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1. CONTEXTE SOCIO-ÉCONOMIQUE DES SAVANES DU NORD DE LA COTE D’IVOIRE


1.1. Présentation de la zone d'étude
1.2. Principales ressources forestières et agroforestières
1.3. Menaces pesant sur les ressources forestières

1.1. Présentation de la zone d'étude


1.1.1. Caractéristiques naturelles de la zone d'étude
1.1.2. Découpage administratif et population de la zone d'étude
1.1.3. Principales activités agricoles en zone rurale

Les formations végétales savanicoles couvrent plus de la moitié de la Côte d'Ivoire. Elles sont comprises entre 8° et 10° de latitude Nord et 3° et 6° de longitude Ouest. Elles suivent la pointe du V baoulé qui descend jusqu'à 6° de latitude Nord dans la région de Toumodi où se trouve la station écologique de Lamto. Les limites Sud de la savane sont, d'Ouest en Est, les départements de Touba, Séguela, Toumodi, Dabakala et Bondoukou (voir la carte de la végétation de la Côte d’Ivoire en annexe 2).

1.1.1. Caractéristiques naturelles de la zone d'étude

En fonction des variations des facteurs climatiques et de végétation, les savanes du Nord de la Côte d'Ivoire ont été subdivisées en trois zones:

- Zone A: savane soudanienne au-delà de la limite Nord de la zone B. Le climat est soudanien avec deux saisons. La végétation est celle de savane boisée et arbustive à savane herbeuse avec des galeries forestières le long des cours d'eau.

- Zone B: savane sub-soudanienne avec pour limite Nord, la ligne passant au niveau des départements d'Odienné, Boundiali, Ferkéssédougou et Bouna. Le climat est de type soudano-guinéen à deux saisons et la végétation est de types savane arborée, savane boisée et savane arbustive selon le niveau de pression agricole.

- Zone C: savane guinéenne comprenant le V baoulé et ayant pour limite Nord, la ligne passant au niveau des départements de Touba, Katiola et Bondoukou (annexe 2). C'est une région de transition climatique qui baigne tantôt dans le climat sub-tropical à quatre saisons (deux saisons sèches alternant avec deux saisons des pluies) tantôt dans le climat tropical humide lorsque la petite saison sèche de juillet-août ne parvient pas à s'affirmer. La végétation est celle des savanes préforestières.

Pour l'ensemble de la zone des savanes du Nord de la Côte d'Ivoire la roche-mère est constituée de granites calco-alcalins du précambien (Adjanohoun, 1964).

1.1.2. Découpage administratif et population de la zone d'étude

La zone de savane du Nord de la Côte d'Ivoire s'étend sur 6 régions administratives, 19 départements et 98 sous-préfectures. Elle couvre une superficie totale de 172 000 km2 soit 54% de la superficie totale du pays. La population de cette région est estimée à 4 000 000 d’âmes, soit 30% de la population totale de la Côte d'Ivoire (tableau 1).

Tableau 1: découpage administratif des savanes du Nord de la Côte d'Ivoire

Régions

Départements

Sup. km2

Population (1993)

S/P

Région de la vallée du Bandama

 

Béoumi

2820

110031

2

Bouaké

4700

548885

7

Dabakala

9670

9968

5

Katiola

9420

159131

5

M'Bayakro

5460

124897

2

Sakassou

1880

72311

1

Région du Zanzan

 

Bondoukou

10040

212262

2

Bouna

21470

165439

3

Tanda

6490

248585

5

Région des Savanes

 

Bondiali

7895

155735

5

Ferkéssédougou

17728

210607

6

Korhogo

12500

475352

11

Région du Kabadougou

 

Tengrela

2200

66812

2

Mankono

10060

150271

6

Odiénné

20600

206796

12

Région des Lacs

Yamoussoukro

6160

342835

4

Toumodi

2780

98428

3

Région semi-montagneuse de l'Ouest

Touba

8720

131420

7

Séguéla

11240

147681

8

Total

171833

3637446

96


1.1.3. Principales activités agricoles en zone rurale

Les populations rurales des savanes du Nord de la Côte d'Ivoire pratiquent essentiellement l'agriculture et/ou l'élevage. Les spéculations pratiquées sont:

