localités ayant un développement suffisant pour pouvoir disposer des ressources propres nécessaires à l'équilibre de leur budget. Les ressources propres ou revenus locaux sont les produits des recettes fiscales (impôts, taxes, etc.), de l'exploitation du domaine et des services publics locaux. Au Sénégal, il est explicitement mentionné, à propos des CL exploitant des équipements marchands, qu'elles peuvent instituer des taxes sur l'utilisation de ces établissements.

Par la levée des taxes et impôts, les municipalités influent directement sur les SADA. Le niveau de taxation a en effet des répercussions sur les prix imposés aux consommateurs. Les ressources propres donnent une relative autonomie aux CL qui peuvent, grâce à elles, exercer plus librement leurs responsabilités et réaliser leurs ambitions. Plus les Autorités locales pourront disposer de ressources à travers la taxation locale, plus conséquents seront leurs efforts d'investissement et d'appui aux opérateurs dans les SADA.

En ce qui concerne la fiscalité, les défis majeurs pour les CL résident dans trois domaines: la pratique d'une taxation adaptée à toutes les catégories d'activités lucratives et supportable par elles, la mise au point d'une base de recensement exhaustive de la matière taxable, et l'adoption de mesures propres à surveiller la rentrée des impôts, des taxes et des droits municipaux. Pour les gestionnaires des cités, il s'agit de réduire les obstacles au développement des activités commerciales et d'éviter de compromettre la réalisation des ambitions municipales par des prévisions budgétaires erronées.

1.3.4 L'autorité en matière de Police

Les municipalités ont également à leur charge la gestion de l'environnement urbain dans son ensemble. Pour ce faire, elles peuvent établir des règlements de Police et mettre en place un service qui les fera appliquer. Ce service a pour rôle d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité, la tranquillité et la salubrité publiques. Le maintien du bon ordre s'exerce dans les endroits où se tiennent de grands rassemblements tels que les foires, les marchés, les aires de stationnement ou de dépôt temporaire, et autres lieux publics. Dans les rues, les quais et voies publics, les CL doivent veiller à la sûreté et à la commodité de passage ainsi qu'au nettoiement, à l'éclairage et à l'enlèvement des encombrements. L'inspection sur la fidélité du débit des denrées vendues au poids et à la mesure, et l'hygiène des denrées comestibles exposés à la vente participent de la salubrité publique. Les CL doivent par ailleurs veiller à la protection de l'environnement en prenant des mesures appropriées, d'une part, pour empêcher ou supprimer les pollutions et nuisances, d'autre part, pour assurer la protection des espaces verts.

Au Sénégal, les tâches de répression liées aux missions de la Police municipale sont dévolues à la Police d'Etat (art. 129 de la loi portant code des CL), alors qu'en Côte d'Ivoire elles relèvent des prérogatives du Maire (art. 73 nouveau de la loi relative à l'organisation municipale).

Les initiatives des CL visant à mettre à la disposition des actifs des SADA des espaces, des bâtiments, des équipements et des infrastructures doivent donc s'accompagner souvent de l'aménagement d'un environnement adéquat pour l'activité commerciale (circulation fluide aux abords des lieux de vente, hygiène, réduction des peuplements anarchiques etc.)

Comme on peut le voir, les compétences reconnues aux CL par les textes de loi, aussi bien en Côte d'Ivoire qu'au Sénégal et au Ghana, sont étendues: elles vont de la planification urbaine à l'aménagement du territoire, de la gestion de l'environnement à la Police municipale, et de la conception des politiques de population à la mise en oeuvre de stratégies fiscales. L'étude de l'exécution de ces attributions amène à observer les actions concrètes entreprises.


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