- les cultures vivrières (igname, maïs, riz, arachide, mil, sorgho, patate douce, niébé, fonio);
- les cultures annuelles de rente (coton, tabac, soja, cultures maraîchères, canne à sucre);
- les cultures pérennes de rente (mangues, avocats, agrumes, anacarde);
- l'élevage de bovins, caprins, porcins, ovins, volaille ainsi que la pisciculture et l'apiculture.
Le bois énergie constitue une source de revenus non négligeable. En effet, des tonnes de bois de feu et de charbon de bois sont acheminées chaque jour des zones rurales vers les villes. 90% environ de la population urbaine des zones de savanes utilisent le bois de feu ou le charbon de bois et 100% des ménages ruraux utilisent le bois de chauffe.

La culture itinérante sur brûlis et l'élevage extensif, systèmes de culture fortement consommateurs d'espace, sont malheureusement très utilisés dans la région. La création de vastes blocs agro-industriels (complexes sucriers et blocs aménagés du projet soja au Nord-Ouest du pays) ainsi que les divers aménagements agro-pastoraux et les feux de brousse sont autant de facteurs qui entament notablement l'équilibre écologique. Ainsi, par la destruction de leurs habitats, par le surpâturage ou tout simplement suite à une exploitation abusive, certaines espèces forestières sont en voie d'extinction.

1.2. Principales ressources forestières et agroforestières


1.2.1. Espèces fruitières
1.2.2. Espèces utilisées en bois énergie
1.2.3. Espèces utilisées en bois de service
1.2.4. Espèces à vocation de bois d’œuvre
1.2.5. Essences fourragères
1.2.6. Essences de restauration de la fertilité des sols
1.2.7. Essences à propriétés pharmacologiques

A la suite d'enquêtes menées dans les trois sous-régions écologiques de la zone des savanes du Nord de la Côte d'Ivoire (savane guinéenne, savane sub-soudanienne et savane soudanienne) auprès des personnes interrogées (tradipraticiens, professionnels du bois, zootechniciens, agroforestiers, paysans, ménagères, aménagistes et diverses ONG), une première liste d'espèces forestières prioritaires (annexe 3), en matière de conservation, a été retenue. Cette liste n'est pas exhaustive et pourra être modifiée en fonction, des facteurs socio-économiques dans l'avenir.

Il faut noter également que sur les 172 000 km² qu’occupe la zone des savanes, 90% constituent l'espace rural (soit 155 700 km²). Sur ces 155 700 km², seulement 2% sont couverts par les forêts classées et réserves (3 000 km²), 70% environ sont des cultures et 28% des jachères, pâturages et des zones non cultivables.

1.2.1. Espèces fruitières

Les savanes de la moitié Nord de la Côte d'Ivoire regorgent d'espèces forestières fruitières. Il s'agit de plantes buissonnantes, arbustives, arborées, lianescentes et sarmenteuses. Certains fruits sont consommés à l'état frais, d'autres, par contre, font l'objet de cuisson, d'extraction (graisse) ou même de transformation industrielle.

a) Fruits consommés à l'état frais

- Adansonia digitata (baobab)
- Borassus aethiopum (rônier à fruits oranges)
- Borassus flabelifer (rônier à fruits verts)
- Dialium aubrevillei
- Detarium microcarpum
- Diospiros mespiliformis
- Parkia biglobosa (néré)
- Landolphia heudolotiana
- Spondias monbin
- Saba senegalensis (saba)
- Vitellaria paradoxa (karité)

b) Fruits consommés après cuisson ou séchage

- Blighia sapida
- Borassus spp
- Parkia biglobosa (soumbala)
- Vitellaria paradoxa (beurre de karité)
- Carapa procera (huile pour pharmacopée et fabrication de savon)
- Pentadesma butyracea (excellent beurre alimentaire)

c) Fruit dont la pulpe ou la graine donne des produits d'industrie

- Tamarindus indica (jus de tamarin)
- Parkia biglobosa (plaquettes de graines de néré pour prévenir le goitre)
- Vitellaria paradoxa (beurre utilisé en industrie alimentaire)

Sept des fruitiers cités ci-dessus occupent une place prépondérante, au plan socio-économique, pour les populations du Nord de la Côte d'Ivoire et même de l'ensemble du territoire:

- La pulpe de Parkia biglobosa très riche en vitamines est un excellent aliment (en complémentation) aussi bien pour l'homme (nourrisson, enfant, adulte) que pour le bétail.

- La graine de Parkia biglobosa bouillie et fermentée est un excellent assaisonnement pour les sauces (soumbala) et aurait des propriétés d'anti-hypertenseur. Cette même graine, très riche en iode, pourrait être utilisée dans certaines régions du pays (notamment le Nord-Ouest et l'Ouest) pour prévenir le goitre.

- La pulpe d’Adansonia digitata est utilisée dans la fabrication de boissons sucrées artisanales sur toute l'étendue du territoire. Malheureusement cette espèce est très peu abondante.

- La graisse extraite des graines de Vitellaria paradoxa, après cuisson est un produit à usages multiples. Elle est utilisée en alimentation (localement) et en industrie cosmétique, alimentaire (chocolaterie), pharmaceutique. Les insaponifiables de l'amande du karité ont des vertus pharmacologiques et cosmétiques démontrées qui différencient le beurre de karité des autres huiles végétales et pourraient lui valoir, à l'avenir, un regain d'intérêt sur les marchés locaux et internationaux (Louppe et al., 1997).

- La graisse extraite des amandes de Pentadesma butyracea, après cuisson est aussi d'une excellente qualité alimentaire, sinon meilleure organoleptiquement que celle du Karité. Des recherches sont à faire pour les propriétés cosmétiques et pharmacologiques de cette graisse. Elle est très recherchée sur les marchés locaux.

- Quant à la graisse extraite des amandes de Carapa procera, elle a des vertus cosmétiques et pharmacologiques démontrées localement. C'est un excellent vermifuge et un bon adjuvant pour certains produits médicamenteux traditionnels. Elle sert à fabriquer du savon local de très bonne qualité. Elle est également utilisée dans certaines cérémonies mystiques.

- La pulpe de Tamarindus indica (tamarin) est couramment utilisée sur l'ensemble du territoire ivoirien, dans la préparation d’une boisson fraîche non alcoolisée (Tomidji). Elle fait l'objet de produits industriels (jus de tamarin, bonbon de tamarin, etc.) au Burkina Faso et en Côte d'Ivoire.

- L'arille de Blighia sapida est très prisée sur les marchés locaux. C'est un excellent condiment pour les sauces. Elle produit aussi de la graisse végétale alimentaire et pharmaceutique.

1.2.2. Espèces utilisées en bois énergie

La plupart des ligneux peuvent servir de bois d'énergie. Mais notons qu'il y a des préférences dans ce domaine, qui peuvent varier d'une région à une autre, en fonction des coutumes, des disponibilités de la tenue au feu et du pouvoir calorifique des essences.

La notion "bois énergie" englobe le bois de chauffe (bois rond ou en quartiers refendus) et le charbon de bois. Cette dernière forme de bois énergie est en plein essor surtout en milieu urbain car elle est plus pratique et ne dégage pas de fumée.

Les prélèvements de ligneux pour le ravitaillement des populations en bois énergie constituent l'un des principaux facteurs essentiels de la déforestation, surtout dans les zones périurbaines.

Dans les zones à forte densité de population telles que la zone dense sénoufo de Korhogo (Nord Côte d'Ivoire), les ménagères sont parfois contraintes d'utiliser les tiges de cotonniers ou de céréales (sorgho et mil) pour la cuisson de leurs aliments.

Dans ces régions, le bois de chauffe est devenu rare du fait de la forte pression sur le foncier. Les jachères naturelles, devenant de plus en plus courtes, ne peuvent plus restaurer le milieu correctement (sol et végétation principalement).

a) Espèces utilisées en bois de chauffe

En général, les ménagères connaissent les espèces à haut pouvoir calorifique de leur région. En zone de savane soudanienne et sub-soudanienne du Nord de la Côte d'Ivoire, les espèces les plus appréciées en matière de bois de chauffe sont:

- des petits bois récoltés à l'état vert: Isoberlinia doka, Detarium microcarpum, Anogeissus leïocarpus, Terminalia spp, Pterocarpus erinaceus, Perecopsis laxiflora, Cassia sieberiana;

- des quartiers refendus: Diospiros mespiliformis, Isoberlinia doka, Terminalia spp, Lophira lanceolata, Khaya senegalensis, Acacia polyacantha, Vitellaria paradoxa, Parkia biglobosa, Blighia sapida, etc.

En zone de savane guinéenne les ligneux les plus prisés en matière de bois de feu sont:
- des petits bois ronds récoltés à l'état vert: Terminalia glaucescens, Bridellia ferruginea, Lophira lanceolata, Parinari curatelifolia, Piliostigma thoningii, Albizzia zygia, Crossopteryx febrifuga, Pseudocedrela kottschii, etc.

- des quartiers refendus: Khaya grandifoliola, Vitellaria paradoxa, Terminalia glaucescens, Phyllanthus discoïdeus, Pterocarpus erinaceus, Acacia polyacantha, Blighia sapida, Allophylus africanus, Anogeïssus leïocarpus, etc.

b) Charbon de bois

Généralement les bois de forte densité font du très bon charbon de bois, notamment Khaya senegalensis, Diospiros mespiliformis, Anogeissus leïocarpus, Vitellaria paradoxa, ...

Mais de nos jours, presque tous les ligneux disponibles sont utilisés en carbonisation du fait de la dégradation de certains milieux et de la relative disparition des essences précitées. En conséquence, le charbon de bois de bonne qualité est de plus en plus rare sur le marché.

Notons que certaines essences font l'objet d'interdit en matière de bois de chauffe notamment Combretum micranthum chez les Sénoufo et les Malinké. En effet, son utilisation en bois d'énergie serait source de querelles dans les foyers, et même les communautés villageoises.

1.2.3. Espèces utilisées en bois de service

Les bois de service regroupent les poteaux, les piquets, les perches et les fourches. Cette forme d'utilisation est très répandue dans la région. Les essences et la nature du produit varient selon les usages. Les constructions d'habitats locaux, les palissades ou clôtures mortes autour des aires cultivées sont très consommatrices de bois de service. Pour cela, des jeunes sujets d'avenir (bien droits, bien conformés) des espèces à vocation de bois d'œuvre sont utilisés. Les sujets adultes ne peuvent donc plus être remplacés, ce qui entraîne leur raréfaction voire leur possible disparition.

Le bois de service concerne une gamme très variée d'essences forestières: Lophira lanceolata, Terminalia glaucescens, Allophylus africanus, Anogeissus leïocarpus, Khaya senegalensis, Spondias monbin, Sterculia tragacantha, Diospiros mespiliformis sont autant d'essences forestières utilisées dans ce domaine.

1.2.4. Espèces à vocation de bois d’œuvre

Le bois d'œuvre concerne surtout les essences forestières pouvant fournir des fûts gros et grands. Certaines essences de zone de savane donnent du très bon bois d'œuvre notamment:

- Khaya senegalensis (acajou), bois rouge de grande valeur technologique;
- Khaya grandifoliola (acajou des savanes guinéennes), bois rouge;
- Milicia excelsa, (iroko);
- Milicia regia (iroko);
- Pterocarpus erinaceus (bois de vène ou palissandre du Sénégal, de valeur);
- Afzelia africana;
- Diospiros mespiliformis;
- Isoberlinia doka;
- Anogeissus leïocarpus;
- Lophira lanceolata (azobé de savane).
Ces essences forestières dont les sujets adultes font l'objet d'une exploitation pour le bois d'œuvre sont en voie de disparition dans la région d'autant plus que les baliveaux sont également exploités sans discernement comme bois de service.

1.2.5. Essences fourragères

Il s'agit des essences forestières dont les feuilles ou les fruits sont utilisés comme fourrage pour le bétail. Plusieurs essences forestières peuvent être classées sous cette rubrique. Le degré d'appétabilité d'une essence est fonction de la nature du bétail (les caprins notamment broutent toutes les espèces ligneuses alors que les bovins sont beaucoup plus sélectifs), de la période de l'année et de la région. Néanmoins, certaines espèces font l'unanimité en matière de fourrage, notamment:

- Afzelia africana (feuilles et graines)
- Pterocarpus erinaceus (feuilles)
- Khaya senegalensis (feuilles)
- Ficus gnaphalocarpa (feuilles)
- Ficus exasperata (feuilles)
- Albizzia zygia (feuilles)
- Prosopis africana (feuilles)
- Faidherbia albida.(feuilles et gousses)
L'émondage de ces essences pour la production de fourrage d'appoint est de plus en plus fréquent dans les savanes du Nord de la Côte d'Ivoire. Tous les marchés de bétail sont approvisionnés chaque jour avec des tonnes de fourrage ligneux. Cette forme d'exploitation est aussi une menace des espèces concernées.

Les jeunes plants des essences sus-citées font très souvent l'objet d'attaques sévères par les ruminants domestiques et sauvages, aussi bien en plantation qu'en milieu naturel. Ces attaques compromettent la régénération, la croissance et la forme des tiges qui survivent.

1.2.6. Essences de restauration de la fertilité des sols

L'arbre de manière générale joue un rôle important dans le processus de la restauration des propriétés physiques et chimiques du sol:

- Il apporte de la matière organique au sol (litière et racines) indispensable à certaines de ses activités biologiques.

- Son houppier constitue un parasol pour le sol et un écran vis-à vis des autres facteurs climatiques (vent, pluie). Ainsi, l'arbre aide à la lutte contre les pertes de sol par érosion hydrique ou éolienne.

- Son système racinaire fait remonter à la surface les éléments minéraux inaccessibles aux racines des cultures et augmente également la porosité du sol.

- L'arbre crée dans son voisinage immédiat un micro-climat favorable aux activités biologiques du sol et à la restauration progressive de sa fertilité.

S'il est vrai que ce processus est scientifiquement démontré pour l'ensemble des arbres, il est aussi vrai que certaines espèces forestières sont plus aptes que d'autres à restaurer la fertilité du sol. Les paysans reconnaissent à l'unanimité les essences qui améliorent les sols, pour la plupart des légumineuses: Pterocarpus erinaceus, Faidherbia albida, Acacia polyacantha, Prosopis africana, Piliostigma thoningii, Albizzia spp., etc. D'autres essences non légumineuses sont aussi citées par les paysans dans ce domaine, notamment Vitellaria paradoxa, Ficus gnaphalocarpa, Danilia oliveri et bien d'autres.

Les terres qui portent des peuplements constitués de ces espèces sont très convoitées et leur mise en culture nécessite souvent l'abattage des arbres.

1.2.7. Essences à propriétés pharmacologiques

Toutes les essences forestières peuvent entrer dans cette classification. Selon les coutumes, la région, la religion et la nature du mal à combattre, les parties de l'arbre à utiliser varient. Pour la même essence, les feuilles, écorces, racines, graines peuvent avoir des usages différents.

Le paludisme, l'ictère, la dysenterie sont des maladies très fréquentes dans la sous-région. Les essences utilisées pour guérir ces maladies font l'objet de fortes pressions au point d'entraîner la disparition de certaines d'entre elles, surtout dans les zones péri-urbaines, notamment celles dont les racines ou les écorces sont utilisées. C'est le cas de Entada abyssinica, Lannea barteri, Terminalia glaucescens, Cochlospermum planchonii pour les savanes guinéennes et sub-soudaniennes et Cassia sieberiana, Combretum micranthum, Sarcocephalus latifolius, Pseudocedrella Kotchii, Khaya senegalensis et bien d'autres pour les savanes soudaniennes.

1.3. Menaces pesant sur les ressources forestières


1.3.1. Les pratiques agricoles
1.3.2. Elevage extensif et transhumance
1.3.3. Feux de brousse

L'accroissement démographique et le développement des superficies agricoles (cultures de rente et élevage extensif) ont engendré une forte perturbation de la végétation des savanes du Nord de la Côte d'Ivoire, du fait de la pression sur le foncier et des divers aménagements agro-pastoraux (retenues d'eau, blocs agro-industriels).

Les formations végétales naturelles sont ravagées régulièrement par les feux de brousse incontrôlés qui se multiplient d'année en année à la faveur du pastoralisme extensif et de la chasse.

L'exploitation du bois, des feuilles, des écorces et des racines des essences forestières pour les besoins quotidiens (bois de service, bois d'énergie, bois d'œuvre et pharmacopée) augmente proportionnellement par rapport à la démographie. Voici autant de pratiques anthropiques qui dégradent le patrimoine forestier naturel entraînant ainsi une diminution progressive des superficies boisées et de la densité des arbres (passage progressive de la forêt sèche à la forêt claire puis à la savane boisée puis à la savane herbeuse).

En conséquence, certaines espèces ligneuses sont en voie de disparition soit à cause de la surexploitation soit par l'absence de régénération par semis naturel suite aux passages annuels des feux, soit tout simplement à cause de la disparition de leurs habitats écologiques.

1.3.1. Les pratiques agricoles

La culture itinérante sur brûlis, qui est le système de culture par excellence pratiqué dans les savanes du Nord de la Côte d'Ivoire, est consommatrice de nouvelles terres et constitue, par conséquent, une menace pour la biodiversité floristique. Cette menace augmente d’autant plus que la pression sur le foncier est plus importante à cause de l'accroissement démographique, du développement de la mécanisation de l'agriculture et de la nécessité de revenus monétaires toujours plus élevés.

Les terres sont très appauvries par de nombreuses années de cultures. Les jachères naturelles sont de plus en plus courtes. La régénération naturelle des ligneux est fortement compromise du fait de l'épuisement des stocks de graines dans les sols labourés avec des outils de plus en plus lourds et la disparition des arbres et des souches pour favoriser la mécanisation agricole.

1.3.2. Elevage extensif et transhumance

Les populations des zones rurales du Nord de la Côte d'Ivoire sont agro-pastorales. L'élevage extensif et la transhumance sont très pratiqués dans la zone. Ils ne sont pas sans conséquences sur la végétation ligneuse. Il est vrai que la pâture favorise l'installation de la végétation ligneuse (embroussaillement avec des espèces peu ou pas appétées), surtout quand il s'agit de bovins et lorsque celle-ci intervient après trois années de jachère. Il faut également reconnaître que la même pâture peut constituer une menace sur les espèces forestières quand elle intervient au début de la jachère, le broutage et le piétinement deviennent alors dangereux pour les plantules.

1.3.3. Feux de brousse

Les feux de brousse incontrôlés sont nombreux dans les savanes du Nord de la Côte d'Ivoire. Les jachères naturelles sont parcourues chaque année par les feux de brousse. En conséquence, les quelques jeunes plants de ligneux (semis, rejets, drageons) qui émergent au cours de la saison pluvieuse sont réduits en cendre à la saison sèche qui suit. Ceci rend quasiment impossible la régénération des ligneux forestiers. Même les espèces les plus résistantes ont besoin de quelques années sans feu pour pouvoir bien s'installer. Les feux réduisent la vitesse de croissance des espèces les plus rustiques et détruisent même les sujets adultes à écorce sensible.


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